• Les parachutes bien dorés des anciens dirigeants de Paris Habitat, Denis Cosnard
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/03/26/les-parachutes-bien-dores-de-paris-habitat_5441466_823448.html

    L’éviction du directeur général et de deux cadres a coûté plus de 850 000 euros à l’office de HLM en 2016. Des largesses épinglées par l’Agence de contrôle du logement social.

    En 2016, lorsqu’une série de scandales avait éclaboussé l’office de HLM #Paris_Habitat, Anne Hidalgo avait promis des « sanctions très sévères à l’encontre des responsables ». La Ville de Paris n’a finalement pas eu la main trop lourde. Le directeur général, Stéphane Dambrine, a certes dû prendre la porte, et deux autres dirigeants avec lui. Mais tous ont bénéficié de conditions de départ généreuses.

    Trop, estime aujourd’hui l’Agence nationale de contrôle du logement social (Ancols). Ensemble, ces trois évictions ont « engendré un coût de plus de 850 000 euros pour l’office », souligne le rapport que vient de publier cet établissement public. Des sommes jugées « excessives pour un organisme investi d’une mission d’intérêt général ».

    Retour au printemps 2016. Paris Habitat, le plus important bailleur social de France, avec un parc de 124 000 logements, se trouve au cœur de la polémique. L’office public est d’abord épinglé pour les rémunérations très élevées de ses nombreux dirigeants. Stéphane Dambrine, son directeur général arrivé début 2012, est le premier sur la sellette, en raison notamment du « #parachute_doré » évalué à 500 000 euros qu’il a négocié au cas où il devrait partir. Puis les révélations se succèdent sur les dérives de l’office : surfacturations, absence de contrôle sur les travaux, présence dans les logements de hauts fonctionnaires dont les revenus dépassent largement les plafonds…

    Deuxième surprise

    En juin 2016, la coupe est pleine. « J’ai fait de la sobriété et de l’exemplarité de la gestion des sociétés et établissements dépendant de la Ville de Paris une priorité de mon mandat », explique la maire, Anne Hidalgo, après la parution d’une enquête à charge de Marianne. Or, « la direction actuelle n’a pas mesuré la gravité de la situation, et a démontré son incapacité à se mettre en cohérence avec ces orientations », note l’élue socialiste. Stéphane Dambrine est alors écarté.

    « Il n’y aura pas de parachute doré, mais une négociation raisonnable », assure alors le président de Paris Habitat, Roger Madec. Problème : le directeur général bénéficie d’un contrat qui paraît solidement bordé. Si bien qu’il part en définitive avec un chèque de 364 976 euros, indique l’Ancols.
    Il y aurait pourtant eu matière à discussion, relève le rapport : le contrat prévoyait en effet une indemnité identique quelle que soit l’ancienneté dans la fonction, « ce qui constitue un point de fragilité juridique en cas de contentieux ». L’office aurait également pu se passer de payer sans justification le solde des congés non pris par le directeur général.

    La lecture du rapport révèle une deuxième surprise : avant de quitter son poste, Stéphane Dambrine s’est assuré que son adjointe et la secrétaire générale de Paris Habitat partiraient elles aussi dans de bonnes conditions. « Sous sa seule responsabilité et sans en informer le conseil d’administration », il a « décidé lui-même du montant de l’indemnisation » de ses deux proches collaboratrices, indique le gendarme du logement social. Et il les a fait bénéficier « d’indemnités très supérieures à la pratique habituelle ».

    Gestion « globalement satisfaisante »

    La secrétaire générale a perçu 209 000 euros de plus que le minimum auquel elle pouvait prétendre et l’adjointe au directeur général 76 945 euros de plus. Parmi les 60 autres ruptures amiables signées chez Paris Habitat entre 2015 et mai 2017, ce complément d’indemnité n’a jamais dépassé 15 000 euros. « Le contexte particulier aurait dû contraindre » le directeur partant à « associer le conseil d’administration » à ces négociations, « afin de garantir que les intérêts de l’office étaient préservés », estime l’Ancols.

    Cette affaire mise à part, l’agence dresse un bilan assez positif. Paris Habitat est désormais géré de façon « globalement satisfaisante », résume le rapport. Les charges sont « en général maîtrisées », les loyers « modérés », le contrôle interne est « efficace » et la situation financière « saine ». Point notable : « Le contrôle n’a révélé aucune irrégularité dans les attributions de logements », souligne Pascal Martin-Gousset, le directeur général de l’Ancols. Cela n’avait pas toujours été le cas dans le passé…

    L’agence n’en relève pas moins des faiblesses. En particulier une gestion coûteuse et peu « efficiente » : la masse salariale est « élevée », et les modalités de temps de travail « très avantageuses » pour le personnel, qui bénéficie de 56 à 62 jours de congés et RTT par an. Les travaux de rénovation des logements dépassent souvent les délais et les budgets. Stéphane Dauphin, le directeur arrivé en 2016, a encore du pain sur la planche.

