La Ligue du LOL, la prescription ne tient plus qu’à un tweet - Pénal

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    La prescription et l’oubli

    Traditionnellement, la prescription et l’oubli sont intimement liés. Le principal argument relatif à l’oubli considère qu’au fil des années, la tourmente se dissipe, les conséquences de l’infraction s’évanouissent et l’agitation collective disparaît. Ainsi, la prescription consacrerait juridiquement la fin du trouble à l’ordre public. Cela revient à supposer que, si l’agitation a disparu, le déclenchement de l’action publique aurait pour unique effet la réouverture de blessures cicatrisées.

    Parallèlement, l’oubli se manifeste sous une autre forme, celle de l’apaisement de la victime. Selon cet argument, la victime n’aurait plus besoin de réponse pénale, passé un certain temps.

    Toutefois, fonder l’institution sur la notion d’oubli rencontre rapidement quelques limites. En effet, nous évoluons dans une société hypermnésique car avant tout médiatique. Défiant l’effet du temps, internet peut faire ressurgir des événements que le législateur considérait pourtant comme « oubliés ». En témoignent les faits d’espèce, puisque ces cyberharcèlements réapparaissent après plusieurs années de silence. Rien ne s’efface. De même, il est difficile d’interpréter le silence comme un apaisement ou une renonciation. L’esprit humain ne semble pas si limpide et l’on sait pertinemment que nombreuses peuvent en être les causes. La peur, la culpabilité, le refoulement… Rien ne permet d’affirmer que tout silence signifie renonciation et oubli. User de celui de la victime pour fonder la prescription serait en abuser. À cet égard, les révélations concernant la Ligue du LOL illustrent parfaitement le fait que les victimes étaient loin d’avoir oublié. Des années après, les blessures n’étaient toujours pas cicatrisées.

    La situation semble plus complexe qu’il n’y paraît, « “la grande loi de l’oubli” n’apparaît plus dans notre société, tout à la fois société médiatique et de mémoire, comme une loi sociale si évidente qu’elle puisse fonder la prescription de l’action publique »10. Il nous est donc permis de nous interroger sur la connexion qui peut être faite entre prescription et sanction. Prescription pour mettre fin à la sanction, mais également prescription en tant que sanction.

    La prescription et la sanction

    Autour de l’idée de sanction gravitent deux fondements usuellement rattachés à la prescription. Le premier recouvre un aspect moral et touche au délinquant lui-même. Il se déduit de l’idée selon laquelle la vie du délinquant en attente d’une potentielle poursuite ne peut être qu’une vie effroyable, faite de crainte et d’angoisse. Finalement, une sanction en soi.

    À l’inverse, le second fondement s’éloigne du délinquant pour se rapprocher du ministère public. Il cristallise l’idée selon laquelle la prescription servirait à sanctionner le parquet pour son inaction et sa négligence, celle de ne pas avoir agi dans le temps imparti.