• La vie après #Guantanamo

    Par le prisme d’un ancien prisonnier de Guantánamo, une plongée au coeur des ténèbres de la « #guerre_contre_le_terrorisme » initiée par l’administration Bush en réponse au 11-Septembre, et la quête pour identifier ses tortionnaires.

    Slahi a passé quatorze années dans l’enfer de Guantánamo et y a été torturé entre 2002 et 2004. Sur place, le prisonnier a tenu un journal de ce qu’il endurait − un livre devenu best-seller, lors de sa publication des années plus tard. Slahi y parle de ses geôliers et tortionnaires, qui ont toujours porté des masques et utilisé des pseudonymes, leur garantissant un anonymat qui a duré des années.

    « Projets spéciaux »
    En 2016, après la libération de #Slahi et son retour en Mauritanie, John Goetz a tenté de traquer et d’identifier ceux qui l’avaient persécuté : une tâche extrêmement ardue tant l’anonymat des hommes − et des femmes − de Guantánamo est protégé par le gouvernement fédéral. Le film mêle ainsi l’enquête de ce journaliste d’investigation qui sillonne l’Amérique sur la trace des acteurs de ces « projets spéciaux » − la désignation de ces séances de tortures −, et des entretiens avec Slahi, en Mauritanie, qui évoque son calvaire passé. Au fil du documentaire, émergent les contours de l’après 11-Septembre et de la « guerre contre la terreur » initiée par George W. Bush en réponse aux attentats, laquelle ne fit que des victimes : les torturés et leurs bourreaux, hantés par la violence de leurs actes.

    https://www.arte.tv/fr/videos/095726-000-A/la-vie-apres-guantanamo
    #film #film_documentaire #documentaire

    #terrorisme #anti-terrorisme #torture #pardon

    Un film sur #Mohamedou_Ould_Slahi :

    Mohamedou Ould Slahi (en arabe : محمدو ولد صلاحي), né le 31 décembre 1970, est un citoyen mauritanien, qui a combattu aux côtés d’hommes qui allaient rejoindre Al-Qaïda pendant l’insurrection afghane des années 1980, mais a déclaré avoir renoncé à faire partie d’Al-Qaïda dès 1992. Accusé d’être impliqué dans l’organisation matérielle des attentats du 11 septembre 2001 en ayant recruté des pilotes des avions s’étant écrasé sur les tours du World Center, iI est illégitimement détenu au camp de Guantanamo du 4 août 2002 au 17 octobre 2016. Il y est torturé et victime de divers traitements dégradants. Le 22 mars 2010, le juge fédéral James Robertson ordonne sa libération, aucune charge contre lui n’ayant pu être retenue, mais il n’est libéré qu’après un appel de l’administration Obama, au bout de quatorze ans de détention.

    En 2005, pendant sa détention, Slahi écrit (en anglais, une langue qu’il a apprise en prison) son histoire dans un manuscrit qui n’est déclassifié par le gouvernement américain qu’en 2012, et publié sous le titre Guantánamo Diary en janvier 2015. C’est un best-seller international.

    Il vit depuis en Mauritanie.


    https://fr.wikipedia.org/wiki/Mohamedou_Ould_Slahi

    • LES CARNETS DE GUANTANAMO

      Détenu depuis août 2002 à Guantánamo, Mohamedou Ould Slahi n’a jamais été inculpé par la justice américaine. Et alors qu’un juge fédéral a ordonné sa libération, le gouvernement des États-Unis a décidé d’ignorer cette décision.

      En 2005, trois ans après son arrestation, Mohamedou a commencé à rédiger un journal. Il y raconte sa vie telle qu’elle était avant qu’il disparaisse dans les limbes du système pénitentiaire américain, pour ce qu’il qualifie « d’interminable tour du monde » de la détention et des interrogatoires ; il y décrit son quotidien de prisonnier à Guantánamo. Son journal n’est pas seulement la chronique fascinante d’un déni de justice, c’est aussi un récit profondément personnel : terrifiant, parfois férocement drôle, et d’une grande élégance.

      http://www.michel-lafon.fr/livre/1522-Les_Carnets_de_Guantanamo.html
      #livre

  • CRISE CORONAVIRALE

    Entretien avec le toxicologue Jean-Paul Bourdineaud, professeur de biochimie et toxicologie environnementales à l’Université de Bordeaux, membre du conseil scientifique du CRIIGEN.

    1) Bonjour Jean-Paul Bourdineaud, pouvez-vous vous présenter pour mes lecteurs ? Quels sont votre formation, votre profession et votre domaine de compétence scientifique ? Avez-vous par ailleurs des conflits d’intérêts, quels qu’ils soient ?

    JP.B. — De formation, je suis ingénieur chimiste, je possède un DEA (maintenant appelé mastère) de chimie organique, puis j’ai bifurqué vers la biologie et je suis titulaire d’un doctorat de biologie moléculaire et cellulaire.
    Avant de débuter ma carrière d’universitaire, j’ai travaillé pendant trois ans en tant qu’ingénieur de recherche dans l’industrie de la parfumerie chez Givaudan, une filiale de Roche. Désormais, je suis professeur à l’Université de Bordeaux, où j’enseigne la microbiologie, la biochimie et la toxicologie environnementale. Mon domaine de compétence est celui de la microbiologie, de la biochimie et de l’écotoxicologie. Je suis éditeur associé du Journal of Toxicological Sciences et de l’International Journal of Molecular Sciences, section Molecular Role of Xenobiotics. Mes travaux scientifiques et ceux de mes collaborateurs sont référencés dans la base de données National Center for Biotechnology Information et 85 articles apparaissent, et pour ceux qui connaissent la signification des critères quantitatifs, mon indice h collecté par le Web of Science est égal à 29 (indice lié à la fréquence avec laquelle nos travaux sont cités par les autres chercheurs, et donc leur rayonnement). Il ne s’agit pas de vanité de ma part, mais je suis contraint de devoir le souligner car mon expertise en sciences biochimiques et microbiologiques a été mise en cause après la publication de ma lettre à Charlie Hebdo, et entre autres, par Antonio Fischetti, le référent scientifique de Charlie Hebdo.

    https://criigen.org/wp-content/uploads/2021/08/2021-07-29_Lettre-a-Charlie-Hebdo-juillet-2021-02_D.pdf

    À titre de comparaison, les indices h de Didier Raoult (Institut Hospitalier Universitaire – IHU - de Marseille), Christian Perronne (hôpital de Garches), Karine Lacombe (hôpital Saint-Antoine), et Benjamin Davido (hôpital de Garches) sont égaux à 147, 37, 28, et 12, respectivement. Je cite ces deux derniers médecins car ils ont été très médiatisés et sont des anti-raoultiens virulents et pugnaces.
    J’ajoute que c’est aussi le citoyen éclairé (parce que possédant les connaissances scientifiques nécessaires) qui parle, et que mes propos n’engagent en rien l’Université de Bordeaux, ni même le CRIIGEN dont je suis membre du conseil scientifique, car ces entités se veulent apolitiques et neutres. Or, intervenir dans le champ de l’imposition du passe sanitaire et de la vaccination de masse est un acte éminemment politique puisque ces mesures sont elles-mêmes avant tout politiques et non médicales.

    Le but de mes recherches est de comprendre comment les organismes réagissent aux contaminants environnementaux, en termes de stratégies moléculaires utilisées pour s’adapter et éliminer les polluants. Mon approche rompt d’avec celle de la toxicologie traditionnelle, laquelle se concentre sur une exposition aiguë à fortes doses, proche de la DL50 (dose qui provoque 50 % de létalité), et donc non pertinente d’un point de vue environnemental. Je focalise au contraire sur les doses qui sont celles rencontrées dans l’environnement et auxquelles sont confrontés les organismes animaux et humains. Par exemple, j’ai pu démontrer l’impact nocif des nanoparticules métalliques sur plusieurs espèces animales aquatiques et terrestres à des doses environnementales. Un thème principal qui m’occupe depuis plusieurs années concerne les contaminations au mercure par consommation de poisson et l’influence des différentes espèces chimiques du mercure sur la santé.

    Enfin, pour répondre à votre dernière question, contrairement à quantités de médecins présents sur les plateaux de télévision depuis le début de la crise coronavirale, je ne présente aucun « conflit d’intérêts », c’est-à-dire que je ne suis pas rémunéré ni gratifié en nature ou en honneur pour quelque activité que ce soit (conseil, expertise, travaux de recherche) par des intérêts privés, et je pense notamment aux entreprises pharmaceutiques. Je suis, comme vous, un serviteur de l’État et de la République, et je ne mange pas ni ne m’abreuve à plusieurs gamelles.

    2) Merci. Comment en êtes-vous arrivé à vous intéresser aux traitements contre la Covid, à la vaccination anti-SARS-CoV-2, au passe sanitaire, et à rendre publique votre opinion sur le sujet ?

    JP.B. — Vous avez bien compris que j’œuvrais en tant que chercheur dans le domaine des sciences environnementales. De nombreuses épidémies virales sont liées à la destruction des habitats des animaux porteurs des virus émergents, par la déforestation, l’urbanisation et l’industrialisation qui accompagnent l’accroissement démographique humain et la quête obligatoire en système capitaliste de la croissance économique, laquelle dans les pays occidentaux est liée pour presque moitié à l’accroissement des populations, comme l’a montré Thomas Picketty dans son ouvrage Le capital au XXIe siècle.
https://www.seuil.com/ouvrage/le-capital-au-xxie-siecle-thomas-piketty/9782021082289
Sonia Shah a pointé la responsabilité du désastre environnemental et les dangers de l’élevage industriel dans la survenue d’épidémies, pour certaines terrifiantes telles que celles du virus du Nil occidental et du virus Ebola.

    https://www.monde-diplomatique.fr/2020/03/SHAH/61547

    Mais en tant que toxicologue environnemental, au-delà de la destruction des habitats naturels, c’est la pollution environnementale qui me préoccupe. Et comme l’a rappelé mon collègue Christian Vélot dans votre entretien, le coronavirus SARS-CoV-2 ne fait que porter le coup de grâce final (Christian emploie le mot d’estocade) aux personnes déjà largement diminuées par leurs pathologies chroniques.
https://blogs.mediapart.fr/laurent-mucchielli/blog/080721/covid-19-vaccins-experimentaux-strategie-vaccinale-entretien-avec-ch
Le problème des maladies chroniques dans nos sociétés occidentales est crucial ; l’Organisation Mondiale de la Santé s’en est fait l’écho à plusieurs reprises, et le Conseil Économique Social et Environnemental (CESE) a rappelé dans son rapport livré le 11 juin 2019 que 10,7 millions de personnes bénéficient en France du dispositif des « affections de longue durée », et que l’Assurance Maladie dénombre 20 millions de personnes recevant des soins liés à une pathologie chronique.

    https://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/Avis/2019/2019_14_maladies_chroniques.pdf
    Le CESE écrit que « les évolutions des habitudes et conditions de vie et de travail, les pollutions de l’environnement, jouent un rôle majeur dans l’apparition, le développement et l’aggravation de ces maladies ».

    La pollution atmosphérique est la principale cause de mortalité liée à la pollution environnementale et se traduit par le décès prématuré de millions de personnes chaque année. L’Agence Environnementale Européenne (EEA), dans son rapport sur la qualité de l’air publié en octobre 2017, a estimé le nombre de décès prématurés (avant 65 ans) causés par la pollution de l’air en Europe à 520 400 personnes pour l’année 2014.

    https://www.eea.europa.eu/publications/air-quality-in-europe-2017

    La pollution de l’air se traduit par les pathologies chroniques principales suivantes : infarctus du myocarde (36 %), accidents vasculaires cérébraux (36 %), cancers du poumon (14 %), broncho-pneumopathies chroniques obstructives (8 %), et les infections respiratoires pédiatriques (6 %). On remarquera que de manière similaire aux polluants atmosphériques, le covid-19 dans sa forme grave touche particulièrement les fonctions respiratoires et cardiaques. Les personnes déjà sensibilisées par les polluants atmosphériques avec leur cortège de maladies chroniques associées constitueraient donc des proies vulnérables pour le coronavirus SARS-CoV-2. L’OMS, dans son rapport de 2016 sur la pollution de l’air, estime à 2,97 millions le nombre de morts attribuables à la pollution de l’air dans le monde entier pour la seule année 2012. Il serait déraisonnable de refuser d’admettre que ces pathologies chroniques d’origines environnementales ne fragilisent pas ceux qui en sont affligés après infection par le SARS-CoV-2. La pollution de l’air tue donc annuellement et prématurément plus de citoyens européens que le covid, sans que cela semble émouvoir nos autorités sanitaires.

