• Polémique Le Corbusier : « Juger les attitudes d’un artiste d’hier dans le climat d’aujourd’hui est bien de notre époque »
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    Chronique. La descente aux enfers se poursuit pour Le Corbusier (1887-1965). L’architecte suisse devenu français en 1930 était considéré comme le dieu de la modernité des années 1920 et 1930 – grands ensembles rationnels pour les masses et maisons pures, blanches et élégantes pour les riches. Mais au fil des ans et des publications, ce Picasso du béton fut qualifié de réactionnaire, vichyste, fasciste, stalinien, antisémite et pro-Hitler. Ce qui donne un millefeuille nauséabond et un personnage qui, même mort, n’est pas fréquentable. Tout cela figure dans une tribune collective, publiée le 2 avril sur le site du Monde.
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    Ce portrait a déjà été brossé dans trois livres sortis en 2015 à l’occasion d’une exposition Le Corbusier au Centre Pompidou. Le contraste était vertigineux : le musée mettait en lumière un génie des formes ; les livres dénonçaient sa face noire. Entre les deux camps, ce fut rude. Mais la tribune est d’abord inédite par le profil des neuf signataires : on y trouve des anti-corbuséens de longue date, mais aussi, et c’est une surprise, le cinéaste Jean-Louis Comolli et l’historienne Michelle Perrot, voix du féminisme, du mouvement ouvrier et aussi de l’univers carcéral, un sujet que les « anti-Corbu » associent aux bâtiments du maître.

    La tribune demande aussi au ministre de la culture, Franck Riester, de se désengager du projet de musée Le Corbusier, à Poissy (Yvelines). De se retirer de la Fondation Le Corbusier, dans le 16e arrondissement de Paris. Et d’agir pour que soit déboulonnée la statue de l’architecte inaugurée il y a quelques semaines à Poissy. Puisque, selon les signataires, Le Corbusier « ne doit plus bénéficier d’aucun soutien public », ils auraient pu demander que nos écoles d’architecture, financées par l’Etat, suppriment l’artiste des enseignements, que ses bâtiments soient fermés à la visite, que les plaques à son nom soient retirées, et que ses œuvres soient expulsées des musées.
    Faire vaciller la statue de l’homme

    Le ministère de la culture nous a fait savoir qu’il ne fera rien de tout cela et qu’il appartient aux historiens de se prononcer. Pas simple car deux camps s’invectivent. Le Corbusier a voulu travailler pour Philippe Pétain et Benito Mussolini. Oui, mais aussi pour Léon Blum, en 1936. Il écrit des mots louangeurs sur Adolf Hitler, mais aussi d’autres de mépris sur l’Allemagne nazie.

    #grand_homme