Persépolis, la crise rendue à l’universel. Par Heiderich Didier

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  • #PERSÉPOLIS, LA #CRISE RENDUE À L’#UNIVERSEL.

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    publié le 16/09/2008
    consulté le 02/06/2018

    Par Didier Heiderich
    Interdit par le régime des mollahs en #Iran et stupidement censuré au Liban où il s’achète sous le manteau pour 2$, le #film_d’animation « Persépolis » de #Marjane_Satrapi perpétue ainsi l’histoire qu’il raconte, celle de l’universalité du comportement des êtres en situation de crise.
    Comment expliquer un tel succès pour un film d’animation et autobiographique qui raconte l’histoire de Marjane, de petite fille à femme, plongée au cœur des crises qui ont secoué la lointaine et étrangère Iran ? Probablement par cette volonté d’universalité voulue par Marjane Satrapi « le dessin, par son côté abstrait, rend le propos universel » déclare-t-elle avant d’ajouter sans ambages « l’image réelle aurait donné un côté film de bougnoules. » En désincarnant les personnages, en évitant soigneusement le pathos de l’horreur, elle nous fait ainsi grâce de nos propres turpitudes : sans image typée, chacun peut reconnaître une part de lui-même dans Persépolis.

    Selon Didier Heiderich, l’universel naît du particulier, du singulier : en racontant ce qui apparaît comme une anecdote, il a pour réel sujet le problème du choix en situation de crise. En effet, malgré les bombardements, un million de morts lors de la guerre Iran-Irak et l’enfermement idéologique imposé par les mollahs, les personnages profitent de chaque espace de liberté ; c’est notamment le cas de la grand-mère de Marjane, personnage attachant et libre qui nous ouvre les yeux sur la conventionnalité de la morale européenne et la banalité de ce que nous traversons (rien n’est grave sinon la mort...). Lorsque Marjane perd sa liberté en s’enfermant dans le souvenir d’une trahison amoureuse, il lui faut paradoxalement retrouver l’Iran pour reconquérir son libre-arbitre : Persépolis nous apprend donc que la liberté ne dépend pas des espaces, mais seulement de notre volonté. Les personnages européens, des punks qui ne connaissent pas directement les contraintes de la guerre, ne savent plus quoi faire de leur liberté et les superficialités dont ils espèrent qu’elles comblent leur ennui ne font que les enfermer : ce ne sont pas le monde ni le destin qui font obstacle à la liberté, mais soi. Le film de Marjane Satrapi est loin d’être moraliste ; il nous apprend cependant qu’il existe une unique limite à la liberté : l’intégrité. Ainsi, Marjane ridiculise l’autorité des mollahs et les gardiens de la morale islamique. Leur moralisme absurde et cruel est illustré par l’exemple suivant : faute de pouvoir tuer une vierge, on la marie de force afin de pouvoir l’exécuter sans commettre un acte « immoral ». Persépolis nous apprend, en définitive, que la situation de crise offre des opportunités grâce auxquelles ont peut en sortir grandi : « on a toujours le choix ! »

    Mon commentaire sur cet article :
    Le film de Satrapi permet une prise de conscience de la possibilité de choisir d’être libre et des opportunités qui s’offrent aux individus, en particulier en temps de crise : l’art n’aide pas le développement de manière directe, mais il transmet un message, autant à ceux qui ont l’opportunité d’agir pour améliorer leur condition qu’à ceux qui doivent se préoccuper de ceux-ci parce qu’ils sont capables de leur apporter une aide. Cependant, je m’interroge sur l’efficacité d’un tel message : non seulement le film a été censuré en Iran et n’est donc, en théorie, accessible qu’à ceux qui ont déjà « passé le pas » et se sont enfuis du pays, mais il évoque en outre la liberté d’agir individuelle et ne met pas réellement en cause une quelconque aide extérieure.