• Le sexe du talent
    Sur le talent indéniable de Polanski et le déni de talent fait à Adèle Haenel.


    C’est une réflexion qui m’est venu de la discutions sur le texte de Despentes suite au César du meilleur réalisateur donné à Polanski.
    https://seenthis.net/messages/828405#message828807
    Un texte féministe mentionne que le talent de Polanski est indéniable, et ca m’a fait pensé à pas mal de choses.

    Pour documenté le déni fait au talent d’Adèle Haenel :
    https://sandrine70.wordpress.com/2020/03/01/apres-les-cesar-la-guerre-des-sexes-naura-pas-lieu

    Que Portrait de la jeune fille en feu ait été volontairement boudé, on ne peut finalement guère s’en étonner. Car les César ne se sont jamais vraiment intéressés au cinéma en tant qu’art, plus à son industrie. On regrette juste que parce que c’est un film exigeant, mais aussi parce que c’est un film subversif (montrer l’amour entre femmes et dans l’égalité, c’est bien plus subversif que céder aux sirènes du regard pornographique comme dans « la vie d’Adèle »), il ne puisse être accessible au-delà d’un nombre de personnes qui reste trop restreint.

    Comme je part en hors sujet, je réunis les infos ici.

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    Sur le texte de Lise B pointé par @vanderling
    https://lisefeeministe.wordpress.com/2020/03/02/les-cesar-2020-consacrent-lextraordinaire-impunite-de-roma

    « Les amis de Polanski » nous disent, entre autres, qu’il n’est pas un justiciable ordinaire car c’est un auteur accompli, un grand artiste, créateur d’une œuvre sublime. On peut tout d’abord relever un lien logique suspect entre son talent (qui est indéniable) et le rapport de ce dernier avec la justice criminelle. A écouter ces gens-là, ce talent aurait pour conséquence qu’il serait hors de question de porter un quelconque jugement sur sa consécration ni qu’il perde une journée de plus de sa vie en prison. Mais qui décide de cette utilité sociale extra-ordinaire ?

    Prenons un exemple particulièrement saillant en ce moment : en plein mois de février, quand nous avons froid et que notre chaudière tombe en panne, qui peut se passer d’un bon plombier-chauffagiste ? Nous serions sûrement très fâchées que notre excellent chauffagiste, lui aussi nommé Roman Polanski, aille en prison pour le viol d’une jeune fille de 13 ans précisément en plein hiver, mais la loi est ainsi faite en démocratie que même les professionnels exceptionnels et indispensables sont comme tous les autres citoyens, passibles des mêmes peines pour les mêmes crimes.

    Personne ne parle du talent perdu de ces 12 victimes de Polanski. Si Polanski avait été arrêté pour les 12 viols qu’il a commis, ces films n’auraient pas été fait et on ne s’en serait pas plus mal sorti. Mais le talent (qui est indéniable) de Polanski c’est un talent qui compte car on ne dénie pas le talent des phallopores qu’ils soient cis ou femmes-trans. Le talent qui ne compte pas c’est celui des femmes cis et des hommes-trans, car personne ne parle du talent perdu de ces 12 femmes (et peut être plus) qui s’est peut être perdu à cause de Polanski. Ca me fait pensé à la sœur de Shakespeare dont parle Virginia Woolf. Qui pleur le talent perdu de toutes ces filles et femmes que les hommes détruisent à coup de bite ? Combien de génie au féminin avons nous perdus à cause des violences masculines ? aucune en fait car contrairement au talent de Polanski qui est INDÉNIABLE, le talent des femmes cis et des hommes-trans est toujours DÉNIABLE. Les Césars l’ont montré très clairement à Adèle Haenel et illes le montrent jours après jours aux femmes, d’Alice Guy à Céline Sciamma.

    Il y a aussi cet exemple du talent du plombier chauffagiste ou du boulanger qui serait non reconnu au prétexte qu’il violerait. Ca me fait pensé que pour le talent d’une boulangère ou d’une plombière-chauffagiste on ne se pose même pas la question. Elle n’aura pas besoin de commettre des crimes pour se voire dénier son talent. Il suffit qu’elle ne sois pas belle, qu’elle ne sois pas mère, qu’elle ne sois pas jeune, et son « talent » de boulangère-plombière,chauffagiste ne vaudra pas tripette.
    #déni #talent

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    Un texte féministe sur l’age des femmes et des hommes.
    Je met ce passage en avant, il montre la dénégation des talents des femmes et leur réduction à un objet à visé décorative.

    Dans de nombreuses industries, en tout cas, l’invisibilisation des femmes de plus de 50 ans demeure quasi-systématique. Exemple classique : les médias, et plus particulièrement la télévision. Où sont en effet les équivalents féminins de Michel Drucker, Jean-Pierre Pernaut, Jean-Jacques Bourdin ? (j’aurais pu citer Claire Chazal, si elle ne s’était pas fait évincer par TF1 à l’âge canonique de 58 ans…) Cantonnées à la météo ou condamnées à jouer les chroniqueuses, les femmes dites « mûres » se font discrètes sur le petit écran.

    La réalité n’est-elle pas qu’on les écarte de la scène parce qu’elles portent moins bien la jupe pailletée et le décolleté plongeant qu’une femme de 30 ans ? Parce que le désir qu’elles provoquent est la raison première de leur présence à l’écran, avant même leurs compétences de journaliste et/ou présentatrice ? Parce que les décideurs des chaînes de télévision sont des hommes (de plus de… 50 ans), qui procèdent avant tout en fonction de leurs fantasmes ?

    Au cinéma, la situation est encore plus critique. Les jeunes actrices sont fétichisées, portées aux nues entre 20 et 25 ans, avant de laisser la place à leurs plus jeunes sœurs. Le cimetière du cinéma est plein de ces jeunes espoirs féminins ayant trop tôt disparu, abruptement remplacées par de nouvelles sensations plus jeunes, plus lisses et plus aptes à flatter l’implacable regard masculin.

    Quant aux femmes plus âgées, elles se font rares sur le grand écran. Sur l’ensemble des films français de 2015, seuls 8 % des rôles ont été attribués à des comédiennes de plus de 50 ans. En 2016, c’était 6 %.

    https://egalitaria.fr/2020/02/28/quel-est-le-probleme-avec-lage-des-femmes

    Je vais voir si je trouve la moyenne d’age des meilleur interprètes féminines pour les César, j’ai comme l’impression que leur talents sera en lien avec leur jeunesse.
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    Toujours sur le talent au féminin, une campagne féministe :
    « Fières de nos talents »

    En avant-première du 8 mars 2020, sept associations* et les Éditions iXe lancent la campagne FIÈRES DE NOS TALENTS ET DES MOTS QUI LES DISENT ! Car, au féminin, les noms qui désignent les activités longtemps monopolisées par les hommes continuent d’être mal aimés, ou distordus pour ressembler encore et toujours à des noms masculins .

    Il s’agit d’une carte postale que chaque groupe va diffuser dans ses réseaux, qu’on peut se procurer auprès des Éditions iXe (par 100 exemplaires minimum, au prix de 0,10 € la carte postale) pour les distribuer gratuitement ou les vendre, et dont le visuel est libre de droits : il peut circuler sur les réseaux sociaux.

