• C’est un peu étonnant, parce que dans Hobsbawm je lis que les bonhommes étaient carrément plus petits qu’aujourd’hui :

      « Humanity was smaller in yet a third respect: Europeans were, on the whole, distinctly shorter and lighter than they are today. To take one illustration from the abundance of statistics about the physique of conscripts on which this generalization is based: in one canton on the Ligurian coast 72 per cent of the recruits in 1792–9 were less than 1.50 metres (5 ft. 2 in.) tall. »

      Extrait de : Eric Hobsbawm, Age of Revolution 1789-1848

    • Il s’agit d’un graphique servant à illustrer l’oral de fin de 3e de ma fille. Son sujet est de démontrer que l’image de la femme à travers l’histoire a été biaisée par le fait que les historiens eux-mêmes projetaient leurs préjugés sur les artefacts qu’ils trouvaient. Ma fille avait été frappée lors de la visite des grottes de Pech Merle par le fait que les conservateurs des grottes avaient totalement dû revoir leur vision de la période préhistorique : ce que l’on prenait pour des empreintes de femmes (parce que femmes = petites) étaient en fait des empreintes d’ado de 11-12 ans, qu’une grande partie des œuvres venaient en fait très probablement de femmes et que ce que l’on pensait jusqu’à très récemment de l’organisation sociale ou de la santé des Cro Magnon était probablement faux.

      Par ailleurs, diverses sources convergent pour dire que le Moyen Âge obscur et rétrograde était à la fois une simplification et une falsification écrite par les vainqueurs. Le Moyen Âge, c’est 1000 ans de civilisation occidentale…

    • L’époque qui nous intéresse et qui est signalée — entre autres — par Silvia Federici dans Caliban et la Sorcière, c’est le Moyen Âge central, appelé aussi temps des cathédrales : une période d’une incroyable prospérité en Europe, caractérisée par une forte résistance au féodalisme et des courants contestataires favorables à une société plus égalitaire, y compris entre les hommes et les femmes.
      Ceux qui ont cherché à mettre en place un nouveau monde ont été taxés d’hérésie et impitoyablement pourchassés et exterminés. Même leurs œuvres et témoignages ont été détruits.
      Reste des monuments qui défient encore le temps et des preuves disparates d’une période d’une prospérité ensuite oubliée pendant des siècles.

      Le graphique est la transposition des données anthropométriques collectées au cours du temps dans les sépultures du secteur de Londres → London Bodies : the Changing Shape of Londoners from Prehistoric Times to the present Days, Muséum de Londres, 1998.

      La taille des corps à Londres au cours des temps

      Tout le monde sait qu’aux États-Unis et en Europe, la taille moyenne de la population a beaucoup augmenté pour les générations récentes, un phénomène généralement attribué à une meilleure alimentation au cours de l’enfance et de l’adolescence. […]

      Ces chiffres [de l’étude du musée de Londres] montrent que les femmes furent en moyenne plus grandes durant la période qui va du Xe au XIIe siècle, toutes autres périodes comprises, même aujourd’hui.
      […]
      Un observateur fait sur ces chiffres le commentaires suivant : « les ossements qui ont été exhumés des tombes en Angleterre de personnes autour de l’an 1000 parlent de personnes solides et en bonne santé […] d’une diète simple et saine qui leur donnait des membres solides ainsi que des dents en excellent état »… [par contre], les archéologues qui ont étudié les derniers siècles du Moyen Âge (les XIVe et XVe siècles) disent qu’ils peuvent presque voir la dévastation de la grande peste menaçante devant la preuve de restes de squelettes de plus en plus fragiles et en mauvaise santé »

      Au cœur de la monnaie, Bernard Lietaer, Albin Michel, 2011.
      #stature #taille #femmes #inégalités #histoire

    • @arno : un fait « amusant » quand j’ai cherché des données sur l’évolution de la taille moyenne au cours du temps → la plupart du temps, les données remontent au XIXe siècle. Alors forcément, étant donné qu’on est dans la pire période possible, tout ce qui suit n’est qu’amélioration. Rappelons que dans le Londres industriel de Dickens, la pollution et la malnutrition faisaient tellement rage dans le milieu ouvrier que les gosses étaient trop malingres pour trimer. Du coup, les manufacturiers allaient « recruter » de solides paysans dans le reste du pays pour faire tourner les machines.

