• #Stefan_Zweig : « Avant 1914, la terre appartenait à tous ses habitants » | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/olivier-beuvelet/blog/181216/stefan-zweig-avant-1914-la-terre-appartenait-tous-ses-habitants

    « Et de fait, rien ne rend peut-être plus palpable l’énorme régression dans laquelle est entrée l’humanité depuis la première guerre mondiale que les restrictions apportées à la liberté de mouvement des hommes et à leurs libertés. Avant 1914, la terre appartenait à tous ses habitants. Chacun allait où il voulait et y restait aussi longtemps qu’il voulait. Il n’y avait pas de permissions, pas d’autorisations, et cela m’amuse toujours de voir l’étonnement des jeunes lorsque je leur raconte qu’avant 1914, je voyageais en Inde et en Amérique sans avoir de passeport et même n’en avais jamais vu aucun. On montait dans le train et on en descendait sans rien demander, sans qu’on vous demandât rien, on n’avait pas à remplir un seul de ces centaines de papiers qu’on réclame aujourd’hui. Il n’y avait ni permis, ni visas, ni tracasseries ; ces mêmes frontières qui, avec leurs douaniers, leur police, leurs postes de gendarmerie, sont aujourd’hui transformées en réseau de barbelés en raison de la méfiance pathologique de tous envers tous, n’étaient rien d’autre que des lignes symboliques qu’on traversait avec autant d’insouciance que le méridien de Greenwich. C’est seulement après la guerre que le monde se vit bouleversé par le national-socialisme, et le premier phénomène qu’engendra cette épidémie spirituelle de notre siècle fut la xénophobie : la haine ou du moins la peur de l’autre. On se défendait partout contre l’étranger, partout on l’excluait. Toutes les humiliations qu’autrefois on avait inventées exclusivement contre les criminels, on les infligeait maintenant à tous les voyageurs avant et pendant le voyage. Il fallait se faire photographier de droite et de gauche, de profil et de face, les cheveux coupés assez court pour que l’oreille fût visible, il fallait donner ses empreintes digitales, d’abord le pouce seul, puis les dix doigts, il fallait en plus présenter des certificats : de santé, de vaccination, de police, de bonne vie et mœurs, des recommandations, il fallait pouvoir présenter des invitations et des adresses de parents, il fallait fournir des garanties morales et financières, remplir des formulaires et les signer en trois, quatre exemplaires, et s’il manquait ne fût-ce qu’une feuille de ce tas de paperasses, on était perdu. »

    • Stefan Zweig: Die Welt von Gestern - Die Agonie des Friedens
      https://gutenberg.spiegel.de/buch/die-welt-von-gestern-6858/18

      » The sun of Rome is set. Our day is gone.
      Clouds, dews and dangers come; our deeds are done.
      «
      Shakespeare, ›Julius Cäsar‹

