Les Indigènes du Royaume

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  • Comment les Français sont devenus blancs

    "L’amnésie du passé colonial qui a longtemps été de règle en France explique l’agacement de certains devant ce déni du poids de la pensée racialiste - donc de la race - dans l’histoire hexagonale. Dès le XVIIIe siècle en effet, la France étend son empire sur les Antilles, où l’économie de plantation prospère, adossée à la stricte hiérarchisation sociale entre Blancs, Noirs et « mulâtres ». Si la théorie raciale de la supériorité des « Blancs » était établie de longue date dans la pensée française, elle devient alors partie intégrante de la vie politique et sociale française. À la veille de la Révolution et de la Déclaration universelle des droits de l’homme, la France « allait réunir une population disparate et multiraciale, si bien que les problèmes posés par les différences raciales allaient jouer un rôle encore sous-estimé, mais néanmoins réel, dans l’effort de définition de ce que signifiait être français ».

    L’identité fantasmée de la France contemporaine prend donc formellement sa source au cours d’une Révolution française plus ambiguë qu’il n’y paraît. Selon le discours national alors élaboré, que Claude Nicolet nomme l’« idéologie républicaine », tout républicain est citoyen et tous les citoyens appartiennent à la « race française ». La nation est une et indivisible, sans distinction aucune. En son nom se met alors en place une contradiction intenable : la proclamation d’un idéal humaniste, assimilationniste et abolitionniste né de la Révolution, et le développement simultané de la domination coloniale - brièvement interrompue- encouragée au nom de la supériorité des Européens qui, peu à peu, en viennent à se définir comme « blancs ».

    L’historienne Françoise Vergès relève avec pertinence cette contradiction et en fournit une explication : « De très nombreuses études ont été consacrées à ce phénomène d’unification de la nation française autour de principes universalistes, mais peu ont souligné un de ses aspects : la racialisation de la nation française. En effet, un des éléments "attractifs" de cette politique d’assimilation fut d’associer le statut de "Français" à la couleur de peau blanche. Pour que la couleur blanche construise une unité "spontanée" d’intérêt entre des personnes dont les cultures, les idées et les objectifs pouvaient diverger, il fallait qu’une autre couleur agisse » . Mais la France, à la différence notoire des pays scandinaves et allemands ou des États-Unis, ne s’est que tardivement identifiée à une « race blanche ». Une race, certes, mais française.

    Cent soixante-dix ans après la Révolution, le président Charles de Gaulle brossait le portrait de la France. De sa France. Il faisait alors très directement le lien entre les Français et la blancheur :« C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. Sinon, la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. Qu’on ne se raconte pas d’histoires » [cité par Peyrefitte, 1994]. "

    http://bougnoulosophe.blogspot.be/2013/11/comment-les-francais-sont-devenus-blancs.html

    #Race
    #racisme
    #Blanc
    #Privilège

  • La vie d’Adèle : les prolos mangent des pâtes la bouche ouverte... - @grosse_fatigue cause toujours....
    http://grosse.fatigue.free.fr/causetoujours/spip.php?article290

    Quelques exemples : les parents #prolos de la gentille adolescente mangent des nouilles la bouche ouverte, ils font du bruit. Elle-même bavouille un peu. Les pauvres, c’est pas poli, c’est un peu sale. Et puis : LES PAUVRES N’AIMENT PAS LES HUÎTRES.

    C’est mal les connaître. Mon père en raffolait et certains dimanches, j’en cachais une dans mon mouchoir pour mieux la déguster crotte de nez en famille. Ça prouve bien que je m’en souviens.

    Mais surtout, les pauvres ne sont pas sophistiqués. Ils ne comprennent rien à Egon Schiele. Ils ne comprennent rien au vin blanc non plus. En gros : ils aiment les choses concrètes. L’héroïne est un peu con : elle veut devenir institutrice alors que Léa Seydoux est la fille de bobos divorcés qui la laissent s’épanouir en peignant des croûtes pour les exposer un jour dans une galerie internationale à Dunkerque ou à Calais.... Léa Seydoux va jusqu’à traiter sa copine de « trainée » quand elle la trompe avec un mâle à bite. Drôle de vocabulaire. A nouveau, nos deux héroïnes sont filmées en très gros plans, avec de la morve surtout, parce que les enfants de prolos, même quand ça devient instituteur, ça reste sale.

