• Le tutoiement au travail, un subtil marqueur social, Baptiste Coulmont, Professeur de sociologie à l’Université Paris VIII
    https://www.lemonde.fr/sciences/article/2019/03/25/le-tutoiement-au-travail-un-subtil-marqueur-social_5440691_1650684.html

    Pour le sociologue Baptiste Coulmont, l’usage du « tu » reflète les frontières au bureau : entre groupes professionnels, entre groupes de sexe, entre générations.

    Carte blanche. Le tutoiement, affaire de feeling ou d’habitude ? Certains ont le tutoiement si facile qu’il semble être dans leur nature. Mais il se généralise, signe qu’il ne dépend pas que des individus. Il était déjà hégémonique pendant l’enfance, puis dans le monde étudiant. Il est maintenant omniprésent au #travail. C’est une des premières règles qu’on m’a indiquées, à mon arrivée à l’université Paris-VIII : « Ici on se tutoie. »

    On se tutoie parce qu’on s’estime être égaux. Mais voilà qu’aujourd’hui, en majorité, c’est aussi son chef qu’on tutoie, alors même qu’il nous commande. L’enquête COI sur les changements organisationnels et l’informatisation a demandé à 16 000 salariés, parmi de nombreuses autres questions, s’ils tutoyaient leur supérieur hiérarchique. Le plus souvent, la réponse est « oui ». Alex Alber (université de Tours) déplie les tenants et les aboutissants de cette pratique sociale faussement anodine dans le dernier numéro de la revue Sociologie du travail :
    « C’est d’abord une pratique d’hommes et de cadres du secteur privé. Seule une femme sur deux tutoie son chef. C’est pourtant le cas de sept hommes sur dix. »

    Les cadres tutoient leur « n + 1 » (qui est aussi cadre, et souvent de sexe masculin). Les employées et employés le font moins : leur chef n’est pas employé, il est cadre ou profession intermédiaire, et souvent d’un autre sexe qu’eux. Les plus jeunes tutoient plus que les plus âgés… et on tutoie d’autant plus son chef qu’il est plus jeune que nous.

    La plus ou moins grande fréquence du tutoiement reflète alors les frontières : entre groupes professionnels, entre groupes de sexe, entre générations. C’est un marqueur subtil des différences de pouvoir et de distance entre groupes. On voit bien qu’il ne s’agit pas là simplement de feeling : les grandes variables sociales sont associées à la fréquence du tutoiement du chef.

    Nouvelles formes d’organisation du travail

    Mais le plus intéressant émerge quand le sociologue se demande alors s’il ne s’agit pas d’habitudes ou d’une « culture » du tutoiement, qu’on sait fréquent dans les start-up, par exemple.

    Plutôt que vers une « culture du tu », c’est vers les nouvelles formes d’organisation du travail qu’il faut tourner son regard : on tutoie son « n + 1 » quand ce dernier n’a plus l’habit du « petit chef ». Le tutoiement du chef direct est plus fréquent quand les salariés font l’objet d’évaluations individualisées ou reçoivent des primes : le « management par objectifs », associé à l’autonomie dans les méthodes de travail, s’accompagne d’un recours plus intense au tutoiement.

    L’organisation en « groupes de projet », qui réunissent des salariés de niveaux hiérarchiques différents et venant de directions différentes, développe encore le recours au tutoiement, lingua franca des interactions. Dans ces mondes professionnels, le contrôle de l’activité est délégué à des outils standardisés qui servent d’interface entre le chef et ses subordonnés. Ce n’est plus le chef qui sanctionne, c’est la machine.

    Selon l’enquête COI, un monde résiste. Pourquoi donc ? Le tutoiement est associé à des relations souples, horizontales, égalitaires, des formes d’interactions socialement valorisées. Qui n’en voudrait pas ? Dans les administrations publiques de l’Etat, le recours au tutoiement est moins important. On vouvoie son chef. L’individualisation des carrières y est moins poussée que dans le secteur privé, car « le caractère impersonnel du statut limite la possibilité, pour le supérieur hiérarchique direct, de négocier les conditions d’emploi de l’agent », écrit Alex Alber. Le modèle bureaucratique distribue clairement les rôles hiérarchiques des fonctionnaires et limite alors l’attrait du tutoiement : la fiction du patron-copain n’y est pas tenable.

    J’ai pas l’âge, mais pour instaurer un minimum de distance, il m’arrive de répondre au #tutoiement qu’on a pas fait 68 ensemble. Ralbol de ces fausses proximités.