    Cette campagne fait suite à l’action des diplômées en doctorat de mathématiques de l’Université Lyon 1, qui ont souhaité voir écrit le mot « doctoresse » sur le procès-verbal de leur soutenance et sur leur diplôme, et non celui de « docteur ». Or il s’avère que cette inscription n’est qu’une vieille habitude du temps où les femmes n’étaient pas admises dans les universités. De fait, aucun diplôme ne devrait présenter de titre (ni au féminin, ni au masculin), mais seulement le nom du diplôme lui-même (licence, master, doctorat…).

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    Ca me fait pensé aussi à l’expression Ténor du Barreau, qui ne s’accorde pas au féminin dans une profession ou il y a 50% d’écart de revenus entre les femmes et les hommes.
    Cf : https://seenthis.net/messages/748347

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    Il y a des salons "Talents de femmes" un peu partout en France, les affiches valent leur poids en magazine Jeune et jolie !

    • Un exemple frappant de la différence entre le talent des uns et celui des unes.
      Source ; https://seenthis.net/messages/828828

      Citation du touit d’Olivier Carbone, directeur de casting :

      « Vu mes sources Haenel, tu vas avoir une bonne surprise très prochainement avec une bonne omerta carrière morte bien méritée qui te pend au nez ! »

      « Haenel tu es minuscule par rapport au talent de Roman ! Tu es qui pour avoir le melon et la raconter comme ça face à un monstre vivant ! Tu fous la gerbe »

      Polanski mérite un césar pour les 12 viols qu’il a commis. Il a d’ailleur été nominé 12 fois. Il en a le droit car c’est un monstre sacré. Adèle Haenel mérite l’omerta pour ne pas avoir respecté l’omerta. Elle n’a pas fait la potiche. Et elle a gâcher la fête à neuneud du cinéma bankable. Le Boys club des cocaïnomanes lui promet le châtiment ultime, le Damnatio memoriae et vu ce qu’a voté la communauté française du cinéma aux césar il y a de sérieuses raison de croire qu’une armé de biteux va se déchainé sur elle.

      #grand_homme #boys_club #omerta #backlash #mérite #violences_masculine #violences_économique #damnatio_memoriae

    • Une citation de Lambert Wilson qui me semble assez parlante niveau grandeur masculine et petitesse féminine. Un grand qui pleur sur le crime de lèse-magesté dans une reprise des meilleurs gags de la folie des grandeurs.

      « Et en plus, qu’est-ce qu’on va retenir de la vie de ces gens par rapport à l’ énormité du mythe de Polanski ? Qui sont ces gens ? Ils sont minuscules »

      https://www.ouest-france.fr/culture/polanski-terrorisme-apres-les-cesar-lambert-wilson-denonce-un-lynchage-
      #grand_homme et #petite_femme

    • Pour une critique de l’art contemporain : questions de méthode
      https://blogs.mediapart.fr/antoineidier/blog/060420/pour-une-critique-de-l-art-contemporain-questions-de-methode

      Le champ de l’art contemporain connaît depuis quelques temps un regain de politisation et de contestation interne bienvenu, dans un espace habituellement pauvre en dissensus et en confrontation. Si ce n’est que le diagnostic global, en des termes purement économiques – une dénonciation du « marché », du « capitalisme », de « l’art et l’argent » ou d’une « entreprise culture » –, fait fausse route.

      Je pense notamment à plusieurs ouvrages parus depuis 2017, à diverses publications, ainsi qu’à des mobilisations majeures qui ont eu lieu ces derniers mois – notamment contre la réforme des retraites, autour du mouvement « L’art en grève », par des interventions sur la rémunération ou les conditions de travail, etc. Il n’y a évidemment aucun doute quant à l’importance et la nécessité de ces mobilisations, et quant à l’importance et la nécessité de les soutenir, en particulier dans un secteur où il y a habituellement peu de mobilisations collectives. Il y a même urgence à se préoccuper de la situation économique du champ de l’art : pour nombre de ses acteurs, en premier lieu les artistes, une préoccupation quotidienne est de réussir à payer leur loyer, à se nourrir et à pourvoir à des besoins immédiats. La question a encore plus d’acuité en pleine crise du Covid19 qui prive les indépendants de revenus sans possibilité de compensation.

      Mais il s’agit aussi de formuler une critique « de gauche » et d’adresser des questions aux mouvements dont ces mobilisations sont parties prenantes. Pour le dire simplement : c’est faire erreur – et se mentir collectivement – que de prendre comme point de départ l’hypothèse selon laquelle la situation actuelle du champ de l’art s’explique par sa soumission à l’argent, au marché et au capitalisme, et que cette soumission détermine toutes les conditions de possibilité à l’intérieur du champ.

      Ces derniers mois, j’ai parfois été très étonné de voir des individus particulièrement mobilisés alors que, par ailleurs, leur travail artistique est très conforme aux attentes dominantes du champ et très peu politisé – pour le dire rapidement, c’est un travail « formel » ou « formaliste », avec un discours et des considérations très esthétiques –, une forme typique d’habitus clivé comme le dit Geoffroy de Lagasnerie dans son intervention au Conservatoire de Paris (1). Comme s’ils opéraient une dichotomie très nette entre un engagement politique et une production artistique. Et comme si leur critique de l’art pouvait laisser de côté leur propre travail et leurs propres engagements esthétiques.

      À limite, il sera aisé de communier contre le marché et les fondations avec quelqu’un avec lequel on n’est artistiquement en accord sur rien, voire dont on pense le travail foncièrement réactionnaire. Dans les écoles d’art, pourtant souvent traversées par de vives tensions et de vrais désaccords esthétiques, il y a souvent un unanimisme suspect pour bannir tout enseignement des mécanismes économiques et du marché – quand bien même on pourrait penser que maîtriser les catégories conceptuelles de l’économie permet aussi d’en faire une critique plus efficace et d’en subvertir les dispositifs, et que tous les étudiants ne sont pas égaux dans la maîtrise de ces dispositions.

      En outre, à gauche de l’art, on discute bien peu d’esthétique, et des valeurs esthétiques dominantes. C’est aussi qu’est évacuée toute discussion symbolique. On le sait, un des principes de base de la valeur artistique (la valeur d’un travail artistique, d’une œuvre d’art, du nom d’un artiste) est sa double valeur, tant « symbolique » – c’est-à-dire que l’art est reconnu comme tel, et qu’une contribution est reconnue comme importante, contemporaine, en résonance avec les préoccupations d’une époque, légitimée aux yeux des acteurs du champ, etc. –, qu’« économique » – c’est-à-dire sa valeur sur le marché, son évaluation monétaire, sa cote.

      C’est un problème ancien, notamment investi par la sociologie de la culture élaborée par Pierre Bourdieu : une critique qui se soucie principalement du marché (oubliant, par ailleurs, que « le marché » n’existe pas : il y a des marchés et des acteurs économiques très différents) ou des mécanismes économiques laisse totalement de côté le symbolique et la légitimité artistiques. Elle ne se demande pas : qui produit les artistes et les acteurs du champ de l’art ? Quelles sont les valeurs artistiques dominantes, quel est l’art légitime, quel type d’art est produit, montré, valorisé par les institutions du champ (centres d’art, musées, galeries, etc.) ? Où est le pouvoir qui détermine quel est l’art d’aujourd’hui et qu’est-ce que ce pouvoir consacre ? La critique du champ de l’art doit aussi et avant tout prendre en compte le symbolique et la production de la légitimité.

