Sur les traces d’homo touristicus : Ah, les jolies vacances aux colonies…

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  • Sur les traces d’homo touristicus : Ah, les jolies vacances aux colonies… - CQFD, mensuel de critique et d’expérimentation sociales
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    Catégorie nouvelle apparue à la fin du XVIIIe siècle, le touriste, tout en marchant sur les pas des uns ou des autres, se distingue de l’explorateur, du colonisateur, du curiste ou du pèlerin par la vacuité sociale de son loisir. À la fin des guerres napoléoniennes, la mode du voyage non utilitaire, réservé aux classes oisives, connaît un véritable essor en Europe. Le développement du chemin de fer, du bateau à vapeur et des échanges internationaux, ainsi que l’expansion coloniale et les voyages scientifiques qui les accompagnent, élargissent l’horizon du touriste au cours du XIXe. En 1841, le puritain Thomas Cook flaire le bon filon et ouvre, en Angleterre, la première agence de voyages. Le premier circuit organisé de l’histoire réunit ainsi 500 membres de ligues contre l’alcoolisme pour un déplacement en train de Leicester à Loughborough.Très vite, le pathétique de l’homo touristicus, ersatz d’aventurier qui entend jouir du spectacle du monde sans rien céder de son confort, suscite la curiosité et la caricature. Dès le deuxième quart du XIXe siècle, l’illustrateur suisse Rodolphe Töpffer dresse, dans Voyages en zigzag, une typologie sarcastique de cette engeance observée dans les Alpes. Il cible particulièrement, le « no-no », touriste anglais hautain, « un itinéraire à la main, un lorgnon sur la belle nature », qui reste dans un rapport livresque à ce qui l’entoure et cultive l’entre-soi : « Haut comme une grue, muet comme un poisson, il se salue lui-même et ceux de son espèce [...] et il méprise beaucoup les pays “ où tute le monde paarlé à tute le monde ”. »