      In der Tat: nichts vielleicht macht den ungeheuren Rückfall sinnlicher, in den die Welt seit dem ersten Weltkrieg geraten ist, als die Einschränkung der persönlichen Bewegungsfreiheit des Menschen und die Verminderung seiner Freiheitsrechte. Vor 1914 hatte die Erde allen Menschen gehört. Jeder ging, wohin er wollte und blieb, solange er wollte. Es gab keine Erlaubnisse, keine Verstattungen, und ich ergötze mich immer wieder neu an dem Staunen junger Menschen, sobald ich ihnen erzähle, daß ich vor 1914 nach Indien und Amerika reiste, ohne einen Paß zu besitzen oder überhaupt je gesehen zu haben. Man stieg ein und stieg aus, ohne zu fragen und gefragt zu werden, man hatte nicht ein einziges von den hundert Papieren auszufüllen, die heute abgefordert werden. Es gab keine Permits, keine Visen, keine Belästigungen; dieselben Grenzen, die heute von Zollbeamten, Polizei, Gendarmerieposten dank des pathologischen Mißtrauens aller gegen alle in einen Drahtverhau verwandelt sind, bedeuteten nichts als symbolische Linien, die man ebenso sorglos überschritt wie den Meridian in Green wich. Erst nach dem Kriege begann die Weltverstörung durch den Nationalsozialismus, und als erstes sichtbares Phänomen zeitigte diese geistige Epidemie unseres Jahrhunderts die Xenophobie: den Fremdenhaß oder zumindest die Fremdenangst. Überall verteidigte man sich gegen den Ausländer, überall schaltete man ihn aus. All die Erniedrigungen, die man früher ausschließlich für Verbrecher erfunden hatte, wurden jetzt vor und während einer Reise jedem Reisenden auferlegt. Man mußte sich photographieren lassen von rechts und links, im Profil und en face, das Haar so kurz geschnitten, daß man das Ohr sehen konnte, man mußte Fingerabdrücke geben, erst nur den Daumen, dann alle zehn Finger, mußte überdies Zeugnisse, Gesundheitszeugnisse, Impfzeugnisse, polizeiliche Führungszeugnisse, Empfehlungen vorweisen, mußte Einladungen präsentieren können und Adressen von Verwandten, mußte moralische und finanzielle Garantien beibringen, Formulare ausfüllen und unterschreiben in dreifacher, vierfacher Ausfertigung, und wenn nur eines aus diesem Schock Blätter fehlte, war man verloren.

    • Téléchargez Die Welt von Gestern von Stefan Zweig | Projekt Gutenberg
      https://gutenberg.spiegel.de/buch/die-welt-von-gestern-6858/1

      A télécharger au format EPUB
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      http://www.epub2go.eu

      Full text of "STEFAN ZWEIG. DIE WELT VON GESTERN. ERINNERUNGEN EINES EUROPAERS. THE WORLD OF YESTERDAY.
      https://archive.org/stream/StefanZweigDieWeltVonGestern/Stefan%20Zweig%20-%20Die%20Welt%20von%20gestern_djvu.txt

  • https://blogs.mediapart.fr/olivier-beuvelet/blog/181216/stefan-zweig-avant-1914-la-terre-appartenait-tous-ses-habitants

    « Et de fait, rien ne rend peut-être plus palpable l’énorme régression dans laquelle est entrée l’humanité depuis la première guerre mondiale que les restrictions apportées à la liberté de mouvement des hommes et à leurs libertés. Avant 1914, la terre appartenait à tous ses habitants. Chacun allait où il voulait et y restait aussi longtemps qu’il voulait. Il n’y avait pas de permissions, pas d’autorisations, et cela m’amuse toujours de voir l’étonnement des jeunes lorsque je leur raconte qu’avant 1914, je voyageais en Inde et en Amérique sans avoir de passeport et même n’en avais jamais vu aucun. On montait dans le train et on en descendait sans rien demander, sans qu’on vous demandât rien, on n’avait pas à remplir un seul de ces centaines de papiers qu’on réclame aujourd’hui. Il n’y avait ni permis, ni visas, ni tracasseries ; ces mêmes frontières qui, avec leurs douaniers, leur police, leurs postes de gendarmerie, sont aujourd’hui transformées en réseau de barbelés en raison de la méfiance pathologique de tous envers tous, n’étaient rien d’autre que des lignes symboliques qu’on traversait avec autant d’insouciance que le méridien de Greenwich. C’est seulement après la guerre que le monde se vit bouleversé par le national-socialisme, et le premier phénomène qu’engendra cette épidémie spirituelle de notre siècle fut la xénophobie : la haine ou du moins la peur de l’autre. On se défendait partout contre l’étranger, partout on l’excluait. Toutes les humiliations qu’autrefois on avait inventées exclusivement contre les criminels, on les infligeait maintenant à tous les voyageurs avant et pendant le voyage. Il fallait se faire photographier de droite et de gauche, de profil et de face, les cheveux coupés assez court pour que l’oreille fût visible, il fallait donner ses empreintes digitales, d’abord le pouce seul, puis les dix doigts, il fallait en plus présenter des certificats : de santé, de vaccination, de police, de bonne vie et mœurs, des recommandations, il fallait pouvoir présenter des invitations et des adresses de parents, il fallait fournir des garanties morales et financières, remplir des formulaires et les signer en trois, quatre exemplaires, et s’il manquait ne fût-ce qu’une feuille de ce tas de paperasses, on était perdu. »