    #distinction

  • « Le peuple » n’existe pas. Ce qui existe ce sont des figures diverses, voire antagoniques du peuple, des figures construites en privilégiant certains modes de rassemblement, certains traits distinctifs, certaines capacités ou incapacités. La notion de populisme construit un peuple caractérisé par l’alliage redoutable d’une capacité - la puissance brute du grand nombre - et d’une incapacité - l’ignorance attribuée à ce même grand nombre. Pour cela, le troisième trait, le racisme, est essentiel. Il s’agit de montrer à des démocrates toujours suspects d’« angélisme », ce qu’est en vérité le peuple profond : une meute habitée par une pulsion primaire de rejet qui vise en même temps les gouvernants qu’elle déclare traîtres, faute de comprendre la complexité des mécanismes politiques, et les étrangers qu’elle redoute par attachement atavique à un cadre de vie menacé par l’évolution démographique, économique et sociale. La notion de populisme remet en scène une image du peuple élaborée à la fin du XIXe siècle par des penseurs comme Hippolyte Taine et Gustave Le Bon, effrayés par la Commune de Paris et la montée du mouvement ouvrier : celle des foules ignorantes impressionnées par les mots sonores des « meneurs » et menées aux violences extrêmes par la circulation de rumeurs incontrôlées et de frayeurs contagieuses."

    [Jacques #Rancière]

    #Populisme
    #Peuple

    http://bougnoulosophe.blogspot.be/2013/10/du-populisme.html

  • "Dans l’histoire des luttes de l’immigration postcoloniale, la référence aux luttes passées et la question de l’héritage politique ont souvent été problématiques. D’un côté, certains mouvements ont toujours revendiqué l’héritage d eluttes passées. Par exemple, lors de l’affaire Djellali Ben Ali (1971), le MTA revendique l’héritage de la révolution algérienne, alors même qu’ils étaient en opposition avec l’Amicale des Algériens en Europe.

    Dans les années 1990 et 2000, une des principales revendications des différents mouvements autonomes de l’immigration est la réappropriation d’une histoire souvent occultée ou méconnue. De l’autre côté, certains militants, conformément à une stratégie d’avant-garde, occultent complètement ou minimisent l’importance des luttes passées, comme certaines associations des années 1980 et associations dequartier créées à la suite des révoltes de 2005. Alors que la « continuité » n’est pas évidente pour tous les acteurs, pourquoi avons-nous pris le parti de mettre en relation toutes ces histoires de luttes ? Le choix a été fait de s’intéresser particulièrement à une population, dont l’histoire politique reste marquée par beaucoup de zones d’ombres, ce qui n’empêche pas de poser le problème de l’héritage et des ruptures entre générations militantes.

    Au lieu de juxtaposer les figures politiques de l’immigration artificiellement, on voudrait conclure en rendant compte des périodes charnières, de transition d’une figure à l’autre...."

    http://bougnoulosophe.blogspot.be/2013/09/histoire-politique-des-immigrations.html

    #Histoire
    #Immigration
    #postcolonie

  • TV5MONDE : Eurabia : quand le mythe passe à l’acte
    http://www.tv5.org/cms/chaine-francophone/info/les-dossiers-de-la-redaction/populisme-europe/p-25212-eurabia-quand-le-mythe-passe-a-l-acte.htm

    Moins d’un an après le procès d’Anders Behring Breivik en Norvège, l’Allemagne a entamé hier lundi 6 mai 2013 l’un des plus grands procès néonazis de l’après-guerre, qui doit juger une série de neuf meurtres racistes. La principale accusée, Beate Zschäpe a été invitée par le terroriste norvégien à se servir de son procès pour mettre en avant ses idéaux politiques. De quels idéaux s’agit-il et sont-ils seulement l’apanage d’une extrême droite radicale ?

    Du mythe d’Eurabia...

