Suite du Roman national
Dunoyer était capable de produire un nombre incalculable de phrases contenant toutes les mots citoyen – république – Etat – nation, la seule fonction de ces phrases était en vérité de combiner et recombiner ces quelques mots à l’infini. Le sens importait peu, seule comptait la production d’énoncés sommaires où chacun de ces vocables de deux ou trois syllabes sonnait comme un coup de gong abrutissant l’auditeur dont la cervelle était tout à coup saturée de propos mécaniques. À vrai dire, ce n’était pas Dunoyer qui avait créé cette mode qui consistait à employer le mot citoyen à toutes les sauces. Il y avait désormais des fêtes citoyennes, des actions citoyennes, des journées citoyennes, des actions de nettoyage citoyennes, il y avait même des banques citoyennes, des entreprises citoyennes, et la police elle-même pouvait se prétendre citoyenne puisqu’elle était au service des citoyens.