    Stefan Zweig, Le monde d’hier, souvenir d’un européen , Folio-Essais n° 616, p. 530-532.

  • Quand Macron nous menace à la Une de Paris-Match ...
    https://blogs.mediapart.fr/olivier-beuvelet/blog/240319/quand-macron-nous-menace-la-une-de-paris-match

    Une image vaut mille mots, cliché aussi confus que confucéen. Avec son regard d’acier, notre président l’a rendu plus clair, cette semaine en Une de Paris-Match. Il n’y est pas allé par quatre chemin : vous voulez vous battre ? Je suis prêt à me battre ! dit ce regard contondant, affiché à la une de l’hebdomadaire de l’ami Lagardère. (qui vient à nous, même si on ne veut pas venir à lui)

    On a presque l’impression que la photographie a été faite par son modèle plus que par son ou sa photographe. Ne pas rester l’objet de l’adversaire, être celui qui formule, reformule, le point de vue de référence, légitime, tel semble être l’enjeu de la lutte des images dans la crise du pouvoir néolibéral. Transposition sur le plan visuel des enjeux sociaux réels. Cependant, contrairement au modèle canonique de Flagg qui nous disait « I want you », cette image au regard appuyé ne demande rien aux spectateurs, rien d’autre que rester immobiles et sages. Elle objectifie plus qu’elle n’interpelle. Elle émane d’un sujet qui n’attend rien d’autrui, d’un sujet qui n’a besoin que de s’écouter lui-même, d’un sujet qui veut maintenant s’imposer, se montrer et cherche à en découdre sur un plan physique.

    • Cette image, qui se veut performative, fait pendant à celle-ci, qui circulait au même moment dans l’arrière-boutique des réseaux sociaux... loin des surfaces d’affichage :


      Le président se permettait récemment de reprendre le sénat qui opérait selon la loi, en lui disant de « garder la bonne hauteur »… Très bon conseil ! Cette Une de Paris-Match, dans le registre de son "Qu’il viennent me chercher !", nous montre encore une fois, qu’en bon chef, il sait s’appliquer à soi-même ce qu’il exige des autres.

    • Il veut peut-être avoir l’air méchant mais il est plutôt crispé dans une attitude apeurée : tête rentrée dans les épaules dans une position inconfortable, placement de côté comme entre deux chaises et un bras droit qui lui manque. C’est quand même symptomatique d’un manque de parole d’en arriver à décrypter des photos.
      #mal_barré

    • « Le choc des images est désastreux » | André Gunthert

      La place de la caricature, désormais réduite à la portion congrue dans les colonnes des quotidiens, est un bon indicateur des contradictions qui étouffent la presse d’information. Plus de place pour la satire, quand on rame à contre-courant pour sauver les meubles d’un libéralisme décati. Mais la caricature se nourrit des colères et des ridicules, et n’a que faire des routines du journalisme. En ces temps de tumulte et de ruine d’un pouvoir qui court à l’abîme, son énergie déborde sur internet, où le rire et la moquerie répondent aux mines apeurées des commentateurs des chaînes d’info. Alors qu’on cherche en vain une Une marquante de Libération sur la crise des Gilets jaunes, c’est Facebook et Twitter qui fournissent les images les plus cruelles de l’égarement d’un régime en coma dépassé...

