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  • Lettre ouverte à Yann LeCun, ancien Professeur au Collège de France, responsable de la recherche en Intelligence Artificielle de Facebook.

    De la part de Olivier Auber, chercheur, Université Libre de Bruxelles (VUB)

    Objet : Quitter Facebook

    en tant que chercheur comme vous l’êtes aussi, mais dans un autre domaine, celui de l’Intelligence Naturelle (IN), je me permets de m’adresser à vous publiquement pour vous signaler que je quitte Facebook, sans doute définitivement.

    La raison est simple. Facebook est évidemment un outil puissant de mise en relation. Je constate que beaucoup de chercheurs avec lesquels je travaille ont pris l’habitude de l’utiliser pour leurs échanges informels. Les conversations qui y sont menées sont parfois futiles, mais souvent aussi du plus grand intérêt.

    Or nous nous rendons compte que ces conversations, en quelque sorte, ne nous appartiennent plus dès lors qu’elles sont menées sur Facebook !

    La preuve en est que lorsque l’on veut quitter Facebook, la plate forme vous propose d’emporter avec nous une archive des plus sommaire. Elle ne comprend pas :

    – les liens des publications personnelles (rien que ça !)
    – les discussions suivant les publications personnelles.
    – les commentaires laissés sur d’autres publications
    – les liens des publications que vous republiez.
    – votre carnet d’adresse (on obtient que les noms, pas les mails ou autres coordonnées théoriquement partagées avec vous)

    Facebook retient environ 90% des données qui nous intéressent ! De plus, lorsque l’on quitte Facebook, au delà d’un certain nombre, la messagerie interdit d’envoyer un mot à chacun des contacts afin de les informer et de recueillir leurs coordonnées !

    En d’autres termes, Facebook ressemble à une sorte de saloon du Far-West dans lequel l’alcool serait gratuit. Si vous y entrez, non pour boire, mais pour discuter simplement avec vos amis, vous vous apercevez au moment de sortir que vos conversations et votre carnet d’adresse ne vous appartiennent plus. Ils appartiennent au patron du saloon ! Pour couronner le tout, le patron vous interdit de dire au revoir à vos amis avant de partir !

    Par cette lettre ouverte, je souhaite alerter mes collègues et plus généralement tous les travailleurs intellectuels professionnels ou indépendants (potentiellement tout le monde) :

    Ne publiez pas vos idées sur Facebook ! Ne menez aucune conversation digne d’intérêt sur Facebook ! Choisissez plutôt de discuter sur des réseaux sociaux libres et distribués tels Diaspora ou bien Mastodon. Choisissez des plateformes de veille partagée tel Seenthis ou des outils de rédaction collective tel Cryptpad qui, contrairement à Facebook ne donne aucun droit ni aucune visibilité à son fournisseur sur ce que vous écrivez.

    En particulier, amis chercheurs et artistes indépendants, n’attendez pas que Mark Zuckerberg, enrichi à l’extrême par votre travail gratuit, veuille bien vous verser un revenu de base. Il n’a aucune légitimité pour cela ! Expérimentez plutôt des réseaux distribués de création monétaire libre tels Duniter.

    Cher Yann, pour conclure, je ne doute pas que grâce à votre talent et à celui des chercheurs que vous avez rassemblés, Facebook dispose un jour de la plus puissante Intelligence Artificielle qui soit. Ce jour-là cependant, cette IA risque de régner sur un désert, car en se comportant ainsi Facebook pourrait se vider de ses utilisateurs. Gone !

    Bien à vous

    Olivier Auber
    http://perspective-numerique.net/wakka.php?wiki=YannLeCun
    #Duniter #Diaspora #Framasphere #Seenthis #Mastodon #Cryptpad INSIDE

    • En fait j’évalue à 90% les données textuelles qui sont retenues par FB, donc les utilisateurs n’ont droit qu’à 10% de leurs données personnelles. Cela n’a évidemment qu’un sens limité car les data ne se comptent pas en kilos... Une meilleure analogie serait le corps humain. FB garde tout sauf, disons les genoux, ou les avant bras avec lesquels vous pouvez repartir... ce qui ne fait pas un corps valide... Ce qui est grave, c’est que dans ses ToS, FB prétend que les utilisateurs peuvent repartir avec leurs data. C’est totalement faux. C’est une tromperie ! (UNFAIR). Je crois que devant un tribunal impartial et qui n’a pas froid aux yeux, c’est plaidable...

    • Pour aller dans votre sens, j’ai découvert, après le décès d’une amie et la transformation de sa page en page « souvenir » ou « hommage » je ne sais plus le terme, que la correspondance privée que j’avais eu avec elle via Fb Messenger avait été tronquée de ses écrits. Il n’y avait plus que mes propres interventions et des blancs à la place de ses contributions...J’ai également fermé mon compte qui avait été ouvert il y a 10 ans.

    • Il serait intéressant en effet de détailler un peu ce chiffre de 90%. Il est parlant, on aime les chiffres ronds et gros (comme nos patriarches), mais souvent ils manquent de précision.

      Une discussion récente m’a interloquer à ce sujet. On parle identité et anonymat à toutes les sauces, mais, ces 90% d’information, ces j’aime/j’aime pas, ces déplacements relevés par le localisateur, ces mots envoyés à la ronde.. sans compter les inscriptions -comme tu le mentionnes- à divers services (cafés, parking lots, et autre cyber communautés) qui demandent ton « compte Facebook ». Ça fait beaucoup de mon identité mise en morceau. Seul un inconscient volontaire qualifiera cette amoncellement de détails à mon sujet comme « anonymes ». Et pourtant.