    #logement_social #Ville_de_Paris

  • Désamour et lassitude, le blues des conseillers de Macron, Cédric Pietralunga
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/03/26/desamour-et-lassitude-le-blues-des-conseillers-de-macron-a-l-elysee_5441452_

    Depuis plusieurs semaines, de plus en plus de membres du cabinet quittent l’#Elysée, comme le conseiller spécial Ismaël Emelien, parti lundi.

    C’était le Grognard le plus fidèle. Le soldat d’élite de la Vieille Garde. Celui qui avait participé à toutes les batailles. Après presque cinq ans passés dans l’ombre d’Emmanuel Macron, Ismaël Emelien a décidé de reprendre sa liberté. Le conseiller spécial, considéré comme l’un des plus proches du chef de l’Etat, a effectué lundi 25 mars sa dernière journée de travail à l’Elysée, deux jours avant la sortie de son livre, Le progrès ne tombe pas du ciel (Fayard, 176 p., 15 €), qu’il a présenté dans Le Point comme « une nouvelle étape de [s]on engagement ».

    L’ancien consultant de l’agence Havas n’est pas le seul à quitter le cabinet élyséen. Depuis la fin 2018, plusieurs des 44 conseillers d’Emmanuel Macron ont quitté l’Hôtel d’Evreux. Barbara Frugier, la conseillère presse internationale, Sylvain Fort, le directeur de la communication, Stéphane Séjourné, le conseiller politique, David Amiel, le bras droit du secrétaire général Alexis Kohler, Fabrice Aubert, le conseiller institutions et action publique, ou encore Ahlem Gharbi, la conseillère Afrique du Nord et Moyen-Orient, ont tous pris d’autres voies.

    Surtout, l’hémorragie n’est pas terminée. D’autres membres du cabinet présidentiel auraient déjà fait part de leur envie d’ailleurs, comme Sonya Djemni-Wagner, la conseillère justice, ou Emmanuel Miquel, le conseiller entreprise, attractivité et export.

    Antoine Pellion, le conseiller énergie, environnement et transports, a même déjà son point de chute : il va prendre la direction du cabinet de Stanislas Guerini, le délégué général de La République en marche (LRM). « Au total, on pense avoir encore dix à quinze départs d’ici à cet été », soit environ un quart du cabinet, reconnaît-on à l’Elysée.

    « Epuisement physique »

    Officiellement, ces départs n’ont rien d’exceptionnel. « Après deux ans, il y a un épuisement physique et un épuisement des idées. Il est normal d’avoir un renouvellement », explique l’entourage du chef de l’Etat. « Le rythme auquel ils sont soumis peut les amener à souffler », concède François Patriat, le président du groupe LRM du Sénat, qui a croisé plusieurs des jeunes forçats lors de la campagne pour l’élection présidentielle.

    « Quand on est conseiller à l’Elysée, on est contacté quotidiennement par des chasseurs de tête. Au bout d’un moment, cela trotte dans la tête », ajoute un membre du cabinet.
    Mais, en coulisses, une autre histoire se raconte. Celle d’un divorce entre un chef de l’Etat insaisissable et des conseillers accusés de l’avoir isolé. « Il y a une forme de désamour », reconnaît l’un d’eux. Côté cabinet, plusieurs font état des méthodes déstabilisantes d’Emmanuel Macron, qui a pris pour habitude de court-circuiter ses équipes, refusant de s’en tenir à ses conseillers pour se forger une opinion sur un sujet. « Il consulte énormément, des experts comme des gens croisés lors de ses déplacements et avec lesquels il a gardé le contact », reconnaît une proche du président.

    Alors qu’ils pensaient avoir touché le Graal en entrant à l’Elysée, nombre de conseillers se sont rendu compte qu’ils avaient finalement peu d’influence. Que si le chef de l’Etat lisait leurs notes – jamais plus d’une page, a imposé Alexis Kohler –, il en recevait aussi de nombreuses autres.
    Lors de son départ, M. Macron a ainsi demandé à Ahlem Gharbi, sa conseillère Afrique du Nord et Moyen-Orient, de continuer à lui faire part de ses réflexions, alors qu’elle a été remplacée, en l’occurrence par Marie Philippe, une diplomate qui travaillait à la représentation permanente de la France auprès de l’ONU à New York. Une requête répétée à tous ceux qui le quittent, pour « garder le lien ».

