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  • En Belgique, la difficile décolonisation des esprits

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/16/en-belgique-la-difficile-decolonisation-des-esprits_5424273_3232.html

    Analyse. En novembre 2018 a paru le rapport de Bénédicte Savoy et Felwine Sarr sur la restitution d’œuvres africaines, commandé par l’Elysée après le discours d’Emmanuel Macron à Ouagadougou (Burkina Faso), en novembre 2017. Il a suscité un large débat, dont l’un des effets a été de « libérer la parole », selon la formule à la mode. Ainsi a-t-on dû lire des commentaires d’internautes du genre de celui-ci, relevé sur le site du Monde et toujours visible : « Utiliser le mot “art” pour ces objets primitifs et périssables me semble inapproprié. » Pur mépris raciste convaincu de la supériorité des Blancs sur les Noirs en toutes matières. On ne feindra pas d’en être surpris : les preuves de sa persistance sont partout dans le monde.

    Dans les anciennes puissances coloniales européennes, il est indissociable du colonialisme. Celui-ci affirmait pour se justifier qu’il apportait la « vraie foi » chrétienne et le progrès à des peuples païens et ignorants. Une littérature pléthorique a répandu ces discours du XIXe siècle – temps de la conquête systématique de l’Afrique et de l’Océanie – jusqu’au milieu du XXe siècle et aux indépendances des ex-colonies. Les collections que l’hypothèse des restitutions met en cause ont été en partie constituées dans ce contexte.

    Pourquoi rappeler ces évidences ? Parce qu’il apparaît que plus d’un demi-siècle après les indépendances, les entendre soit toujours douloureux pour certains et les énoncer, difficile pour d’autres. Et ceci dans le milieu des spécialistes des arts que l’on disait jadis « primitifs », par opposition à nous, les « civilisés ». Une preuve spectaculaire en est donnée depuis le 8 décembre 2018 par le Musée royal de l’Afrique centrale (MRAC) à Tervuren (Belgique), renommé AfricaMuseum.
    Un exotisme global mis en scène

    Ouvert en 1910, il est consacré à ce qui s’est appelé Etat indépendant du Congo, création et propriété du roi Léopold II (1865-1909) de 1884 jusqu’en 1908, et son annexion à la Belgique. Autrement dit le Congo belge, aujourd’hui République démocratique du Congo (RDC). Fermé en 2013 pour une rénovation d’un coût de 66 millions d’euros, le MRAC a été réaménagé, les surfaces d’exposition ont été presque doublées.

    #belgique #colonisation #décolonisation

  • « Les gaz lacrymogènes, outils de répression des insectes et des émeutiers », Jean-Baptiste Fressoz
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/27/les-gaz-lacrymogenes-outils-de-repression-des-insectes-et-des-emeutiers_5428

    Dans sa chronique, le chercheur Jean-Baptiste Fressoz retrace l’histoire des gaz utilisés par les forces de l’ordre contre les manifestants, et récemment les « gilets jaunes ».

    Chronique. La répression policière des « gilets jaunes » et la disparition des insectes − annoncée par des scientifiques pour le début du XXIIe siècle — partagent une origine commune qui remonte à la fin de la première guerre mondiale, au moment où les gaz de combat sont reconvertis à un usage civil, à la fois comme phytosanitaires pour nettoyer les champs et comme gaz lacrymogènes pour réprimer grévistes et émeutiers.

    En 1918, Amos Fries (1873-1963), l’énergique chef du service de la guerre chimique (CWS) de l’armée américaine, est désemparé : il est à la tête de 44 000 hommes, et surtout il a organisé un immense programme de recherche auquel collaborent 1 700 scientifiques. Il est en train d’inventer la guerre du futur et, soudainement, avec l’armistice, le CWS est en passe d’être démantelé.

    L’opinion publique est révulsée par les gaz de combat. La Chambre des représentants ratifie la convention de Washington puis celle de Genève, qui interdisent la guerre chimique. Pour Fries, c’est tout simplement incompréhensible : les gaz sont un moyen plus moderne, moins meurtrier, moins sanglant, plus propre en somme, de faire la guerre.
    Pour justifier son existence et son financement, le CWS doit convaincre l’état-major américain et l’opinion publique que les gaz peuvent trouver des usages en temps de paix. Amos Fries lance alors deux projets parallèles, l’un sur les pesticides, l’autre sur les grenades lacrymogènes.

    Le rêve d’une nature libre d’insectes

    Comme l’a bien montré l’historien Edmund Russell dans War and Nature (Cambridge University Press, 2001, non traduit), la première guerre mondiale a ouvert la voie aux #pesticides modernes : nouvelles molécules, nouveaux moyens d’épandage, et surtout nouvelle culture de l’éradication. Dans la propagande américaine, les Allemands étaient souvent comparés à des insectes qu’il fallait écraser et, réciproquement, les insectes étaient dépeints comme les ennemis de l’humanité, et cela d’autant plus facilement que le typhus (transmis par les puces) faisait des ravages dans les tranchées.

    En plein conflit, Stephen Allen Forbes (1844-1930), l’un des plus grands écologues américains déclarait : « La lutte entre l’homme et les insectes a commencé bien avant la civilisation, elle a continué sans armistice jusqu’à maintenant et continuera jusqu’à ce que l’espèce humaine prévale. » C’est durant la première guerre mondiale que naît le rêve d’une nature purgée des insectes et que commencent les grandes campagnes d’éradication, qui perdureront jusque dans les années 1970.

    La première guerre mondiale met aussi en évidence l’intérêt de la chloropicrine, une molécule jusqu’alors obscure, qui est un fongicide, mais qui possède aussi la particularité de provoquer des pleurs et des vomissements. Elle est moins connue que le gaz moutarde, mais il s’agit pourtant de l’arme chimique la plus utilisée pendant le conflit. Active à faible dose et pénétrant plus facilement dans les masques à gaz, elle était utilisée en guise de préliminaire : pris de pleurs et de suffocations, le soldat arrachait son masque, s’exposant ainsi à d’autres gaz plus dangereux. La chloropicrine est l’ancêtre des gaz lacrymogènes.