    Comme la religion qu’ils fustigent, les "#contre-djihadistes" ont eux aussi leur livre révélé, Eurabia : l’axe euro-arabe. Ils l’ont reçu en 2005 de Gisèle Littman-Orebi, alias "BatYe’or", une chercheuse égyptienne d’origine juive qui habite actuellement en Suisse. Elle y décrit une conspiration qui, depuis les années 1970, lierait les élites européennes et les pays musulmans producteurs de pétrole sur la base d’un échange : "pétrole contre immigrés musulmans".
    "Selon les pires prévisions d’Eurabia, écrit le journaliste Matt Carr dans la revue Race and Class, d’ici la fin du XXIème siècle, la plupart des villes d’Europe seront envahies par des immigrants étrangers arabophones, la plus grande partie du continent vivra conformément à la Charia et la chrétienté aura cessé d’exister (…) Dans le cauchemar d’Eurabia, les églises et les cathédrales seront remplacées par des mosquées et des minarets, l’appel à la prière se répercutera de Paris à Rotterdam en passant par Londres et les restes judéo-chrétiens de l’Europe auront été réduits à de petites enclaves dans un monde de barbus et de femmes voilées par une burqa".

    … A la réalité

    "Moi, je me suis plongé dans les Eurostats pendant six mois. Au maximum, les musulmans représentent 4% de la population de l’Union européenne", constate le sociologue Raphaël Liogier, auteur du Mythe de l’islamisation, essai sur une obsession collective, paru au Seuil en 2012. "En ce qui concerne les prévisions, il est quasiment impossible qu’il y ait un dépassement sur les 20-30 ans à venir. La population musulmane est touchée par l’écrasement démographique et avec un certain effet de retard, ce qui indique que ça va continuer à descendre." Il rappelle qu’"au niveau de l’immigration aujourd’hui, la plus forte progression est celle de l’immigration asiatique” et que des dix pays qui émigrent le plus vers l’Europe "seulement trois sont musulmans".

    En ce qui concerne ses frontières, l’Union Européenne n’a cessé de les renforcer depuis les années 1970. Elle accueille très peu de réfugiés en comparaison avec les Etats-Unis, ou le Canada. En 2011, la Commission européenne indiquait à cet égard que "durant l’année 2010, environ 5000 réfugiés ont été réinstallés dans l’ensemble de l’UE, chiffre à comparer avec les quelques 75 000 réfugiés réinstallés aux Etats-Unis la même année. En fait, les Etats membres de l’UE dans leur totalité acceptent actuellement moins de réfugiés réinstallés que le seul Canada".

    "Oui bien sûr, mais quand même..."

    ....

  • " Muslim Women Against Femen " : un excellent exemple d’#empowerment...

    "Cela fait un certain temps que j’observe les exploits des #Femen et que je suis très dérangée par la manière dont elles s’acquittent de leur « mission ». Parce que les actions des Femen sont aussi contre-productives que préjudiciables aux femmes musulmanes à travers le monde. Pour moi, et pour des centaines de femmes qui ont pris contact avec moi au cours des derniers jours, leurs tactiques font partie de la guerre idéologique qui se joue entre divers éléments néo-coloniaux de l’Ouest et des sociétés islamiques. Leur but n’est pas de nous émanciper de notre esclavage présumé. Il vise plutôt à renforcer l’impérialisme occidental et à assurer le consentement de la poursuite des guerres contre les pays musulmans...."

    http://bougnoulosophe.blogspot.be/2013/04/muslimah-pride.html

    #féminisme
    #islam

    • @bp314, t’es content alors ? Mais ne te méprends pas ! Les femens sont là pour donner des arguments aux anti féministes trop heureux de poursuivre la confusion du terme. Le #féminisme est multiple mais il faut savoir différencier le #combat_politique_pour_la_liberté_des_femmes et le show-business des femens. Cette mise en spectacle n’a pas pour but de faire avancer la cause du féminisme ou la liberté des femmes, relis l’article !

      Leur but n’est pas de nous émanciper de notre esclavage présumé. Il vise plutôt à renforcer l’impérialisme occidental et à assurer le consentement de la poursuite des guerres contre les pays musulmans.

      Et elles n’apparaissent que comme le relais féminisé du patriarcat et d’un occident ultra médiatisé, de surcroit raciste et islamophobe !