    J’étais donc déjà attentif et mobilisé lorsque la controverse de l’hydroxychloroquine (HCQ) a éclaté en février 2020. À ma grande stupéfaction, l’HCQ a été classée substance vénéneuse par le directeur général de la santé, Jérôme Salomon, le 13 janvier 2020, juste au début de la pandémie, alors qu’il savait bien que ce médicament venait d’être utilisé avec succès en Chine.
    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32074550https://academic.oup.com/jmcb/article/12/4/249/5814654

    Puis, les médecins courtisans et leurs relais médiatiques l’ont déclarée être un poison violent, cardiotoxique redoutable. Dans le même temps, des médecins stipendiés par Gilead promouvaient le Remdesivir, fabriqué par cet industriel. Or, en tant que toxicologue, j’ai immédiatement compris que l’on nous racontait des bobards (« fake news » dans le jargon des journalistes parisiens). Car précisément, c’est l’inverse : le Remdesivir est très toxique, d’emblée aux doses nécessaires pour obtenir un effet antiviral, alors que l’HCQ est utilisée depuis des décennies sur des personnes elles-mêmes fragilisées par des maladies auto-immunes telles que le lupus érythémateux et les affections rhumatoïdes. D’ailleurs l’OMS a fini par reconnaître la possibilité d’importants effets secondaires du Remdesivir et a déconseillé son utilisation dans le traitement du covid.

    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/11/20/l-oms-deconseille-le-remdesivir-dans-le-traitement-des-malades-du-covid-19-h

    Puis, l’imposition du passe sanitaire est arrivée et ce qui m’a navré et agacé a été le traitement médiatique réservé aux opposants au sésame sanitaire et en particulier aux personnels soignants réfractaires. Dans les médias dominants, nous avons été vilipendés, poussés vers les marges de l’extrême droite, qualifiés d’antisémites, et d’illuminés irrationnels. Puis, Charlie Hebdo a chanté le même refrain, avec le talent satirique qu’on lui connaît. Je suis un ami de Charlie et un abonné. On ne peut pas être en permanence en accord avec ses amis, mais plusieurs unes et articles virulents, et en réalité manquant de discernement (c’est une règle de la caricature et de la satire que je reconnais bien volontiers à Charlie), m’ont suffisamment titillé pour que je décide d’adresser une lettre à Charlie, lui présentant des arguments rationnels et même scientifiques bien étayés. Cette lettre fut envoyée à Charlie le 29 juillet qui m’a répondu le 2 août par la plume de Marika Bret : « Bonjour, merci pour votre message, courrier argumenté qui participe au débat. En vous souhaitant un bel été… » Puis l’association CRIIGEN – qui a pour vocation d’informer le public sur les biotechnologies et le génie génétique – et dans laquelle je suis un membre du conseil scientifique, a décidé de publier et d’héberger ma lettre à Charlie début août. Le CRIIGEN est naturellement fondé à informer le public sur les vaccins, car ceux adoubés et distribués en France sont tous issus du génie génétique.

    Ce fut pour moi une surprise : ma lettre a été remarquée, lue et appréciée par beaucoup (mais pas tous). Des collectifs de lutte anti-passe sanitaire m’ont contacté à la mi-août, et notamment ceux des « Blouses blanches » et des « Citoyens libres des Pyrénées ». Les « Blouses blanches » m’ont dirigé vers le réalisateur Magà Ettori qui procédait à la confection d’un film documentaire sur les soignants en lutte et sur le thème des libertés. J’ai accepté sa proposition d’apparaître et de témoigner, et dans son film « Liberté », et dans le débat diffusé en vif qui a suivi la diffusion du film, le 5 septembre dernier sur YouTube. Et comme le monde est presque parfait, vous m’avez contacté et proposé cet entretien.

    https://www.youtube.com/watch?v=KueedqdpJTw

    3) Vous contestez la toxicité de l’HCQ et son supposé manque d’efficacité contre le traitement du covid. Vous êtes très peu nombreux à assumer publiquement une telle position parmi les scientifiques. Ne vous sentez-vous pas isolé et mis en défaut en tant que scientifique ?

    JP.B. — Tout d’abord, en matière scientifique, le nombre ne fait pas le poids. Un seul scientifique peut avoir raison de la multitude. Le consensus dans le monde scientifique n’est possible que sur les acquis, et sur ce qui est incorporé dans le grand corpus des connaissances scientifiques. Par exemple, on ne dispute plus le fait que les humains sont des mammifères au même titre que les primates : trop de preuves sont abondantes y compris dans l’esprit des non scientifiques. La molécule d’eau est formée de deux atomes d’hydrogène et d’un atome d’oxygène. Là aussi, les preuves, inaccessibles d’emblée au grand public, sont de nature spectroscopiques, biochimiques, et dans les laboratoires de biologie moléculaire, nous réalisons quotidiennement des électrophorèses de protéines et d’acides nucléiques où l’on sépare ces molécules par l’imposition d’un champ électrique : on observe le dégagement de l’hydrogène à la cathode et de l’oxygène à l’anode avec une production de bulles gazeuses deux fois plus importante à la cathode ; il s’agit bien d’une électrolyse de l’eau. C’est toujours un ravissement de le vérifier et de le montrer aux étudiants. C’est donc la répétabilité et la banalité des observations réalisées par quantité de personnes sur une longue durée qui permet le consensus scientifique.

    En revanche, le dissensus prévaut dans la science en train de se faire, c’est-à-dire celle qui est à l’œuvre et en cours dans les laboratoires de recherche. La controverse est de mise et même souhaitable lorsqu’elle n’est pas polluée par les « conflits d’intérêts » des chercheurs, car la dispute permet de susciter de nouvelles théories, lesquelles conduisent à la mise en œuvre d’expériences, dont les résultats permettront à leur tour de moduler, d’infléchir, de corriger le modèle théorique, nouveau modèle se prêtant à son tour à un nouveau cycle d’hypothèses et d’expérimentation. C’est la démarche positiviste comtienne développée en 1865 par Claude Bernard (Introduction à l’étude de la médecine expérimentale) et mise en œuvre dans ses travaux sur le diabète et la régulation de la glycémie par la sécrétion pancréatique. Bruno Latour (La science en action, 1989) a bien expliqué cette dialectique, et il appelle la science en cours d’élaboration la science en action. Je vais donner quelques exemples où un scientifique, seul, peut se dresser contre la communauté entière de son champ disciplinaire, et se voir rendre justice des années plus tard.

    En son temps (le milieu du 19ème siècle), Ignace Semmelweis était seul contre tous les médecins de l’hôpital de Vienne en Autriche, lorsqu’il a mis en place les premiers rudiments et gestes de l’asepsie. Il a été moqué, renvoyé de l’hôpital et interné dans un asile d’aliénés. L’obstétricien qu’il était avait fait diminuer de 75 à 20 % la mortalité puerpérale des parturientes. Les femmes suppliaient pour pouvoir accoucher dans son service. Le trublion fut déclaré cinglé par ses collègues jaloux. Cette histoire, véridique, est superbement contée par Céline, dans un ouvrage qui a constitué sa thèse de médecin généraliste.

    http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/L-Imaginaire/Semmelweis

    De même, Louis Pasteur avait raison contre les Académies des Sciences et de Médecine, non seulement concernant la vaccination (celle pasteurienne), mais également sur la controverse de la génération spontanée qui l’avait opposé à Pouchet.
    Autre exemple : Stanley Prusiner, finalement récipiendaire du Prix Nobel de médecine, a dû batailler quinze ans pour faire admettre que la maladie de la tremblante chez le mouton, le kuru frappant les indigènes de Papouasie Nouvelle-Guinée, la maladie de Creutzfeldt-Jakob, et ce que les journalistes ont nommé la maladie de la « vache folle », étaient toutes dues à un agent pathogène non vivant, dépourvu de génome - et donc sans gène de virulence puisque sans aucun gène -, lequel se résumait à n’être qu’une bête protéine nommée prion, exprimée dans le cerveau, et qui pouvait adopter une configuration tridimensionnelle pathologique (étiologie variée : génétique, spontanée, ou par consommation de viandes d’animaux malades, ou de cerveaux humains dans le cas du kuru).

    https://www.nobelprize.org/uploads/2018/06/prusiner-lecture.pdf

    Enfin, Oswald Avery, Colin MacLeod et Maclyn McCarty avaient raison contre toute la profession des biochimistes et généticiens lorsqu’ils affirmaient en 1944 que le support de l’information génétique était l’ADN et non pas les protéines. Ils durent attendre huit années pour que leur découverte soit acceptée par la communauté scientifique après l’expérience de Martha Chase et Alfred Hershey qui montrait que le virus bactériophage T2 se fixe à la surface du colibacille, et lui injecte son ADN, et que seul l’ADN viral – et non les protéines virales - permet une multiplication virale ultérieure dans les cellules bactériennes.

    https://www.editionsladecouverte.fr/histoire_de_la_biologie_moleculaire-9782707172594

    Venons-en maintenant à Didier Raoult. Renaud Piarroux, spécialiste du choléra, en collaboration avec Didier Raoult, a montré que l’épidémie de choléra ayant frappé Haïti juste après le tremblement de terre de 2010, avait eu pour origine le campement des soldats népalais mandatés par les Nations Unies et l’OMS afin de rétablir l’ordre.

    http://www.michel-lafon.fr/livre/2415-Epidemies_Vrais_dangers_et_fausses_alertes.html

    Leur article envoyé au Lancet a été refusé car l’hypothèse chez les scientifiques de l’OMS était que cette épidémie de choléra était la première épidémie écologique due au réchauffement climatique et à l’effet El Niño. La conséquence de ce refus d’accepter les résultats des travaux de Piarroux et Raoult fut que le choléra continua à sévir à Haïti tuant des personnes qui aurait pu éviter la maladie et pour certaines la mort, si l’OMS et l’ONU avaient accepté leur responsabilité et fait procéder à la désinfection du camp népalais et au traitement par antibiotique des soldats. L’OMS s’est très longtemps entêtée sur le sujet avant de reconnaître son tort.
    Autre exemple de l’avance de Didier Raoult et de ses approches sur le reste de la communauté scientifique : en 1998, lui et ses collaborateurs démontrent, en analysant des dents retrouvées dans des charniers, que les personnes mortes de la peste à Marseille en 1720, ainsi que celles tuées par les pestes du Moyen-Âge et justinienne, l’ont été par la seule souche bactérienne Yersinia pestis orientalis (alors qu’un modèle attribuait des souches différentes à chaque peste, et qu’un autre modèle incriminait des virus), et que le principal vecteur n’était pas la puce de rat mais les poux. Leurs résultats ont immédiatement été contestés et notamment par une équipe anglaise qui n’a pas réussi à les confirmer à ce moment-là du fait de son retard méthodologique relativement à l’équipe de Raoult. Treize ans plus tard, en 2011, la même équipe anglaise publiait un article confirmant la découverte des français.
    https://www.humensciences.com/livre/La-science-est-un-sport-de-combat/39

    Ces différents exemples montrent qu’un seul chercheur ou une équipe peut détenir la vérité contre le reste des scientifiques ou l’institution académique. Pour être juste, l’inverse est vrai : la multitude peut avoir raison sur la minorité en matière scientifique. Alors qu’en conclure ? Et bien qu’un débat scientifique ne saurait être décidé par le seul argument du nombre. La vérité scientifique ne se met pas aux votes, elle est vraie indépendamment du nombre et de la qualité de ses opposants ou partisans : seuls les résultats expérimentaux, leur répétabilité, et l’exercice de la raison peuvent trancher le nœud gordien.
    Je n’ai pas la prétention de me comparer aux titans de la science que je viens d’évoquer, mais j’ai voulu devenir scientifique parce que je les admirais. Quand j’affirme que l’HCQ ne présente pas de dangers toxicologiques lui interdisant d’être prescrite en traitement contre le SARS-CoV-2, contre une majorité de médecins courtisans, je n’ai pas tort a priori au seul motif de la quantité de personnes prétendant l’inverse.

