Le CNNum explose à la figure du gouvernement | Mediapart
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Marie Ekeland a donc refusé de céder aux exigences du secrétaire d’État au numérique, Mounir Mahjoubi, qui lui avait demandé, mercredi dernier, de présenter une nouvelle liste de trente membres du CNNum excluant la militante féministe et antiraciste (lire notre précédent article ici). « Le projet que j’ai porté d’ouverture, d’indépendance de pensée et de diversité, a été mis à l’épreuve dès le démarrage, écrit l’ex-présidente dans un communiqué publié mardi matin sur le site du Conseil. Je ne vois pas aujourd’hui, comment continuer à le porter en maintenant son essence et de bonnes chances de réussite ».
« Nous avons beaucoup travaillé de concert cette dernière semaine avec Mounir Mahjoubi et les membres du CNNum à trouver une solution qui permette d’en conserver son intégrité et son entièreté », précise Marie Ekeland. « Nous n’y sommes pas arrivés. J’ai donc présenté aujourd’hui ma démission à Mounir Mahjoubi afin de laisser la place à une autre vision au CNNum. »
Mais pour le gouvernement, il s’agit en fait de céder à la droite raciste et anti-féministe.
Le revirement de l’exécutif est intervenu le mercredi 13 décembre après 24 heures d’une polémique lancée tout d’abord sur Internet par une partie de la droite et du Printemps républicain. Le 12 décembre, le président du mouvement, Amine El-Khatmi, réagit ainsi sur Twitter à l’annonce de la nomination de Rokhaya Diallo : « Vous avez demandé le racisme d’État, ne quittez pas… »
Le lendemain, la députée Les Républicains, Valérie Boyer, interpelle directement le premier ministre Édouard Philippe dans un courrier qu’elle publie sur Twitter. Dans celui-ci, la nouvelle secrétaire générale adjointe chargée des questions de société du parti de Laurent Wauquiez reproche plusieurs propos tenus par Rokhaya Diallo ces dernières années.
L’élue rappelle notamment une interview accordée à la web-émission Regards par la militante féministe. « Je ne vois pas en quoi le fait de marquer la féminité par un voile, c’est plus sexiste que de le marquer par des talons aiguilles ou une minijupe », avait affirmé Rokhaya Diallo. Il existe un « déni extrêmement profond du fait qu’il y a une production du racisme qui est ancrée à gauche », poursuivait-elle.
Les différents propos pointés par Valérie Boyer étaient déjà connus. Rokhaya Diallo, connue pour sa lutte contre l’islamophobie, est en effet une des cibles favorites de l’extrême droite et de certains mouvements laïcistes ou islamophobes. Ce qui est plus étonnant, c’est la célérité avec laquelle l’exécutif a cédé à leurs pressions alors qu’aucun élément nouveau n’est apparu.
Du côté du secrétariat d’État au numérique, on assurait, la semaine dernière, que ce n’est pas la lettre de Valérie Boyer ni la mobilisation sur Internet, qui a conduit à l’éviction de Rokhaya Diallo. Les services de Mounir Mahjoubi auraient en effet reçu de nombreux messages de la part de personnes de « l’écosystème numérique ». On reconnaissait cependant avoir bien validé la composition du CNNum telle que présentée lundi. Et qu’à ce moment, elle ne posait aucun problème.
Dans son communiqué annonçant sa démission, Marie Ekeland défend sa décision de nommer Rokhaya Diallo qui « déconstruit les mécanismes de la construction de la haine en ligne et défend les droits des afro-descendants et des minorités au sens large ». « Je ne renie rien, écrit-elle. J’ai été choquée par les caricatures auxquels Rokhaya Diallo et Axiom ont été réduits : elles n’ont rien à voir avec ce qu’ils sont vraiment. »
L’exclusion de la militante est due, estime l’ex-présidente du CNNum, à « un emballement médiatique et politique violent, révélateur des tensions françaises et de la difficulté à les traiter sereinement. Nous en avons été les témoins impuissants », explique-t-elle.
Le plus drôle vient quand même de la bouche du ministre
Contacté par Le Figaro, Mounir Mahjoubi a assumé sa décision. « J’ai signé le décret, j’étais là à la nomination. Il n’y a eu aucune surprise. Le problème, ce sont les réactions et l’incapacité du CNNum à travailler dans la sérénité », affirme le secrétaire d’État. « Il ne s’agit pas d’une association, d’un parti politique ou d’un lobby. Le CNNum doit être proche du gouvernement pour nous orienter, et le gouvernement lui fait confiance sur ces sujets. Ce n’est pas une force d’opposition, même si conseiller peut signifier dire quand ça ne va pas. C’est cet équilibre subtil qui a été cassé », poursuit-il.
La composition du nouveau CNNum devrait être prête au début de l’année 2018, précise encore Mounir Mahjoubi. Elle « sera faite d’experts du numérique. Elle aura aussi une plus grande représentativité des quartiers, de la ruralité ».
ON va donc faire représenter les quartiers par des gens qui surtout ne font pas de vagues, ne sont ni activistes, ni rappeurs, peut être par exemple la nouvelle bourgeoisie de couleur du numérique... pourquoi pas ceux qui ont utilisé les ZRU et autres zones franches pour y mettre les click-travailleurs/ses ou des entrepôts de livraison amazoniens. Des experts du numérique qui surtout n’auront jamais l’idée d’utiliser le langage épicène. Des experts comme on les aime dans les cercles de pouvoir : experts en courbettes et génuflexions !
Cela dit, je n’aimerais pas être à la place du futur nominé... Il ne s’agit plus d’avaler des couleuvres, mais bien des boas, des anacondas. Le CNNum est mort, mais ce n’est que le premier pas. Je ne veux plus voir une tête qui dépasse. Tiens, les honteux de l’audiovisuel comme Elise Lucet... ou les merdeux de SUD Education qui osent penser qu’il existe un racisme d’Etat. Mettez moi tout ça en ordre !