Tony Blair l’avait promis, les conservateurs l’ont fait. L’organisation des Jeux olympiques de Londres a accéléré le nettoyage des quartiers populaires de l’East End et l’éclosion, autour des stades et autres installations sportives, de zones urbaines vouées à la consommation et aux classes sociales à gros pouvoir d’achat. Dans les quartiers, beaucoup voient d’un mauvais œil l’effacement de leur convivialité et de leur mémoire historique. Reportage.
Les propos de Jacques Rogge, président du Comité international olympique, seront bien insuffisants pour éroder l’enthousiasme sportif. « On peut franchement dire que les Jeux de 2004 [à Athènes] ont joué un rôle. Si vous regardez la dette extérieure de la Grèce, deux à trois pour cent peuvent être attribués aux Jeux », a-t-il déclaré dans la capitale hellénique le 27 décembre 2011. Notons qu’il oublie de tenir compte
des 10 % d’emprunts supplémentaires contractés par le pays entre 2003 et 2004. Mais, même si l’on s’en tient aux chiffres minimisés du patron des JO, ces deux à trois pour cent représentent, excusez du peu, l’équivalent du déficit la Sécurité sociale française évalué à dix milliards d’euros.
Les jeux d’Athènes ont coûté treize milliards, dont un milliard exclusivement destiné au personnel et aux dispositifs de sécurité. Plus prosaïquement : à l’époque, l’explosion du prix des logements avait engendré des déplacements de population. Côté rentabilisation des infrastructures, de nombreux sites construits en l’honneur de l’esprit sportif sont aujourd’hui à l’abandon. « Des Jeux de rêves, des Jeux inoubliables », s’exclamait alors le président. Inoubliables, assurément ! Les Grecs en savent quotidiennement quelque chose dans leur vie devenue, aujourd’hui, cauchemardesque.
Mais gardons l’esprit sportif, malgré ces milliards perdus à Athènes en 2004, à Pékin en 2008, et les quatorze mille livres sterling que va coûter à chaque Londonien la sauterie olympique de 2012. Jacques Rogge, lui, persévère : « Ce n’est pas seulement une dépense, c’est un investissement qui va laisser un héritage remarquable. » On n’en doute pas !