    • @mad_meg Il est amusant de noter que ce que notre Histoire a baptisé Renaissance était en fait une période de sombre déclin… sauf pour la bougeoisie marchande et le capitalisme contre-révolutionnaire, réaction à la chute de la féodalité. La renaissance commence avec la Reconquista espagnole par l’Église catholique, l’expulsion des Juifs et des Arabes, le lancement du plus grand féminicide de tous les temps : la chasse aux sorcières. Du point de vue artistique, on se vautre avec complaisance dans des resucées d’une antiquité rêvée un peu moisie et pompeuse et les sciences pondent surtout la hiérarchisation des êtres humains !
      Youpi !

      Le Moyen Âge central peut être qualifié de Petite Renaissance. Mais comparé à ce qui a suivi…

    • Sympas le cours de ta fille. J’aurais adoré apprendre ca en cours d’histoire !

      Pour le mot Renaissance il me semble liée à l’idée de renaissance de l’antiquité (fantasmé par les bourges & curés) et du coup dans toute sa couillerie fasciste avec l’esclavage, culte des vierges, phallosophes, misogynie hardcore ... Je trouve pas les mots naissance et renaissance si positif que ca surtout si c’est pour parlé de naissance et renaissance du fascisme. Je ne préférè pas traité la période la moins inégalitaire du moyen-age de renaissance même petite. On pourrait dire Moyen-age d’Or pour illustré la prospérité dont les femmes ont bénéficié et l’idée de déclin qui suit avec le haut-moyen-age et la renaissance.

    • J’ai vu passer ton billet initial, tu penses !… Si je n’ai pas commenté, c’est que je n’avais en l’état rien à dire. Si ce n’est une petite montagne de questions préalables. En caricaturant à peine, ton « énoncé » est un pur exercice de projection d’idées préconçues ;-)

      Contrairement à l’image qui nous est renvoyée constamment, le statisticien ne trouve pas son bonheur dans les chiffres. Du moins, pas tant qu’il ne sait pas d’où ils sortent et comment ils ont été obtenus. J’ai donc cherché une source pour ses données, qui en manquent dramatiquement, le sous-titre selon des données du muséum de Londres relevant quasiment de la galéjade : on ne trouve rien de tel, ou en tous cas d’aussi synthétique dans les publications ; il y a donc un gros travail de synthèse et de mise en forme de plusieurs publications. À vérifier dans la référence que tu cites, gros bouquin achetable sur les librairies en ligne…

      En revanche, on trouve pas mal de données sur des lieux variés et des époques qui peuvent être lointaines. J’en ai collectées quelques unes dans le fichier Excel sur gg :drive.
      https://drive.google.com/file/d/1iH8xEoe2JzkkTAn2G5js9g7Zsk8PlA8I/view?usp=sharing

      Les préalables :
      • comment s’assurer de la comparabilité de chiffres concernant des époques distantes de deux millénaires. D’un côté, on a des séries depuis, en gros le milieu ou la fin du XIXè en suivant des protocoles plus ou moins décrits (je pense, p. ex. en France, aux données physiques (pour les garçons !…) issues des mensurations effectuées lors du recensement des classes d’âge pour le service militaire (qui ont d’ailleurs abondamment servi à l’époque pour y trouver une validation de théories… de l’époque, … c’est-à-dire plutôt racistes). De l’autre, on estime une taille à partir d’ossements collectés dans des cimetières ou autres sites archéologiques.
      • tu mentionnes toi-même que dans ce cas, la détermination du sexe est en partie liée à la variable étudiée (grand -> garçon,…)
      • la taille d’un adulte résulte de facteurs dont la plupart sont liés à des éléments sociaux (alimentation, travail physique ou pas (y compris dans l’enfance), résidence urbaine ou rurale, …)
      • comment s’assurer que le dépôt d’ossements ne résulte pas d’un processus biaisé aboutissant à une sélection sur des critères inconnus (fosse commune -> pauvres ou épidémie, tumulus de « nobles », caveau familial, périodes d’ensevelissement surreprésentées, remaniements ultérieurs (cf. les catacombes de Paris)…)
      • enfin quelles sont les tailles des différents échantillons et quelle est la dispersion des observations (écarts-types, p. ex.) ?

      Bon, on peut se dire (pur acte de foi) que si les chiffres ont été mis dans un même graphique, c’est qu’ils ont subi un minimum de prétraitements qui les rendent comparables et commentables.

      Dans ce cadre, le premier traitement que j’en fait est de les représenter sur un nouveau graphique permettant de visualiser l’écart, tout en gardant l’enchaînement historique (il y a 2 dimensions chronologiques, donc il n’y a pas trop de problèmes).