    #égalité (fausse)

  • Clément Goehrs, médecin de la génération IA
    https://www.lemonde.fr/sciences/article/2019/03/19/clement-goehrs-medecin-de-la-generation-ia_5438060_1650684.html

    Pharmacologue de poche

    Accessible sur smartphone ou ordinateur, la plate-forme d’IA de Synapse Medicine analyse les ordonnances et visualise les interactions médicamenteuses et leur potentielle gravité. Elle peut aussi rechercher si un symptôme allégué par un patient peut être un effet indésirable de l’un des traitements prescrits. A la ­manière des assistants virtuels intelligents de Google ou d’Amazon, ce pharmacologue de ­poche peut par ailleurs être interrogé par écrit ou oralement. Puis-je prescrire tel anti-inflammatoire en gel à une femme enceinte ? Quelle est la posologie de tel antibiotique… ? « La réponse est instantanée, et fondée sur les données les plus actualisées puisque Synapse lit en permanence les sources d’informations officielles sur les médicaments, dont les RCP

    #IA #algorithme #data

  • Les astéroïdes Bénou et Ryugu, deux amas de gravats sombres dans l’espace
    https://www.lemonde.fr/sciences/article/2019/03/19/les-asteroides-benou-et-ryugu-deux-amas-de-gravats-sombres-dans-l-espace_543


    L’ombre de la sonde Hayabusa-2 à la surface de l’astéroïde Ryugu.
    HANDOUT / AFP

    Les sondes japonaise Hayabusa-2 et américaine Osiris-Rex ont permis de collecter des données qui font l’objet de dix publications simultanées, mardi 19 mars, dans les revues scientifiques « Science » et « Nature ».

    Cela s’appelle une rafale éditoriale. Mardi 19 mars, les équipes de deux missions spatiales – la japonaise #Hayabusa-2, qui ausculte l’astéroïde #Ryugu depuis juin 2018, et l’américaine #Osiris-Rex, qui en fait autant avec l’astéroïde #Bénou (#Bennu) depuis décembre 2018 – ont publié les premiers résultats sur ces deux petits corps dans un total de dix études. Trois sont consacrées à Ryugu et paraissent dans Science et les sept autres décrivent Bénou dans Nature et trois de ses revues filles, Nature Astronomy, Nature Geoscience et Nature Communications.

    Indices sur la naissance et l’évolution du Système solaire
    Dix études simultanées dans quelques-uns des plus grands journaux scientifiques mondiaux, l’affaire n’est pas si courante. Pour Patrick Michel, directeur de recherches CNRS à l’Observatoire de la Côte d’Azur, et qui a le privilège d’appartenir aux équipes des deux missions, cette rafale se justifie : « Ce sont les premiers résultats jamais obtenus in situ sur des astéroïdes carbonés », explique-t-il. Les astronomes font la cour à ces objets parce qu’ils sont les restants des matériaux qui ont composé les planètes il y a un peu plus de 4,5 milliards d’années. Les auteurs de l’étude de Science consacrée à la surface de Bénou soulignent par ailleurs que ces astéroïdes sont représentatifs des objets qui ont pu apporter à la Terre primitive de l’eau et des molécules favorables à l’apparition de la vie. Les informations que l’on peut en tirer constituent donc autant d’indices sur la naissance et l’évolution du Système solaire.


    Bennu, OSIRIS-REx, source : NASA
    la (vraie) légende est derrière le #paywall

  • Lancée des Etats-Unis, la capsule Dragon est en route vers la Station spatiale internationale
    https://www.lemonde.fr/sciences/article/2019/03/01/lancement-crucial-samedi-d-un-nouveau-vehicule-spatial-par-la-nasa-et-spacex


    La fusée SpaceX Falcon-9, sur laquelle est embarqué le vaisseau spatial Crew Dragon, a décollé samedi 2 mars de Cap Canaveral, en Floride.
    Terry Renna / AP

    Depuis 2011, le transporteur exclusif vers l’ISS est l’agence spatiale russe, et les astronautes américains doivent décoller du cosmodrome de Baïkonour, au Kazakhstan.

    La NASA et SpaceX ont fait décoller avec succès une fusée avec une nouvelle capsule Crew Dragon pour astronautes, samedi 2 mars. L’engin, qui n’a à son bord qu’un mannequin baptisé Ripley, a décollé comme prévu à 2 h 49 (8 h 49 à Paris) du Centre spatial Kennedy à Cap Canaveral, en Floride.
    La capsule s’est séparée sans incident de la fusée qui l’a placée en orbite, a annoncé SpaceX. Elle doit s’arrimer dimanche à la Station spatiale internationale (ISS) avant un retour vendredi 8 mars sur Terre, où elle doit tomber dans l’océan Atlantique.
    […]
    « –Cette journée représente une nouvelle ère des vols spatiaux_ », s’est exclamé l’administrateur de la NASA, Jim Bridenstine, qui y voit le premier pas de la « privatisation » de l’orbite terrestre basse.
    Désormais, a-t-il répété, la NASA ne se ruine plus à construire des lanceurs ou des navettes mais achète un service, ce qui réduit ses coûts d’accès à l’ISS, alors qu’elle veut consacrer de plus en plus d’investissements au retour sur la Lune, dans la décennie prochaine.
    Depuis 2010, la NASA a accordé plus de 3 milliards de dollars de contrats à SpaceX pour développer ce service de taxi, et 4,8 milliards au groupe Boeing, qui développe sa propre capsule, le CST-100 Starliner – un test est prévu en avril. Chacun devra assurer six allers-retours vers l’ISS, sans compter les tests. Les gros contrats datent de 2014.