    Des collègues me disent que mes arguments présentés dans la lettre à Charlie sont certes recevables, mais que je prends le risque de discréditer l’institution et la communauté scientifique en contribuant à une controverse rendue publique, et notamment par le fait que les réseaux anti-vaccinalistes se sont emparés de ma lettre. Tout d’abord, je ne suis pas responsable de l’usage que peuvent faire de ma lettre les différents réseaux militants, et je ne peux interdire à personne la possibilité de reprendre les arguments que j’avance (s’ils ne sont pas modifiés ou tronqués, ou présentés de manière parcellaire hors contexte, ce qui serait malhonnête). La controverse, la dispute et le dissensus sont nécessaires pour démêler les résultats de la science en action, et je ne vois pas pour quelles raisons ce processus devrait être escamoté et dissimulé au public, au motif spécieux et plutôt méprisant que nos contemporains non scientifiques ne pourraient pas comprendre et se poseraient des questions sur la pertinence et la portée des avis scientifiques. Au CRIIGEN, nous estimons plutôt que les citoyens devraient s’emparer des grands débats scientifiques et technologiques puisque la technoscience et ses réalisations modifient nos existences et nos sociétés, pour le bien et le pire. La philosophe Barbara Stiegler est du même avis et écrit « que plutôt que de se taire par peur d’ajouter des polémiques à la confusion, le devoir des milieux universitaires et académiques est de rendre à nouveau possible la discussion scientifique et de la publier dans l’espace public ».
    http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Tracts/De-la-democratie-en-Pandemie

    De surcroît, nous avons été mis au pied du mur. La nécessité du grand déballage nous a été imposée sans que le débat entre scientifiques (non soudoyés par les industriels) ait pu avoir lieu en préalable. À rebours, ce sont les professeurs Christian Perronne et Didier Raoult qui ont été victime de calomnies, de menaces de mort, et de tentatives d’interdiction de l’exercice de la médecine par l’Ordre national des médecins et ses diverticules départementaux, une entité créée par le régime félon de Vichy et qui a curieusement survécu à l’épuration à la Libération. Alors que cet Ordre accuse le Pr Raoult de charlatanisme (plus précisément, sa branche départementale des Bouches-du–Rhône), le même Ordre ne s’était pas opposé et n’avait émis aucune objection ou protestation contre les lois antisémites excluant les médecins juifs sous Vichy. Ainsi, qui discrédite la Science, moi ou bien l’Ordre avec ses complaisants relais médiatiques, ainsi que les médecins à la solde de l’industrie pharmaceutique, les agences d’expertise (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, ANSES ; Agence Nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, ANSM, anciennement AFSSAPS ; Agence Européenne du Médicament, EMA), bienveillantes vis à vis des industriels et gangrénées par les « conflits d’intérêts », ou les scientifiques qui publient des données frauduleuses comme l’ont révélé les affaires du Lancet et du New England Journal of Medicine ?

    https://reporterre.net/Fabrice-Nicolino-L-Agence-nationale-de-securite-sanitaire-fait-partie-du
    https://www.monde-diplomatique.fr/2020/11/DESCAMPS/62393
    http://www.editionslesliensquiliberent.fr/livre-Le_crime_est_presque_parfait-572-1-1-0-1.html
    https://blogs.mediapart.fr/laurent-mucchielli/blog/260520/fin-de-partie-pour-l-hydroxychloroquine-une-escroquerie-intellectuel

    Je constate d’ailleurs que les industriels ne sont pas en reste quand il s’agit de mettre en évidence les désaccords entre scientifiques, et surtout d’en tirer profit en les exploitant. Par exemple à propos des risques liés aux pesticides, aux perturbateurs endocriniens, aux nanoparticules, aux OGMs végétaux, à la téléphonie mobile, à l’amiante, et à certains médicaments. Face aux études montrant la toxicité pour l’environnement et la santé des humains de ces molécules et nouvelles technologies, les industriels et leurs groupes de pression harcèlent les parlementaires, déjeunent avec les journalistes influents et les patrons de presse, et mettent en avant les travaux lénifiants de leurs scientifiques liges, tant et si bien qu’ils en appellent à l’arbitrage, et du public, et des agences d’expertises conseillant les gouvernements, en minaudant de la sorte : « mais enfin, si même les scientifiques ne sont pas d’accord entre eux , c’est bien que les données toxicologiques ne sont pas suffisamment probantes ; laissez-nous donc encore 20 ans d’exploitation de notre affaire ». Cette stratégie a été éventée par un universitaire étatsunien, Sheldon Krimsky, professeur de politique urbaine et environnementale à l’Université de Tufts, qui constata que 35 % des 789 articles qu’il avait scrutés avaient au moins un auteur ayant des intérêts financiers dans le domaine de recherche étudié.

    https://www.librairie-gallimard.com/livre/9782846711234-recherche-face-aux-interets-prives-la-sheldon-kri

    Enfin, il faut rappeler que le propre de l’esprit scientifique est de douter. Douter de ses propres résultats que l’on vérifie en s’assurant de leur répétabilité, et douter des nouvelles merveilles technologiques censées révolutionner nos existences. Se poser des questions sur ces vaccins biotechnologiques en phase d’essai ne consiste pas à refuser l’avancée de la science, mais à exercer son esprit critique et exiger une somme de certitudes suffisantes avant de se faire injecter un ensemble hétéroclite de molécules à effets biologiques. En revanche, les zélotes de ces biotechnologies vaccinales, eux, ne doutent absolument pas, et prétendent être dans la démarche scientifique idoine, et renversent l’accusation de déni scientifique contre ceux qui précisément doutent, en dépit de tous les acquis de l’épistémologie en matière heuristique. Laissons le dernier mot au plus grand d’entre nous autres, microbiologistes et biochimistes, Louis Pasteur (cité par Latour) : « Dans les sciences expérimentales, on a toujours tort de ne pas douter alors que les faits n’obligent pas à l’affirmation ». 
http://www.bruno-latour.fr/node/276

    4) Revenons à la question relative à la toxicité de l’HCQ et plus actuellement de l’ivermectine. Quels sont vos arguments permettant d’affirmer que ces substances ne présentent pas de dangers majeurs en utilisation thérapeutique ?

    JP.B. – Tout médicament est toxique, et la combinaison entre la dose (ou la concentration sanguine) et la durée de traitement déterminera la survenue d’évènements toxiques (plus la dose et la durée de traitement sont élevés, et plus grands sont les risques toxiques). Il faut donc s’assurer qu’aux doses efficaces et durant la durée de traitement, la toxicité soit la plus faible possible. Les anti-raoultiens mettent en avant des données toxicologiques redoutables, celles obtenues avec de très hautes doses, non pertinentes quant aux dosages thérapeutiques, et bien évidemment mortelles, mais qui doivent être obligatoirement acquises sur les animaux (les test dits de toxicité aigüe ; le but est de préciser les doses mortelles tuant la moitié de l’effectif, DL50, en 24 h ou 48h), ce qui permet aux agences sanitaires de préciser les doses limites en divisant la DL50 par 100 ou 1000.

    L’HCQ est utilisée en indication contre le paludisme et contre certaines maladies auto-immunes telles que le lupus érythémateux systémique (LES) et les affections rhumatoïdes. Avant 2020, donc avant la pandémie de SARS-CoV-2, l’essentiel de la littérature toxicologique concernant l’HCQ avait trait principalement au risque de rétinopathies chez des patients atteints de maladies auto-immunes, et seulement secondairement à sa cardiotoxicité éventuelle. Cette focalisation sur le cœur et la rétine était motivée par le fait que les patients atteints du LES sont sujets aux rétinopathies et aux maladies cardiovasculaires, indépendamment de la prise d’HCQ.

    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29948002
    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27227346
    Il fallait donc vérifier si la prise d’HCQ chez ces patients ne serait pas un facteur aggravant. Pour la rétine, et chez des patients souffrant du LES, et qui prennent donc l’HCQ quotidiennement, une étude espagnole montrait en 2019 qu’en deçà d’une dose de 5 mg/kg/jour, aucun effet toxique n’était observable quant à la rétine et la macula.

    https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0961203319829826?journalCode=lupa

    Quant au cœur, la combinaison HCQ plus azithromycine (AZI) testée sur des dizaines de milliers de personnes souffrant de maladies auto-immunes n’a déclenché aucune augmentation avérée de l’arythmie cardiaque. Puis une méta-analyse (incorporant et synthétisant les résultats obtenus par 46 études avec tirage au sort) a conclu que l’usage de l’HCQ était sûr, et qu’aucune augmentation significative de risque cardiovasculaire et ophtalmologique n’avait été enregistrée.
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33832827
Également, sur plusieurs centaines de patients atteints du covid et hospitalisés, l’administration d’HCQ n’a pas révélé de lien avec la nécessité d’intubation ou l’issue fatale, relativement aux patients non traités, alors même que les auteurs de l’étude reconnaissent que les patients traités avec l’HCQ étaient plus sévèrement atteints.

    https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/nejmoa2012410

    En réalité, c’est le SARS-CoV-2 lui-même qui cause de graves dommages cardiaques et des arythmies, et cela était su depuis le début de la crise coronavirale.
https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/jce.14479https://jamanetwork.com/journals/jamacardiology/fullarticle/2763524
Des médecins chinois ont très rapidement alerté sur le fait que « contrairement aux autres infections à coronavirus, qui provoquent principalement des infections pulmonaires, ce cas d’infection à coronavirus s’est caractérisé par une atteinte cardiaque ».

    https://academic.oup.com/eurheartj/article/42/2/206/5807656

    Et donc des tentatives de traitement à l’HCQ sur des patients en réanimation (déconseillés par le Pr Raoult) ont conclu à la cardiotoxicité de l’HCQ alors qu’il s’agissait des effets du virus. Et là, les médias ont claironné la nouvelle de la cardiotoxicité de l’HCQ sans demander d’essais par tirage au sort (« randomisés », disent les journalistes).
Quant à l’ivermectine, elle est utilisée en tant qu’antiparasitaire (contre la gale et des vers intestinaux).
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21321478
Sur sa sûreté d’administration, une méta-analyse portant sur 452 études, montrait que jusqu’à une dose égale à 0,4 mg/kg, aucun effet indésirable ou toxique n’était constaté. En traitement chez des enfants contre la gale et le ver intestinal causant la trichocéphalose, elle s’est révélée efficace et sûre.

    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31960060
    https://academic.oup.com/cid/article/67/8/1247/4956651?login=true
    https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/bjd.18369

    5) Mais si l’HCQ et l’ivermectine sont à la fois efficaces et non toxiques aux doses indiquées, pourquoi sont-elles autant ostracisées à votre avis ?

    JP.B. — La dévalorisation et l’opprobre jeté sur l’HCQ ont démarré très tôt et au plus haut niveau de l’administration puisque la direction générale de la santé l’a classée substance vénéneuse dès janvier 2020, avant même les premiers foyers infectieux déclarés en France. Puis l’affaire de l’article bidonné du Lancet va permettre au ministère de la santé d’interdire ce médicament. L’interdiction sera maintenue après même que la fraude scientifique aura été éventée, et alors que l’OMS sera, elle, revenue sur sa décision. Mais avant que l’affaire du Lancet ne trucide définitivement les chances de l’HCQ (le 22 mai 2020), un épisode quasi burlesque avait déjà entamé la longévité de l’HCQ : c’est l’affaire de l’aquariophile maladroit mort après avoir ingéré de manière préventive une quantité mortelle de phosphate de chloroquine (23 mars 2020) ce qui n’a strictement rien à voir avec le protocole thérapeutique raoultien. Le ministre Véran participa de l’embrouillamini et exploita le fait divers devant la représentation nationale : « Les cardiologues m’alertent également sur le fait que l’hydroxychloroquine peut entraîner des troubles cardiaques. Aux États-Unis, aujourd’hui, une personne qui en avait utilisé en automédication a été victime d’un arrêt cardiaque qui lui a été fatal ».
    https://www.lemonde.fr/sante/article/2020/03/27/la-surdose-mortelle-a-la-chloroquine-expliquee-en-sept-questions_6034694_165

    Le journaliste qui cite M. Véran ne se demande pas quels cardiologues, et à partir de quelles bases observationnelles et cliniques ces mystérieux cardiologues parleraient. Le ministre se mélange les pinceaux ou les médocs puisque c’est le phosphate de chloroquine et non l’HCQ qui est impliquée dans ce cas d’empoisonnement. Or l’HCQ est utilisée en lieu et place des autres congénères de la famille (phosphate de chloroquine et chloroquine) précisément parce qu’elle est nettement moins toxique que ces dernières et frappée d’innocuité aux doses thérapeutiques.

