L’association d’aide aux détenus Genepi annonce sa dissolution - Agence France Pénitentiaire
▻https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/08/02/l-association-d-aide-aux-detenus-genepi-annonce-sa-dissolution_6090345_3224.
Depuis 2019, le Genepi avait renoncé à son activité historique d’ateliers ou de cours en prison. L’association avait changé d’orientation et se revendiquait comme « féministe et anticarcérale ».
Le Groupement étudiant national d’enseignement aux personnes incarcérées (Genepi), association qui a accompagné pendant plus de quarante ans de nombreux détenus, a annoncé dans un communiqué, lundi 2 août, sa dissolution.
Créé par les pouvoirs publics à la suite des violentes émeutes qui avaient fait rage dans les prisons, notamment durant l’été 1974, le Genepi animait également, « hors la prison », de nombreux colloques et campagnes de sensibilisation autour de la question carcérale et de la place de la prison dans la société.
Depuis 2019, le Genepi, qui a pu compter jusqu’à 850 bénévoles au début des années 2000, avait renoncé à son activité historique d’ateliers ou de cours en prison. L’administration pénitentiaire avait rompu ses liens avec la structure en 2018, en ne renouvelant pas la convention trisannuelle qui lui assurait des subventions.
L’organisation avait changé d’orientation et se revendiquait désormais comme association « féministe et anticarcérale », expliquant être arrivée au bout de sa logique « abolitionniste ». « Nous refusons de faire perdurer une association qui n’a pas été pensée comme un outil de lutte contre l’enfermement et n’a jamais servi l’intérêt des prisonnier[s et des prisonnières] », a fait valoir le Genepi dans un communiqué rejetant l’héritage du mouvement.
« Nous refusons de nous contenter d’une critique réformiste de la taule et de la justice, seule possibilité entendue par l’Etat et discours dominant formulé par le Genepi pendant plus de quarante ans », assène la direction actuelle de l’association dans ce texte.
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▻https://twitter.com/GenepiFrance/status/1422204998805491717
puis
►https://www.genepi.fr/communique-sur-la-dissolution-du-genepi
L’administration pénitentiaire rompt ses liens avec l’association d’aide aux détenus Genepi, 29 octobre 2018
▻https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/10/29/l-administration-penitentiaire-rompt-ses-liens-avec-l-association-d-aide-aux
L’organisation étudiante se voit supprimer sa subvention pour avoir fortement réduit ses actions d’enseignement en détention et pour ses prises de position contre la prison.
Les relations entre l’association d’étudiants Genepi (ex-Groupement étudiant national d’enseignement aux personnes incarcérées) et l’administration pénitentiaire se dégradaient depuis plusieurs années. Elles semblent avoir atteint un point de non-retour. « Cette fois, la situation est plus grave », estime Maxime Boyer, président du Genepi. Romain Peray, sous-directeur des missions à la Direction de l’administration pénitentiaire (DAP), a informé l’association le 20 septembre que la convention triannuelle qui les liait depuis des décennies ne serait pas renouvelée.
Une rupture synonyme de l’arrêt de la subvention de 50 000 euros par an, qui participait au financement de l’association forte aujourd’hui de quatre salariés, une quinzaine d’étudiants en service civique et quelque 800 bénévoles (un tiers de moins qu’au début de la décennie).
Déjà, au printemps 2017, la DAP avait décidé de réduire sa contribution de 52 000 à 30 000 euros. Mais Jean-Jacques Urvoas, alors garde des sceaux, était intervenu à la veille du scrutin présidentiel pour la rétablir. Cette fois, l’administration pénitentiaire a fait valider sa décision par le cabinet de Nicole Belloubet, ministre de la justice, avant d’en informer le Genepi.
Les griefs invoqués pour ne plus soutenir l’association fondée en 1976, à l’initiative notamment du responsable politique centriste Lionel Stoleru, sont de trois ordres : un désengagement du Genepi avec une baisse régulière de ses interventions en détention, l’évolution de ses missions avec la réduction de la part consacrée à l’enseignement, un discours passé en quelques années d’une critique de l’enfermement à des attaques directes contre l’administration pénitentiaire et ses personnels.