      Bien sûr, il ne fait aucun doute que l’action des fondations – ou plutôt de certaines fondations – pose de graves problèmes. Notamment du fait d’un déplacement et d’une concentration du pouvoir dans les mains de quelques acteurs et d’une perte d’autonomie de l’artistique par rapport à l’économique. La Fondation Louis Vuitton en est un très bon exemple : elle est devenue si puissante qu’elle peut obtenir ce qu’elle veut, par exemple, de la part de musées dépendants du mécénat, des prêts de toiles précieuses et d’ordinaire rarement prêtées – comme, en 2015, Le Cri que le Musée Munch d’Oslo refuse de faire voyager depuis le début des années 2002 –, ou l’élaboration d’un protocole diplomatique permettant de faire venir la collection Chtchoukine en 2016, objet d’un conflit avec des héritiers du collectionneurs (3).

      Mais, monstre économique, la Fondation est aussi un poids lourd symbolique : il est indéniable que, sur des critères proprement esthétiques et artistiques, il s’y passe des choses importantes et reconnues ; et c’est notamment une des forces de la fondation d’avoir constitué son équipe actuelle en faisant venir des personnalités consacrées et à leur tour consacrantes (en l’occurrence, les anciennes équipes du Musée d’art moderne de la Ville de Paris).

      Les lieux de pouvoir

      Il ne faut pas se leurrer non plus : l’argent du mécénat pose lui aussi de nombreux problèmes. D’une part, son poids accru, la réduction des financements publics et l’obligation de trouver de l’argent ailleurs (« il faut développer les ressources propres », dit-on de manière euphémisée) créent de fait une perte d’autonomie et une dépendance. D’autre part, comme la Cour des comptes le soulignait très clairement en 2018 (et, plus tard, le scandale de l’incendie de Notre-Dame), le principe de défiscalisation du mécénat conduit à ce que l’argent public sert à faire des bénéfices privés et est capté par quelques très grands mécènes.

      Mais, à mal localiser le pouvoir, on en situe mal la critique. Le pouvoir n’est pas exclusivement à la frontière entre le seizième arrondissement de Paris et Neuilly. Il est aussi en plein cœur de la capitale : le Centre Pompidou, institution publique, est aujourd’hui un des lieux les plus puissants de l’art français.

      Il est frappant de voir que le champ de l’art est si peu porté à se demander pourquoi un artiste ou un travail artistique existe et se voit accorder de l’intérêt : non pas parce que cet artiste ou son travail est doté d’une force esthétique en soi, mais parce que les autres – en l’occurrence ceux qui ont le pouvoir de décider de cela – le reconnaissent comme ayant une force esthétique. Je pense souvent à cette formule de Michel Journiac : « Greco a disparu pendant deux siècles ; [Maurice] Barrès l’a fait ressusciter. (4) »

      Or, précisément, le Centre Pompidou est un des lieux majeurs de la consécration. Dans un marché symbolique qui fonctionne par accumulation de la valeur (en schématisant : pour un artiste, quelques pièces exposées dans des petits centres d’art rendent alors possible l’achat d’une œuvre par un Fonds régional d’art contemporain, achat qui justifie alors une exposition dans un musée important en région, laquelle peut justifier l’achat d’une pièce par le Fonds national d’art contemporain, etc.), au sommet de la pyramide, quelques lieux dont le Centre Pompidou donnent le la de la raison artistique. Quand un artiste a une monographie à Beaubourg, c’est parce qu’il est un grand artiste… mais il est aussi un grand artiste parce qu’il a eu une monographie à Beaubourg. (Ce qui donne lieu à des règles tacites : un artiste qui a une exposition solo dans une grande institution parisienne sait qu’il n’aura pas tout de suite d’exposition à Beaubourg ; donc celui qui attend Beaubourg sait qu’il ne doit pas accepter une grande exposition monographique ailleurs dans la capitale.)

      Le Centre Pompidou est aussi une puissance instance de consécration pour le public, y compris le plus éloigné du cœur du champ, du fait de sa force de frappe en nombre de visiteurs. Là où, en des étapes antérieures, tel FRAC ou tel musée départemental, reconnus pour le goût sûr de ceux qui y officient mais avec un public moindre, ont plutôt un effet prescripteur pour le cœur du champ (les « professionnels »), Beaubourg touche largement (le « grand public » – en tout cas, le grand public suffisamment doté socialement pour mettre les pieds à Beaubourg, ce qui est bien sûr très loin du grand public), en tant que lieu au puissant pouvoir de prescription.

      Quand je participais au jury d’admission de l’école d’arts de Paris-Cergy, où un nombre important de candidats non-parisiens (et parfois très éloignés de Paris), de 18-20 ans, se présentaient, nous leur demandions souvent : « quelle exposition marquante avez-vous vu récemment ? » « quel artiste vous a touché ? ». Le plus souvent, la réponse était une des grosses expoitions parisiennes de Beaubourg ou du Palais de Tokyo. La question, en fait, est stupide : par un effet de l’examen, la réponse est rarement spontanée, mais celle qui apparaît comme attendue (elle ne dit pas grand-chose des goûts de la personne qui répond, mais plutôt des attentes qu’il perçoit chez ses interlocuteurs – des profs d’une grande école parisienne). Mais, en discutant avec eux, nous nous apercevions aussi qu’ils avaient vu l’exposition la veille : du fait de la centralisation culturelle, profitant du séjour à Paris, ils allaient voir quelques unes des expos « importantes » du moment – Beaubourg ou le Palais de Tokyo étaient un des points de passage obligés. C’est ainsi que se forme un large « goût » artistique.

      Le problème de Beaubourg, ce n’est alors pas qu’il est soumis au marché, mais que l’esthétique qu’il promeut est largement discutable. Où sont les expositions des artistes femmes ? Le ratio, pour les grandes expositions monographiques, est actuellement de quatre pour une : en 2019, Vasalery, Bernard Frize, Francis Bacon, Christian Boltanski… et Dora Maar ; en 2018 : César, David Goldblatt, Chagall/Lissitzky/Malevitch, Franz West… et Sheila Hicks (sans même rentrer dans le détail des expositions thématiques collectives). Où sont les artistes non-blancs ? Quelle est la place accordée aux questions politiques, aux mouvements sociaux, au féminisme, à la sexualité, à l’antiracisme, au postcolonialisme (5) ? Il faudrait aussi analyser les hiérarchies internes et la répartition des espaces : quand une très belle exposition a lieu sur l’histoire de la photographie sociale engagée (mais, d’ailleurs, sur l’histoire, pas sur le présent de la photographie engagée – « Photographie, arme de classe », 2018-2019), c’est au sous-sol, dans un espace réduit, gratuit, etc. (c’est-à-dire l’exposition qu’on visite « en plus », rapidement, fatigué de la grosse exposition payante que l’on vient de voir).