    La toxicité à très hautes doses des congénères de l’HCQ était déjà connue, ce cas isolé n’apportait donc rien à leur toxicologie. Et pourtant, la propagande déployée allait instrumentaliser ce fait divers et laisser entendre que cette information était neuve, fracassante, et permettait de revenir sur une supposée sûreté de l’usage thérapeutique de l’HCQ avancée par le Pr Raoult puisqu’il était dès lors établi qu’un membre de la famille de l’HCQ était mortel. Conclusion imposée par cette propagande : l’HCQ ne saurait constituer un médicament fiable et sûr. Or, il s’agissait d’un accident provoqué par la bêtise avant toute chose.
    Aujourd’hui, on nous rejoue ce scénario stupide avec l’ivermectine, et la propagande se déchaîne aux États-Unis en prétendant qu’il s’agit d’un médicament à usage vétérinaire exclusif et utilisé chez les chevaux et les vaches (ce surdosage vétérinaire existe bien mais à destination de ces animaux seulement), après qu’un autre nigaud, en Australie cette fois, se soit empoisonné avec une formulation chevaline. L’Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA) ment copieusement par omission en occultant le fait que l’ivermectine est utilisée contre la gale et certains vers intestinaux chez les humains.

    Le Pr Raoult signalait à juste titre que le paracétamol absorbé en excès était mortel également, et qu’il ne venait néanmoins à l’idée de personne de l’interdire. Le paracétamol (ou acétaminophène) est un hépatotoxique redoutable.
https://www.annualreviews.org/doi/abs/10.1146/annurev.me.35.020184.003045https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/0002934383902401
Le taux de décès par empoisonnement au paracétamol (nombre de morts divisé par le nombre total de suicidés) est de l’ordre de 0,2 à 2 % selon les pays.
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/11210057
Par exemple, aux États-Unis, de 2000 à 2018, il y eut 327 781 hospitalisations pour des suicides par antalgiques et 1 745 morts : le paracétamol à lui seul a contribué pour 48 % de ces hospitalisations et 64,5 % de ces décès.

    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32715560

    Alors, quel est donc le vrai problème ? Et bien tout simplement, il s’agit de jeter l’opprobre sur tout médicament ou traitement thérapeutique non protégé par un brevet. Le Plaquenil ne rapporte plus grand chose puisque l’HCQ est tombée dans le domaine public ; idem pour l’AZI et l’ivermectine. L’industrie pharmaceutique désire ardemment répondre à chaque nouvelle maladie ou épidémie par un médicament ou vaccin miracle, breveté et donc rémunérateur pour l’actionnariat. Lors de l’affaire du bacille du charbon envoyé par courrier à des sénateurs et journalistes étatsuniens en 2001, le gouvernement étatsunien a réagi face à ces menaces bioterroristes - et après une propagande médiatique intense et hystérique, semant la panique auprès du public - en décidant de recourir au stockage de tonnes d’un antibiotique. Alors que la pénicilline et la doxycycline étaient efficaces pour tuer le bacille, elles présentaient la faiblesse d’être bon marché, et ce fut la très coûteuse ciprofloxacine de Bayer, protégée par un brevet, qui fut choisie ; le centre de contrôle des maladies (CDC) conseilla de la sorte le gouvernement fédéral. Le gouvernement français emboîta le pas et commanda également cet antibiotique pour un coût considérable. L’éviction des médicaments qui ne sont plus protégés par un brevet, implique donc de crier haro sur les médicaments génériques.

    http://www.michel-lafon.fr/livre/2415-Epidemies_Vrais_dangers_et_fausses_alertes.html

    Quelle est donc la stratégie industrielle : instiller le doute. Donc mettre en avant toutes les études qui ne distinguent pas d’effets bénéfiques du médicament générique, minimiser celles qui montrent l’inverse, en mobilisant tous les professionnels stipendiés qui expliqueront sur les plateaux de télévision et dans les radios que les études ne montrent pas de manière statistiquement significative un effet, et que de nombreuses autres études sont indispensables avant de se prononcer. Les mêmes vont dénigrer les études observationnelles pour exiger celles par tirage au sort ; ils parlent d’essais « randomisés » et les journalistes parisiens reprennent cette formulation euphémisante sans expliquer au public que cela implique de tirer au sort des malades et de les répartir en deux groupes : ceux qui reçoivent le médicament testé et ceux qui reçoivent un placebo, donc de l’eau salée ou sucrée. C’est bien entendu immoral de procéder de la sorte avec des personnes malades risquant de mourir, et c’est la raison pour laquelle Didier Raoult et les médecins de l’IHU de Marseille ont refusé de pratiquer ce tirage au sort. Ils ont refusé de réaliser une expérience scientifique sur des patients infectés et ont fait le choix de soigner. Ils ont préféré une attitude pleine d’humanisme envers leurs semblables, quitte à écorner leur immense prestige scientifique. La société et la nation devraient leur en être reconnaissantes et admiratives.

    Puis, les mêmes personnes liges et autres valets rémunérés de l’industrie propageront une campagne visant à salir ceux qui observent des effets bénéfiques : on les traitera de charlatans, d’agités du bocal, d’être orgueilleux et méprisants, de falsificateurs de données scientifiques, notamment en utilisant leur qualité d’éditeurs de journaux scientifiques pour publier plus facilement leurs articles dans lesdites revues, et de manquements à la déontologie. Toute cette campagne diffamatoire est réalisée avec le tambour des relais médiatiques dominants, tous détenus par des millionnaires dont on peut se demander si les avocats d’affaire n’ont pas judicieusement garni les portefeuilles d’actions de leurs clients avec des actions boursières de Pfizer et consorts (s’ils ne le faisaient pas, ils manqueraient de compétence).
    Cette stratégie est connue et dénoncée depuis longtemps. Ainsi le Dr Mayer Brezis écrivait : « Les industries chimiques, du tabac et de l’alimentation partagent des tactiques similaires [à celles des industries pharmaceutiques] : proclamer des doutes sur les questions de sécurité, acheter des chercheurs, infiltrer les universités, les conseils d’administration, les médias et les agences législatives ».
    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/18982834

    Ce qui vaut pour les médicaments vaut également pour les composés toxiques produits et libérés dans l’environnement par les industriels. Dans le premier cas, il s’agira de discréditer l’efficacité des médicaments génériques (au moyen des scientifiques à la solde des industriels et des groupes de pression), et dans le second de nier ou de minimiser la dangerosité de leurs merveilles chimiques. Cette stratégie a été abondamment utilisée dans le cas de l’amiante : la connaissance toxicologique de sa cancérogénicité et de l’étiologie des mésothéliomes chez les travailleurs exposés est acquise depuis 1960. Et pourtant, grâce aux agissements des groupes de pression et des scientifiques liges, il faudra attendre 1997 pour qu’elle soit interdite en France. De même, il aura fallu des décennies avant que le tétraéthyl de plomb (TEP), utilisé comme agent antidétonant dans l’essence automobile ne soit interdit malgré la démonstration de sa toxicité pour les humains en 1965 par Clair Patterson. Là également, des scientifiques à la solde des industriels ont produit des études fausses et certains d’entre eux ont même porté plainte contre Herbert Needleman, un autre chercheur qui a contribué à la connaissance sur la toxicité du TEP, mais il a également été attaqué par les avocats des industriels pour malhonnêteté intellectuelle, puis désavoué par les Instituts Nationaux de la Santé, et par sa propre Université, celle de Pittsburgh. Là encore, il s’agissait d’imposer un produit breveté (le TEP), en réalité peu efficace quant à sa qualité d’antidétonant, contre l’utilisation d’un produit beaucoup plus efficace mais peu coûteux qu’était l’éthanol.

    Le problème est bien économique, financier et donc capitaliste. Les industries pharmaceutiques n’ont pas pour vocation de soigner les malades mais d’enrichir leurs actionnaires ; d’ailleurs les vaccins n’iront qu’aux plus riches en vertu de la protection des brevets et des coûts afférents insupportables pour les pays peu fortunés (et le côté immoral du procédé ne choque aucun de nos dirigeants et ne suscite aucune réaction permettant de réguler par amendements le droit des brevets sur les médicaments). Souvent, tout de même, leurs intérêts financiers coïncident avec celui sanitaire des malades, sinon tant pis. Quand le médicament est par trop toxique, on engrange d’abord les bénéfices, et puis on nie pendant des années la toxicité du produit, en utilisant la stratégie que je viens de décrire, c’est-à-dire inonder la littérature médicale d’articles prétendant qu’il n’a pas été possible d’observer une toxicité du médicament, en utilisant le réseau de scientifiques liges stipendiés. Et d’autres scientifiques liges, installés dans les agences sanitaires, fermeront les yeux le plus longtemps possible. La tragédie du Mediator de Servier est exemplaire : ce médicament mortifère ne fut interdit qu’en 2009 par L’AFSSAPS - aujourd’hui rebaptisée ANSM – alors que sa toxicité, ainsi que celle de la famille moléculaire à laquelle il appartient, était bien connue depuis la fin des années 1980.

    https://www.librairiedialogues.fr/livre/1250568-mediator-150-mg-combien-de-morts--irene-frachon-editions-

    Ceci pose deux problèmes fondamentaux.

    D’abord celui des « conflits d’intérêts » dans lesquels sont empêtrés beaucoup de scientifiques et de médecins, mais également les experts des agences de sécurité alimentaire ou du médicament (qui se recrutent parmi les premiers). « Conflit d’intérêts » est une expression importée des pays anglo-saxons et imposée par ce qui est appelé là-bas une attitude « politiquement correcte ». En langue française, on appelle ça de la corruption. Le plus stupéfiant est que cela soit légal.

    Ensuite celui du financement de la recherche publique, lequel explique en partie le problème des « conflits d’intérêts ». En effet, la loi d’autonomie des Universités ou loi Pécresse, a instauré en 2007 une paupérisation accrue des Universités et des laboratoires de recherche publics. Les crédits récurrents qui étaient alloués chaque année par les institutions aux équipes ont disparus. Il faut maintenant en passer par l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui satisfait au plus 10 % des demandes. Concrètement, les chercheurs doivent répondre à un appel d’offre – il s’agit bien d’un concours et donc d’une mise en concurrence des équipes françaises entre elles – et rédiger un copieux dossier scientifique, et prévoir le budget total pour des recherches non encore effectuées et prévisionnelles (cela prend bien deux mois car il faut mobiliser d’autres équipes autour du projet). L’institution nous recommande instamment d’avoir un partenaire industriel ou privé. Si l’ANR n’adoube pas leur projet, les chercheurs n’ont plus comme solutions que l’Europe (mais c’est encore bien plus sélectif), les régions (mais pour des projets très ponctuels, appliqués, et peu financés), et enfin « les acteurs privés ». Comme le disait André Picot, toxicologue, dans ce livre : « Pour nous, au CNRS, mais aussi à l’Université, la situation n’a jamais été aussi catastrophique… On n’a plus d’argent et c’est la ‘prostitution généralisée’ ».
    https://www.editionsladecouverte.fr/silence_on_intoxique-9782707146380

    6) Vous évoquez le problème de l’évaluation des risques par les agences et celui des « conflits d’intérêts » qui mineraient ces institutions. Pourriez-vous nous donner des exemples et précisez selon vous la manière d’y remédier ?

    JP.B. – Le scandale du Vioxx de Merck est maintenant oublié. Le Vioxx était un médicament anti-inflammatoire censé être un vrai miracle pour les patients souffrant d’arthrose. Autorisé en 1999, il apparaît rapidement qu’il provoque des accidents cardiovasculaires et un article est publié relatant ses dangers en 2001 dans le Journal of The American Medical Association (JAMA) par l’équipe du Dr Eric Topol.
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/15641522
La FDA ne bouge pas, et en France L’AFSSAPS reprend même l’argumentaire lénifiant de Merck (toute l’histoire est racontée : https://halldulivre.com/livre/9782753300132-au-nom-de-la-science-souccar-goliszek). Merck tente d’acheter le silence du Dr Topol qui refuse. Dans les années qui suivent, d’autres publications mettent en cause le Vioxx et l’associe à une augmentation dramatique des infarctus chez les patients, mais ni l’EMA ni l’AFSSAPS ne demanderont le retrait de l’autorisation de mise sur le marché. C’est finalement Merck qui décide de le retirer du marché malgré la décision de la FDA en faveur du maintien, et au grand dépit du ministre de la santé français. L’AFSSAPS déclarera, après le retrait du Vioxx par Merck, assumer totalement la décision de n’avoir pas retiré du marché ce médicament.