      L’hebdomadaire d’Arnaud Lagardère, ami des Macron, qui leur a déjà consacré pas moins de 13 couvertures, tente de réparer les dégâts de la sortie à ski. Un portrait qui se veut martial du président fixant le peuple des Gilets jaunes, les sourcils froncés, accolé à une image du « saccage des Champs-Elysées », illustre « La riposte aux casseurs » (photo : Stephane Lemouton, Bestimage). Mais l’air furibard, la pose peu naturelle, et le registre zyva du caïd supposé impressionner les émeutiers donnent un air de caricature involontaire à ce montage. Celui-ci n’a pas tardé à être détourné à son tour, par l’ajout d’une grenade de désencerlement ou d’autres accessoires du maintien de l’ordre à la française.

      http://imagesociale.fr/7330

  • L’éborgnement : châtier les regards dans la France néolibérale ... | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/olivier-beuvelet/blog/060219/leborgnement-chatier-les-regards-dans-la-france-neoliberale

    Y a t il un lien entre ces éborgnements et le fait que se multiplient les enregistrements vidéos compromettants ? Sont-ils une forme de sanction des regards émancipés qui n’ont plus peur d’exercer leur droit de filmer, et qui gardent parfois trace des agissements illégaux des représentants de la légalité ? cherche-t-on à punir ou à intimider le témoin qui filme par réflexe citoyen ?

    #maintien_de_l'ordre

  • Stefan #Zweig : « Avant 1914, la terre appartenait à tous ses habitants » | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/olivier-beuvelet/blog/181216/stefan-zweig-avant-1914-la-terre-appartenait-tous-ses-habitants

    Et de fait, rien ne rend peut-être plus palpable l’énorme régression dans laquelle est entrée l’humanité depuis la première guerre mondiale que les restrictions apportées à la liberté de mouvement des hommes et à leurs libertés. Avant 1914, la #terre appartenait à tous ses habitants. Chacun allait où il voulait et y restait aussi longtemps qu’il voulait. Il n’y avait pas de permissions, pas d’autorisations, et cela m’amuse toujours de voir l’étonnement des jeunes lorsque je leur raconte qu’avant #1914, je voyageais en Inde et en Amérique sans avoir de passeport et même n’en avais jamais vu aucun. On montait dans le train et on en descendait sans rien demander, sans qu’on vous demandât rien, on n’avait pas à remplir un seul de ces centaines de papiers qu’on réclame aujourd’hui. Il n’y avait ni permis, ni #visas, ni tracasseries ; ces mêmes #frontières qui, avec leurs douaniers, leur #police, leurs postes de #gendarmerie, sont aujourd’hui transformées en réseau de barbelés en raison de la #méfiance_pathologique de tous envers tous, n’étaient rien d’autre que des lignes symboliques qu’on traversait avec autant d’insouciance que le méridien de Greenwich. C’est seulement après la guerre que le monde se vit bouleversé par le national-socialisme, et le premier phénomène qu’engendra cette épidémie spirituelle de notre siècle fut la #xénophobie : la haine ou du moins la peur de l’autre. On se défendait partout contre l’étranger, partout on l’excluait. Toutes les humiliations qu’autrefois on avait inventées exclusivement contre les criminels, on les infligeait maintenant à tous les voyageurs avant et pendant le voyage. Il fallait se faire photographier de droite et de gauche, de profil et de face, les cheveux coupés assez court pour que l’oreille fût visible, il fallait donner ses empreintes digitales, d’abord le pouce seul, puis les dix doigts, il fallait en plus présenter des certificats : de santé, de vaccination, de police, de bonne vie et mœurs, des recommandations, il fallait pouvoir présenter des invitations et des adresses de parents, il fallait fournir des garanties morales et financières, remplir des formulaires et les signer en trois, quatre exemplaires, et s’il manquait ne fût-ce qu’une feuille de ce tas de paperasses, on était perdu. »

    Stefan Zweig, Le monde d’hier, souvenir d’un européen, Folio-Essais n° 616, p. 530-532.