      Qui en est responsable ? Ce ne sont pas les galeries ou les fondations, mais bien la présidence et la direction, les conservateurs qui élaborent le programme, la conception qu’ils se font de ce que le Centre doit exposer… mais aussi, plus fondamentalement, toute l’histoire qui a produit comme artistes et art consacrés ceux qui sont montrés. Beaubourg, en tant qu’ultime étage de la pyramide, condense à la fois l’histoire présente, passée et future du champ de l’art : pour être à la hauteur de sa réputation en même temps qu’il s’agit de la conserver, Beaubourg ne peut montrer que des travaux ou des artistes que les étages juste en-dessous ont suffisamment reconnus comme légitimes. Une expo à Beaubourg met à la fois en jeu Beaubourg lui-même, mais aussi tous les échelons intermédiaires et antérieurs de la consécration qui rendent possible l’exposition à Beaubourg. Et la dépolitisation, l’esthétique esthétisante, le formalisme qui globalement caractérisent Beaubourg, sont au fond les symptômes des tendances dominantes de l’art français.

      Prenons un autre lieu de production de capital symbolique : la Biennale de Venise, à la consécration tant internationale (être exposé à la Biennale, c’est intégrer un certain niveau de l’art international) que nationale (pour l’artiste choisi qui « représente » la France). Or la programmation du Pavillon Français est une pure décision de l’autorité publique (Ministère de la culture et Ministère des affaires étrangères), selon un processus plus ou moins opaque, qui varie selon les années, mais qui a associé, pour les derniers choix, un comité de sélection composé de personnalités des plus légitimes et des plus reconnues du champ, comité dans lequel tant les institutions publiques que le corps des conservateurs du patrimoine, fonctionnaires de la culture, étaient loin d’être sous-représentés. Or, les choix des artistes ces dernières années sont très conformes aux attentes dominantes du champ de l’art français, et aux choix opérés par les institutions publiques : il suffit de regarder même rapidement les CV des artistes retenus pour les trois dernières biennales pour voir qu’ils sont passés par certain nombre de lieux publics, lesquels ont concouru à légitimer ces artistes selon une forme de cursus honorum des prestiges. Quant à la grande exposition de la Biennale, cible de nombreuses critiques, elle était confiée en 2017 à une conservatrice en chef du Musée national d’art moderne du Centre Pompidou, et pure produit des institutions culturelles publiques françaises.

      C’est pour cela qu’accuser le seul marché revient à occulter l’ensemble de la production de la légitimé, dont le marché n’est que très partiellement partie prenante (c’est évacuer, aussi, que le « marché » permet à certains d’exister parce qu’un autre système – par exemple un circuit de reconnaissance plus « institutionnel » – ne leur permettrait pas, pour une raison ou pour une autre). Ce sont les expositions, les critiques, les aides et bourses, les acquisitions dans des collections publiques – pour un artiste, avoir une œuvre dans une de ces collections, c’est signifier à ses interlocuteurs futurs que d’autres avant eux ont jugé votre travail digne d’intérêt. D’ailleurs, quand on discute avec celles et ceux qui gèrent ces collections, ils peuvent être tout à fait lucides rétrospectivement sur les lacunes qu’elles présentent (des lacunes inhérentes à l’existence même d’une collection) : absences parfois criantes, sur-représentations qui a posteriori semblent incompréhensibles. Le goût se révise au fur et à mesure que l’histoire s’écrit, mais le goût s’invente également au quotidien par l’accumulation de ces légitimations symboliques.

      En fait, le symbolique est précisément la condition de l’économique : si une institution peut se permettre de ne pas payer l’artiste qu’elle expose (ça marche également pour une galerie qui escroque son artiste), c’est parce qu’elle sait très bien que le capital symbolique qu’elle lui apporte, ainsi que la promesse d’un profit encore plus grand à l’avenir, rendu possible par cet apport initial de capital, l’emportera sur l’absence d’argent.

      Les profits de l’irresponsabilité

      L’avantage de dénoncer le seul marché, c’est qu’il n’y aura personne pour vous contredire tant c’est le discours le plus convenu, et peut-être le plus satisfait de soi-même. Au moment de la parution de La Distinction, dans un entretien avec Didier Eribon, Pierre Bourdieu expliquait que « les intellectuels ont intérêt à l’économisme qui, en réduisant tous les phénomènes sociaux et en particulier les phénomènes d’échange à leur dimension économique, leur permet de ne pas se mettre en jeu » (6). Je remplacerai volontiers « intellectuels » par « acteurs du champ de l’art ». La critique du seul marché a une fonction sociale très précise : renvoyer à une entité abstraite, extérieure (et, par ailleurs, grossière, faisant fi des hiérarchies entre le petit galeriste parisien et la galerie internationale, etc.), permet d’évacuer la question du fonctionnement global du champ, de tous les échelons du pouvoir, de sa propre contribution et des hiérarchies desquelles on est soi-même, inévitablement, partie prenante.

      Ainsi, il reste à faire une analyse véritablement critique du champ de l’art, de ce qu’il produit artistiquement, de son fonctionnement et de l’idéologie artistique dominante qui le justifie. Personne ne vous reprochera de dénoncer le marché ou l’argent, c’est une des positions les moins exposées. C’est plus facile – et moins coûteux en termes de profit symbolique – de dénoncer le marché de l’art que, pour un artiste, se demander quelles œuvres d’art il produit ; pour un enseignant en école d’art, se demander ce qu’il enseigne ou comment il enseigne ; pour un commissaire, quels artistes il expose ; pour un critique, quels artistes il soutient ; pour un directeur de FRAC, à quels artistes il achète des œuvres ; pour quelqu’un qui siège dans une commission, quel type de décisions et quelles légitimités produit cette commission, etc. Discuter des conditions de production sans discuter de la production elle-même n’est pas un gage de progressisme.

      À l’automne dernier, une journaliste influente et considérée comme une voix dissonante pouvait se réjouir d’un « choix radical », celui de ne pas faire figurer de cartel explicatif dans l’exposition Francis Bacon du Centre Pompidou. « Comme s’il fallait tout contextualiser, tout historiciser, tout asséner », écrivait-elle, « et dissiper à coup de références le mystère de la création » (7). Choix le moins radical qu’il soit, et le plus conforme à une pensée bourgeoise magique du génie artistique qui pénètre et transporte naturellement le visiteur : le « mystère de création » n’est pleinement saisissable que par celles et ceux qui ont les compétences et les dispositions esthétiques pour le lire, lesquelles sont avant tout des compétences et des dispositions sociales.

      Il ne s’agit pas de procéder à une dénonciation nominative (encore que, parfois…), mais une critique des habitus et des inconscients, et de leurs effets concrets dans la production artistique contemporaine. J’ai beaucoup parlé de Beaubourg : ceux qui y décident sont principalement des conservateurs de musée, devenus membres d’un corps à la suite d’un concours extrêmement sélectif, dont la critique est relativement banale. Tant la formation (il est courant dans le milieu de se moquer des cours et des examens « sur diapositive » de l’École du Louvre, voie royale pour devenir conservateur, où il s’agit de savoir identifier de mémoire des œuvres à partir de leur reproduction) que les modalités de sélection des conservateurs (une des épreuves phares du concours consiste à reconnaître et commenter quatre reproductions, sans titre, sans auteur, sans date et sans légende) définissent un profil et une relative uniformité des catégories de jugement et des critères de la perception esthétique – sans compter l’homogénéité sociale qui caractérise le milieu.