    En 2002, la Direction générale de la santé saisit l’Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE) concernant les risques sanitaires de la téléphonie mobile.
https://www.editionsladecouverte.fr/silence_on_intoxique-9782707146380
Un groupe de travail est créé sous la direction de Bernard Veyret (Université de Bordeaux), Denis Zmirou (AFSSE) et René de Sèze (INERIS, Institut national de l’environnement industriel et des risques). Très curieusement, des spécialistes incontestés dans ce domaine sont écartés, et qui avaient publiés des travaux sur les perturbations bioélectromagnétiques (Pierre Aubineau, CNRS ; Pierre Le Ruz, société française de radioprotection ; Roger Santini, Institut National des Sciences Appliquées). Mais la veille de la remise du rapport en avril 2003 – qui dédouanera la téléphonie mobile de tout effet sanitaire dommageable – il est dévoilé que les trois compères étaient en contrat publicitaire avec l’entreprise Orange, et qu’ils avaient publié une plaquette publicitaire dans laquelle ils se montraient rassurants, alors même qu’ils avaient débuté leur mission. Le rapport est même en retrait des recommandations écrites par Denis Zmirou en 2001 au ministère de la santé et imposant une distance supérieure à 100 mètres des crèches, écoles et hôpitaux, pour l’implantation d’antennes. Le même osera proclamer, à propos des financements privés des experts : « Cela n’affecte pas l’intégrité des chercheurs : les contrats garantissent une totale indépendance des études lors de leur conduite et de leur interprétation ».

    Comment remédier à cette situation déplorable de nos agences d’expertise sanitaires ? Dans un récent article publié dans Toxicological Research, Christian Vélot, des collègues et moi-même préconisions la création d’une Haute Autorité de l’Expertise composée de parlementaires, de représentants des grands organismes nationaux de recherche, de chercheurs reconnus pour leurs travaux dans le domaine scientifique concerné par la saisine, de juristes qualifiés (en droit du travail, de l’environnement, et de la santé publique), de représentants d’associations, et de représentants des syndicats majeurs. Ces personnalités pourraient être désignées par les commissions parlementaires idoines et le CESE, après réponse à un appel public. Les élus seraient soumis à une enquête visant à s’assurer qu’ils ne sont pas entravés par des « conflits d’intérêts », puis leur désignation finalement adoubée par le Conseil d’État.
    https://link.springer.com/article/10.1007/s43188-020-00075-w

    Enfin, ce que doit comprendre le public c’est que ces agences, l’ANSM et l’EMA, pour le cas des vaccins biotechnologiques actuels, prennent leur décision sur la seule base des documents adressés par les entreprises demandeuses de l’autorisation de mise sur le marché. Elles ne procèdent à aucune étude scientifique ni évaluation expérimentale indépendante. Les entreprises demanderesses ont donc toutes les cartes en main, et de plus, en situation d’urgence et sous la pression exercée par la gent politique, deux semaines seulement suffirent pour que les entreprises anglaise et étasuniennes soient adoubées. En revanche l’Union Européenne et la France ont clairement écarté Valneva et son vaccin (Valneva est une société de biotechnologie spécialisée dans les vaccins et produit ceux contre l’encéphalite japonaise et le choléra ; ceux contre le chikungunya et la maladie de Lyme sont en phase III d’essais). Des commentateurs politiques se désolent continuellement que la France, pays de Pasteur, ne soit pas plus enthousiaste pour la vaccination anti-covid. Mais les vaccins biotechnologiques ne sont pas pasteuriens ; en revanche c’est bien le cas du vaccin Valneva qui repose sur une méthodologie traditionnelle, mais éprouvée, dans laquelle le virus atténué ou tué est injecté, et dans ce cas la réponse immunitaire concerne toutes les protéines du virus et non pas une seule, et en conséquence la protection est a priori supérieure. Mais au pays de Pasteur, une entreprise française concevant un vaccin pasteurien a été méprisée sans qu’aucune justification ne soit avancée.

    7) Vous critiquez l’imposition de la solution vaccinale comme seule réponse possible au coronavirus SARS-CoV-2. Mais pourquoi nos dirigeants prendraient-ils une telle orientation si elle n’était pas la plus judicieuse et bénéfique pour notre peuple ?

    JP.B. – Comment expliquer le choix funeste de la vaccination en tant que solution unique ? Comment en est-on arrivé là ? Tout simplement les politiques sont principalement mus par leur désir de réélection, une motivation puissante chez eux, que l’on peut comprendre. Mais leur gros problème réside dans le fait qu’à Sciences Po et à l’ENA, ils n’ont pas été confrontés ni appris à réagir à une pandémie de cet ordre-là. Donc, ils s’en remettent aux médecins, aux médicastres en cour à l’Élysée. Or, beaucoup de ces gens ne sont plus en activité, ils sont retraités et continuent à bénéficier, grâce à leur entregent, de missions, expertises et autres sinécures. Ce déplacement de la gouvernance par les élus du peuple vers celle par les médecins pose un énorme problème car beaucoup d’entre ces médecins sont en « conflit d’intérêts », et il s’agit là d’un euphémisme désignant en fait une corruption morale, et une grave flétrissure déontologique. Ils sont en réalité soudoyés par les industriels. Une partie des chercheurs de l’INSERM et des praticiens hospitaliers susceptibles de faire de la recherche sont en « conflit d’intérêts », c’est-à-dire qu’ils sont à la solde de l’industrie pharmaceutique. Or, c’est à eux que le gouvernement demande conseil. Bien entendu, après l’échec du Remdesivir, néphrotoxique finalement banni par l’OMS, la solution unique qu’ils proposèrent fut la vaccination, et en conséquence il convenait d’éliminer tout autre traitement non protégé par un brevet, et donc peu rémunérateur pour les industriels auxquels ils sont inféodés.

    Parmi nos gouvernants - nous voulons continuer à croire que certains sont de bonne foi tout de même – certains s’imaginent, parce qu’ils y sont poussés et persuadés par les médecins courtisans (ceux du conseil dit scientifique), que la vaccination serait la seule solution. À partir du moment où l’on veut promouvoir la vaccination et la rendre en fin de compte quasiment obligatoire, il faut qu’il n’y ait aucun traitement disponible parce que dans l’éventualité contraire où un traitement serait doté d’une certaine efficacité, la vaccination obligatoire ou à très grande échelle n’aurait plus de sens et serait dénuée de pertinence. Il convenait dès le départ de crier haro sur les traitements et tuer dans l’œuf toute tentative de traiter par voie chimique. Donc, l’HCQ et l’AZI ont été promues au rang de poisons violents, et quant à l’ivermectine, elle est assimilée à un médicament à usage vétérinaire. Ainsi, tout est fait pour qu’il n’y ait aucun traitement susceptible de juguler cette maladie. Reste donc la solution unique vaccinale qui nous est serinée. Or, nous ne nous en sortirons pas par la seule grâce de la vaccination puisque la variante indienne delta se joue du vaccin et rend l’immunité collective inatteignable, la transformant en concept mythique. Il faudra combiner à la fois les traitements et une vaccination pour les rares personnes jeunes mais fragiles et surtout celles âgées puisque plus de 80 % de la mortalité concerne les plus de 70 ans.
https://www.science.org/news/2021/08/grim-warning-israel-vaccination-blunts-does-not-defeat-deltahttps://www.theguardian.com/world/2021/aug/10/delta-variant-renders-herd-immunity-from-covid-mythical

    Le traitement combiné HCQ plus AZI fonctionne, n’en déplaise aux médicastres médiatiques ; le Pr Christian Perronne a apporté suffisamment d’éléments probants puisés dans la littérature scientifique dans son dernier ouvrage. L’ivermectine est également efficace contre le covid et est devenue le traitement préconisé par les autorités médicales de plusieurs pays, par exemple au Pérou et au Brésil et dans certains états de l’Inde fédérale. De nombreuses études et méta-analyses, ignorées (ou passées sous silence par) des journalistes, appuient sa pertinence thérapeutique contre le covid.

    [https://blogs.mediapart.fr/laurent-mucchielli/blog/300921/crise-coronavirale-entretien-1-avec-le-toxicologue-jean-paul-bourdineaud](https://blogs.mediapart.fr/laurent-mucchielli/blog/300921/crise-coronavirale-entretien-1-avec-le-toxicologue-jean-paul-bourdin

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    https://www.francesoir.fr/opinions-tribunes/etat-du-kerala-inde-vaccination-et-contamination
    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34145166
    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33278625
    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34418758
    https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0006291X20319598
    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33389725
    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33293006
    https://journals.lww.com/americantherapeutics/fulltext/2021/06000/review_of_the_emerging_evidence_demonstrating_the.4.aspx
    https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/bjd.18369
    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34491955
    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32736876
    https://journal.chestnet.org/article/S0012-3692(20)34898-4/fulltext
    https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2052297521000883
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  • Léonore Le Caisne : « Il n’y a pas de silence de l’inceste »
    https://www.mediapart.fr/journal/france/100121/leonore-le-caisne-il-n-y-pas-de-silence-de-l-inceste?onglet=full
    (pas encore lu mais je me dit que ca interesserait certaines pêrsonnes par ici @tintin @touti )

    En apparence, les deux affaires n’ont rien en commun. D’un côté, le livre de Camille Kouchner La Familia grande, publié le 7 janvier au Seuil, dans lequel l’autrice écrit que son beau-père, Olivier Duhamel, constitutionnaliste, président de la Fondation nationale des sciences politiques et du club très select Le Siècle, a imposé des rapports incestueux à son frère jumeau. Une enquête pour « viols et agressions sexuelles par personne ayant autorité sur un mineur de 15 ans » et « viols et agressions sexuelles par personne ayant autorité » vient d’être ouverte par le parquet de Paris.

    De l’autre, l’affaire Gouardo, du nom, célèbre dans les années 2000, de cette famille où un père a, pendant près de trente ans, violé sa fille adoptive. Six enfants en sont nés, dans un petit village de Seine-et-Marne, près de Meaux, où les commérages allaient bon train, mais sans que la police ou la justice ne s’en mêlent.

    Il a fallu attendre la mort du père, en 1999, pour qu’une enquête soit finalement ouverte – en 2001. Dans ce cadre, la belle-mère de Lydia Gouardo sera condamnée, en 2008, à quatre ans de prison avec sursis pour des faits non prescrits (« non-empêchement de crime » et « agressions sexuelles » sur un des fils de Lydia).

    En novembre 2012, la Civi (Commission d’indemnisation des victimes d’infractions), qui n’impose pas les mêmes délais de prescription que le droit pénal, dédommage Lydia Gouardo, à partir des rapports d’expertise d’un gynécologue, d’un psychiatre et d’un médecin généraliste, de plus d’un million d’euros pour les actes de barbarie, violences et viols subis durant vingt-huit années (1971-1999).

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    Lydia Gouardo a raconté son histoire dans un livre intitulé Le Silence des autres (Michel Lafon, 2008).

    Léonore Le Caisne, directrice de recherche au CNRS, a enquêté pendant un an et publié un livre passionnant sur cette affaire Gouardo, Un inceste ordinaire. Et pourtant tout le monde savait (Belin, 2014). Elle témoigne de l’aveuglement de la société face aux violences sexuelles intrafamiliales (l’inceste), une réalité pourtant largement documentée et souvent connue de l’entourage, mais peu débattue dans la société et très peu dénoncée. Car dans ce petit village d’Île-de-France, « tout le monde savait », mais personne n’a saisi la justice.

    Vous vous êtes penchée sur une affaire spectaculaire par les faits décrits et par la médiatisation importante qu’elle a suscitée. Pourtant, vous avez intitulé votre livre Un inceste ordinaire. Pourquoi ?

    Léonore Le Caisne : Au-delà de la provocation d’un titre, la formule est juste. L’inceste subi par Lydia Gouardo, dans ce village près de Meaux [Seine-et-Marne – ndlr], a été médiatisé comme une affaire extraordinaire. Mais, en réalité, il s’agit d’un père qui viole sa fille : une fille sur dix est victime d’inceste ; c’est ordinaire.

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    Ensuite, c’est un inceste qui a été vécu par les habitants comme un fait assez ordinaire. Personne ne parlait d’« inceste ». L’expression utilisée était : « C’est lui qui fait des enfants à sa fille. » Et sa fille était considérée comme sa femme. C’était finalement assez ordinaire : cela devenait un homme qui fait des enfants à une femme ; et, finalement, un homme et une femme qui ont bâti une famille… C’est banal.