    Les Etats-Unis d’après-guerre offrent un terrain propice aux expérimentations policières : alors que de grandes grèves éclatent et qu’on agite le spectre d’une révolution bolchevique, les gaz lacrymogènes sont vantés par Amos Fries comme un outil de maintien de l’ordre à la fois plus efficace et plus humain que la matraque. Contrairement à cette dernière, ils laissent peu de traces et surtout ils individualisent l’émeutier pris dans une douleur atroce alors que les batailles rangées avec la police renforçaient la cohésion des foules. A partir de 1921, des petites entreprises montées par d’anciens du CWS fournissent les forces de police américaines en grenades lacrymogènes.
    Cent ans plus tard, on peut dire qu’Amos Fries et ses collègues ont triomphé : la guerre millénaire de l’humanité contre les insectes est en passe d’être gagnée, et les gaz lacrymogènes sont abondamment utilisés partout où la révolte gronde. L’ordre règne dans les champs et dans les rues.

    #gaz_lacrymogène #maintien_de_l'ordre #armes_chimiques #police

  • Air France-KLM dans le chaos après le coup de force de l’Etat hollandais
    https://www.latribune.fr/entreprises-finance/services/transport-logistique/air-france-klm-dans-le-chaos-apres-le-coup-de-force-de-l-etat-hollandais-8

    Le gouvernement néerlandais a acquis une participation de 12,68% dans Air France-KLM afin de renforcer son influence dans le groupe aérien, et compte porter cette part au niveau de celle de la France, soit 14,3%%. La présence de deux États au capital avec une vision stratégique différente rend la gestion du groupe complètement ingérable.
    Quinze ans après sa création, Air France-KLM va à vau-l’eau. Annoncée la semaine dernière, la nouvelle organisation d’Air France-KLM n’a pas clos une énième période de tensions entre le groupe et sa filiale néerlandaise. Comme il fallait le redouter, elle a au contraire ouvert une crise sans précédent qui va fragiliser le groupe pour longtemps.

    L’annonce, ce mardi, du gouvernement néerlandais de l’achat sur le marché de 12,68% du capital d’Air France-KLM avec la volonté clairement affichée de porter cette participation au niveau de celle de la France (14,3%) pour peser sur les décisions du groupe, plonge ce dernier dans le désordre et porte un gros coup aux relations entre la France et les Pays-Bas. Qu’un État étranger entre en catimini au capital d’un groupe privé français dont le premier actionnaire est l’État français constitue un acte très agressif de La Haye à l’égard de Paris. Que n’aurait-on dit si l’inverse s’était produit ? A chaud, l’attaque n’a pourtant pas provoqué de réaction violente de la France.

    • Le Monde, en édito, je vous prie, en défenseur du #capitalisme_à_la_française, de ses arrangements entre copains, de la chasse gardée que sont les présidences d’entreprises publiques pour les hauts fonctionnaires,…

      Air France-KLM, un raid contre-productif
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/28/air-france-klm-un-raid-contre-productif_5429450_3232.html

      Editorial. En montant au capital de la compagnie aérienne sans en avertir ses partenaires, à commencer par l’Etat français, les Pays-Bas risquent de fragiliser le groupe.
      […]
      A l’origine de cette offensive à la hussarde, les velléités de Ben Smith de siéger au conseil de surveillance de KLM, qui, rappelons-le, est une filiale à 100 % du groupe binational. Aussi étrange que cela puisse paraître, ses prédécesseurs avaient docilement renoncé à cette prérogative, pourtant logique sur le plan de la gouvernance.
      […]
      Depuis 2004, date du rapprochement entre les deux compagnies aériennes, les Néerlandais ont dû supporter l’interventionnisme incessant de l’Etat français. Celui-ci s’est souvent comporté en actionnaire calamiteux, arbitre partisan de relations sociales rongées par le corporatisme, sans pour autant fixer de cap clair à l’entreprise.
      Si la période a pu être agaçante pour les Néerlandais, elle leur a plutôt bien réussi. KLM a doublé de taille et, grâce au rapprochement avec les Français, sa rentabilité, toutes choses égales par ailleurs, est aujourd’hui supérieure de 30 % à celle de son partenaire. Dans le même temps, Air France a fait du surplace.

      Dès lors, on comprend les réticences à laisser le manche à un pilote moins performant, prompt à dilapider les fruits des efforts d’un copilote qui n’aurait pas son mot à dire sur le plan de vol. Mais la méthode est contre-productive et le moment mal choisi.

      Et quel moment serait opportun, à votre avis, pour appeler l’#actionnaire_calamiteux (#sûr_de_lui_et_dominateur aurait dit un grand ancien…) au respect de ses actionnaires minoritaires et, accessoirement, de ses engagements ?

  • Secret Défense
    https://www.franceculture.fr/emissions/le-journal-des-idees/le-journal-des-idees-du-mercredi-27-fevrier-2019


    Alors que des centaines de personnes ont quitté hier encore le dernier réduit du groupe Etat islamique, le colonel Legrier a critiqué la stratégie de la coalition en Syrie.

    Il était jusqu’à sa relève récente – au terme de son mandat – à la tête des 200 artilleurs qui ont contribué à la réduction des derniers bastions de Daech. Il s’exprime à propos de la bataille d’Hajin, achevée en janvier dernier, et non de celle qui est en cours à Baghouz, mais ses analyses valent également dans ce cas. Le Monde publie de larges extraits de son texte* qui dénonce une guerre par procuration, sous-traitée aux FDS arabo-kurdes sur le terrain, et une approche exclusivement « tournée vers la suprématie technologique ». La coalition aurait ainsi perdu la maîtrise du « tempo stratégique » et intensifié les bombardements au prix de la destruction des infrastructures, une approche assumée sans complexe par les Américains mais que le colonel Legrier estime ne pas être la nôtre. Il rappelle que Mossoul et Raqqa ont subi le même sort : une destruction quasi complète.

    *https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/26/la-bataille-d-hajin-victoire-tactique-defaite-strategique-le-texte-qui-embar

    #colonel_Legrier

    https://seenthis.net/messages/760517

  • « Le costume de tueurs de la consommation n’est-il pas trop grand pour les “gilets jaunes” ? », Philippe Askenazy
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/26/philippe-askenazy-le-costume-de-tueurs-de-la-consommation-n-est-il-pas-trop-

    Les premiers signes d’une baisse de la consommation sont bien antérieurs au mouvement de contestation, note, dans sa chronique au « Monde », l’économiste Philippe Askenazy.

