Les eaux glacées du calcul égoïste — Adieu à Pierre Lazuly

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    • Parmi les tous premiers correspondants que j’ai eus après la première mise en ligne de Désordre, et fallait être une sacrée tête chercheuse pour être au courant de ce genre de choses alors. Et je serais à peine surpris d’apprendre si je ne lui dois pas, à lui ou à d’autres, suivez mon regard ( @fil, @mona, @arno ) l’inscription du Désordre dans le cénacle de rezo.net

      J’adorais recevoir de ses mails, parfois tard dans la nuit qui me disaient son enthousiasme d’avoir trouvé ceci ou cela dans sur Internet (à l’époque c’était comme cela que cela fonctionnait, on s’en voyait des mails pour signaler de beaux contenus) et dont il pensait que cela allait m’intéresser, et ça m’intéressait à chaque fois. Vu qu’on ne se connaissait pas, je ne sais pas très bien comment il faisait.

      Pensées à celles et ceux qui l’ont bien connu et qui doivent être fort tristes.

    • On l’aura compris : dans la société de l’information comme dans le monde archaïque, les plus belles rencontres ne se font pas sur les axes autoroutiers, mais bien au hasard des chemins de traverse.

      https://www.liberation.fr/tribune/1998/05/21/le-net-c-est-l-apotheose-du-frivole-et-du-mercantile-des-autoroutes-de-la

      Je viens de retrouver cet article de Pierre Lazuly qui date donc de 1998. J’en suis un peu ébaubi quand même : 1998 !

    • C’est ouf, il avait quasiment tout dit sur l’état actuel (netflix, etc), 20 ans avant.

      On comprend mieux alors la fusion annoncée du multimédia et de la communication, l’Internet véhiculera demain un programme audiovisuel personnalisé.

      La personnalisation, c’est le nerf de la guerre. Sous prétexte de mieux vous servir, les fournisseurs de services Internet s’empressent de modéliser votre profil. Véritables big brothers, leurs machines analysent votre comportement.

      […]

      La « bataille de l’intelligence », alors, opposera ceux qui auront un recul suffisant, une vision suffisamment claire pour en tirer un profit économique ou culturel, et ceux qui auront accès, mais dans un rôle de consommateurs soumis aux manipulations mercantiles des premiers. Or le recul ne s’acquiert pas en surfant sur le Web. L’éducation doit, avant d’inculquer la maîtrise de l’outil, enseigner la méfiance et développer l’esprit critique.

      […]

      Qui est assez naïf pour croire qu’un instrument destiné à accroître la productivité et à réduire les coûts aura, à terme, un effet bénéfique sur l’emploi ?

    • @rastapopoulos oui, j’en suis resté comme deux ronds-de-flanc. J’avais un certain souvenir (positif) de cet article (et c’est déjà beau de se souvenir d’un article quel qu’il soit vingt ans après), mais le relire aujourd’hui m’a interloqué.

      (Lequel article était rangé dans ma mémoire pas très loin des articles du @diplo à propos des autoroutes de l’information, quelques années plus tôt. Je me souviens notamment d’un article qui expliquait ce à quoi ressemblerait la guerre des noms de domaine, présentant la chose comme une colonisation du langage, autant de choses que je ne comprenais pas très bien, mais ça avait l’air très intéressant)

    • https://www.monde-diplomatique.fr/1998/12/LAZULY/4198

      Rien, de nos jours, n’est plus important que le client. La télévision le distrait jour et nuit. Les journaux chantent ses louanges ; les plus grands éditorialistes s’intéressent à sa vie. Les politiciens l’encensent : il est la croissance ; de sa consommation dépend le sort de la nation. Les journaux d’entreprise chantent à l’unisson : « La satisfaction du client doit être notre obsession. » Pourquoi ? Sans doute pour des raisons d’argent.