    Quant à la médiatisation, elle ne fut pas immédiate. Au départ, un journaliste local s’y est intéressé – mais son article a eu un faible écho et seule Ondine Millot de Libération a repris l’information et effectué un reportage sur cette famille et le village [en 2007 – ndlr]. Mais cela n’intéressait personne.

    Il a fallu l’affaire Fritzl en Autriche, une affaire spectaculaire [une jeune femme séquestrée à la cave par son père, qui l’avait violée, et plusieurs enfants en étaient nés – ndlr], pour que des journalistes en France se disent que nous disposions d’une affaire similaire : la presse en a alors parlé comme de l’histoire d’une séquestration, d’un silence villageois, d’un secret, d’une omerta. En réalité, c’était un inceste qui se pratiquait et qui était su de tous, comméré. Il n’y a pas eu de silence, de tabou ou d’omerta.

    Vous racontez que, lorsque vous arrivez dans ce village pour vos recherches – vous y avez passé deux ou trois jours par semaine pendant une année en 2008-2009 –, les habitants ne sont absolument pas hostiles. Ni silencieux. Comment cela s’est-il passé ?

    J’avais été mise en garde sur le silence à prévoir des villageois. D’autant que la médiatisation suscitait beaucoup de méfiance. Je me suis présentée comme une sociologue qui travaillait sur la vie d’un petit village de la région parisienne. Ils ne m’ont jamais associée à une journaliste. Et, auprès de moi, ils n’ont pas eu peur de passer pour des salauds. Pas du tout. Ils m’ont parlé de la famille Gouardo comme d’autres familles du village un peu spécifiques.

    Ils m’ont expliqué que tout le monde savait et ils n’en ressentaient aucune honte. À leurs yeux, c’était simplement une famille qui fonctionnait un peu différemment des autres. Elle faisait parler les habitants du village, mais aussi de la cité populaire de la ville voisine [Meaux]. En fait, cet inceste n’était pas pensé comme un crime, c’était juste « un père qui fait des enfants à sa fille ». Et si tout le monde le sait, et que ce n’est pas un crime, alors à qui voulez-vous que l’on dénonce et que voulez-vous que l’on dénonce ?

    L’inceste était tellement su qu’il n’y avait finalement aucune raison de le dénoncer à la justice.

    Seule la médiatisation a créé le scandale. C’est à ce moment-là que les faits ont été qualifiés d’inceste et qu’ils ont récupéré leur charge criminelle. Avant, ils ne sont pas perçus comme tels, la famille était simplement considérée comme une famille un peu différente des autres et qui faisait parler et permettait donc de créer du lien entre habitants.

    Lydia Gouardo, chez elle, à Coulommes, en Île-de-France, le 29 avril 2008. © OLIVIER LABAN-MATTEI / AFP Lydia Gouardo, chez elle, à Coulommes, en Île-de-France, le 29 avril 2008. © OLIVIER LABAN-MATTEI / AFP

    Pourquoi l’inceste n’est-il pas un crime à leurs yeux ?

    Parce que les habitants n’ont pas su d’un coup que cette fille avait été violée par son père pendant vingt-huit ans et qu’elle en avait eu six enfants. Ça, c’est le récit qui en a été fait par les journalistes, après coup.

    Ils ont appris les faits progressivement, en observant la maison, les déplacements des membres de la famille… Ils ont vu un homme avec une femme, avec trois enfants, dont les deux premiers qui quittent la maison familiale. Puis un homme et sa femme, avec une fille qui est restée. Avec un père grande gueule, pas sympa avec les voisins, mais bon travailleur, imprimeur ambulant, qui fait des cartes de visite à Meaux, y compris pour des notables. Il est perçu comme un bosseur, un type sérieux, avec un fort caractère. Un jour, sa fille est enceinte. Pourtant, personne ne vient dans leur maison. Cela commence à parler… Les habitants ne savent pas qui est le père. Mais ils se demandent, s’interrogent. Puis un deuxième enfant naît. Et les deux ont des ressemblances avec le père… Le commérage se poursuit.

    Peu à peu, cela fait un nombre faramineux de gens qui parlent. Du village au centre commercial de Meaux en face duquel Gouardo a installé son camion d’imprimerie. Aux caisses de Super M où tout le monde fait ses courses, on en parle. Tout le monde est au courant. Progressivement, les faits et le commérage qu’ils suscitent entrent dans la vie quotidienne des habitants, des voisins, des notables de Meaux.

    C’est un commérage qui devient structurant. Il crée des sociabilités. La circulation de l’information ne s’organise pas n’importe comment. Les élus se parlent entre eux ; la secrétaire de mairie est assez fière de savoir ; les anciens du village sont aussi contents de mieux connaître l’histoire que les nouveaux arrivés, car ça montre qu’ils sont vraiment « du pays ».

    Les habitants ont des relations de commerçants avec lui, et même de voisinage, quand bien même ce sont des relations conflictuelles. Pour eux, c’est un mec courageux, qui élève ses enfants à la dure, mais qui les élève bien. Et qui tient bien sa famille.

    Et Gouardo est une grande gueule ; il est trapu, musclé. Il leur fait un peu peur. On est donc content de bien s’entendre avec lui, de pouvoir lui parler. Sans compter qu’il ne fait que des garçons – les six enfants nés des viols sont des garçons –, dans l’imaginaire, cela compte. Le fait qu’il les fasse à sa fille montre aussi qu’il se joue des lois. Il est au-dessus d’elles. Gouardo incarne finalement un certain pouvoir. En le côtoyant, ou en essayant, certains espèrent peut-être récupérer de sa force.

    L’agriculteur qui vivait en face de Gouardo était ravi de me raconter qu’il était allé dans sa maison, qu’il arrivait à parler avec lui. Cela l’intéressait bien plus que de s’inquiéter de ce que l’homme pouvait faire subir à sa fille et de ce que celle-ci subissait.

    Cela en fait-il des complices ?

    Non, pas du tout. Par contre, détenir l’information leur permet de s’élever socialement en occupant une place enviable au sein du village. Cela n’est pas de la complicité.

    Mais comment expliquez-vous que personne ne soit alarmé ? Que personne ne se soit dit qu’il s’agissait d’un crime ?

    Parce que les faits se sont sus petit à petit et qu’ils ont été sus par beaucoup, y compris par des représentants de la justice. Les magistrats du coin participaient certainement au commérage, ne serait-ce que dans leur bureau ou dans leur cercle familial et amical. J’ai également rencontré une avocate du barreau de Meaux, qui défendait des victimes d’inceste et qui, elle aussi, commérait. Elle n’a pas cru Lydia Gouardo quand elle a dénoncé son crime, elle a minimisé…

    Les policiers, aussi, savaient : quand Lydia fuguait, c’est eux qui la ramenaient chez elle. Gouardo avait de nombreux conflits de voisinage ; la police était souvent à la porte de sa maison.

    Lui-même ne se cachait pas. Ses enfants l’appelaient « papa », ils sortaient avec lui, il les emmenait à l’école. Il parlait de « ses enfants ». Les formules étaient ambiguës. Même à l’hôpital quand elle allait accoucher, le personnel demandait qui était le père. Elle disait : « C’est mon père. » Lui répondait : « Oui, car c’est moi qui vais les élever. »

    Il ne se cachait pas, parce qu’il savait que ce qu’il faisait subir à sa fille, sa paternité incestueuse, ne ferait pas scandale. Et pour les habitants, s’il ne se cache pas, c’est bien qu’il n’y a pas crime. Cela crée un brouillage dans les repères. Dans les discussions avec les habitants, certains confondaient fille et femme. Ils parlaient parfois de Lydia comme de sa femme.

    Ce qui est sidérant dans ce que vous trouvez, c’est qu’au-delà des voisins ou des commérages du village, des représentants de la police et de la justice sont, eux aussi, alertés…

    Oui, bien sûr. Gouardo était très régulièrement au tribunal pour des affaires de conflits de voisinage, de droit de passage et de parcelles communes… La belle-mère de Lydia l’avait aussi brûlée dans un bain d’eau brûlante. Lui avait porté plainte contre l’office HLM pour négligence. Donc les juges parlaient de cet homme.

    Il était connu, avec son camion devant la grande surface de Meaux où tout le monde allait faire ses courses. Les maires successifs – dont Jean-François Copé – passaient lui serrer la main. Tout le monde était pris là-dedans. Pour que cela cesse, pour que cet inceste fasse scandale, il a fallu un public extérieur, qui n’a existé qu’avec la médiatisation du procès de la belle-mère, grâce à ce journaliste local et à la reprise des articles, une année plus tard, par la presse nationale.

    Avec la presse, le regard a-t-il alors changé sur la famille ?

    Ce n’est pas parce qu’il y a eu scandale que Lydia Gouardo a été considérée comme une victime. D’une avocate défendant des victimes d’inceste à l’agriculteur d’en face, on entendait les mêmes discours : on s’interrogeait sur les révélations tardives, sur le fait que le nombre des grossesses montrait qu’elle était consentante, etc. Quelle que soit la classe sociale, les arguments sont identiques pour laisser un inceste se perpétrer.

    Et quand la presse met en cause ce « silence » ?

    Les habitants, les voisins, ne comprennent pas ce qui leur tombe dessus. On les accuse d’omerta, d’avoir tu l’inceste. Mais il n’y a pas eu de silence ! C’était pris dans le brouhaha du commérage. Le problème n’était donc pas qu’ils n’en aient pas parlé.

    Et puis, avec son père, elle a formé une famille. Avec six garçons. C’était, en apparence, une jolie famille ; le père était autoritaire, il faisait travailler ses enfants, il allait acheter les pommes de terre chez le maire. Les enfants « avaient une bonne bouille », ils allaient à l’école, ils « étaient propres », c’est ce qu’on m’en disait, il « s’en occupait bien ».

    Lire aussi

    L’affaire Duhamel, révélatrice du « système de l’inceste » Par Lénaïg Bredoux et Marine Turchi

    Quand elle dénonce l’inceste, Lydia casse la famille et son image, et jette l’opprobre sur le village. Les victimes d’inceste qui le révèlent sont très souvent exclues de la famille. Là, les habitants ont exclu Lydia du village, peu ont continué à lui parler, alors qu’avant la famille faisait partie du village.

    Elle est brutalement devenue la salope. Dès que son père est mort, des garçons du village sont venus frapper à sa porte pour la draguer. On m’a aussi rapporté des rumeurs selon lesquelles elle allait se prostituer dans la forêt d’à côté avec une amie.

    Là encore, ce discours était porté par tous les milieux sociaux confondus. Les agriculteurs comme les enseignants. Ces habitants ne sont pas des « autres », ce sont des habitants ordinaires, de classes sociales différentes, et qui furent pris dans une configuration sociale qui intégrait cet inceste.

    Vous parlez d’enseignants, mais comment expliquez-vous qu’il n’y ait pas eu de signalements auprès de la protection de l’enfance ? Des procédures existent.

    Je pense que c’est davantage le cas aujourd’hui qu’autrefois. Le père est mort en 1999. Les faits ont commencé au début des années 1970…

    De toute façon, disons-le : l’inceste a à voir avec une représentation très patriarcale de la société. L’homme dans sa famille fait ce qu’il veut chez lui ; il est autoritaire ; il fait des enfants, c’est le plus important, et les enfants vont bien, ils mangent à leur faim. Et si la femme n’est pas d’accord, elle n’a qu’à partir.

    À vos yeux, et en dépit de spécificités – le jeune âge des victimes, le lien familial et la durée des violences subies –, l’inceste est-il une « forme paroxystique » des rapports de domination au cœur des violences sexuelles ?

    J’en suis certaine. L’inceste, c’est le début des violences sexuelles, le début de la domination des femmes [les femmes sont très majoritaires parmi les victimes d’inceste, et les auteurs sont à 95 % des hommes – ndlr]. C’est une manière de former, d’élever et de socialiser des enfants.

    Si les femmes laissent faire leur mari, c’est parce que c’est lui qui tient la famille. Les hommes incesteurs, ou agresseurs, sont des hommes à qui les proches reconnaissent une espèce de force. Il s’agit souvent d’une personne respectée, quel que soit le milieu, occupant une place importante dans la famille.

