Ecouter la parole des femmes, avec ou sans images – L’image sociale

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  • Violences faites aux femmes : le festival des éditocrates réactionnaires | Frédéric Lemaire et Pauline Perrenot
    http://www.acrimed.org/Violences-faites-aux-femmes-le-festival-des

    Dans le cadre de notre série sur le traitement médiatique de l’affaire Weinstein et du hashtag « BalanceTonPorc », nous revenions dans un précédent article sur la manière dont certains commentateurs et éditocrates ont occulté la question de la libération de la parole de femmes victimes de violences. À ce sujet de fond, ils ont substitué de vaines polémiques sur les termes employés, qui renverraient à la délation ou seraient trop insultants pour la gent masculine… voire pour les porcs. Dans ce nouvel article, nous revenons plus particulièrement sur des formes plus radicales de détournement voire de déni du phénomène et sur la large audience médiatique dont elles ont bénéficié. Un nombre significatif d’éditocrates et de polémistes réactionnaires aux positions parfois édifiantes ont en effet joui d’une (...)

    • Le 21 décembre 2017, Diane de Bourguesdon brosse pour le mensuel, sous le titre « Balance ton porc : la chasse aux sorciers doit s’arrêter » un petit historique des relations hommes-femmes de l’antiquité à nos jours !

      "L’affirmation de la parfaite égalité entre l’homme et la femme par la religion chrétienne dès l’époque romaine, puis la valorisation de la courtoisie érigée en vertu chevaleresque durant le Moyen-Âge, en particulier en France, ont peu à peu lissé les aspérités de la brute nature masculine et tempéré leurs fougueuses ardeurs envers la gent féminine. [ …] L’instruction de la littérature, combinée à une éducation des garçons dans un profond respect des jeunes filles et des femmes, a permis que la tradition courtoise se perpétue au fil des générations, au bonheur des dames françaises."

    • C’est pas le pire de ce qui est recensé dans l’article d’Acrimed. Du coup je vais mettre ce que j’avais pas mis dans mon poste précedent avec un multi-facepalm parceque c’est tellement ....

      Autre article de Causeur, celui de l’universitaire Ingrid Riocreux paru le 18 octobre. Tout, ou presque, est dans le titre : « Les Weinstein, certaines femmes s’en accommodent très bien » (sic). Extrait :

      " Pour beaucoup de femmes, un homme dominé par ses pulsions est un être faible. […] On les croirait victimes, on les croirait soumises. À la vérité, elles n’iront jamais se plaindre d’un individu qu’elles estiment facile à manœuvrer et qu’elles méprisent profondément."

      Des victimes coupables, et des coupables victimes : formidable retournement ! Car si l’argument selon lequel « tous les hommes ne sont pas agresseurs » a été maintes fois employé (voir notre précédent article), il fallait faire preuve d’une imagination et d’une audace à toute épreuve, ainsi que d’un talent certain dans la pratique de la dialectique de l’extrême, pour expliquer que même les agresseurs sont, en fait, des dominés. Et les agressées, des dominantes ? Et ce n’est pas fini :

      Cela s’apprend très tôt : c’est la jolie lycéenne qui vient au début du cours, en minaudant, le chemisier ouvert, expliquer au professeur que « monsieur, je suis vraiment désolée mais je n’ai pas eu le temps de faire ma dissertation, est-ce que je peux vous la rendre la semaine prochaine ? ». C’est sa camarade, qui se demande pourquoi elle irait débourser 1000 euros pour avoir le nouvel iPhone alors que tel mec de terminale, qui l’a chouré on ne sait où, le lui cède en échange d’une fellation. S’il y a des Harvey Weinstein, si « personne n’a rien dit », c’est aussi parce qu’il y a des femmes qui s’en accommodent très bien.

      https://s14-eu5.ixquick.com/cgi-bin/serveimage?url=https:%2F%2Fi.ytimg.com%2Fvi%2FfYUReR2b9Sg%2Fhqdefau

    • HéOh faudrait voir à les dénoncer pour ce qu’ils sont, et à éviter cette banalisation des propos d’extrême droite.

