Si les étudiants ont échoué à obtenir le gel de la hausse des frais, ils savent qu’ils ont secoué la société québécoise en profondeur. Une victoire en soi, selon Eliane Laberge : « On a réveillé le Québec. On a ramené une flamme en la nation québécoise, montré qu’on pouvait se lever et dire ce qu’on pense. On a créé une culture militante, qui existait peu ici. C’est un legs pour les futures générations. On peut en être fiers. » Sa consœur de la Classe, Jeanne Reynolds, retient aussi la constitution des assemblées de quartier, « un réseau de mobilisation durable, solidaire, prêt à être réactivé dans le futur autour d’autres sujets ».
La génération au carré rouge, en référence au carré de tissu emblème du mouvement, ne s’arrête pas à la seule tranche d’âge des étudiants, souligne la politologue Diane Lamoureux, professeure à l’université Laval. « Ce mouvement, c’est la politisation d’une génération qui a été amenée à réfléchir en termes de projet de société. Mais pas seulement les jeunes. Les gens se sont mis à parler politique plutôt que météo ou sport, ce qui ne s’était guère vu au Québec depuis le référendum sur l’indépendance de 1995. Le débat sur les frais universitaires a permis, plus largement, de faire émerger un débat sur la tarification des services publiques dans leur ensemble et, au fond, une critique collective du néolibéralisme. Cela laissera des traces. »