      Heureusement que d’autres femmes, féministes, oeuvrent partout pour aider, vraiment, à libérer les victimes des violences et des injustices perpétuées par les dominants et par tout ceux qui ne veulent rien voir, si bien planqués derrière des théories politiques qui ignorent depuis leur création la condition des femmes.
      Tu dis que les féministes, (je corrige le « on »), devraient « se focaliser sur les auteurs des discriminations » et non sur les victimes ? L’un n’empêche pas l’autre, et ce n’est pas non plus antinomique du combat contre le capitalisme. En passant, regarde toi donc dans une glace, tu risques de croiser un de ces « auteurs des discriminations » !

    • Donc @bp314, c’est pas très fairplay de supprimer tes messages quand quelqu’un se donne la peine d’y répondre.

      Donc, tu disais apprécier cet excellent exemple qui illustre ce qui se produit quand on préfère traiter la question de la violence ou des discriminations en se focalisant sur les victimes de ces violences plutôt que sur leurs auteurs ?

    • (je doute d’être parvenu à supprimer deux messages par accident)

      De mon point de vue et pour ce qu’il vaut, les Femen illustrent l’aboutissement de toute logique communautariste, c’est à dire, la récupération. Dont le plus bel exemple en France sont les débats sur la parité à l’assemblée nationale, les conseils d’administration et les plafonds de verre justifiés par les (indéniables) violences faites aux femmes (et aux roms, aux noirs, aux arabes, aux musulmans et aux pauvres en général).

      Effectivement, plutôt que d’attendre du capital de daigner s’aménager pour indemniser (pécuniairement ?) d’indéniables préjudices subis, pourquoi ne pas tout simplement se tourner en direction de leurs auteurs ?

    • @bp314, ça fait beaucoup d’accidents d’ effaçage sur le sujet du féminisme....
      Pour le fait de s’occuper des auteurs de discriminations vis a vis des femmes, tu devrait reconnaitre qu’on s’occupe bien de toi tout de même ici, toi qui lutte energiquement contre l’émancipation des femmes.

    • Effectivement, de mon point de vue du moins, la notion d’amalgame est, à mon humble avis, la formidable antithèse universelle à la volonté d’unification des pauvres contre leurs exploiteurs, j’en conviens. Elle rejoint les rangs du réalisme, de l’évidence (assénée plutôt que ressentie) et de l’argument d’autorité (universitaire, donc bourgeoise).

      De la même manière que la science et la culture sont l’art de compliquer inutilement les choses simples, de diviser les exploités, de renforcer les exploiteurs fédérés par la logique de classe.

      Rassurez-vous : le corollaire de cette thèse est que tout communautarisme se traite par l’indifférence, la dérision et l’ostracisme. Il serait d’ailleurs bien vain de chercher à s’opposer au travail institutionnel d’animation culturelle ou sociale, puisqu’il semble d’expérience condamné à la stérilité.

      Enfin, une remarque : puisque la langue et l’éducation sont les marqueurs sociaux de la bourgeoisie, c’est à l’hostilité que reçoit un discours que s’évalue en tout premier lieu sa cohérence avec l’ambition de progrès social. Then, they fight you, then, you win.

  • De l’#intersectionnalité et de la coalition

    " Envisageons dans cette optique le scandale Clarence Thomas/Anita Hill. Lors des auditions organisées au Sénat pour confirmer la nomination de Clarence Thomas à la Cour suprême, si Anita Hill, qui accusait Thomas de harcèlement sexuel, s’est vue dépossédée de ses arguments, c’est en partie parce qu’elle s’est retrouvée coincée entre les interprétations dominantes du féminisme et de l’antiracisme. Prise entre deux tropes narratifs concurrents - d’un côté le viol, mis en avant par les féministes, de l’autre le lynchage, mis en avant par Thomas et ses partisans -, elle ne pouvait rien dire des dimensions raciale et genrée de sa position. On pourrait présenter ce dilemme comme la conséquence de l’essentialisation de l’« être noir » par l’antiracisme et de l’« être femme » par le féminisme.

    Cela ne nous mène cependant pas assez loin, car le problème n’est pas simplement de nature linguistique ou philosophique. Il est spécifiquement politique : ce qui est dit du genre l’est à partir de l’expérience des bourgeoises blanches ; ce qui est dit de la race l’est à partir de l’expérience des Noirs de sexe masculin. La solution ne passe pas simplement par une défense de la multiplicité des identités ou une remise en cause de l’essentialisme en général. Dans le cas de Hill, par exemple, il aurait au contraire fallu affirmer ces aspects fondamentaux de sa position (ou de sa « localisation ») qui précisément étaient gommés, y compris par ses défenseurs. En d’autres termes, il aurait fallu préciser quelle différence faisait sa différence.