« Une sanction politique »
Selon M. Boyer, il s’agit « d’une sanction politique ». L’étudiant en génie des matériaux, membre du Genepi depuis trois ans, souligne que la convention garantissait l’indépendance des parties et la liberté d’expression des étudiants intervenants, et stipulait que les actions des bénévoles ne se limitaient pas à l’enseignement. L’association a retiré de ses statuts en 2011 l’objectif d’aider « à la réinsertion sociale des personnes incarcérées ». Son objet social est désormais d’œuvrer « en faveur du décloisonnement des institutions carcérales par la circulation des savoirs entre les personnes incarcérées, le public et ses bénévoles ».
Quant au discours, il a effectivement évolué. Dans un communiqué de février intitulé « L’Etat enferme, la prison assassine », le Genepi précisait : « Par la phrase “la prison assassine”, nous entendons aussi qu’elle a pour mission de briser les individus, leur corps et leur esprit. » Des propos de plus en plus mal vécus par certains personnels et responsables pénitentiaires. Lors de ses assises de 2017, l’association s’interrogeait sur le sens de ses interventions en détention qui « participent à la légitimation d’un système (…) que nous n’avons de cesse de dénoncer ». Certains groupes locaux du Genepi, tels ceux du Sud-Ouest, ont ainsi décidé d’arrêter de se rendre en détention.
En quatre ans, le volume des interventions de l’association est passé de 12 474 heures à 5 825 heures pour l’année universitaire 2017-2018. La DAP dénonce une chute encore plus sévère et affirme n’avoir comptabilisé que 2 276 heures dispensées par les bénévoles du Genepi la dernière année. Ce que conteste M. Boyer. Quant aux activités d’enseignement, le Genepi assume le fait qu’elles ne représentent plus que 53 % de ses actions.
En principe, la fin de la convention nationale liant la DAP à l’association ne devrait pas empêcher les groupes locaux du Genepi de continuer d’intervenir en accord avec les établissements pénitentiaires respectifs. Des visiteurs de prison peuvent entrer sans convention nationale ni subvention.
Lettre de plusieurs associations
Pourtant, sur le terrain, certains établissements ont déjà mis fin à la collaboration avec l’association étudiante. A Fresnes (Val-de-Marne) par exemple, « l’atelier de langue des signes a été brutalement interrompu le 3 octobre alors que la salle était réservée jusqu’en décembre », affirme Julia Poirier, déléguée régionale d’Ile-de-France. Elle affirme que le motif qui lui a été donné « est la suppression de la convention nationale ». Cet atelier de deux heures par semaine avait été mis en place en mai pour permettre à une personne sourde de communiquer avec ses codétenus. Illustration de la méfiance grandissante qui s’est installée entre les deux parties, une source pénitentiaire affirme que la dizaine de détenus « entendant et parlant » qui participaient à cet atelier « s’y rendaient pour – au mieux – se réunir… »
Dans le but de faire revenir la chancellerie sur cette décision, plusieurs associations partenaires de la DAP telles que le Secours catholique, l’Association nationale des visiteurs de prison ou la Fédération des associations réflexion action prison et justice ont cosigné une lettre adressée vendredi 26 octobre au directeur de l’administration pénitentiaire pour s’inquiéter de l’arrêt de la convention.
« A travers l’action du Genepi, l’intervention d’étudiants en détention nous semble à l’évidence plus que jamais importante », écrivent-elles. Elles soulignent que, non seulement ces rencontres ont « un impact positif » sur les personnes détenues, et qu’elles sont menées par des étudiants appelés à occuper des postes importants et dont le regard sur la prison aura ainsi changé. Albin Heuman, conseiller de Nicole Belloubet, devait recevoir l’association à la chancellerie lundi 29 octobre dans l’après-midi. Mais c’est sans doute à la ministre qu’il reviendra d’entériner ou non cette rupture.