L’écologie peut-elle se passer d’une critique du capitalisme ?

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  • Pour 2019, Macron souhaite une « #écologie_industrielle », mais pas nous
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    écologie industrielle ? On se demande où le Président est allé chercher cette expression tandis qu’il ne manque pas d’#oxymores plus répandus et tous plus inventifs les uns que les autres pour qualifier l’idée saugrenue d’une économie capitaliste respectueuse de l’environnement. Ainsi dans la lignée des expressions telles que « #développement_durable » ou « croissance_verte », ou même, plus absurde encore, « #capitalisme_vert », voilà un autre terme qui vient s’ajouter au vocabulaire fantaisiste des gestionnaires et des décisionnaires. En réalité, le terme existe depuis la fin des années 1980 [2] et n’a pas été inventé pour l’occasion, quoi qu’il ne se soit pas encore répandu dans la sphère médiatique. On peut en trouver la définition suivante sur le site du Ministère de la transition écologique et solidaire : « L’écologie industrielle et territoriale (EIT) est un levier pour mobiliser les acteurs de terrain en faveur de la #transition_écologique. Elle se concrétise par la mise en commun volontaire de ressources par des acteurs économiques d’un territoire, en vue de les économiser ou d’en améliorer la productivité : partage d’infrastructures, d’équipements, de services, de matières… »

    #eco_socialisme

    1) tous les déchets ne se valorisent pas, et les déchets sont loin d’être le problème le plus grave du point de vue écologique ; 2) la valorisation des déchets est-elle réellement une solution écologique ? pour valoriser des déchets, il faut consommer des ressources, construire des infrastructures, etc., donc continuer de faire tourner la machinerie économique qui est précisément à l’origine du réchauffement climatique ; 3) cette « solution », quand bien même elle serait bonne théoriquement, dépend du bon-vouloir des entreprises et sera abandonnée en cas de non rentabilité ; à court-terme pour maximiser le profit, il est préférable pour les entreprises de s’en tenir à ce qui est déjà là (énergies fossiles, etc.), puisque la mise en place du système de valorisation a un coût. Les petites mesures « vertes » prises dans le sens de la valorisation des déchets ne serviront probablement qu’à cacher l’immense continuation d’une production toujours plus polluante.

    On notera également qu’il est ironique de voir que parmi les acteurs de l’écologie industrielle se trouve l’industrie nucléaire : or on doute de la capacité à inscrire les déchets nucléaires dans un circuit permettant leur « valorisation ». L’absurdité de l’écologie industrielle comme « valorisation des déchets » – recyclage de l’idée de recyclage –, est déjà bien attestée par les pratiques de recyclage du plastique, qui n’ont aucunement permis de stopper la croissance de la production de plastique

    https://grozeille.co/lecologie-se-passer-dune-critique-capitalisme

    https://grozeille.co/oui-oui-et-le-changement-climatique

  • L’écologie peut-elle se passer d’une critique du capitalisme ?

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    Dans le vacarme et l’urgence qui entourent la question écologique, il s’agit pour bien agir de bien distinguer la cause de nos problèmes, afin d’identifier des cibles logiques. Armel Campagne, un jeune historien, vient justement de faire paraître ses recherches sur le Capitalocène, aux éditions Divergences. L’idée est simple : le dérèglement climatique, dû aux pollutions émises par l’extraction et la consommation d’énergies fossiles, n’est pas séparable de l’émergence d’un régime social et économique particulier, le capitalisme. Historiquement, le lien saute aux yeux : le dérèglement climatique comme le capitalisme apparaissent aux 18-19ème siècles, à partir de la révolution industrielle anglaise. Après avoir lu cet excellent bouquin, nous avons donc souhaité rencontrer Armel Campagne, qui a très aimablement accepté, pour creuser avec lui cette question cruciale : l’écologie peut-elle se passer d’une critique du capitalisme ?

    • La critique du capitalisme est au cœur de ton analyse. Force est de constater que le terme est généralement utilisé avec très peu de rigueur, et qu’on ne sait pas toujours bien ce qu’on désigne par là. Ce qui n’est pas ton cas. Comment définirais-tu le capitalisme, quels sont ses traits distinctifs ?

      [...] À mon sens, on peut parler de société capitaliste à partir du moment où il y a 3 choses :

      1. Une dépendance généralisée des acteurs sociaux, toutes classes confondues, au travail au sens capitaliste, c’est-à-dire à la vente ou à l’achat de la force de travail. Les classes dominées sont contraintes de louer leur activité (à l’instar des ouvriers) ou de vendre l’essentiel de leur production (à l’instar des artisans et des agriculteurs), les classes dominantes pour leur reproduction matérielle doivent acheter du travail salarié et lui faire produire des marchandises de manière profitable. Ça c’est quelque chose qu’on observe qu’en Angleterre à partir du 17-18ème siècle, alors qu’en France on n’est pas encore dans ce schéma à cette époque.

      2. Deuxième trait caractéristique : une dépendance généralisée des acteurs sociaux par rapport au Marché. C’est-à-dire que même les classes dominantes dépendent avant tout pour leur reproduction matérielle non pas d’une logique d’extorsion de type féodal, tributaire, etc., mais dans le cas des landlords anglais, de la location de leurs terres à des fermiers qui produisent de manière compétitive, et qui dégagent pour ces propriétaires capitalistes une rente qui dépend des prix du marché, du rapport de classes. Pour ce qui est des classes dominées, cette dépendance se manifeste par une absence de moyens d’auto-subsistance, de reproduction matérielle autonome ; et donc une nécessité d’acheter au Marché leur nourriture, leurs vêtements, etc.

      3. Troisième caractéristique : cette dépendance des acteurs sociaux au travail et au Marché (et aux autres catégories du capitalisme évidemment : au capital, à l’argent, etc.), elle prend place dans une certaine unité des rapports économiques, avec au minimum une forme de libéralisation interne de l’économie : abolition des corporations, des barrières douanières, des monopoles, bref des obstacles au Marché concurrentiel auto-régulé. Sont supprimées tout un tas de choses qui sont des freins à cette caractéristique du capitalisme qu’est la « compulsion de croissance » : l’ensemble des acteurs sociaux sont forcés d’améliorer la productivité du travail du fait d’une concurrence généralisée. Cette logique de contrainte impersonnelle, la compulsion de croissance, entraîne des crises cycliques, et donc une dynamique contradictoire du capital.

      Je dirais que c’est ça les trois caractéristiques du capitalisme, car je trouve que la plupart des autres définitions qui sont souvent avancées sont imprécises. Par exemple, le profit, comme simple gain, c’est clairement quelque chose qu’on retrouve avant, le commerce, la monnaie aussi. Ce ne sont pas des caractéristiques suffisamment distinctives, et qui d’ailleurs sont incapables de saisir les spécificités de ce qu’on vit depuis environ deux siècles.