    Chronique « Tendances France ». La croissance a marqué le pas fin 2018, du fait d’une #consommation atone. Les soldes d’hiver ont été décevantes. Politiques et analystes ont vite fait d’attribuer cela aux « gilets jaunes » : les commerces des centres-villes ont perdu des clients les samedis de manifestation et les restrictions de circulation à certains ronds-points ont perturbé les zones commerciales périphériques. Le costume de tueurs de la consommation n’est-il cependant pas trop grand pour les « #gilets_jaunes » ?

    Les difficultés des magasins en dur auraient dû induire un report massif sur le e-commerce : les principaux sites ont maintenu leurs délais de livraison, et les blocages de dépôts ont été rares et ponctuels. Or, les chiffres de la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad) révèlent l’absence de ruée chez ses adhérents. Au contraire, en décembre, le e-commerce n’aurait progressé que de 6 % sur un an, un très net ralentissement par rapport aux 15 % de hausse jusqu’en octobre.

    D’où une autre interprétation : entendre des « gilets jaunes » décrire des vies de restrictions ne donnait guère envie d’acheter du superflu. Encore leur faute, donc ? Peut-être pas…
    Les conjoncturistes disposent de mesures des anticipations des entreprises et des ménages. Un des indices synthétiques phares de l’Insee est la confiance des ménages. De nombreux travaux montrent qu’il est un prédicteur de l’évolution de la consommation à court terme. Or, dès le mois de février 2018, il entame une descente. En mai, il passe sous sa moyenne historique. En septembre, il est au plus bas depuis avril 2016. Toutes les composantes se détériorent, en particulier l’opportunité de faire des achats importants et les perspectives d’évolution du niveau de vie. Ces chiffres auraient dû laisser prévoir un gros coup de frein à la consommation à la fin de l’année 2018. « Gilets jaunes » ou pas.

    Excès d’optimisme
    Le raisonnement du gouvernement et des conjoncturistes a été différent. Ils ont estimé que les Français n’avaient pas intégré dans leurs anticipations l’exonération de cotisations des salariés du privé et la baisse de la taxe d’habitation prévue en octobre. Leur confiance allait donc remonter dès novembre et la consommation dans son sillage, dès qu’ils liraient leur fiche de paye et leur feuille d’impôt. Tout aussi optimistes, les commerçants affichaient au début de l’automne des anticipations de hausse des achats et constituaient des stocks pour un Noël qui s’annonçait en fanfare.

    « Il faut questionner la pertinence de la mesure officielle du pouvoir d’achat en France »
    Patatras, la confiance s’est effondrée en novembre, notamment les opportunités d’achats. Difficile d’incriminer les « gilets jaunes » : l’enquête a été menée dans la première partie du mois, et l’acte I était le 17 novembre. On peut donc se demander si les dirigeants économiques, en imaginant des Français myopes que la pédagogie des réformes leur en ferait comprendre les avantages, n’ont pas été, eux, aveugles devant la montée d’un mécontentement social qui ressortait des enquêtes auprès des ménages dès le printemps.

    Il faut aussi questionner la pertinence de la mesure officielle du pouvoir d’achat en France. Elle suit une approche selon les comptes nationaux qui peut parfois s’éloigner du porte-monnaie. Par exemple, si un médicament est déremboursé et que son fabricant en baisse le prix pour sauver son marché, l’indice des prix à la consommation (IPC) diminue. Comme c’est cet indicateur qui est utilisé dans le calcul officiel du pouvoir d’achat, ce dernier augmente !
    En revanche, les normes Eurostat (indice des prix à la consommation harmonisés, IPCH) feraient, elles, apparaître une hausse de prix car elles retiennent la somme nette après remboursement que le consommateur doit sortir de sa poche. Or, en octobre et novembre 2018, l’#inflation mesurée par l’IPCH était significativement supérieure à celle de l’IPC, ce qui confirmait une dégradation de la situation des Français.

    L’indice Insee de confiance des ménages s’est redressé en janvier ; celui de février sera publié le 26 février. L’histoire retiendra peut-être que les concessions obtenues par les « gilets jaunes » ont permis de rétablir un minimum de confiance et sauvé l’économie française !

    • Cet article ne comporte qu’une chose utile, une amorce de critique de la mesure de l’inflation. Pour le reste il me semble qu’il s’agit d’un intellectuel de gauche qui sous couvert de science diffuse une théorie implicite de l’impuissance populaire et de l’innocuité des luttes. Le populaire tout ce qu’il peut c’est consommer si, éclairé, on lui en donne les moyens. Keynes, plus cheap que jamais. En plus il se moque du monde en faisant des « mesures » Macron l’élément déterminant d’un efficace effet placebo.
      #économiste #innocentiste

  • Venezuela : articles du Monde sur les événements du week-end.
    (notez que dans les deux premiers « factuels », l’incendie des camions provoqué par les cocktails Molotov n’est pas même mentionné alors qu’il saute aux yeux sur la photo d’ouverture qui laisse même penser à un pillage en règle…)

    Aux frontières du Venezuela, scènes de confusion et de violences
    25/02, 15h28-15h35
    https://www.lemonde.fr/international/article/2019/02/25/aux-frontieres-du-venezuela-scenes-de-confusion-et-de-violences_5428069_3210


    A 15 km au nord [du pont international Simon Bolívar], un camion d’aide humanitaire a été bloqué puis vidé sur le pont Francisco-de-Paula-Santander, qui relie la Colombie et le Venezuela.
    FERNANDO VERGARA / AP

    Des centaines de Vénézuéliens se sont mobilisés ce week-end aux frontières brésilienne et colombienne, mais les camions d’aide humanitaire sont restés bloqués par les forces de sécurité. Les anti-Maduro attendent, eux, qu’une directive d’action soit donnée.
    […]
    Il s’agit des fameux colectivos (« collectifs ») mis en place par Hugo Chavez et développés par Nicolas Maduro. Ces groupes de civils armés ont fait régner la terreur pendant plusieurs heures, samedi, à la frontière avec la Colombie. Mais il n’y a pas eu de mort.

    Les services migratoires colombiens ont par ailleurs confirmé, dimanche, que 156 membres des forces armées vénézuéliennes avaient déserté en quarante-huit heures. Une victoire à relativiser pour l’opposition, alors que les forces de sécurité vénézuéliennes comptent plus de 350 000 membres.

    Note : El Nacional (d’opposition) n’a mentionné nulle part l’intervention de collectivos, mais parle d’affrontements avec la police et la garde nationale (bien présentes sur les photos).