    « Il n’est jamais satisfait »

    « Macron, c’est quelqu’un qui déteste les règlements, les organisations fermées, il le vit comme un étouffoir. Lors de la campagne présidentielle, nous étions la seule équipe à ne pas avoir d’organigramme », décrypte l’un des compagnons de route du chef de l’Etat. « N’oubliez jamais que Macron génère son confort dans l’inconfort des autres. Avec lui, c’est “je jette les chatons dans la piscine et je vois qui surnage” », ajoute un autre pour expliquer le malaise des équipes.

    « C’est très dur de travailler avec le président, il est très exigeant, à toute heure du jour et de la nuit, il n’est jamais satisfait », abonde un poids lourd de la majorité.

    Pour expliquer cette vague de départs, ceux qui parlent régulièrement à M. Macron décrivent aussi un chef de l’Etat de plus en plus agacé par son entourage, accusé de n’avoir pas vu venir la crise des « #gilets_jaunes ». Le président reprocherait notamment à son équipe la façon dont son « itinérance mémorielle » a été organisée à l’automne 2018. Durant une semaine, M. Macron avait arpenté les routes de l’est et du nord de la France pour célébrer le centenaire du 11-Novembre et avait été plusieurs fois pris à partie par des Français, ce qui avait brouillé son message et son image.

    « A posteriori, c’était les prémices des “gilets jaunes” et personne ne l’avait anticipé. Macron a eu l’impression d’être envoyé au #casse-pipe », décrypte un conseiller extérieur. La visite au Puy-en-Velay, le 4 décembre, lors de laquelle des manifestants avaient poursuivi à pied la voiture présidentielle, n’a pas arrangé les choses.

    « Il faut du sang neuf en permanence »

    Résultat : plusieurs élus, dont François Bayrou, ont conseillé au début de l’hiver à Emmanuel Macron de faire le ménage dans son cabinet, jugé trop monocolore et sans expérience du terrain. Un premier signe a été envoyé avec l’arrivée de Philippe Grangeon , le 4 février.
    A 61 ans, l’ancien conseiller de Dominique Strauss-Kahn et de Nicole Notat à la CFDT détonne parmi la jeune garde, par son expérience mais aussi par son franc-parler. « Conseiller, ce n’est pas un job de cinq ans. Il faut du sang neuf en permanence », assume le sexagénaire à l’évocation du départ de plusieurs membres du cabinet présidentiel.

    Au début de l’année, Brigitte Macron, dont les relations avec la garde rapprochée du chef de l’Etat sont notoirement difficiles, aurait également conseillé de choisir son directeur du cabinet, Pierre-Olivier Costa, un ancien de l’équipe de Bertrand Delanoë à la Mairie de Paris, pour remplacer Sylvain Fort à la direction de la communication de l’Elysée. « Elle s’est toujours méfiée de ces jeunes diplômés qui pensent avoir raison sur tout », confie l’un de ses proches. Une version démentie auprès du Monde par M. Costa et Mme Macron.

    « Dumontet rencontre des ONG, c’est n’importe quoi »

    A l’Elysée, certains se sont surtout offusqués du rôle joué par Jean-Marc Dumontet, voyant une marque d’une défiance à leur égard du chef de l’Etat. L’homme d’affaires, producteur de spectacles et propriétaire de six salles de théâtre à Paris, a été chargé par M. Macron de mener des auditions pour trouver le remplaçant de Sylvain Fort, parti le 25 janvier. Un choix surprenant puisque M. Dumontet n’exerce aucune fonction officielle au sein du cabinet présidentiel et n’a même jamais travaillé dans l’administration ou eu de responsabilité politique.

    Surtout, M. Dumontet ne se serait pas contenté de faire le casting de la communication, pour lequel il a mené des auditions dans ses bureaux parisiens mais aussi à l’Elysée : il aurait aussi participé à d’autres réunions sur d’autres sujets au Palais. « Il rencontre des associations, des ONG, c’est n’importe quoi », s’agace un conseiller. Début février, il était présent lors d’une rencontre hors agenda entre Emmanuel Macron et l’actrice Marion Cotillard, venue en toute discrétion évoquer les sujets sur le climat avec le chef de l’Etat.

    « Dumontet n’a pas le niveau de compétence et de connaissance politique pour occuper de telles fonctions, ça hystérise les structures et c’est inconfortable pour tout le monde », désapprouve un proche du chef de l’Etat.

    « Il n’a pas été scanné par la HATVP [Haute Autorité pour la transparence la vie publique] alors que c’est un homme d’affaires, on ne sait rien de lui », s’étonne cette source. « On a l’impression que personne n’a retenu les leçons de Benalla », s’alarme même un macroniste.

    Interrogé par Le Monde, M. Dumontet assure au contraire qu’« il n’y a aucune tension ni difficulté » liée à sa mission.

    Absorption de gouvernementaux en tous genres (des LR aux EELV en passant par les PS et centre) ou pas, #Ça_branle_dans_le_manche comme le disait Eugène.