Les gilets jaunes, le néolibéralisme et la gauche

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  • #stephano_palombarini, coauteur du #bloc_bourgeois avec bruno #Amable

    Les gilets jaunes, le néolibéralisme et la gauche | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/stefano-palombarini/blog/211218/les-gilets-jaunes-le-neoliberalisme-et-la-gauche

    Le mouvement des Gilets Jaunes (GJ), bien qu’inattendu, n’est pas vraiment surprenant. Avec Bruno Amable et Elvire Guillaud, nous avons identifié de bonne heure, dès 2012 [1], le profil du bloc bourgeois qui a ensuite permis à Macron d’accéder au pouvoir, et les politiques qui en assuraient la formation et la cohérence. Une coalition sociale centrée sur la partie la plus favorisée de la société, et l’accélération des réformes néolibérales qu’elle impulse, étaient destinées à susciter des souffrances sociales qui tôt ou tard devaient s’exprimer. De plus, on sait que – par sa composition – le bloc bourgeois ne peut être socialement majoritaire : c’est la fragmentation de l’offre politique, et notamment la crise des blocs de gauche et de droite, qui lui ont permis de s’imposer. Là encore, il n’est alors pas bien compliqué d’expliquer le soutien très vaste rencontré par les GJ dans la population française.

    L’identification des causes de ce mouvement ne pose donc pas de problème majeur. Plus compliqué, par contre, est de comprendre comment l’émergence d’une protestation sociale si forte et diffuse modifie le paysage politique, et quelles perspectives elle ouvre. C’est à ces questions que je vais essayer d’esquisser des premières réponses dans ce billet, dont j’espère on excusera la froideur analytique. Car bien évidemment, pour les raisons que je viens d’évoquer, parce qu’ils expriment la souffrance ressentie par la partie la plus pauvre et fragile de la population, directement exposée à la violence des politiques du pouvoir macronien, les GJ ne peuvent que susciter de la sympathie ; mais qui ne doit pas faire obstacle à l’analyse concrète de la situation et de ses évolutions possibles.

    Le mouvement des Gilets Jaunes (GJ), bien qu’inattendu, n’est pas vraiment surprenant. Avec Bruno Amable et Elvire Guillaud, nous avons identifié de bonne heure, dès 2012 [1], le profil du bloc bourgeois qui a ensuite permis à Macron d’accéder au pouvoir, et les politiques qui en assuraient la formation et la cohérence. Une coalition sociale centrée sur la partie la plus favorisée de la société, et l’accélération des réformes néolibérales qu’elle impulse, étaient destinées à susciter des souffrances sociales qui tôt ou tard devaient s’exprimer. De plus, on sait que – par sa composition – le bloc bourgeois ne peut être socialement majoritaire : c’est la fragmentation de l’offre politique, et notamment la crise des blocs de gauche et de droite, qui lui ont permis de s’imposer. Là encore, il n’est alors pas bien compliqué d’expliquer le soutien très vaste rencontré par les GJ dans la population française.

    L’identification des causes de ce mouvement ne pose donc pas de problème majeur. Plus compliqué, par contre, est de comprendre comment l’émergence d’une protestation sociale si forte et diffuse modifie le paysage politique, et quelles perspectives elle ouvre. C’est à ces questions que je vais essayer d’esquisser des premières réponses dans ce billet, dont j’espère on excusera la froideur analytique. Car bien évidemment, pour les raisons que je viens d’évoquer, parce qu’ils expriment la souffrance ressentie par la partie la plus pauvre et fragile de la population, directement exposée à la violence des politiques du pouvoir macronien, les GJ ne peuvent que susciter de la sympathie ; mais qui ne doit pas faire obstacle à l’analyse concrète de la situation et de ses évolutions possibles.

    Un premier pas vers l’unification des classes populaires ?

    D’un point de vue analytique, le premier constat est celui d’un mouvement d’une certaine façon symétrique au bloc bourgeois. Ce dernier réunit les classes favorisées « au-delà de la droite et de la gauche » ; les GJ semblent faire de même, mais du côté des classes populaires.

    [...]

    Bref, les GJ pourraient préfigurer le bloc anti-bourgeois dont nous avions discuté la possible formation dans L’illusion [3] en soulignant cependant qu’une politique de médiation en mesure de satisfaire l’ensemble des classes populaires nous semblait bien difficile à concevoir, compte tenu de la distance qui marquait les attentes, par exemple, des salariés à faible qualification par rapport à celles des ‘petits patrons’, des artisans ou des commerçants.

    [...]

    Cependant, force est de constater que les GJ expriment une certaine unification politique des classes populaires ; dont il faut ainsi se demander sur quels ressorts elle repose.

    [...]

    En poussant, et même en obligeant les classes défavorisées à délaisser le conflit contre le patronat sur le partage de la valeur ajoutée et à se concentrer entièrement sur la demande de transferts monétaires de la part du gouvernement ou sur celle d’une baisse des impôts, le néolibéralisme se nourrit de la misère sociale qu’il engendre.