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    Escalade de violence aux frontières du Venezuela
    25/02, 17h57 (intégralité de l’article accompagnant une vidéo)
    https://www.lemonde.fr/international/video/2019/02/25/escalade-de-violence-aux-frontieres-du-venezuela_5428134_3210.html

    Depuis le samedi 23 février, la situation est toujours tendue aux frontières vénézuéliennes. Les violences ont fait au moins quatre morts et plus de 300 blessés.

    De l’aide humanitaire bloquée aux frontières vénézuéliennes : la situation dure depuis plusieurs jours et samedi 23 février la situation s’est tendue. Le président autoproclamé, Juan Guaido, avait donné au président officiel, Nicolas Maduro, jusqu’à cette date pour laisser entrer au Venezuela des camions de vivres et de médicaments. Refus catégorique du président en place. Les partisans de Guaido ont ainsi été violemment repoussés par les forces de sécurité, toujours fidèles à Nicolas Maduro.

    Gaz lacrymogènes, incendies, jets de projectiles, barricades… les violences ont fait au moins quatre morts et plus de 300 blessés, selon l’ONU. Du côté des forces de sécurité, les désertions se sont malgré tout multipliées. Face à une dangereuse escalade, Juan Guaido a demandé à la communauté internationale de considérer « toutes les options » pour résoudre la crise qui touche le pays.

    • Devant l’échec manifeste de l’effondrement du gouvernement Maduro que le buzz pré-23F laissait espérer, les appuis internationaux de Guaidó prennent un peu de marge…

      Après les bravades, le Brésil tente de calmer le jeu au Venezuela
      25/02, 11h21
      https://www.lemonde.fr/international/article/2019/02/25/apres-les-bravades-le-bresil-tente-de-calmer-le-jeu-au-venezuela_5427950_321


      Le vice-président brésilien Hamilton Mourao, à Brasilia le 21 février 2019.
      SERGIO LIMA / AFP

      La présidence brésilienne appelé la « communauté internationale » à reconnaître massivement le président autoproclamé du Venezuela, Juan Guaido.

      Après les violents heurts du samedi 23 février, le président brésilien, Jair Bolsonaro, a fait l’effort d’écrire un Tweet en espagnol pour soutenir les Vénézuéliens, qui se sont battus parfois au prix de leur vie afin de déstabiliser un Nicolas Maduro basculant chaque jour un peu plus dans l’autoritarisme. « Courage à nos frères vénézuéliens. Dieu est aux commandes », a déclaré le leader de l’extrême droite brésilienne.
      […]
      De la part du chef d’Etat brésilien comme de son ministre des affaires étrangères, Ernesto Araujo, habituellement prompt aux envolées belliqueuses envers le Venezuela de Maduro, ce ton diplomatique détonne.

      Marquant l’embarras du président brésilien, le propos atteste du changement de position du pays face à une crise à l’issue incertaine. Hier prêt à jouer les protagonistes alliés à « 100 % » avec les Etats-Unis pour en finir avec un chavisme honni, le géant d’Amérique

      #paywall

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      Venezuela : même s’il est anti-Maduro, le « groupe de Lima » ne veut pas d’usage de la force
      25/02, 22h12, mis à jour 26/92, 06h54
      https://www.lemonde.fr/international/article/2019/02/25/venezuela-les-etats-unis-soutiennent-guaido-a-100-et-n-ecartent-aucune-optio


      Le président autoproclamé du Venezuela, Juan Guaido, accompagné du président guatémaltèque, Jimmy Morales, du président colombien, Ivan Duque, et du président panaméen, Juan Carlos Varela, lors d’une réunion du groupe de Lima, en Colombie, lundi 25 février 2019.
      Martin Mejia / AP

      Cette alliance de quatorze Etats a répété que « la transition vers la démocratie doit être menée pacifiquement » et regretté la « grave situation humanitaire ».

      Le groupe de Lima, cette alliance de quatorze Etats majoritairement hostiles au président chaviste , a plaidé, lundi 25 février, pour une transition démocratique au Venezuela. Insistant sur la « grave situation humanitaire » dans le pays, ses membres ont cependant écarté l’usage de la force envisagé par Washington, allié de l’opposant Juan Guaido.

      Les Etats qui composent cette alliance ont ainsi réitéré :
      « leur conviction que la transition vers la démocratie doit être menée par les Vénézuéliens eux-mêmes pacifiquement, dans le cadre de la Constitution et du droit international, et soutenue par des moyens politiques et diplomatiques, sans usage de la force ».

    • Deux tribunes, datées du 26/03
      (également d’un côté, également de l’autre,…)

      Venezuela : « Le régime de Maduro se targuait d’agir au nom du peuple, aujourd’hui il le laisse mourir »
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/26/venezuela-le-regime-de-maduro-se-targuait-d-agir-au-nom-du-peuple-aujourd-hu

      Alors que le gouvernement vénézuélien bloque l’arrivée de l’aide humanitaire et face à une tragédie de dimension internationale, les pays voisins du Venezuela et les puissances occidentales « ont été contraints de réagir », soulignent deux universitaires et une journaliste, dans une tribune au « Monde ».

      Fini le déni, c’est peut-être la chance pour un peuple de renaître demain. L’aide humanitaire, dernier épisode en date de la crise vénézuélienne, agit comme un puissant révélateur sur la nature du projet chaviste, dont Nicolas Maduro est l’héritier. En refusant à sa population son libre accès, l’Etat vénézuélien montre jusqu’où il peut aller dans la course à la fatalité.

      #paywall

      ===================

      Venezuela : « Pourquoi ces ultimatums typiques des époques impériales ? »
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/26/venezuela-pourquoi-ces-ultimatums-typiques-des-epoques-imperiales_5428317_32

      Selon Boaventura de Sousa Santos, figure du Forum social mondial, le Venezuela est à la veille d’une intervention militaire américaine appuyée par l’Europe, alors même que les démocrates de ce pays réclament une solution négociée.

      Ce qui se passe au Venezuela est une tragédie annoncée, qui va entraîner la mort de beaucoup d’innocents. Le pays est à la veille d’une intervention militaire étrangère et le bain de sang pourrait atteindre des proportions dramatiques. Celui qui l’affirme sait de quoi il parle : c’est le plus connu des leaders de l’opposition à Nicolas Maduro, Henrique Capriles. Il assure que le président fantoche Juan Guaidó est en train de faire des Vénézuéliens de la « chair à canon ». Il sait qu’Hugo Chávez [président de 1999 à 2013] avait pris très au sérieux le précédent Salvador Allende [renversé par un coup d’Etat soutenu par les Etats-Unis en 1973] au Chili, et qu’il avait armé la population civile.