      Mais il y a aussi les écoles d’art : qui les dirige, qui y enseigne, avec quel enseignement, quels étudiants sont sélectionnés, avec quelles qualités attendues, et quels étudiants en sortent ? Quand je travaillais à l’école de Paris-Cergy, nous avons eu de nombreuses discussions sur l’enseignement de l’histoire de l’art : dans une école qui se voulait « expérimentale » ou « pratique », au fil des années les cours d’histoire de l’art se trouvaient réduits à la portion congrue, perçus comme des vestiges de l’académisme et de la vieille pédagogie, magistraux, descendants, incapables de couvrir l’ensemble des intérêts des étudiants, etc. Nous étions parfois prêts à croire qu’il fallait laisser les étudiants aller librement vers les références historiques qui les aideraient, que leur « créativité » les guiderait… mais cette inclinaison ne faisait que ratifier l’écart entre ceux qui disposaient déjà d’une culture historique et artistique (par leur famille, leur milieu), et ceux qui n’en avaient pas. Et ce n’est qu’une des croyances dont les écoles d’art sont traversées. Lesquelles ne sont que des acteurs parmi d’autres – avec les critiques, les commissaires, les institutions, – DRAC, FRAC, centres d’art, musée… ainsi que les fondations, les galeries, les prix, les bourses, etc.

      S’il y a un lieu commun des interventions qui se veulent critiques sur l’art, c’est dans l’usage du terme « fétichisation ». Mais s’il y a en effet fétichisation, c’est-à-dire un effacement des conditions sociales de production, c’est bien une fétichisation symbolique : l’art consacré est le produit de tout un système, d’un champ entier et d’un ensemble d’acteurs mus par certain nombre de croyances et de représentations. En circonscrire l’analyse, c’est circonscrire la possibilité de le transformer réellement.

      (1). « Penser (l’art) dans un monde mauvais », 12 octobre 2018, https://www.youtube.com/watch?v=FH5liBXAMIY

      (2) Roxana Azimi, « La Fondation Vuitton à pied d’œuvres », Le Monde, 3 avril 2015, https://www.lemonde.fr/m-actu/article/2015/04/03/la-fondation-vuitton-a-pied-d-uvres_4608406_4497186.html ; Harry Bellet et Roxana Azimi, « Chtchoukine : comment Vuitton a mis (presque) tout le monde dans sa poche », Le Monde, 22 octobre 2016, https://www.lemonde.fr/arts/article/2016/10/22/chtchoukine-comment-vuitton-a-mis-presque-tout-le-monde-dans-sa-poche_501860

      (4) Michel Journiac, Écrits, 2013, p. 156. Soit dit en passant : si Barrès redécouvre Le Greco – et donc si Le Greco existe pour nous aujourd’hui –, c’est aussi à travers l’obsession de Barrès pour les « Arabes » et les « Juifs », pour les traces de « la plus belle lutte du romanisme et du sémitisme » (Greco ou le secret de Tolède)

      (5) Sur l’homosexualité, cf. mon texte « Démonstration de respectabilité : Pureté d’Hockney et Twombly au Centre Pompidou », Diacritik, 20 juillet 2017, https://diacritik.com/2017/07/20/demonstration-de-respectabilite-purete-dhockney-et-twombly-au-centre-pomp

      (6) Pierre Bourdieu, « L’art de résister aux paroles », Questions de sociologie, 2002, p. 10.

      (7) Roxana Azimi, « Le paradoxe du cartel », Le Quotidien de l’art, 12 septembre 2019, https://www.lequotidiendelart.com/articles/15958-le-paradoxe-du-cartel.html

    • Penser (l’art) dans un monde mauvais
      https://www.youtube.com/watch?v=FH5liBXAMIY


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      Les transclasses ou l’illusion du mérite par Chantal Jaquet
      https://www.youtube.com/watch?v=BwoLZgwZxLI

      « Quand on veut, on peut ».. pas vraiment pour la philosophe Chantal Jaquet pour qui le mérite est une pure construction politique destinée à conforter l’ordre social. Car en insistant sur les capacités personnelles des individus, l’État se dédouane de ses responsabilité collectives. Chantal Jaquet , philosophe et directrice du Centre d’Histoire des Philosophies modernes de la Sorbonne, a popularisé le terme de « transclasses » dans ses derniers ouvrages. Un mot qui désigne à la fois une réalité sociale mais aussi une construction politique, celle de la méritocratie.

  • La colère monte aux Beaux-Arts de Paris
    1 mars 2020 Par Antoine Perraud
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/010320/la-colere-monte-aux-beaux-arts-de-paris
    L’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris, avant de rejoindre le mouvement de grève prévu le 5 mars dans l’enseignement supérieur, s’est livrée à une performance protestataire symptomatique, ce dimanche 1er mars.

    Pour ceux qui ont la faiblesse de ne pas être au courant, Paris accueille – depuis le 24 février et jusqu’au 3 mars – la semaine de la mode (« Fashion Week », dit forcément ce petit monde franglaisant). Ça défile à tout-va (le matraquage n’est que publicitaire) dans la capitale française, après des présentations déjà menées dollar battant à New York, Londres et Milan : 70 marques et 5 000 visiteurs d’un milieu où le paraître a supplanté l’être, du berceau à la tombe.

    Dimanche 1er mars à 14 heures, le styliste américain Thom Browne envahissait l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris (Ensba), écrin dévolu à ses collections automne-hiver 2020-2021. Mais voilà, certains étudiants ne l’entendaient pas de cette oreille et ont proposé, sous la pluie, une performance devant leur établissement fermé à la canaille pour accueillir les déesses et les dieux de la mode.

    Déjà mardi 25 février, à l’occasion d’un « événement Louboutin » très talon rouge, des étudiants et quelques professeurs s’étaient manifestés pour protester contre cette privatisation à outrance de l’espace public, menée par les Beaux-Arts et son directeur, Jean de Loisy.

    Pour ceux qui occupent une position de pouvoir avec pour tout bagage leur vision comptable – en notre Ve République où tout semble à louer ou à vendre –, la tentation est grande de rentabiliser un site si prestigieux : entre le quai Malaquais et les rues Bonaparte, Jacob et des Saints-Pères, en cette partie du VIe arrondissement de Paris où les appartements se négocient 30 000 € du mètre carré.

    Que font encore là ces chenapans d’étudiants – pourquoi ne pas les envoyer au-delà du périphérique, comme naguère les salariés voisins de La Documentation française, qui avaient l’outrecuidance de travailler face à la Seine ?

    Jérôme Espitalier, l’un des porte-parole du mouvement, explique à Mediapart que la direction a tenté de diviser les étudiants qui se partagent le site : les artistes d’une part, les architectes de l’autre. La réponse fut une triple revendication commune. Les étudiants, unis, réclament d’avoir leur mot à dire sur la pédagogie, l’avenir du site et ses privatisations intempestives.