      Causeur, financé à 44 % par Gérald Penciolelli, ex-repreneur de Minute, une figure de l’extrême droite francaise

    • lire aussi : Ecouter la parole des femmes, avec ou sans images
      https://imagesociale.fr/5490

      Philippe Ridet ne s’est pas trompé pas dans sa recherche d’un monde perdu. L’art et le cinéma n’ont pas seulement été des reflets du sexisme de la société, mais des moteurs de la culture du viol. La chute d’Harvey Weinstein n’est pas celle d’un homme, mais celle d’un monde où être un homme rendait les choses plus faciles. Peut-on lire la prudence iconographique des participantes à l’affirmation féministe comme le signe de la recherche d’un nouvel équilibre encore à venir, au sein d’un univers visuel piégé ? En tout état de cause, cette mobilisation décisive apporte l’exemple original d’une expression publique qui contredit bon nombre des idées reçues sur la « civilisation des images ».

      #La_parole_des_femmes

  • Le problème avec Johnny – L’image sociale
    http://imagesociale.fr/5322

    Le problème avec Johnny
    André Gunthert 9 décembre 2017 - 8 h 51 min

    Phénomène de saturation de l’ensemble des canaux médiatiques, la mort de Johnny présente la rare particularité d’avoir été anticipée par deux chansons (Eric la Blanche, La Mort à Johnny, 2006 ; les Fatals Picards, Le jour de la mort de Johnny, 2009), qui soulignent le caractère prévisible d’une exploitation opportuniste de l’émotion populaire, sous la forme d’un deuil collectif imposé à la nation toute entière.

    Peu après le mouvement de dénonciation des violences faites aux femmes, qui a magistralement incarné la puissance de mobilisation du débat public, imposant à chacun de prendre parti dans un espace fortement polarisé par l’exercice de la controverse, le deuil médiatique, construit lui aussi par la multiplication des témoignages et des signes de la participation, illustre la dynamique opposée d’un consensus qui éteint toute polémique, comparable à la gestion de l’émotion collective après les attentats terroristes de 2015.

    Dans le cas de Johnny, l’imposition d’une communion étendue à toute la nation pose pourtant problème. Car Johnny a été une vedette paradoxale, représentant précoce de l’adaptation française du vaste mouvement anglo-américain visant à incarner une culture alternative de la jeunesse par le biais des musiques populaires, qui culminera dans la contestation de la guerre du Vietnam en 1968-1969. Pays de forte tradition chansonnière, la France n’a jamais réussi à produire que de pâles copies de la légende pop-rock, et la carrière toute entière de Johnny, écartelée entre des références vestimentaires, musicales ou vocales made in USA et son insuccès dans l’univers anglophone, illustre jusqu’à la caricature le destin folklorique d’une imitation impulsée par le commerce.

    Celui qui n’était plus depuis longtemps l’idole des jeunes, et qui n’avait plus qu’un rapport de façade avec le rock, depuis son retour dans le giron de la variété française, a également la particularité d’être nettement marqué à droite. Entre ses déclarations, ses amitiés affichées avec Chirac ou Giscard, ou encore son soutien à Nicolas Sarkozy en 2007, la prise de parti de la star, qui tranche avec l’héritage contre-culturel de la pop, fait de Johnny une personnalité clivante, comme le confirme un sondage récent selon lequel, si le chanteur n’est apprécié que par 25% des sympathisants de gauche, il totalise en revanche 58% d’adhésion des sympathisants de droite.

    Un marquage que l’on retrouve dans l’éventail des hommages, et jusque dans la dénonciation par le journaliste conservateur Jean-Michel Aphatie du défaut de sensibilité du responsable de gauche Jean-Luc Mélenchon : « Sur Johnny Hallyday, Jean-Luc Mélenchon a dit : “Je n’ai rien à dire”. Comment un leader politique peut-il à ce point passer à côté d’une émotion collective, sincère d’un peuple que l’on prétend incarner ? Dans son cas, on peut parler d’une faute professionnelle ».

    La circonstance du décès du chanteur rend évidemment inaudible une réception moins enthousiaste de la caricature vocale, expressive et scénique à quoi se limitait l’art de Johnny Hallyday, réduit à une série de stéréotypes figés du mâle alpha, magnifié par la théâtralité narcissique du spectacle pop. Le deuil impose la communauté de l’hommage. Bien anticipée dans la chanson d’Eric la Blanche (« il n’y a que les mauvais Français qui n’aiment pas Johnny »), l’injonction républicaine en forme de chantage à l’émotion ressemble comme deux gouttes d’eau à la communion forcée de l’après-Charlie. Dans un pays qui penche tellement à droite qu’on a pu lui faire croire que Macron était de gauche, l’imposition médiatique d’un deuil faussement consensuel et la métamorphose de Johnny en symbole national n’est finalement qu’un signe de plus de la longue glissade de la France sur la pente du conservatisme et de la réaction.

    #Johnny_Hallyday