    • @najort Ce chiffre de 90% n’est là que pour donner une idée du racket et accrocher l’attention (sorry, on fait son temps) mais au fond on ne peut bien entendu pas mesurer « l’information » de cette manière. Est-elle seulement mesurable ? C’est une grande question ! Une chose est claire, les mots au kilomètre livrés par Facebook n’ont pratiquement aucune valeur sans les liens qui les relient entre eux et avec leur environnement.
      Voici par exemple la sauvegarde de ma timeline :
      http://perspective-numerique.net/Facebook2011-2018/html/timeline.htm

    • Je m’interroge sur l’archivage de ses données personnelles sur les réseaux sociaux. Ce n’est jamais le pourquoi de ce genre de service. Ces services web seraient même plutôt basés sur l’idée de faire monter les gens dans le train pour qu’ils l’alimentent de leur énergie vitale mais jamais pensés pour qu’ils puissent en descendre. Je ne parle même pas des spécificités de FB, vols d’images, des droits, des visites, des mots, de la pensée spécifique, de l’annihilation sociale. Non, par exemple sur seenthis, on en discute parfois, lorsqu’une personne veut partir, je ne crois pas qu’elle ait cette possibilité d’archiver ses activités, toutes ses données sont supprimées et ses posts disparaissent. Du coup il faut deviner que @aude_v au milieu d’une discussion avait posté un truc important, et pas seulement important pour elle. Ça, ça fait chier quand même, non seulement la personne se casse mais en plus on perd des interventions souvent pertinentes.
      Voila, je note comme ça, pour aussi souligner les aspects de pourquoi c’est différent/ou pas et ce qui est questionné quand on parle d’archiver (ses) ces données.

    • Avant de quitter Facebook, voici la facture.
      USD 350.000.000.000.000
      Trois Cent Cinquante Mille Milliards de Dollar

      Lettre ouverte à Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook.

      Objet : Quitter Facebook

      Salut Mark !

      meilleurs voeux et toutes mes félicitations pour tes bonnes résolutions 2018 !

      1) tu nous dis que tu as pris conscience « qu’avec l’émergence d’un petit nombre de grandes entreprises technologiques - et les gouvernements utilisant la technologie pour surveiller leurs citoyens - beaucoup de gens croient maintenant que la technologie centralise le pouvoir plutôt qu’elle ne le décentralise. »

      Ce n’est pas qu’une croyance, c’est un peu vrai non ? Et tu y es un peu pour quelque chose n’est-ce pas ?

      Là dessus, tu nous dis être « intéressé à approfondir et étudier les aspects positifs et négatifs des technologies de décentralisation. »

      C’est cool ! Tu dois savoir que d’autres travaillent depuis longtemps ces questions - déjà bien avant la création de Facebook - en vue de créer les conditions d’une société plus équitable. Si ta prise de conscience est réelle, tu pourras sans doute nous aider. On manque de développeurs !

      2) tu sembles aussi avoir compris que tes algorithmes rendaient les gens fous en les inondant de posts sponsorisés et de fake news. Tu dis : « le renforcement de nos relations améliore notre bien-être et notre bonheur ». Tu vas donc modifier quelques lignes de code pour renforcer ce que tu appelles nos « liens forts » (strong ties) qui selon toi ont beaucoup de « valeur » (high value). Au final tu veux que le temps que les gens « dépensent » sur Facebook soit « plus précieux ».

      C’est cool ! Cependant, mon cher Mark, il faut que tu comprennes que ce temps est bien plus précieux encore que ce que tu imagines.

      Pour ma part, disons que je passe(ais) environ une heure par jour sur Facebook à développer ces liens et ma propre documentation professionnelle. En dehors de cela, j’y passe(ais) aussi du temps à titre « récréatif ». Ce point est évoqué plus bas*.

      Or comme mes liens et ma documentation sont irrécupérables par le système backup de Facebook comme je l’ai expliqué à ton collège Yann LeCun ? , je suis obligé de constater que Facebook me les a volés.

      Voyons combien cela coûte...

      365 heures par an. Arrondissons à 50 jours par an. Si je compte mon prix de journée à USD 1.000 /jour (c’est très raisonnable, les avocats de FB sont payés USD 1.000 de l’heure), ça fait USD 50.000 par an. Comme je suis sur Facebook depuis 7 ans, je t’adresserai une facture de USD 350.000.

      Les statistiques montrent que je suis dans la moyenne des utilisateurs de Facebook en terme de durée d’utilisation et d’ancienneté. On peut donc multiplier ce coût par le nombre d’utilisateurs (non pas les 2 milliards actuels mais disons 1 milliard pour faire bonne mesure sur les 7 dernières années). On obtient donc une facture globale de :

      USD 350.000.000.000.000
      (Trois Cent Cinquante Mille Milliards de Dollar).

      En conclusion, mon cher Mark, tu fournis une véritable interopérabilité des données personnelles qui permettrait aux gens de ne pas être otages de Facebook et de sa centrallisation, ou bien tu rembourses !

      Bien à toi

      Olivier Auber

      () Le temps récréatif n’est pas décompté. En effet, le divertissement fourni par Facebook est financé par la publicité. C’est-à-dire que chacun paie pour ce divertissement à travers sa consommation quotidienne de produits surfacturés à cause des budgets publicitaires des marques captés pour une bonne part par Facebook..

      ( *) Lettre ouverte à YannLeCun, ancien Professeur au Collège de France, responsable de la recherche en Intelligence Artificielle de Facebook.
      http://perspective-numerique.net/wakka.php?wiki=YannLeCun

      1) Résolution 1 : https://www.facebook.com/zuck/posts/10104380170714571
      2) Résolution 2 : https://www.facebook.com/zuck/posts/10104413015393571