    Comme je l’explique dans mon livre, cette idée est celle popularisée par les féministes nord-américaines, selon lesquelles l’inceste serait l’une des banales violences masculines perpétrées au foyer. Louise Armstrong, porte-parole de la position féministe américaine sur l’inceste, écrivait : « [La pédophilie], c’est ce que les hommes font couramment et régulièrement à la maison parce qu’ils considèrent ça comme un droit. »

    Mais, parce que cette violence est moralement intolérable et parce que trop d’hommes « normaux » devraient sinon être criminalisés et punis, et plus généralement parce qu’elle participe du maintien de la société patriarcale, il faudrait taire cette violence, notamment l’inceste, et, à partir de toutes sortes de « tactiques » et de « stratégies d’occultation », faire croire qu’elle n’existe pas ou qu’elle est rare et ponctuelle, et seulement le fait de « pervers » ou d’hommes « trop aimants ».

    © Editions du Seuil © Editions du Seuil
    On a, en effet, souvent décrit les incesteurs comme des « monstres ». Les études sur l’ampleur du phénomène prouvent que c’est faux. Comment avez-vous réagi en prenant connaissance du livre de Camille Kouchner La Familia grande ?

    J’ai travaillé sur la réception d’une affaire d’inceste dans ce village. Le contexte est ici différent. Mais dans les extraits que j’ai lus, on comprend que, là aussi, l’entourage était au courant et en parlait ou en avait parlé. Il n’y a donc pas eu de « silence », « d’omerta » au sens strict du terme – ce n’était pas un silence réfléchi face à une autre communauté. En réalité, cela se savait, les uns et les autres en parlaient, plus ou moins, selon la place de chacun. Mais cela n’a pas été dénoncé à la justice…

    Mais dans cette affaire encore, l’inceste a été comméré. La question, c’est : pourquoi l’entourage ne s’est-il pas tourné vers la justice ? Il faudrait comprendre pourquoi, selon les places occupées par chacun, cet inceste n’a pas pu être dénoncé. Comme dans l’affaire Gouardo. Parler de silence ou d’omerta conduit à passer à côté de la question fondamentale.

    Dans ce cas, cela va encore plus loin qu’une absence de dénonciation à la justice : la justice elle-même a classé l’enquête lancée en 2011… Avant d’ouvrir une nouvelle enquête, après la publication dans Le Monde et L’Obs des extraits du livre.

    L’inceste est un fait social très important, pratiqué dans tous les milieux sociaux. Malgré son ampleur, il n’est encore l’objet d’aucun grand débat public. Au-delà de leurs actes, les agresseurs occupent une place sociale importante : au sein de la famille, de leur voisinage, professionnellement. Les familiers, les proches, les amis, les voisins, les collègues ont des engagements moraux envers l’agresseur, ou même envers la victime, qui peut demander à la sœur, au frère, à l’autre parent, de ne pas « dire », et qui les empêchent de dénoncer l’agresseur à la justice. Certains peuvent aussi avoir peur de perdre des avantages liés à leur relation avec lui : leur travail, un salaire, ou l’image d’une famille unie. Beaucoup privilégient ces engagements moraux plutôt que de faire acte de citoyenneté en dénonçant les faits à la justice. L’enfant compte souvent moins que ces engagements. Et puis, les faits sont banalisés. Souvent, on entend aussi : « C’était il y a longtemps », « C’est passé », « Ce n’est pas si grave ! ».

    Je pense aussi que la justice ne sait pas bien saisir ces affaires et que ce n’est peut-être pas par elle qu’il va falloir passer pour éradiquer ces pratiques. Actuellement, je travaille sur le recueil des informations préoccupantes. Je constate les difficultés qu’ont les travailleurs sociaux, les policiers et les magistrats à saisir l’inceste : ils cherchent des « faits » et des « traces ». Dans l’inceste, bien souvent, il n’y a ni témoins ni traces. À moins qu’il ne s’agisse d’enfants très jeunes, il peut y avoir pénétration sans déchirure. Sans parler des fellations ou des attouchements… Et après, c’est « parole contre parole », expliquent les professionnels, et la parole de l’enfant n’est pas suffisamment comprise pour faire le poids face à celle de l’adulte.

    La parole des enfants n’est sans doute pas non plus toujours bien considérée.

    De nombreux dossiers sont alors classés. Et ces classements découragent par avance les particuliers et les professionnels qui voudraient dénoncer des incestes à la justice.

    • Les policiers, aussi, savaient : quand Lydia fuguait, c’est eux qui la ramenaient chez elle. Gouardo avait de nombreux conflits de voisinage ; la police était souvent à la porte de sa maison.

      Lui-même ne se cachait pas. Ses enfants l’appelaient « papa », ils sortaient avec lui, il les emmenait à l’école. Il parlait de « ses enfants ». Les formules étaient ambiguës. Même à l’hôpital quand elle allait accoucher, le personnel demandait qui était le père. Elle disait : « C’est mon père. » Lui répondait : « Oui, car c’est moi qui vais les élever. »

      Les gamins ne fuguent pas sans de très bonnes raisons. Mais la société les ramène encore et encore au point de départ.

    • De toute façon, disons-le : l’inceste a à voir avec une représentation très patriarcale de la société. L’homme dans sa famille fait ce qu’il veut chez lui ; il est autoritaire ; il fait des enfants, c’est le plus important, et les enfants vont bien, ils mangent à leur faim. Et si la femme n’est pas d’accord, elle n’a qu’à partir.

    • Je viens de le lire, une telle hypocrisie partagé c’est tellement dément. Et à part les victimes même ici toujours pas de commentaires sur un sujet aussi grave. OSEF. Ce bon père de famille laisse 6 fils probablement aussi bons pères de famille qui suivent ce bon modèle qui fonctionne si bien... pourquoi cela s’arrèterait ? Ca me rend dingue.

      Le comble c’est :

      Quand elle dénonce l’inceste, Lydia casse la famille et son image, et jette l’opprobre sur le village. Les victimes d’inceste qui le révèlent sont très souvent exclues de la famille. Là, les habitants ont exclu Lydia du village, peu ont continué à lui parler, alors qu’avant la famille faisait partie du village.

      Elle est brutalement devenue la salope. Dès que son père est mort, des garçons du village sont venus frapper à sa porte pour la draguer. On m’a aussi rapporté des rumeurs selon lesquelles elle allait se prostituer dans la forêt d’à côté avec une amie.

      Incroyable qu’on avorte les fœtus de fille par millions alors que la malédiction de cette planète ce sont les garçons sur absolument tous les terrains : pollueurs, violeurs, tueurs, agresseurs, prédateurs, pornographe, prostitueurs, viandards...

      Tous les hommes ne sont pas pères, mais 1 femme sur 10 est survivante de l’inceste... Ca fait combien de pères incesteurs ? 1 sur 5, 1 sur 2 ? Personne pour faire ce calcule de l’horreur ?

      Sans compter qu’ il ne fait que des garçons – les six enfants nés des viols sont des garçons –, dans l’imaginaire, cela compte.

      Vivement l’extinction de notre espèce de merde.
      #rage #haine #furie #all_men

    • LE SILENCE DES AUTRES - VICTIME DE SON PÈRE PENDANT 28 ANS

      Ça s’est passé en Seine-et-Marne, dans un charmant village à une demi-heure de Paris, au vu et au su de chacun, dans l’#indifférence totale des voisins, des gendarmes, des services sociaux, de la justice et des médecins... « Pourtant, tout le monde savait ». Avec la collaboration de Jean-Michel Caradec’h, grand reporter, Prix Albert-Londres.

      http://www.michel-lafon.fr/livre/572-Le_silence_des_autres_-_Victime_de_son_pere_pendant_28_ans.html

      #livre

    • Affaire Duhamel : d’autres éléments pourraient intéresser la justice
      https://www.mediapart.fr/journal/france/130121/affaire-duhamel-dautres-elements-pourraient-interesser-la-justice

      Deux jours avant la publication du livre de Camille Kouchner, le parquet de Paris a annoncé l’ouverture d’une enquête préliminaire des chefs de « viols et agressions sexuelles par personne ayant autorité sur un mineur de 15 ans » et « viols et agressions sexuelles par personne ayant autorité ».

      Les investigations ont été confiées à la Brigade de protection des mineurs (BPM). L’objectif, d’après le parquet de Paris, est de « faire la lumière » sur les accusations de viols incestueux visant Olivier Duhamel, mais aussi d’« identifier toute autre victime potentielle » et vérifier si les faits dénoncés sont prescrits.

      Dans La Familia grande, paru le 7 janvier aux éditions du Seuil, la juriste et universitaire Camille Kouchner affirme que son frère jumeau – qu’elle nomme « Victor » pour protéger son identité –, a subi, pendant plusieurs années, alors qu’il était mineur, des viols de la part de leur beau-père, le politiste Olivier Duhamel, âgé de 70 ans aujourd’hui.

      Au-delà des viols qu’aurait subis « Victor » – situés par sa sœur à partir de ses 13 ou 14 ans, « à Paris, à Sanary », pendant « des années », « deux ou trois » –, d’autres éléments relatés par Camille Kouchner pourraient intéresser les enquêteurs.

      La juriste affirme notamment que « plus tard », une enfant de douze ans lui a expliqué qu’Olivier Duhamel lui avait « roulé une pelle » « derrière le dos de ses parents » et qu’elle n’avait « rien dit ».

      Elle-même a fait l’objet, d’après son récit, de remarques sexuelles et de commentaires réguliers sur son corps, lorsqu’elle était mineure. Au moment de la baignade par exemple, « surveill[ant] l’évolution des corps », son beau-père commentait, d’après elle : « Dis-donc, ça pousse, ma Camouche ! Mais tu ne vas tout de même pas garder le haut ? T’es pas comme Mumu, la coincée ? [Muriel, la meilleure amie de sa mère, qui se veut pas exposer son corps – ndlr]. » Un autre jour, il lui lançait, selon elle, qu’il « n’aim[ait] pas [sa] bouche » : « Tes lèvres sont trop fines. C’est dérangeant. »

      Elle relate que son beau-père aimait photographier « les culs, les seins, les peaux, les caresses ». Lorsqu’elle était âgée d’« à peine 15 ans », il aurait pris en photo ses seins en gros plan et aurait affiché le cliché en « quatre par quatre » dans la cuisine de la Ferme – la maison des enfants à Sanary –, aux côtés d’autres photos, telle « une photo des fesses de ma sœur dévalant le chemin » et celle de sa « vieille mère, quasi nue dans le jacuzzi, seins flottants ».

      Le soir, après être allé dans la chambre de son jumeau « Victor » à Paris, Olivier Duhamel se rendait dans la sienne, et s’asseyait sur son lit, écrit-elle. « Il me disait : "Tu as mis une culotte ? Tu sais que je ne veux pas que tu mettes de culotte pour dormir. C’est sale. Ça doit respirer." » D’après son récit, Olivier Duhamel venait aussi « parfois » voir leur frère aîné – qu’elle nomme « Colin » –, « dans sa chambre », pour « lui mesurer le sexe avec un double décimètre » dès que leur mère « regardait ailleurs ».

      Il reviendra à la justice de qualifier ces faits. « Les investigations en cours porteront notamment sur les faits susceptibles de revêtir une qualification pénale évoqués dans l’ouvrage écrit par Camille Kouchner », fait savoir ce mercredi à Mediapart le parquet de Paris.

      Dans La Familia grande, Camille Kouchner décrit, plus largement, un climat ultra sexualisé dans lequel évoluaient adultes et enfants, notamment à l’occasion des vacances à Sanary-sur-Mer, où famille et amis se retrouvaient. Aucune frontière ne semble séparer adultes et enfants, d’après son témoignage. « À 7 ans, à 15 ou à 40 », il faut savoir débattre de politique lors de « dîners de révolte » animés. Danser et voir les couples se former. Se baigner nu. Jouer au poker et autres jeux d’argent.

      Elle rapporte cette scène, où, lors d’un jeu de mimes à Sanary, « parents et enfants mélangés », elle a dû mimer le film La Chatte sur un toit brûlant. « Tu connais pas ? C’est un film de cul. Démerde-toi », lui aurait-on expliqué. « Me voilà faisant semblant de baiser devant les parents », se souvient-elle. « Aux enfants, il n’y a rien à cacher ! »

      « À Sanary, rien n’est interdit », mais cette liberté implique de vivre « comme les grands », écrit-elle. Dans son livre se mêlent des comportements qui relèvent du libertinage ou de l’adultère, et d’autres qui peuvent poser davantage question. Là-bas, écrit-elle, « certains des parents et enfants s’embrassent sur la bouche. Mon beau-père chauffe les femmes de ses copains. Les copains draguent les nounous. Les jeunes sont offerts aux femmes plus âgées ». Elle se souvient notamment du « clin d’œil » que lui aurait adressé son beau-père lorsque, petite, elle a découvert que, « sous la table, il caressait la jambe de la femme de son copain, le communicant avec lequel nous étions en train de dîner ». « Il n’y a rien de mal à ça. [...] La baise c’est notre liberté », lui aurait rétorqué sa mère, à qui elle avait confié cet épisode.