    Le site des Beaux-Arts, où tout le monde est à l’étroit, est menacé d’une amputation de locaux à la suite de l’action menée par François Pinault contre un bâtiment qui fait de l’ombre à son hôtel particulier de la rue des Saint-Pères. Le Conseil d’État a donné raison au milliardaire en décembre 2019 et ledit bâtiment doit être rasé d’ici la fin de l’année, privant les étudiants en architecture d’infrastructures essentielles (laboratoires de recherche des doctorants, salles de cours et ateliers de fabrication).

    « Nous ne sommes pas contre la destruction de ce bâtiment provisoire installé en 2001, à condition qu’il soit remplacé par un autre, qui témoigne de la vitalité architecturale contemporaine dans un site en évolution, tout en dotant étudiants et enseignants de locaux dignes de ce nom et cessant donc de perpétuer la précarité dans laquelle nous vivons », précise Jérôme Espitalier.

    Se sentant défiée, humiliée, négligée, l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris entend donc se joindre au mouvement général de grève lancé pour le 5 mars dans l’enseignement supérieur et la recherche.

    • L’Ecole des beaux-arts aimerait se libérer du fait du prince
      9 juillet 2015 Par Antoine Perraud
      https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/090715/lecole-des-beaux-arts-aimerait-se-liberer-du-fait-du-prince?onglet=full
      Les étudiants de l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris entendent profiter du limogeage de Nicolas Bourriaud pour négocier une nomination de leur prochain directeur, en vertu d’un processus enfin transparent et participatif consenti par le ministère de la culture : pas gagné d’avance !

      L’étudiante peste : « Regardez le bazar du démontage d’une soirée Dassault ! » Le pandémonium est patent : caisses noires et chromées regorgeant de matériel, au milieu de débris verriers, de détritus et autres reliefs festifs jonchant le sol de la cour vitrée du Palais des études. Nous sommes à Paris, au cœur de l’École nationale supérieure des beaux-arts, qu’un acronyme idiot désigne parfois comme l’Ensba.

      Le désordre ne résulte pas du bal des Quat’z’Arts – remis au goût du jour en 2012 par l’établissement, après de mémorables éditions entre 1892 et 1966. La dégradation du lieu, éphémère mais violente, résulte d’un processus qui reste en travers de la gorge de l’étudiante : « Le désengagement de l’État oblige notre école, sous-financée, à s’offrir comme un écrin. De gros intérêts sont prêts à verser leur obole pour bénéficier d’une enclave patrimoniale à deux pas de la Seine, là où déjà le luxe colonise à tour de bras : la Samaritaine, l’hôtel de la Monnaie, la grande poste de la rue du Louvre… »

      Ce mercredi 8 juillet 2015 au matin, l’étudiante se rend à une petite assemblée générale inopinée dans l’amphithéâtre d’honneur. Elle fait partie des délégués de l’an dernier, qui ont demandé à rencontrer ceux de cette année. Les aînés reprochent à leurs puînés d’avoir inconsidérément pris la défense du directeur de l’École, Nicolas Bourriaud, mis à pied le 2 juillet par Fleur Pellerin.

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      Beaux-Arts : encore un sale tour de la monarchie culturelle ? Par Joseph Confavreux

      Les représentants actuels ont en effet écrit à la ministre de la culture, le 6 juillet, pour exiger le maintien du limogé à son poste, avec la phrase de trop, selon les représentants d’antan : « Les objectifs que vous fixez à l’éventuel nouveau directeur sont déjà des priorités pour Nicolas Bourriaud et ont tous été réalisés ou sont en cours de résolution en accord avec les différents corps actifs à l’école, donnant un bilan positif à l’institution. » Voilà des arguments martelés dans la presse, de Télérama à Mediapart, par le remercié soi-même, qui s’est livré à une campagne éclair d’interviews.

      Les contempteurs de Nicolas Bourriaud le condamneraient-ils à une double peine : être viré puis réduit au silence ? Marc Pataut, professeur notoirement opposé au directeur congédié, relativise pour Mediapart, d’une formule cinglante : « Bourriaud est parti comme il est arrivé. » Traduction : en bénéficiant de l’arbitraire puis en le subissant ; il fut un ayant droit du fait du prince, avant que de s’en retrouver la victime…

      La nomination de Nicolas Bourriaud à la direction des Beaux-Arts intervint au déclin de l’ère Sarkozy, en octobre 2011. Frédéric Mitterrand et son cabinet de la rue de Valois cherchaient quelqu’un de plus pimpant que l’excellent Henry-Claude Cousseau, dandy policé, en place depuis onze ans à l’Ensba. M. Cousseau faisait preuve d’une retenue rare. Il avait été échaudé par l’affaire de l’exposition « Présumés innocents », accueillie au musée de Bordeaux qu’il dirigeait. C’était en 2000. Le maire, Alain Juppé, avait refusé d’inaugurer cet événement culturel qu’une campagne dénonçait comme « pédophile » et « pornographique », avant qu’une association, La Mouette, n’estât en justice contre le conservateur, exfiltré vers les Beaux-Arts à Paris.

      Le circonspect Cousseau n’a pas démérité, comme en témoigne le catalogue d’une exposition récapitulative de 2011 : « Soudain déjà ». Mais le vibrionnant Nicolas Bourriaud a profité de la discrétion décennale qui précéda son surgissement sur place, pour se poser en lumière après les ténèbres. À l’entendre, il aurait réveillé une École aux allures de belle endormie : discours que serait en droit de tenir le philosophe Yves Michaud, nommé directeur des Beaux-Arts par Jack Lang en 1984, qui, lui, releva une institution véritablement vétuste et nécrosée.

      Cependant Nicolas Bourriaud s’est posé, avec un culot d’acier, en réformateur signalé, singulier et suprême. Il prétend avoir ouvert l’École à des professeurs étrangers : l’ancienne direction a beau jeu de nous rappeler que des enseignants venus du Japon, d’Italie, ou de Cuba avaient été recrutés avant 2011. Il se pose en créateur d’une cafétéria pour les étudiants, mais un ancien délégué, Clément Boudin, le récuse pour Mediapart : « Bourriaud voulait à l’origine créer un restaurant de luxe donnant sur la rue Bonaparte, où nous aurions eu quelques facilités. Nous avons refusé un tel schéma en exigeant un lieu qui nous soit dévolu et non un endroit où nous aurions été tolérés. Il a cédé, transformant ensuite sa défaite en initiative et défendant à contrecœur notre idée, tout en ayant l’habileté de se l’approprier ! Surtout, il n’a jamais été capable de présenter un projet, à part une liste de mécènes pour épater la galerie. »

      Charlotte Novaresio, déléguée des étudiants élue cette année, ne l’entend pas de cette oreille et nous confie son exaspération : « Nos représentants de l’an dernier n’avaient qu’une idée en tête : virer le directeur. Ils refusaient le dialogue, opposaient un non de principe à tout ce qui venait d’en haut, au nom de leur conviction idéologique que l’art et le marché ne vont pas de pair et que la seule place des artistes est la place du Tertre ! Moi, je pense qu’il faut construire plutôt que de faire continuellement la guerre : accepter le dialogue, passer des compromis, savoir se montrer diplomate… »
      Tralala bling-bling

      Comment, d’une année sur l’autre, les vues estudiantines peuvent-elles se montrer si diamétralement opposées ? Les anciens déléguées, combatifs, ont été élus par plus de 120 étudiants sur les quelque 500 que comptent les Beaux-Arts – une participation apparemment faible mais exceptionnelle dans une école où prime l’individualisme légendaire d’artistes en herbe souvent déjà sur leur Aventin, qui se double d’une inquiétude quant à l’avenir virant à l’angoisse démobilisatrice.