      Les milices, bien sûr, peuvent être désarmées, mais cela ne se fera pas sans résistance. Capriles sait aussi que malgré l’immense souffrance à laquelle est soumis le pays par le mélange des fautes politiques internes et des pressions externes, notamment l’embargo (condamné par l’ONU), un sentiment d’orgueil nationaliste reste chevillé au corps du peuple vénézuélien, qui n’acceptera pas d’intervention étrangère.

  • L’espérance de vie en panne (Éditorial, LeMonde.fr, 19.02.19)
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/19/l-esperance-de-vie-en-panne_5425318_3232.html

    Après avoir augmenté de trente ans depuis le début du XXe siècle, l’#espérance_de_vie plafonne en France depuis quatre ans, révélant une image peu rassurante de la #société d’aujourd’hui.
    […]
    Aux Etats-Unis, on observe même depuis trois ans un recul inquiétant de l’espérance de vie, notamment du fait d’une explosion des #overdoses médicamenteuses, des #suicides et des maladies chroniques provoquées par l’#obésité.
    […]
    L’une des hypothèses consiste à mettre en cause la convergence des modes de vie entre les hommes et les femmes.
    […]
    Autre piste à ne pas négliger : le creusement des #inégalités qui taraude les sociétés occidentales.

  • Mon idée pour la France : « Créer un média par établissement scolaire »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/21/mon-idee-pour-la-france-creer-un-media-par-etablissement-scolaire_5426119_32

    La pratique existe déjà mais elle repose sur l’envie des personnels. On voit fleurir par exemple depuis une petite dizaine d’années des webradios dans des écoles, collèges ou lycées et les Comités territoriaux de l’audiovisuel (CTA) ouvrent de plus en plus d’antennes temporaires scolaires.

    Hélas, la proposition de 2015 n’a été ni vraiment suivie, ni systématisée et nombre d’élèves en sont encore privés. Elle répond pourtant à des nécessités criantes. Parce que c’est en produisant des contenus médiatiques (qu’ils aient pour support la radio, la presse écrite, la vidéo ou le web) qu’on devient un lecteur, un auditeur, un téléspectateur averti. Qui a fait de la radio une fois ne l’écoute plus jamais de la même oreille : il sait qu’un micro-trottoir est le résultat d’un choix, d’un angle, que les recherches doivent être sérieuses, validées et que l’information se vérifie et se contextualise.
    Article réservé à nos abonnés Lire aussi Mon idée pour la France : doter notre pays d’une « constitution éducative »

    Et cette leçon s’étend à d’autres situations : elle permet de comprendre qu’on ne doit pas, sur les réseaux sociaux, répercuter sans vérifier, s’indigner sans savoir qui parle, ou se complaire dans la surenchère scandaleuse en partageant une image tronquée.

    Parce que les médias concernent tous les champs du savoir et qu’on peut pratiquer dans le cadre scolaire le journalisme scientifique, sportif, littéraire, etc. Chaque enseignant peut y trouver sa place et traiter des contenus de son programme en faisant produire les élèves.

    Les exemples ne manquent pas. Sont aussi très formateurs les temps dédiés à la publication, à l’éditorialisation, à sa technique mais aussi à son éthique et à ses règles, qui permettent de saisir concrètement les questions de droits

    Parce que produire des contenus médiatiques c’est à la fois travailler en équipe et s’ouvrir au monde extérieur, sortir de l’école ou montrer ce que l’on y fait. C’est communiquer « pour de vrai » et faire en sorte que l’école ne soit plus un monde clos.

    #Education #Médias #Publication

  • Aides sociales : « Ne luttons pas davantage contre les pauvres que contre la pauvreté », Axelle Brodiez-Dolino, chercheuse au Centre Norbert-Elias (EHESS, universités d’Avignon et d’Aix-Marseille)
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/19/aides-sociales-ne-luttons-pas-davantage-contre-les-pauvres-que-contre-la-pau

    L’historienne Axelle Brodiez-Dolino revient aux racines du discours, récemment remis en avant par Edouard Philippe, sur la « contrepartie » aux aides sociales.

    Tribune. Alors que les « gilets jaunes » focalisent l’attention sur les couches populaires laborieuses, le premier ministre vient de faire diversion, dans le cadre du grand débat national, le vendredi 15 février, en exhumant l’idée de contreparties aux aides sociales. Flattant implicitement ceux qui n’y recourent pas, tout en répondant à son électorat. S’il reconnaît le sujet comme « explosif », c’est qu’il fait référence au concept du #workfare anglo-américain, rarement loué comme un modèle enviable ; et que, (re)lancé en 2011 par Laurent Wauquiez puis Nicolas Sarkozy, puis adopté dans le Haut-Rhin, il a suscité des levées de boucliers.

    Car il englobe deux préoccupations. L’une, économique : faire que chacun, surtout s’il reçoit de la collectivité plus qu’il ne semble apporter, contribue ostensiblement. L’autre, morale : imposer le maintien d’une saine occupation, contre l’oisiveté et les activités illicites suspectées chez les #allocataires.

    Loin d’être nouvelle, l’idée était déjà soulevée par le Comité de mendicité en 1790 : « Si celui qui existe a le droit de dire à la société “Faites-moi vivre”, la société a également le droit de lui répondre “Donne-moi ton travail”. » Elle était au cœur du « grand renfermement », dans les « hôpitaux généraux » (XVIIe-XVIIIe siècles) puis les « dépôts de mendicité » (XVIIIe-XIXe siècles), ainsi qu’en Angleterre et aux Etats-Unis dans les workhouses. Le pauvre « valide », en âge et en état de travailler, bénéficiait, si l’on ose dire, du gîte et du couvert au sein d’un système #disciplinaire carcéral fondé sur la #mise_au_travail. Ce système, que les pouvoirs publics se sont maintes fois évertués à réactiver, a de l’avis général (contemporains de l’époque comme historiens d’aujourd’hui), fait la preuve de sa totale inefficacité. Au point qu’il a fini par être, au début du XXe siècle, discrètement abandonné.

    Un principe récusé par les lois sociales

    Hors son échec historique, ce principe est discutable. Il ne relève pas du hasard que sa disparition coïncide avec l’apparition des lois sociales : en forgeant des #droits, la IIIe République a récusé la #contrepartie. Elle a, avec le solidarisme, renversé l’idée de dette, qui n’était plus celle de l’individu envers la société, mais de la société envers l’individu pour lui assurer sa subsistance.

