L’énigme d’un squelette vieux de 2 000 ans trouvé en Grande-Bretagne romaine résolue grâce à l’ADN ancien - Geo.fr
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L’histoire commence par des fouilles de prévention, dans le cadre de travaux d’un axe routier majeur entre Cambridge et Huntingdon (Cambridgeshire, Angleterre). Elle se termine avec un véritable cold case antique. Les archéologues ont retrouvé sur les lieux les restes squelettiques d’un homme mort il y a deux millénaires, dont aucun effet personnel n’a été identifié pour rétablir sa mystérieuse identité.
C’était sans compter les progrès des analyses ADN, qui ont permis de révéler ses origines lointaines, quelque peu surprenantes : l’inconnu, né dans ce qui est aujourd’hui le sud de la Russie, faisait partie d’un groupe nomade connu sous le nom de Sarmates. Mais comment alors s’est-il retrouvé à des kilomètres de là, au milieu de la Grande-Bretagne romaine ? Les détails de cette fascinante enquête scientifique sont partagés par la BBC, et publiés dans la revue Current Biology ce 19 décembre 2023.
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Son ADN a dévoilé qu’il faisait partie des Sarmates, peuples de cavaliers nomades de langue indo-iranienne étroitement liés aux Scythes, qui ont prospéré dans les steppes eurasiennes (IVe siècle av. J.-C. au IVe siècle apr. J.-C.), dans les régions de la mer Noire et de la mer Caspienne notamment. Offord Cluny 203645, enterré entre 126 et 228 apr. J.-C., venait donc des confins de l’Empire romain.
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Pourquoi se trouvait-il alors au milieu de la campagne anglaise ? La suite de ses péripéties antiques nous est comptée grâce à ses dents fossilisées. Tout au long au long de la vie d’un individu, celles-ci subissent des changements, si bien qu’à l’image des cernes d’un arbre (dendrochronologie), chaque couche devient un instructif « instantané » de ce qu’il mangeait à un moment T.
Le département d’archéologie de l’université de Durham (Angleterre) a ainsi montré qu’Offord Cluny 203645 avait consommé, jusqu’à l’âge de six ans, du millet et du sorgho, abondants dans les régions où les Sarmates évoluaient. Mais au fil du temps, ces céréales semblent avoir disparu de son régime alimentaire, au profit du blé. Un changement significatif d’une migration vers l’Europe occidentale.
Ce serait ainsi bien lui, et non ses ancêtres, qui se serait rendu dans la Grande-Bretagne romaine (43-407 apr. J.-C.). Les archives historiques suggèrent qu’il aurait pu être le fils — ou éventuellement, l’esclave — d’un homme d’une cavalerie sarmate incorporée dans l’armée romaine. Cette dernière avait souvent recours à des troupes auxiliaires non romaines, provenant de diverses régions et ethnies.
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Cependant, les relations entre Sarmates et Romains sont moins documentées que les interactions de l’Empire avec d’autres peuples voisins. Ces premières preuves biologiques, apportées par l’analyse de l’ADN ancien, semblent confirmer l’existence de la cavalerie sarmate postée en Grande-Bretagne.
Elles permettent ainsi une meilleure compréhension, comme pour des âges de la pierre et du bronze plus lointains et donc plus secrets, de l’époque romaine et des périodes ultérieures.
« Nous pouvons maintenant poser des questions différentes et examiner comment les sociétés se sont formées, leur composition et comment elles ont évolué à l’époque romaine, se réjouit le Dr Alex Smith de l’entreprise qui a dirigé les fouilles, MOLA Headland Infrastructure. [...] il y avait [sûrement] beaucoup plus de mouvement [que soupçonné], non seulement dans les villes mais aussi à la campagne. »