      Un événement s’était montré fédérateur à l’automne 2013 : la façon qu’avait eu Ralph Lauren de s’accaparer le site en mécène un rien prédateur, évinçant les étudiants de leurs ateliers pour les besoins de son tralala bling-bling : défilé de mode, dîner fin, autosatisfaction à tous les étages. Avec Nicolas Bourriaud en bateleur et passe-plats…

      La magie du défilé aux Beaux-Arts de Ralph Lauren © Paris Match

      À l’époque, Paris-Match vantait l’événement dans un déchaînement de crinolines, tandis que regards.fr, site propre à la gauche alternative, critiquait ce raout déraisonnable, relayant la colère étudiante avec des vidéos probantes. En janvier 2014, l’élection des délégués, dans la foulée de la lutte contre l’invasion de Ralph Lauren, avait poussé sur le devant de la scène les éléments les plus politisés : des contestataires au verbe haut, capables de mener la vie dure à Nicolas Bourriaud.

      Celui-ci sut faire profil bas. Il opéra un recul tactique passant pour reconnaissance de ses torts. Puis il sut diviser pour régner. Résultats : en janvier 2015 de nouveaux délégués étudiants sont désignés par une vingtaine de votants seulement, tant l’amertume et le découragement avaient gagné les rangs.

      Et voici donc qu’après le renvoi du directeur, en ce 8 juillet 2015, se retrouvent face à face les élus de l’année, qui s’estiment raisonnables, et ceux de l’an dernier, qui les jugent manipulés. Dans l’amphithéâtre d’honneur bien défraîchi – Ralph Lauren avait promis de le rénover mais retira ses billes après son fiasco événementiel de l’automne 2013 –, sous la peinture à la cire de Paul Delaroche représentant soixante-quinze figures dominantes de l’art grec, romain, gothique et renaissant, une douzaine d’étudiants tentent de trouver un terrain d’entente. Quelles revendications présenter au ministère de la culture, dont des représentants ont promis de les recevoir, rue de Valois, en fin d’après-midi ?

      La petite troupe traversée d’antagonismes décide de ne pas se focaliser sur Nicolas Bourriaud, pomme de discorde toujours vive, qui revient néanmoins par inadvertance sur le tapis : il savait nous écouter, geignent les nouveaux délégués ; non, grognent les anciens, il n’obéissait qu’aux rapports de force que nous parvenions à instaurer. Il a été chassé comme un malpropre, plaident les uns ; nenni rétorquent les autres, il avait été reconduit pour un an seulement par Aurélie Filippetti l’été dernier.

      Le groupe convient toutefois que ceux qui s’offusquent du dégommage du directeur comme ceux qui s’en réjouissent, doivent nouer un pacte quant à la suite des événements : plus question d’accepter une nomination opaque conduisant au parachutage d’un copain ou d’un affidé du pouvoir, forcément accueilli dans la défiance, quelles que soient ses possibles qualités.

      Urbain Gonzalez, leader historique de la contestation d’octobre 2013 contre Ralph Lauren, donne le la : « Le ministère de la culture a un scandale médiatique à répétition dans les pattes. Les journalistes ne s’intéressent qu’aux intrigues de sérail : Nicolas Bourriaud sera-t-il remplacé par Éric de Chassey, poussé par Julie Gayet ? Ne cédons pas à de tels leurres et battons-nous pour que notre parole soit entendue. La parole des étudiants a beaucoup plus de poids que celle des professeurs, qui défendent leur bout de gras et tournent pour la plupart comme des girouettes selon le vent. Or c’est à nous tous de choisir qui prendra la tête de l’École, en concertation avec le personnel administratif qui a aussi son mot à dire. Exigeons la concertation et la transparence pour que les préférés du pouvoir ne puissent plus débouler. Que la ministre comprenne que si elle nous colle encore une fois un directeur selon les vieilles méthodes, ça va être la merde dans l’École ! À l’heure où l’eau fuit dans les ateliers, ne nous bernons plus sur la capacité de Nicolas Bourriaud à lever des fonds de façon magistrale. Si nous nous battions pour sauver la tête du directeur, nous serions infantilisés par le ministère. En revanche si nous nous battons pour sauver l’École, c’est pas désespéré ! »

      Faux nez du marché

      Le groupe dépasse ses divisions et se soude, jusqu’à trouver une résolution à faire valoir auprès du ministère : suspendre le processus de nomination du successeur de Nicolas Bourriaud tant que n’est pas réécrit le décret de 1984, qui fixe dans le plus grand flou la désignation du directeur des Beaux-Arts – aucune durée de mandat n’est par exemple précisée. « Nous exigeons que tous les acteurs de l’École soient partie prenante de cette réécriture », affirme ainsi la petite assemblée dans une note qu’elle remettra dans quelques heures rue de Valois.

      Faut-il du reste un directeur ? Les discussions reprennent de plus belle, entre ceux qui ont un besoin d’incarnation et ceux qui croient en un modèle collectif et collégial, à l’allemande, ayant notamment prévalu à l’Académie des beaux-arts de Düsseldorf. Là encore, le cénacle estudiantin trouve une façon de transformer ses divergences en proposition, prenant au mot l’humeur délibérative affichée par Fleur Pellerin. L’AG pose ainsi ses exigences : « Conformément à la volonté exprimée par la ministre de mettre en place une gouvernance plus collaborative de l’école, nous demandons que celle-ci soit dirigée par un conseil ad hoc composé en nombre égal de membres du personnel, des professeurs et des étudiants, ainsi que de l’équipe administrative, jusqu’à la validation du décret écrit dans ces conditions de concertation. »

      Dans l’amphithéâtre d’honneur, impression d’assister à l’an I de la démocratie aux Beaux-Arts de Paris. Avec ces fusées ou ces ornières qui, depuis 1789, caractérisent de telles sessions où se mêlent l’action, la réflexion, le possible et l’utopie. Tout cela va-t-il se fracasser, rue de Valois, sur quelques cerveaux reptiliens de la bureaucratie française autoproclamés « serviteurs de l’État » ?

      En attendant ce choc de l’idéal démocratique et de la raison administrative, finalement prévu à 18 heures au ministère de la culture le mercredi 8 juillet 2015, nous interrogeons l’un des rares enseignants qui ose s’exprimer en ces temps incertains : Jean-François Chevrier. Il a tenté de s’engager dans la vie des Beaux-Arts avant de comprendre qu’il s’était trompé sur Nicolas Bourriaud. Celui-ci, selon lui, envisageait la transparence et la concertation telles de simples concessions tactiques entre deux nominations de suppôts – tel Jean-Luc Vilmouth, dont il fit son bras droit et qui n’a pas donné suite à notre demande d’entretien.