    Si, comme je l’affirme, l’histoire et le contexte déterminent l’utilité de la politique de l’identité, comment comprendre cette politique aujourd’hui, notamment à la lumière de la reconnaissance des multiples dimensions de l’identité ? Plus précisément, qu’entendons-nous lorsque nous avançons que les discours antiracistes occultent les identités de genre de même que les discours féministes occultent les identités de race ? Est-ce que cela signifie que nous ne pouvons pas parler de l’identité ? Ou que tout discours s’y rapportant doit reconnaître que la construction de nos identités passe par l’intersection de dimensions multiples ? Pour commencer à répondre à ces questions, il faut au préalable reconnaître que les groupes identitaires organisés dans lesquels nous nous retrouvons sont en fait des coalitions, ou à tout le moins des coalitions potentielles qui attendent de se former.

    Dans le contexte de l’antiracisme, ce n’est pas parce que nous reconnaissons que la politique de l’identité telle qu’elle est couramment comprise marginalise les expériences intersectionnelles des femmes de couleur que nous devons pour autant renoncer à essayer de nous organiser en tant que communautés de couleur. L’intersectionnalité nous offre au contraire une base pour reconceptualiser la race comme une coalition entre hommes et femmes de couleur. Dans le cas du viol, par exemple, elle nous permet d’expliquer pourquoi les femmes de couleur doivent laisser tomber l’argument général qui, au nom des intérêts de la race, recommande d’éviter tout affrontement sur la question du viol intraracial. Elle nous donne aussi les moyens de réfléchir à d’autres formes de marginalisation. Ainsi la race peut-elle être au départ d’une coalition d’hétérosexuels et d’homosexuels de couleur, et servir de la sorte de point d’appui à une critique des églises et des institutions culturelles qui reproduisent l’hétérosexisme."

    (#Kimberlé Williams #Crenshaw)

    http://bougnoulosophe.blogspot.be/2013/02/de-lintersectionnalite.html

    #féminisme
    #Minorité
    #Racisme
    #Black_feminism

  • http://pixhost.me/avaxhome/a7/0f/000e0fa7.jpeg

    « Cette chasse nouvelle aux sexualités périphériques entraîne une incorporation des perversions et une spécification nouvelle des individus. La sodomie - celle des anciens droits, civil ou canonique - était un type d’actes interdits ; leur auteur n’en était que le sujet juridique. L’homosexuel du XIXe siècle est devenu un personnage : un passé, une histoire et une enfance, un caractère, une forme de vie ; une morphologie aussi, avec une anatomie indiscrète et peut-être une physiologie mystérieuse. Rien de ce qu’il est au total n’échappe à sa sexualité. Partout en lui, elle est présente : sous-jacente à toutes ses conduites parce qu’elle en est le principe insidieux et indéfiniment actif ; inscrite sans pudeur sur son visage et sur son corps parce qu’elle est un secret qui se trahit toujours. Elle lui est consubstantielle, moins comme un péché d’habitude que comme une nature singulière. Il ne faut pas oublier que la catégorie psychologique, psychiatrique, médicale de l’homosexualité s’est constituée du jour où on l’a caractérisée – le fameux article de Westphal en 1870, sur les « sensations sexuelles contraires », peut valoir comme date de naissance - moins par un type de relations sexuelles que par une certaine qualité de la sensibilité sexuelle, une certaine manière d’intervertir en soi-même le masculin et le féminin. L’homosexualité est apparue comme une des figures de la sexualité lorsqu’elle a été rabattue de la pratique de la sodomie sur une sorte d’androgynie intérieure, un hermaphrodisme de l’âme. Le sodomite était un relaps, l’homosexuel est maintenant une espèce. »

    (Michel #Foucault, Histoire de la sexualité, , Tome 1 : la volonté de savoir)

    http://www.revue-ganymede.fr/pour-une-strategie-nouvelle-reflexion-sur-les-termes-homosexualite-ho

