• Fabrice #Nicolino : « Définitivement, je suis un #anarchiste »
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    Des Luddites à Elisée Reclus, j’ai un profond respect pour ce #mouvement qui est l’histoire des vaincus. #Utopique et illusoire, certes, mais qui dit que la liberté, ça existe, au moins en #rêve.

    Un jour elle débarque avec un nouveau jules, « le gros Manu, alias Bilboquet ». « Plus jeune que mon frère aîné. Un truand grotesque mais il nous a sauvés de la débine. » Il rit : « Une fois, avec sa bande, il pique un camion de cafés Legal. Il y en avait partout à la maison, ça servait de pieds aux lits qui se déglinguaient. Il n’arrivait pas à l’écouler. Jusqu’au jour où il tombe sur un type qui lui achète cash tout ce qui reste. Champagne ! C’était un flic. Ils se sont tous fait serrer. »

    Chez les Nicolino, des histoires il y en a. Et même un fusil chargé au cas où l’ex-beau-frère qui a menacé sa sœur pointe son nez… C’est alors que la politique débarque comme une « explication consolante » dans la vie de l’adolescent. « Pour moi : un bonheur ineffable. Parce que jusque-là, je ne comprenais rien à ce qui nous arrivait. La pauvreté, la violence, le sort de mon père, ou pourquoi ma mère allait voir des voyous : tout devenait clair. Des explications sur mesure – la rébellion à l’ordre social – et des amis à travers le monde. Et puis cela s’accompagnait d’une exigence intellectuelle qui m’élevait au-dessus de ma classe. »

    Il a le rire tonitruant, le regard tendre, la voix qui porte. Il a grandi en banlieue. « Au 122. » Le 122, Grand-Rue, à Villemomble (Seine-Saint-Denis), une HLM dans une banlieue paumée. Son père est ouvrier estampeur. Militant communiste. Cinq enfants. Fabrice est le quatrième. « Un gourbi. Murs en carton-pâte. Tout le monde sait tout sur ses voisins. De ces histoires ! » Son père meurt à 49 ans, lui n’en a que 8. « On a plongé du prolétariat au sous-prolétariat. Des années d’effroi social. On achetait “à croum” – à crédit – en attendant les allocs. On avait la honte quand on nous envoyait chez la mère Noëlle, l’épicière. C’est pour ça que j’ai une certaine tendresse pour les “gilets jaunes”, je ressens le mépris de classe. Or, qui a voulu la bagnole ? Le diesel ? Les mégalopoles ? Les villes nouvelles ? »

    Un tour au PSU, puis « la Ligue » – les trotskistes –, il y restera six ans. Il aime en découdre : « Je me suis battu contre des fascistes, des staliniens, et accessoirement des flics. Je voulais certes mettre le feu au monde, mais pour que tout le monde en profite. »