• « Occupy » les ronds-points : les gilets jaunes déplacent le « mouvement des places » - Libération
    https://www.liberation.fr/debats/2019/01/11/occupy-les-ronds-points-les-gilets-jaunes-deplacent-le-mouvement-des-plac
    https://medias.liberation.fr/photo/1185850-000_1bm902.jpg?modified_at=1547139298&picto=fb&rat

    Le rond-point devant l’Intermarché serait-il la nouvelle Puerta del Sol ? Les années 2010 avaient commencé par une série de mouvements sur les places des grandes villes : Indignados, Occupy Wall Street, Tahrir… Elles se terminent avec une invention des provinces françaises, les mouvements de ronds-points. La comparaison est peu faite entre les gilets jaunes et ces mouvements grassroots qui ont essaimé sur la planète. C’est pourtant une clé pour comprendre la manière de faire politique des gilets jaunes.

    C’est une petite phrase qui revient souvent sur les ronds-points : « Les gilets jaunes ne sont ni d’extrême droite ni d’extrême gauche mais d’extrême nécessité. » Les étiquettes politiques divisent, il faut trouver d’autres moyens de faire groupe. Les gilets jaunes sont soudés par ce destin économique commun et par la construction d’un ennemi partagé, source de tous leurs maux : Emmanuel Macron. A Wall Street, on fabriquait du consensus en dressant une ligne très claire avec l’ennemi qui s’appelait alors « les 1% » : « Ce que nous avons tous en commun, c’est que nous sommes les 99 % qui ne tolèrent plus l’avidité et la corruption des 1% restant », proclamaient-ils. Ces définitions gazeuses du mouvement leur permettent de brasser large, « de faire du collectif avec de l’hyper divers politiquement », analyse Dominique Cardon, sociologue au Médialab de Sciences-Po qui a étudié les mouvements des places. « Ils ne se préoccupent pas de définir substantiellement les valeurs du collectif, ils définissent le collectif par sa diversité. »

    Sur les ronds-points, comme jadis sur les places, tout le monde a le droit à la parole, dans un horizontalisme radical. « On retrouve chez les gilets jaunes le même refus de la délégation que sur les places, explique Dominique Cardon. Tout porte-parole est sous le contrôle permanent d’une base qu’on ne peut pas délimiter. Ils savent qu’il est extrêmement fragile de formuler une phrase comme "nous voulons". Tout énoncé collectif doit formuler sa propre contestation. »

    #Gilets_jaunes #Mouvement_des_places