• Brésil : les exactions de la dictature étaient assumées par le sommet de l’Etat

    http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2018/05/12/bresil-les-exactions-de-la-dictature-etaient-assumees-par-le-sommet-de-l-eta

    La révélation au grand jour d’un mémo de la CIA rédigé en 1974 jette une lumière crue sur les crimes de la dictature.

    Hormis une poignée de négationnistes, aucun Brésilien n’ignore les morts suspectes, les exécutions sommaires et les tortures abominables menées lors de la dictature militaire (1964-1985). Le pays a désormais la preuve que les crimes n’étaient pas ordonnés par quelques policiers zélés, mais venaient directement de Brasilia, le sommet du pouvoir. Et qu’aucun président à épaulettes dirigeant le pays pendant ces années noires n’a été moins cruel que les autres. La démonstration a été faite par le biais d’un mémo écrit le 11 avril 1974 par l’ancien directeur de la CIA, l’agence de renseignements américaine, William Colby. Un texte adressé à Henry Kissinger, alors secrétaire d’Etat de la plus grande puissance mondiale.

    Mis au jour jeudi 10 mai par le chercheur en relations internationales de la Fondation Getulio Vargas, Matias Spektor, l’écrit fait partie des élements mis à disposition du public par le gouvernement américain depuis 2015. Son contenu a plongé le Brésil dans un état de choc. « Il s’agit du document le plus perturbateur que j’aie lu ces vingt dernières années », estime M. Spektor cité par les médias brésiliens.

    Jetant une lumière crue sur les exactions du pouvoir militaire qui, selon les données officielles, aurait fait 434 victimes dont 208 disparus, cette révélation casse les discours complaisants envers un régime considéré par une partie du pays – à tort – comme exempt de corruption et responsable d’une prospérité économique exceptionnelle. « Certains, y compris à gauche, étaient indulgents envers Geisel mettant en avant les “acquis” de la dictature, tels que le nationalisme ou la création d’entreprises publiques. Toute cette rhétorique est fichue en l’air », atteste l’historien Luiz Felipe de Alencastro.