• Résonance… N°878 | Radio Univers | Radio Univers
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    Ce ne sont pas des balades comme l’ont été les manifs passées. Qu’ils puissent y laisser leurs yeux, leurs mains et même leur vie…, devrait amener tout un chacun à se poser des questions. Ou quand, samedi après samedi, sont absorbées des quantités inouïes de gaz dont la composition non-dévoilée par les autorités ressemblerait selon des médecins à un empoisonnement à l’acide cyanhydrique – terme qui vient de cyanure, qui lui-même vient du grec kuanos qui veut dire couleur bleu foncé.

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    Ce qui du coup, me ramène par le col de chemise à cet ouvrage de 531 pages, positionné en attente de reprise de lecture sur mes étagères depuis sa parution il y a quelques mois : Résonance : une sociologie de la relation au Monde. Dont l’auteur, Hartmut Rosa, philosophe et sociologue, est reconnu pour être le spécialiste des phénomènes d’accélération et de leurs conséquences sur notre mode de vie.

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    Le constat de Hartmut Rosa repose sur le fait que nous traversons une crise de relations : avec nous-même, avec la nature et avec les autres.

    « Ma thèse est la suivante : tout, dans la vie, dépend de la qualité de notre relation au monde, c’est-à-dire de la manière dont les sujets que nous sommes font l’expérience du monde et prennent position par rapport à lui, bref : de la qualité de notre appropriation du monde. Mais dans la mesure où les modes d’expérience et d’appropriation du monde ne sont jamais déterminés de façon purement individuelle, et sont toujours médiatisés par des modèles socioéconomiques et socioculturels, je nomme sociologie de la relation au monde le projet que je souhaite développer. La question centrale – savoir ce qui distingue une vie bonne d’une vie moins bonne – peut alors se reformuler comme suit : quelle est la différence entre des relations au monde réussies et non réussies ? Quand notre vie est-elle une réussite et quand est-elle un échec dès l’instant où nous ne voulons pas la mesurer à l’aune de nos ressources et des options qui s’offrent à nous ? »

    « On peut supposer de fait avec Albert O. Hirschman que les sociétés capitalistes ont une tendance inhérente à développer des traits pathologiques tant sous l’espèce de la peur que sous celle du désir : toutes les positions que les sujets peuvent adopter à l’égard du monde sont livrées l’une après l’autre aux forces érosives de la dynamique concurrencielle, de sorte que la crainte de rester sur le carreau, de se faire distancer, de ne plus être à la page, de ne plus pouvoir suivre ou d’être exclu devient un véritable mode d’existence : en ce sens, ces sociétés sont animées par la peur. Mais parce qu’elles sont aussi structurellement contraintes de produire en chaîne des désirs marchandisables qui ne peuvent jamais être assouvis à long terme (sous peine d’entraîner une diminution de l’intensité de la demande) et ne peuvent pas non plus être déçus ou transformés au point de quitter la sphère marchande, ces sociétés sont également poussées par le désir – sous cette forme douteuse du désir d’objet inhibiteur de résonance. Déçu, le désir de résonance cristallise en un désir accru d’objet (et, parallèlement, en un désir de position sociale, qui n’est jamais exempt de peur). Tel est, semble-t-il, le cœur secret du mécanisme, aussi complexe que stupéfiant, de la production capitaliste du désir. »