      Pour Jean-François Chevrier, l’ancien directeur pratiquait une sorte de bonneteau qui mystifiait son monde : il délaissait la mission pédagogique de l’École au profit d’un prétendu « centre d’art », qui n’était en définitive que le faux nez du marché. Le marché, qui soudoie déjà certains étudiants inquiets pour leur avenir et qui pensaient trouver en Nicolas Bourriaud un futur facilitateur en raison de ses liens avec le milieu. Le marché, qui menace, l’air de rien et même l’air de se poser en vecteur de modernité, le pluralisme de l’art actuel.

      Chez les étudiants activistes de l’automne 2013 contre Ralph Lauren, Jean-François Chevrier a trouvé des pionniers « en avance sur le corps enseignant » : « Cette minorité d’étudiants est consciente de la menace qui pèse sur leur liberté de pensée, donc sur leur créativité. Cette minorité protège ses instruments, y compris l’institution publique des Beaux-Arts. Les bonnes idées viennent toujours de peu de gens et je regarde leur lutte comme très encourageante dans la misère ambiante. Cette nouvelle génération sait qu’il y a place pour autre chose que ce que propose le marché. Mais cet autre chose que Jeff Koons, pour dire vite, cet affranchissement précaire, doit être défendu bec et ongles, fût-ce avec ce que d’aucuns considèrent comme des naïvetés déplacées. Pour ma part, je tiens simplement à dire que je trouve ces jeunes gens remarquables. »

      Une telle impression n’a sans doute pas même effleuré, de 18 heures à 18 h 30, ceux qui reçurent la délégation de douze étudiants des Beaux-Arts rue de Valois : Pierre Oudart, directeur adjoint chargé des arts plastiques à la Direction générale de la création artistique, flanqué d’Arthur Toscan du Plantier, ancien conseiller en communication de Bertrand Delanoë puis d’Aurélie Filippetti, devenu auprès de Fleur Pellerin « conseiller chargé des relations avec les acteurs culturels et institutionnels ».

      La même étudiante qui pestait contre le bazar du démontage de la soirée Dassault, le matin aux Beaux-Arts, rive gauche, soupire en fin de journée, au ministère de la culture, rive droite : « Ils nous ont dit qu’ils n’avaient pas pour mandat de débattre mais de transmettre. »

    • Merci pour le rappel de l’enfarinage de ce gros misogyne de Bustamente. Pour Nicole Esterolle c’est drole de savoir qu’il dit pique-pendre sur les étudiantes des beaux arts mais pourtant il a selectionner mon travail d’ex étudiante des beaux-arts pour le montrer sur son site comme art Esterollo-compatible.

  • Attribuée à 1,2 million d’euros, une œuvre de Banksy s’autodétruit en pleine vente
    https://www.lemonde.fr/arts/article/2018/10/06/attribuee-a-1-2-million-d-euros-une-uvre-de-banksy-se-detruit-en-pleine-vent

    La « Petite fille au ballon rouge » a été en partie découpée en morceaux juste après avoir été vendue, lors d’enchères organisées à Londres, vendredi. L’incident reste inexpliqué.

    Il pourrait s’agir du dernier canular mis en scène par l’artiste Banksy, célèbre pour ses pochoirs contestataires peints dans de nombreuses villes du monde. Lors d’une vente aux enchères organisée à Londres, vendredi 5 octobre, un tableau lui étant attribué, la « Petite fille au ballon rouge », a été vendu à 1,04 million de livres – près de 1,2 million d’euros en incluant la commission de la maison de vente.

    Une enchère exceptionnelle pour la maison Sotheby’s, à Londres – l’œuvre était estimée entre 230 000 et 341 000 euros –, mais qui ne s’est pas terminée comme prévu : un mécanisme caché dans le bas du cadre a commencé à broyer le tableau peu après la confirmation de l’enchère, ne s’arrêtant que pour laisser intact le ballon rouge en forme de cœur s’éloignant de la fillette, désormais découpée en plusieurs morceaux.

    La destruction pourrait être une bonne affaire

    Aucune explication n’a été fournie sur la destruction de l’œuvre, la maison de vente se disant incapable de confirmer si Banksy lui-même était impliqué. L’artiste a dans la nuit publié une photo de la vente – et de la surprise apparente du public – sur son compte Instagram, accompagné du commentaire : « En train de partir [allusion à la vente aux enchères], en train de partir, partie… » (« Going, going, gone… »).

    « Nous avons été “banksyé” », a de son côté ironisé Alex Branczik, directeur du département d’art contemporain à Sotheby’s, lors d’une conférence de presse après l’incident. « Nous n’avons jamais connu cette situation dans le passé, où une œuvre est découpée en morceaux, juste après avoir égalé un record de vente pour l’artiste. Nous travaillons à estimer ce que cela peut changer à la vente aux enchères », a-t-il expliqué.

    L’acheteur du tableau, contacté par la maison de vente, s’est dit « surpris » de la tournure des événements. Mais si la destruction de l’œuvre aurait pu mener à l’annulation de la vente, comme cela se ferait habituellement, l’opération pourrait se transformer en une bonne affaire, selon un analyse du Financial Times : « Il se pourrait que le tableau broyé prenne de la valeur, considérant qu’il est devenu l’objet de l’un des meilleurs canulars jamais organisés sur le marché de l’art. »

  • Bansky à Paris
    http://liminaire.fr/proces-verbal/article/bansky-a-paris

    « La peinture n’est pas faite pour décorer les appartements, c’est un instrument de guerre offensif et défensif contre l’ennemi. » Pablo Picasso Les murs de la capitale attestent depuis quelques jours du passage de l’artiste de rue Bansky. Les formes se détachent du mur qui leur sert de support, elles nous arrêtent, nous arrachent à ce temps et à ce lieu. L’une d’entre-elles est située Avenue de Flandres, dans le 19ème arrondissement. L’artiste anglais s’approprie le tableau de Jacques-Louis David : (...)

    #Procès-verbal / #Art, #Photographie, #Langage, #Regard, #Quotidien, #Traces, #Politique, Société, #Travail

    #Société
    « https://fr.wikipedia.org/wiki/Bonaparte_franchissant_le_Grand-Saint-Bernard »
    « http://www.valeursactuelles.com »
    « http://banksy.co.uk »
    « http://www.leparisien.fr/culture-loisirs/de-passage-a-paris-banksy-couvre-les-murs-d-oeuvres-engagees-24-06-2018-7 »
    « https://www.lemonde.fr/immigration-et-diversite/article/2018/04/22/migrants-dans-les-alpes-francaises-renforts-importants-pour-controler-les-fr »
    « http://www.andipa.com/artist/banksy/go-flock-yourself »
    « https://www.franceculture.fr/personne-jacques-munier.html »
    « https://www.franceculture.fr/emissions/le-journal-des-idees/le-journal-des-idees-du-lundi-25-juin-2018

     »
    « http://www.liberation.fr/photographie/2018/06/24/six-banksy-sur-les-murs-de-paris_1661592 »
    « https://www.lemonde.fr/arts/article/2018/06/25/banksy-prend-paris-pour-cible-et-comme-terrain-de-jeu_5321085_1655012.html »