    « Le “devoir de travailler” n’a de sens qu’avec son corolaire, le “droit d’obtenir un emploi” »

    Du début du XXe siècle à 1988, un droit a donc été un pur droit. Les préambules des Constitutions des IVe et Ve Républiques ont toutefois été prudents : « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi (…). Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler, a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence. »

    C’est ce qui a légitimé, dans la loi de 1988 sur le #RMI, l’imposition d’une contrepartie : le contrat d’insertion. Lequel puisait à la pratique alors novatrice d’ATD Quart monde de rééquilibrer le rapport d’assistance en mettant sur un pied d’égalité les contractants. Le « contrat-projet » du rapport Wresinski s’est mué en contrat d’insertion du RMI.

    Mais c’est aussi là qu’il a été dévoyé, vidé des deux grandes caractéristiques du contrat : librement consenti, et équilibré entre les deux parties. On ajoutera que le « devoir de travailler » n’a de sens qu’avec son corolaire, le « droit d’obtenir un emploi » – qui n’existe toujours pas aujourd’hui.

    Déséquilibre entre offre et demande d’emploi

    Car le problème français n’est pas d’occuper les #chômeurs. Il est celui d’un déséquilibre abyssal entre offre et demande d’#emploi : au minimum, un ratio de 1 à 10 ; et qui serait plutôt situé entre 1 à 17 et 1 à 42 (selon le rapport 2017 du Secours catholique). On peut toujours « traverser la rue », selon la formule d’Emmanuel Macron, mais la demande reste très supérieure à l’offre. La France recourt en outre largement à l’emploi précaire et aux contrats très courts, paupérisants, désincitatifs et coûteux (transports, gardes d’enfants, etc.). S’y ajoutent la désadéquation entre formations et emplois disponibles, ainsi qu’entre lieux d’emplois et lieux de vie. Si, comme le dit le premier ministre, « on veut qu’il y ait un avantage objectif à retourner à l’activité », mieux vaudrait aborder le problème sous ces angles-là.
    Mettre en regard, de façon simpliste, chômage et emplois non pourvus, c’est faire fi de ces chantiers politiques et imputer le paradoxe à des chômeurs qui feraient la fine bouche devant les emplois proposés ; donc rendre les plus démunis responsables. Car fondamentalement, le recours aux aides sociales découle du découragement face aux échecs répétés à s’insérer de façon durable et décente sur le marché du travail.

    La ministre des solidarités et de la santé Agnès Buzyn veut inscrire la « stratégie pauvreté » annoncée en septembre 2018 « dans la fidélité aux valeurs profondes qui ont construit notre république sociale ». Mais ne choisissons pas la filiation de la Ire République, qui luttait davantage contre les pauvres que contre la pauvreté, mais celle des républiques suivantes. Le slogan de la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron est beau : « Faire plus pour ceux qui ont moins. » Ne le dévoyons pas, à peine engendré, en « demandant plus à ceux qui ont moins ».

    #guerre_aux_pauvres

  • « Chlordécone et trémolite s’inscrivent dans une histoire durable de violences coloniales invisibles »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/18/chlordecone-et-tremolite-s-inscrivent-dans-une-histoire-durable-de-violences

    Dans sa chronique, l’anthropologue Michel Naepels rapproche l’utilisation de l’insecticide à caractère perturbateur endocrinien dans les Antilles françaises et celle d’une roche proche de l’amiante utilisée en Nouvelle-Calédonie.

    #paywall #colonialisme #pesticides

  • « La Ligue du LOL pourrait être notre affaire Weinstein »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/15/la-ligue-du-lol-pourrait-etre-notre-affaire-weinstein_5423700_3232.html

    Il aura donc fallu attendre une bonne année pour que l’affaire Harvey Weinstein éclabousse la France. Il aura fallu un article de Libération, publié le 8 février, pour apprendre qu’une trentaine de membres d’un groupe nommé Ligue du LOL, baignant dans la culture numérique et les réseaux sociaux, souvent journalistes, pour la plupart des hommes, se sont livrés à du harcèlement, le plus souvent contre des femmes, entre 2009 et 2012. Et la déflagration est énorme.

    Sans Weinstein, il n’y aurait sans doute pas d’affaire de la Ligue du LOL. Et cette dernière pourrait être notre affaire Weinstein. « Un #meetoo à la française », jugent plusieurs titres de la presse étrangère.

    A la manière du « dîner de cons », certains chassent en meute, en « boys club », comme il y eut la vogue des « boys band » musicaux, et cisèlent des phrases-chocs (punchlines), sur le modèle du stand-up au théâtre ou de la sitcom télévisuelle. Ils manient le photomontage porno, le canular téléphonique, créent des petites performances tyranniques. Bref, c’est bien une nouvelle culture.

    Un membre de la Ligue du LOL a dit : « On trouvait ça cool. » Ce cool a broyé des femmes, il s’est traduit en haine, moqueries, injures et humiliations en tous genres, notamment sur le physique, provoquant douleurs ou dépressions.

    Ce qui mène à ceci. Pour Weinstein comme pour la Ligue du LOL, le harcèlement n’est pas une spécialité culturelle ou médiatique, mais un attribut du pouvoir. Leurs auteurs tiennent une place et ils en abusent. En revanche, le combat à mener pour y remédier est culturel. Aussi, comme après le grand déballage qui a suivi Weinstein, nul ne sait jusqu’où va aller l’affaire de la Ligue du LOL. Pour l’instant, l’émoi est fort dans le monde de la presse et des écoles de journalisme. Mais il pourrait s’étendre ailleurs dans la société.

    #Ligue_LOL #Cyberharcèlement

  • « Prendre » : Wilfried Lignier est allé là où les tout-petits font société
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/07/prendre-wilfried-lignier-est-alle-la-ou-les-tout-petits-font-societe_5420328

    Quel parent n’a pas éprouvé, en refermant la porte de la crèche dans laquelle il venait de déposer son enfant, ce petit malaise passager qui tient au caractère irréel du lieu ? Hors de la société, pourrait-on dire, et doublement. La crèche ressemble d’une part à une bulle protégée des vicissitudes de la vie ordinaire. Elle paraît d’autre part tout occupée à pacifier des ­conflits qui, vus à hauteur d’adulte, semblent parfois naître de pulsions naturelles erratiques plutôt que de motifs explicables.