  • Le Garçon arabe : le français impossible

    "Alter ego en négativité de la fille voilée, son acolyte si son allié objectif, « le garçon arabe »a fait une irruption d’autant plus puissante sur la scène et symbolique qu’il condense lui aussi dans son corps les questions de l’ethnicité et du genre. D’abord, il est un revenant du passé colonial. Il incarne l’un des avatars de l’indigène devenu immigré puis musulman. Ensuite, il est la cause du voilement des filles qui, sinon, seraient menacées d’être violées par ce « sauvageon ». Le garçon arabe revient de loin. Il resurgit d’une mémoire enfouie, celle de la colonie et de l’Orient où les hommes occidentaux allaient à la rencontre des éphèbes de la rive sud de la Méditerranée. Il suffit de lire la littérature de Gide à Genet en passant par Nerval ou les récits de Flaubert pour se convaincre du caractère hautement valorisé des émois partagés ou imposés à des garçons arabes.

    L’émoi qui se lit à longueur de colonne aujourd’hui en France et construit le stéréotype du « garçon arabe » n’est certes pas de même nature ; il en est même l’exacte inverse. Il ne s’agit plus de jouissance, mais d’horreur face à des actes qualifiés de violents, sauvages, barbares et dont les auteurs ne peuvent être que des jeunes hommes incivilisés et incivilisables. Le traitement médiatique des « tournantes », tentative pour attribuer les viols collectifs aux seuls fils d’indigènes, aussi bien arabes que noirs, puis celui des « violences urbaines » de l’automne 2005, scandent le thème d’une altérité de l’intérieur, indésirable.

    Pour comprendre le renversement qui s’opère entre la figure désirable du garçon arabe des colonies et celle détestable de l’Arabe des banlieues françaises, il faut faire un détour par un passage du Voyage au bout de la nuit de Céline. Les Arabes y sont les figurants invertis et vicieux d’une scène où un cafetier se plaint de leur présence car, contrairement aux Polonais, ils ne boivent pas, pendant que sa serveuse, elle, entame ses heures supplémentaires en partant avec deux d’entre eux, assurée qu’ils sauront payer sa docilité. La différence - de taille - entre les récits exotiques et l’atmosphère étouffante du Voyage est que les premiers se passent dans un ailleurs lumineux au point d’être parfois aveuglant, pendant que le second s’enlise dans une périphérie improbable et poisseuse, parfaite préfiguration des banlieues lépreuses des descendants des deux Arabes qui se tiennent dans un coin, presque invisibles... " (#Nacira_Guénif_Souilamas)

    http://bougnoulosophe.blogspot.be/2013/02/le-garcon-arabe-le-francais-impossible.html

  • L’islam noir

    « Les étapes historiques de l’islamisation de l’Afrique noire sont connues dans leurs grandes lignes. L’Islam, par rapport à la frange érythréenne, a attaqué l’Afrique plus obliquement, non plus de l’ouest à l’est, mais du nord-ouest au sud-est. Dans l’Afrique du Nord, par la conversion des Coptes et des Berbères, du VIIe siècle au XIe siècle ; dans la zone centrale, en bordure de la grande forêt, par la conversion des Peuls, des Mandé et des Haoussa, du XIIIe au XIXe siècle, sans réussir à pénétrer très au-delà de la lisière forestière : par les trois grandes voies d’accès à l’Afrique soudanaise – le tariq Lamtuni atlantique, la route centrale de Taddmekka et l’axe Fezzan-Kawar.

    Dans la zone littorale orientale (érythréenne), après l’islamisation de la « Côte des Zanj » (dès le IXe siècle) et de Kilwa (Xe siècle), il y a eu lente conquête, du XIIe au XVIe siècle, des contreforts ouest et est de l’Abyssinie chrétienne avec, au-delà, conversion des Galla et une islamisation plus poussée de la Côte, depuis les Somalis jusqu’à Zanzibar, avec des îlots aux Comores et a Madagascar... »

