Et si on s’attachait davantage à la sangsue ?

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  • Et si on s’attachait davantage à la sangsue ?

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    Aujourd’hui, on en sait davantage sur les véritables propriétés des hirudo. Leur salive contient des composés anti-inflammatoires et un puissant anticoagulant, l’hirudine. Une fois les sangsues retirées, un fin saignement continue pendant plusieurs heures, ce qui a un effet décongestionnant. Tendinites, hématomes ou encore arthrose sont traités par certains naturopathes grâce à ce type de thérapie. Même la médecine conventionnelle s’y est mise : presque tous les CHU mettent les sangsues médicinales à contribution. Utilisées en chirurgie réparatrice depuis une vingtaine d’années, elles permettent de drainer les accumulations de sang et d’accélérer la cicatrisation après des greffes de doigts coupés, de peau ou encore une reconstruction mammaire. Pour s’assurer que les bestioles auront faim, on les fait jeûner pendant trente jours avant. Rien d’insurmontable puisqu’elles sont capables de ne rien manger pendant près d’un an.

    « En France, nous utilisons 20 000 sangsues par an, essentiellement pour l’homme (mais pas pour la femme). Elles sont beaucoup plus populaires en Allemagne, où c’est 600 000. En Suisse, certaines mutuelles remboursent même l’hirudothérapie », souligne Emmanuel Lecoutey, docteur en biologie et hirudothérapeute. Il soigne les humains et les chevaux grâce à ces auxiliaires médicales. « Sur une tendinite, j’appose entre 4 et 6 sangsues pour un être humain, c’est 15 à 20 sur un cheval si le tendon est lésé sur une vingtaine de centimètres », précise celui qui est en train de se constituer son propre élevage de petites bienfaitrices.

    Face à ses patients, il doit défaire les fantasmes : non les sangsues ne vont pas se balader, elles resteront accrochées une vingtaine de minutes, non elles ne s’enfonceront pas sous la peau, non ça n’est pas douloureux. « C’est plutôt une légère gêne. On sent surtout la sangsue dans les premières minutes qui suivent l’apposition, lorsqu’elle incise la peau avec sa mâchoire. Les patients comparent souvent la morsure à une piqûre d’ortie ou à de petites décharges électriques. Une fois qu’elle a injecté sa salive qui contient des composés analgésiques, on ne sent quasiment plus rien », précise-t-il. Et de conclure : « C’est juste un cap psychologique à passer. »