    Fuck #paywall, est-ce qu’à tout hasard, quelqu’un ne l’aurait-il pas vu traîné somewhere dans les tréfondeurs du l’internet ?

    • « Prendre » : Wilfried Lignier est allé là où les tout-petits font société

      Pour son nouvel essai, le sociologue a longuement observé, en crèche, comment les enfants saisissent, prêtent, donnent… et reproduisent les inégalités.

      Par Gilles Bastin Publié le 07 février 2019 à 09h00 - Mis à jour le 07 février 2019 à 09h00

      Prendre. Naissance d’une pratique sociale élémentaire, de Wilfried Lignier, Seuil, « Liber », 328 p., 24 €.

      Quel parent n’a pas éprouvé, en refermant la porte de la crèche dans laquelle il venait de déposer son enfant, ce petit malaise passager qui tient au caractère irréel du lieu ? Hors de la société, pourrait-on dire, et doublement. La crèche ressemble d’une part à une bulle protégée des vicissitudes de la vie ordinaire. Elle paraît d’autre part tout occupée à pacifier des ­conflits qui, vus à hauteur d’adulte, semblent parfois naître de pulsions naturelles erratiques plutôt que de motifs explicables.

      Cette étrangeté fait obstacle au regard de la sociologie. Elle force à observer les faits et gestes des plus petits, à écouter des histoires que les adultes qualifient d’enfantillages. Tout le contraire des grandes questions de société à propos desquelles débattent les sociologues. De plus, ce qui se passe dans ce lieu où tout semble être réduit à sa fonction (tapis plastifiés, chaises et tables minuscules, cubes de couleur et livres en carton…) est de l’ordre de la pratique la plus élémentaire et répétitive, de l’acte à l’état brut. Encore une raison de s’en éloigner si l’on aspire à écrire des choses profondes sur la société ?
      Un apprentissage capital

      C’est tout le contraire pour Wilfried Lignier. Après des travaux consacrés à la désignation par la société d’enfants dits « surdoués » (La Petite Noblesse de l’intelligence. Une sociologie des enfants surdoués, La Découverte, 2012) et aux représentations enfantines de la société et de la politique (L’Enfance de l’ordre. Comment les enfants perçoivent le monde social, Seuil, 2017), le sociologue a consacré pour ce livre une année de recherches aux crèches dans lesquelles sont accueillis les enfants de 2 à 3 ans. Plus précisément, à un geste particulier que les enfants accomplissent en ­permanence dans ce type de lieux : celui de prendre (des objets ­principalement) et par la suite de donner ce que l’on a pris, de le garder ou de l’échanger.
      Lire aussi Les tout-petits ont le sens de la justice

      Pour le sociologue, la crèche est un « domaine du prenable » : on y apprend avant tout à prendre. Et cet apprentissage, qui demande un effort considérable, est aussi d’une importance capitale pour la société. En apprenant d’abord à désirer ce qui est désirable (voiture ou compote), à s’éloigner de ce qui n’est pas prenable (le doudou d’autrui), à demander avant de prendre ou à donner afin de se faire des alliés (« Tiens », dit-on, un objet à la main, pour entrer en relation), les enfants apprennent en effet tout à la fois les règles des institutions (comme la propriété), l’inégalité (parce que tous ne disposent pas à la maison d’autant de choses prenables qu’il y en a à la crèche) et la hiérarchie des biens culturels (ainsi du livre dont la crèche apprend très vite aux enfants que l’on ne peut le manipuler qu’en présence d’un adulte et lors d’une cérémonie de lecture).
      « L’énergie sociale »

      Wilfried Lignier excelle, dans ce livre fondé sur de fines observations, à faire sentir « l’énergie sociale » qui émane de la crèche et préexiste aux pratiques des enfants qu’elle guide. Cette énergie est le plus souvent canalisée par la crèche elle-même : on y apprend de façon très codifiée qu’il faut partager et comment on doit prendre les choses sans agresser autrui. Mais il s’y joue également d’autres processus sociaux tout aussi formateurs pour les enfants.

      La reproduction des inégalités est de ceux-là. Dans la crèche qu’a étudiée le sociologue cohabitent des enfants de milieu social privilégié, qui disposent à la maison de nombreux objets pour jouer, et d’autres de milieu social défavorisé, qui n’en disposent pas. Leur rapport à la prise est profondément différent. Les premiers semblent moins « inquiets » lorsqu’ils se voient privés temporairement d’un objet qu’ils avaient pris, alors que les seconds manifestent fréquemment une « impatience distinctive » à l’égard des objets, impatience qui les gêne dans ce lâcher-prise qu’est le don, ferment pourtant des alliances et du pouvoir en société : « L’appropriation des choses, note en effet le sociologue, passe pour eux par un volontarisme de tous les instants. »

      La sociologie a encore beaucoup de chemin à parcourir pour comprendre tout ce qui se joue dans ces premières prises enfantines et le documenter avec plus de matériaux que ceux qui sont fournis dans ce livre. Mais en redonnant de la grandeur aux actes quotidiens et banals des plus petits, en montrant comment, dès la prime enfance, « le geste qui nous porte vers les choses est un geste social », Wilfried Lignier accomplit un pas ­notable dans cette direction.

      Extrait

      « Ce que nous tenons sans aucun doute de la nature, ce qui est irrémédiablement en nous depuis la naissance, c’est un désir générique d’appropriation de ce qui nous entoure. Mais l’intensité de notre tendance à prendre lors de nos premières années d’existence (…), ainsi que la manière dont nous avons ­tendance à procéder au moment même de l’acte, tout cela est forcément ­particulier, c’est-à-dire particularisé par des conditions locales singulières : une époque, un milieu, un moment, une interaction. Les premières prises ne sont dès lors plus envisageables comme une confrontation nature/culture. Elles doivent être analysées comme un processus forcément social de formation de pratiques distinctives à partir d’une tendance générique à s’approprier le monde. » Pages 17-18

      Gilles Bastin (Sociologue et collaborateur du « Monde des livres »)
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  • « En finir avec l’#hypocrisie sur la question des #pesticides »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/05/en-finir-avec-l-hypocrisie-sur-la-question-des-pesticides_5419246_3232.html

    Au bout du compte, les protocoles d’évaluation des pesticides vis-à-vis des pollinisateurs en #Europe continuent de se référer à un texte de 2002, un copié-collé de l’#industrie, prétendument « actualisé » en 2010. Selon les spécialistes du sujet, ces protocoles sont aujourd’hui totalement obsolètes et se révèlent incapables de mesurer la dangerosité pour les abeilles des produits phytosanitaires mis sur le marché. Cerise sur le gâteau, les dernières propositions de la Commission européenne prennent uniquement en compte les tests sur la #toxicité aiguë, mais ignorent ceux sur la toxicité chronique, pourtant reconnue comme étant une des causes importantes de la mortalité des #pollinisateurs et pour l’étude de laquelle existent des tests homologués par l’#OCDE.