    http://bougnoulosophe.blogspot.be/2009/08/lislam-noir.html

  • Mort lente : punition par les détails

    "(...) Bref, les Palestiniens doivent périr de mort lente pour qu’Israël puisse avoir la sécurité qui est à portée de main mais ne peut se concrétiser en raison de l’ « insécurité » proprement israélienne. Et le monde entier doit sympathiser, tandis que nul n’entend ni ne garde en mémoire les pleurs des orphelins, des vieilles malades, des villages en deuil et des prisonniers palestiniens torturés. Allons, va-t-on nous dire, ces horreurs ont surement un objectif plus large que la pure cruauté sadique : les « deux parties » sont engagées dans un « cycle de violence » qu’il faut bien briser à un moment, quelque part. De temps à autre, arrêtons et répliquons avec indignation : il n’y a qu’une seule partie dotée d’une armée et d’un pays ; l’autre est une population dépossédée, sans Etat, faite de gens sans droits ni moyens immédiats de les faire respecter. La langue de la souffrance et de la vie quotidienne concrète a été kidnappée, ou pervertie au point qu’elle en est, je crois, devenue inutilisable, sauf en tant que pure fiction à déployer comme un écran derrière lequel on continue à tuer et à imposer d’atroces tortures – lentes, minutieuses, inexorables. Telle est la vérité de ce que subissent les Palestiniens. Mais la politique israélienne finira de toute manière par échouer." (#Edward_Saïd) #Gaza #Palestine

    http://bougnoulosophe.blogspot.be/2012/11/mort-lente-punition-par-les-details.html

  • « Les Nègres ! [....] je n’aurai jamais du employer un tel terme. Comment essayer de définir en quelques phrases les désirs, les opinions et les qualités de quinze millions d’individus tous différents les uns des autres par leur aspect physique, leur mentalité, leur caractère, leur âme ! » L’expression « les Nègres », prise comme un collectif, lui paraissait obscène. »

    Le marronnage idéologique et solitaire contenu dans le roman n’est sans doute pas étranger à la stupeur des critiques. A mesure que Lee Gordon, l’organisateur syndical, reconnaissait son incapacité à représenter, comprendre ou résumer ses semblables, c’est l’image des noirs comme groupe homogène que Himes brûlait. Il jetait au feu les images d’Épinal au profit de l’individualité noire. Il ruinait les espoirs des futurs bergers en proclamant qu’aucun parti, aucun groupe politique ne serait le réceptacle naturel des desideratas des noir-e-s : « Suppose que les nègres préfèrent s’efforcer de devenir capitalistes. » dira Lee, mi-provocateur, mi-sincère.

    Malgré des aliénations évidentes et un potentiel de soumission énorme, sa quête de dignité fait de Lee une figure de nègre incontrôlable ; pas souvent glorieux mais définitivement en marronnage. Or l’embauche de Lee comme organisateur syndical est sous-tendue par la prophétie incantatoire qui veut que les noir-e-s, en tant que sous-classe particulièrement exploitée de la classe ouvrière, doivent y jouer un rôle d’avant-garde. Lee doit donc leur montrer la voie :

    « ‘Lee, enfonce-toi bien dans la tête que le sort du prolétariat mondial dépend de toi dès aujourd’hui. En effet, à la fin de cette guerre, il calquera son attitude sur celle des ouvriers de chez nous ; les ouvriers américains suivront l’exemple de leurs camarades californiens ; ces derniers seront plus ou moins attachés à leurs syndicats selon que nous réussirons ou non à organiser les travailleurs de la Comstock.’
    Lee faillit éclater de rire. »

    S’il est évidemment problématique que les organisations progressistes restent majoritairement blanches, Himes montre que chercher à recruter « les noirs » comme une troupe par le biais de représentant-e-s noir-e-s l’est tout autant ; Gordon ou son double maléfique Luther Mc Gregor ont trop conscience qu’on les utilise pour se laisser dissoudre, intégrer. Au fond, nous dit aussi Himes, une organisation progressiste qui reproduit naturellement en ses rangs les mêmes exclusions que le reste de la société… n’est pas vraiment progressiste. Pourquoi Lee inviterait-il alors ses sœurs et frères dans cette galère ?

    Encore une fois certaines questions résonnent d’actualité :

    « Faut-il vraiment que nous reconnaissions nos amis ? S’ils étaient vraiment nos amis, ils n’auraient pas besoin de nous le dire. »

    http://bougnoulosophe.blogspot.be/2012/08/a-propos-de-la-croisade-de-lee-gordon.html