      « Tu comprends, j’ai l’amour à l’âge de 12 ans. Faire l’amour c’est la liberté. Et toi, qu’est-ce que tu attends ? », lui aurait encore lancé sa mère, qui, comme sa tante, se « préoccupait » de sa virginité, dit-elle.

      Camille Kouchner rapporte aussi que son frère aîné est encore « un jeune adolescent » lorsque leur mère lui envoie l’une de ses amies – une Sanaryenne de vingt ans de plus – « pour le déniaiser ». Il est alors « flatté, mais largement effrayé », dit-elle.

      Ces comportements et relations sexuels étaient-ils consentis ? Pas tous, si l’on en croit son livre. Elle affirme qu’après une soirée à Sanary, « une main courante a été déposée ». « La jeune femme, à peine vingt ans, était endormie lorsqu’un garçon s’est glissé dans son lit. Elle s’était enfuie à Paris et avait prévenu ses parents. Des explications avaient suivi. La jeune femme a été répudiée, vilipendée par mon beau-père et ma mère, effarés par tant de vulgarité. Quant à moi on m’a expliqué ce qu’il fallait en comprendre : la fille avait exagéré. Mais avec mon frère, ça aussi c’est autorisé », interroge-t-elle dans La Familia grande.

      Un autre livre est susceptible d’intéresser les enquêteurs : celui d’Évelyne Pisier, la mère des jumeaux et compagne d’Olivier Duhamel jusqu’à son décès, en 2017. Dans Une question d’âge (Stock), publié en 2005 – trois ans avant les révélations de « Victor » à sa mère –, la politologue relate des accusations d’inceste de leur fille adoptive à l’encontre de son mari, « Thierry », un professeur d’économie issu de la bourgeoisie, homme de réseaux proche de Michel Rocard et des cercles de pouvoir, « chef de bande » pendant les vacances en « tribu » dans leur maison au soleil.

      Dans un « avertissement » en préambule de l’ouvrage, évoqué par Libération et que Mediapart a lu, Évelyne Pisier donne du crédit à son récit : « J’introduis des éléments autobiographiques dans un récit fictif. Pas exactement fictif. La plupart des faits et gestes de mes héros ne relèvent pas de mon imagination. À ma propre histoire, je mêle des histoires vécues par d’autres. Un entrelacs qui préserve la fonction de témoignage que j’assigne à ce roman ».

      Le livre s’adresse à sa fille adoptive à la seconde personne du singulier. Certains passages sont troublants, au regard de l’affaire que révèle aujourd’hui le livre de Camille Kouchner. Comme cet échange, entre la narratrice et « Thierry » :

      « Mes rapports avec Thierry se détériorent. Entre nous, la tension monte. Ce n’est pas la guerre, mais c’est sinistre. Il ne partage pas mes engouements associatifs. "Tu vas encore chez tes Alcooliques anonymes ?" Je rétorque, glaciale : "Tu préfères les réseaux de pédophiles ?" ».

      Ou cet extrait, au commissariat, lorsque « Thierry » fait l’objet, pendant trois mois, d’une enquête judiciaire :


      Extrait du livre d’Évelyne Pisier paru en 2005. Extrait du livre d’Évelyne Pisier paru en 2005.

      Face à ces accusations, la narratrice dit dans ce livre « tenir bon » : « Elles sont nombreuses à douter de leurs maris. D’autres tiennent bon. J’en suis, écrit-elle dans ce livre. Jusqu’à quand ? Une « amie » confie gentiment à Nina [la fille aînée d’Évelyne Pisier dans le livre, ndlr] : « Je ne crois pas au viol. Même pas aux attouchements. Mais tout de même, Thierry entretient une relation trop ambiguë avec sa fille. Je me suis toujours demandé comment ta mère le supportait… Et avec toi, comment était-il ? »

      « Trois mois plus tard, notre dossier est classé, raconte-t-elle. Le juge renonce à mettre Thierry en examen. Sur les abus sexuels, tu t’es rétractée. Comme le fils de Camille [une amie de la famille dans le livre, ndlr]. Comme tant d’autres enfants dont je fréquente désormais les parents. Rien ne prouve que tu n’as pas menti. Rien ne prouve l’inverse non plus. De cette aventure nauséabonde, quelle trace restera-t-il ? Notre couple se défait. »

      En 2011, une enquête judiciaire avait déjà été ouverte par le parquet de Paris, après la transmission d’éléments découverts en marge d’une autre enquête : celle concernant la mort de l’actrice Marie-France Pisier, 66 ans, la sœur cadette d’Évelyne Pisier.

      Le 24 avril 2011, la comédienne avait été retrouvée morte au fond de la piscine de sa résidence de Saint-Cyr-sur-Mer (Var), encastrée dans une lourde chaise en fer forgé, bottes en caoutchouc aux pieds. Accident ? Suicide ? Meurtre ? À l’époque, la presse s’interroge. D’autant que l’autopsie n’a pas décelé d’eau dans les poumons de l’actrice. Les analyses toxicologiques indiquent un taux d’alcoolémie important et la présence d’antidépresseur et d’antalgique à doses thérapeutiques.

      Dans La Familia grande, Camille Kouchner présente sa tante comme l’une de leurs rares soutiens : au fil des années, « seule Marie-France se débat », écrit-elle. « [Elle] s’est lancée dans une entreprise acharnée. Elle a lutté contre l’horreur comme elle pouvait. Elle a prévenu ses amis. Sa sœur avec un pédophile qui s’en était pris à son fils. C’était insupportable, inacceptable. Pendant des mois elle a cherché des appuis pour convaincre ma mère, pour lui ouvrir les yeux et la persuader de le quitter. » Mais l’actrice a fini par se « désespérer », et les deux sœurs Pisier « se sont fâchées ».

      Les gendarmes de la brigade de recherches de Toulon interrogent à l’époque le cercle familial et amical de Marie-France Pisier. C’est dans ce cadre qu’ils recueillent incidemment des confidences sur des violences sexuelles qu’aurait commises Olivier Duhamel sur son beau-fils.

      L’enquête n’a pas établi de lien entre la connaissance par l’actrice de ces éléments et sa mort, assure à Mediapart une source proche du dossier. Mais les enquêteurs ont à l’époque rédigé un rapport incident au procureur adjoint de Toulon, Pierre Cortès, qui dirigeait l’enquête sur la mort de l’actrice. Celui-ci transmet ces éléments au parquet de Paris, celui de Toulon n’étant pas compétent territorialement.

      Dans son livre, Camille Kouchner relate que l’ordinateur de sa tante a été exploré dans le cadre de l’enquête et que ses échanges de mails avec Évelyne Pisier ont dû être trouvés. Elle explique aussi qu’une amie de l’actrice s’était confiée aux policiers.

      Les enquêteurs auditionnent alors « Victor ». Le jeune homme de 36 ans accepte de répondre à leurs questions, mais il refuse de porter plainte. « Cette histoire ne vous regarde pas », dit-il aux policiers, d’après le récit de sa sœur. Fait étonnant, Olivier Duhamel n’a lui jamais été auditionné. « L’enquête s’est arrêtée. Sous mes yeux, le récit d’un inceste. Et l’enquête s’est arrêtée. Police partout, justice nulle part. Pas la peine de me le rappeler », écrit Camille Kouchner dans son livre.

      Selon nos informations, l’enquête a été classée sans suite en novembre 2011, par la procureure adjointe. Avec quel motif ? Questionné par Mediapart, le parquet de Paris élude, et indique simplement que « la procédure initiée en octobre 2011 n’a pas donné lieu à suites judiciaires ». Une source proche du dossier évoque auprès de Mediapart « un problème de possible prescription de l’action publique ». Il n’en demeure pas moins qu’Olivier Duhamel n’a pas été questionné par les enquêteurs.

      À l’époque, l’affaire est sensible. Certes, Olivier Duhamel n’est plus, en 2011, conseiller du président du Conseil constitutionnel (1983-1995), ni député européen PS (1997-2004). Mais il est un personnage influent, constitutionnaliste de renom, invité des médias et proche des cercles du pouvoir. Il dirige déjà la revue Pouvoirs, siège au conseil d’administration de la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP), l’organe de gouvernance de Sciences-Po Paris, et est vice-président du club le Siècle, deux entités dont il prendra la tête par la suite. Quatre ans plus tôt, en 2007, il a participé au Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République, mis en place par le chef de l’État Nicolas Sarkozy et présidé par Édouard Balladur.

      Ce dossier mettant en cause une personnalité publique a-t-il été placé sous haute surveillance politique ? Le Garde des Sceaux de l’époque, Michel Mercier, affirme à Mediapart n’avoir « jamais su qu’il y avait eu cette enquête préliminaire » et n’avoir « jamais entendu parler de l’affaire de M. Duhamel », qu’il n’a « jamais rencontré et à qui [il] n’[a] jamais parlé ». « Personne ne m’a averti », dit-il. Il ajoute que, ministre, il avait « pris une position toute simple » : « Je savais bien qu’il ne fallait surtout pas que le ministre se mêle des procès, enquêtes. Donc je n’ai jamais demandé à être informé sur aucun procès. Et à l’époque la direction des affaires criminelles et des grâces n’était pas informée des classements ». Le ministre de l’intérieur de l’époque, Claude Guéant, nous répond n’avoir « aucun souvenir de cette enquête ».

      Sollicités mardi et mercredi par Mediapart, Olivier Duhamel et son avocate, Frédérique Baulieu, n’ont pas donné suite.

      L’affaire continue en tout cas de susciter des remous. Mercredi 13 janvier, le conseiller d’État Marc Guillaume – par ailleurs mis en cause par des accusations de « comportements sexistes » portées par des conseillères de l’Élysée –, a annoncé qu’il démissionnait des fonctions occupées dans « des établissements » où il a « travaillé avec Olivier Duhamel » : la FNSP, la revue Pouvoirs, qu’il a longtemps codirigée avec le constitutionnaliste, et le club Le Siècle. « Fréquentant Olivier Duhamel depuis des années, je me sens trahi et condamne absolument ces actes », a ajouté l’ancien secrétaire général du gouvernement et actuel préfet d’Ile-de-France dans un communiqué, assurant qu’il ignorait « totalement » les accusations d’inceste visant Olivier Duhamel.

  • La #justice grecque acquitte enfin #Stéphan_Pélissier, poursuivi pour avoir aidé sa famille syrienne

    Jugé en appel pour avoir aidé sa belle-famille syrienne à passer, en 2015, de Grèce en Italie, Stéphan Pélissier a été relaxé ce vendredi 1er mars par le tribunal de Patras. Dans un livre qui vient de paraître, il raconte son histoire. Je voulais juste sauver ma famille est un récit revigorant sur les victoires auxquelles peut aboutir un combat juste et obstiné.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/010319/la-justice-grecque-acquitte-enfin-stephan-pelissier-poursuivi-pour-avoir-a
    #réfugiés #asile #migrations #délit_de_solidarité #solidarité #réfugiés_syriens #Grèce #passeurs

    Sur cette histoire, plus à lire sur seenthis (archives datant de 2017) :
    https://seenthis.net/messages/648611
    https://seenthis.net/messages/643134

    • #Livre « Je voulais juste sauver ma famille »

      Pour avoir voulu sauver sa belle-famille fuyant une Syrie à feu et à sang d’une mort certaine, Stéphan Pélissier est menacé de 15 ans de prison ferme par la justice grecque qui l’accuse d’être un passeur.
      Son crime ? Être parti chercher les parents, le frère et la sœur de sa femme Zéna en Grèce plutôt que de les laisser monter à bord d’un canot de fortune pour tenter une impossible traversée vers l’Italie.
      L’euphorie des retrouvailles vire au cauchemar lorsque Stéphan et les siens sont arrêtés et jetés en prison. À la tragédie humaine s’ajoute alors pour l’Albigeois sans histoire un enfer judiciaire aussi absurde qu’implacable. Si ses proches ont enfin pu trouver – légalement – asile en France, lui doit encore se battre de toutes ses forces pour que soit reconnue son innocence et que les valeurs d’humanité et de solidarité auxquelles il croit farouchement puissent triompher.

      http://www.michel-lafon.fr/livre/2213-JE_VOULAIS_JUSTE_SAUVER_MA_FAMILLE.html