  • « La France doit s’engager pour une issue diplomatique au Venezuela »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/07/la-france-doit-s-engager-pour-une-issue-diplomatique-au-venezuela_5420341_32

    Dans une tribune au « Monde » cosignée par Jean-Luc Mélenchon, un collectif de personnalités de gauche milite pour une solution politique et pacifique.

    Le Venezuela est prisonnier d’un conflit civil qui a polarisé à l’extrême l’ensemble de la société et altéré l’Etat de droit et la démocratie. Il faudrait se positionner par rapport à une alternative faussement abstraite : faut-il soutenir le camp de Nicolas Maduro ou celui de Juan Guaido ? Faut-il soutenir celui du président constitutionnel mais contesté ou celui du président « par intérim » autoproclamé, dont la légitimité ne provient pas du suffrage universel ? En réalité, la question n’est déjà plus celle-ci. Ce dont il est question désormais, c’est de stopper d’urgence les logiques de surenchère et d’ingérence partisanes activées au nom de la « démocratie » et des droits de l’homme pour servir, in fine, une stratégie de « changement de régime ».

    « Ce dont il est question désormais, c’est de stopper d’urgence les logiques de surenchère et d’ingérence partisanes »

    Au Venezuela comme ailleurs, les résultats de cette approche sont connus d’avance. Les crises de cette ampleur, complexes et bloquées, ne se règlent jamais par la force, l’ingérence, l’interventionnisme direct ou indirect. L’histoire de ce premier quart de siècle entamé, de l’Irak à la Libye en passant par la Syrie, ne nous a que trop édifiés quant à cette question. Partout, toujours plus de chaos, de violence, de désordres, et toujours moins de démocratie, de paix et de prospérité.

    #paywall itou

    • http://www.medelu.org/Qui-reconnait-qui | Maurice Lemoine

      « Mélange bâtard de ses deux prédécesseurs, le président Macron figure donc en première ligne de cette « communauté internationale » qui, à en croire la sphère médiatique, a reconnu la légitimité de Juan Guaido et de son « gouvernement de transition ». Information ou manipulation ?
      Côté pro-coup d’Etat, Washington et ses supplétifs. Le Groupe de Lima (13 pays latinos conservateurs plus le Canada). Le 4 février, depuis Ottawa, celui-ci s’est prononcé « pour un changement de régime sans usage de la force » en appelant… l’armée vénézuélienne « à se ranger derrière Juan Guaido ». Message subliminal : « On cherche un Pinochet sympa. » Et respectueux des nouvelles normes en matière de coup d’Etat.
      Traditionnellement, un « golpe » est défini comme la prise illégale et brutale du pouvoir par l’armée ou par une autorité politique bénéficiant de son soutien. Si le pire devait survenir au Venezuela en la figure d’un quarteron de généraux félons, qu’on n’imagine pas un scénario à la chilienne. L’opération porterait le tampon « méthode Honduras ».

      Dans ce pays, en juin 2009, ce sont le Parlement, la Cour suprême de justice et, dans l’ombre, Washington, qui se trouvent à la manœuvre pour renverser le président constitutionnel – mais de gauche – Manuel Zelaya. L’astuce (sur ordre impératif du gouvernement américain) : le 28 juin, c’est un commando militaire qui arrête et séquestre le chef de l’Etat, l’expédie à l’étranger et réprime violemment ses partisans. Toutefois, l’exécuteur des basses œuvres, le général Romeo Vásquez, remet immédiatement le pouvoir au président du Congrès. Une manœuvre parfaite : « soumis au pouvoir civil », qui lui a demandé d’agir pour défendre la Constitution, les militaires servent d’instrument à une « succession présidentielle ». Bientôt, le régime putschiste de Roberto Micheletti se verra rebaptisé « gouvernement de transition » [11]. Anesthésiée par la présence omniprésente des « costume cravate », l’opinion internationale n’y verra que du feu.

      Le Groupe de Lima, donc [12]. Les boutefeux européens : l’Allemagne, l’Espagne, la France, les Pays-Bas, le Portugal, le Royaume-Uni, bientôt rejoints par l‘Autriche, qui envoient un l’ahurissant ultimatum de huit jours au chef de l’Etat constitutionnel, lui enjoignant de convoquer une nouvelle élection présidentielle, puis reconnaissent le « fils de Trump » (en espagnol : « HijueTrumpa »). Comme l’a fait le 31 janvier – 430 « pour », 104 « contre » et 88 abstentions – le Parlement européen. Une résolution non contraignante, mais donnant le sens du vent mauvais.

      Derniers appuis au « dictateur », soutiennent devant micros et caméras les disciples du faux-semblant, la Russie, la Chine, la Corée du Nord, l’Iran, la Turquie et Cuba. Une liste qui, puant les « pays parias » à plein nez, est censée mettre un terme à tout débat. Sauf que le monde entier n’est pas obligé de croire ce genre de demi-vérité. Car, à l’examen, même l’Europe se divise. « Aussi incroyable que cela paraisse, s’étrangle L’Express (6 février), il y a au cœur de l’UE des gouvernements qui ne parviennent toujours pas à déclarer ouvertement que Nicolas Maduro, le maître de la clique de Caracas, s’est rendu illégitime (…). » Interdisant une position commune, la Grèce et l’Italie, ou la Roumanie refusent de suivre le troupeau ; seules dix-neuf nations de l’UE sur vingt-huit reconnaissent Guaido. »

  • Christiane Taubira : « Au Venezuela, respecter le droit »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/07/christiane-taubira-au-venezuela-respecter-le-droit_5420261_3232.html

    Dans une tribune au « Monde », l’ancienne garde des sceaux estime que l’Europe ne doit pas s’aligner sur l’interventionnisme des Etats-Unis mais qu’elle doit s’appuyer sur des règles claires pour préserver la paix.

    mais… #paywall