• Une défense de l’avortement | Cairn.info
    https://www.cairn.info/revue-raisons-politiques-2003-4-page-3.htm

    Une bonne part de l’opposition à l’avortement se fonde sur la prémisse suivant laquelle le fœtus est un être humain, une personne dès l’instant de sa conception. Je ne crois pas que les argumentations qui défendent cette prémisse soient satisfaisantes. Prenons par exemple la plus commune. On nous demande de remarquer que le développement d’un être humain de la conception à l’enfance, en passant par sa naissance, est continu. On ajoute ensuite que tracer une frontière ou choisir un point dans ce développement et affirmer : « Avant ce point, la chose n’est pas une personne, après ce point, elle en est une », relève d’un choix arbitraire, pour lequel aucune bonne raison ne peut être trouvée dans la nature des choses. On conclut alors que le fœtus est une personne dès l’instant de sa conception ou, du moins, que nous ferions mieux de dire qu’il en est une. Mais cette conclusion ne découle pas des prémisses avancées. On peut dire la même chose de la transformation du gland en chêne, et il ne s’ensuit pas que les glands sont des chênes ou que nous ferions mieux de dire qu’ils en sont. Les argumentations de ce genre sont souvent qualifiées d’argumentations de la « pente savonneuse » - l’expression s’explicite sans doute d’elle-même - et il est étonnant que les adversaires de l’avortement leur accordent tant d’importance et qu’ils les utilisent de manière non critique.