A Toulouse, 5 000 personnes sont sans domicile fixe

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  • A Toulouse, 5 000 personnes sont sans domicile fixe
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/04/18/a-toulouse-5-000-personnes-sont-sans-domicile-fixe_5452002_3224.html

    Une étude menée conjointement par la mairie et des associations a comptabilisé pour la première fois le nombre de personnes sans domicile fixe. Les deux tiers sont des familles, le nombre d’étrangers est en hausse.

    La situation est inquiétante. Quelque 5 000 personnes vivent à Toulouse sans domicile fixe. A titre de comparaison, Paris en a recensé 3 641 après le dernier décompte réalisé lors de la deuxième édition de la Nuit de la solidarité début février. Jeudi 18 avril, Daniel Rougé, adjoint au maire chargé de la coordination des politiques de solidarité à Toulouse, devait présenter les détails d’une étude réalisée dans le cadre du plan Logement d’abord et menée par l’antenne municipale du Service intégré d’accueil et d’orientation (SIAO) entre 21 heures et minuit par environ 150 bénévoles ou agents municipaux. Ce soir-là, le SIAO, épaulé par la Croix-Rouge, le Secours catholique et les Restos du cœur, était parvenu à un total de 4 163 personnes vivant dans la rue ou dans des squats, campements, hôtels ou gymnases…

    Mais la mairie et certaines associations, comme Droit au logement (DAL) estiment que ce nombre serait plus proche de 5 000. Pour le maire (Les Républicains), Jean-Luc Moudenc, « cette évaluation est très importante, elle va nous permettre de regarder le sujet de face et de faire des propositions. » Elle dévoile une hétérogénéité des profils et parcours. Ainsi, 70 % sont des familles et « sur les 437 adultes sans-abri qui ont répondu, la forte majorité (66 %) se situe dans la tranche d’âge 25-50 ans, et 18 % ont entre 18 et 24 ans », est-il précisé.

    Des familles entières à la rue

    Pour M. Moudenc, « on peut tirer plusieurs leçons de ce premier recensement. Premièrement, la présence grandissante de familles entières. Ensuite, une féminisation importante avec près de 35 % de femmes seules, et enfin une augmentation fulgurante d’étrangers de pays d’origine très variés. » Un SDF sur deux (52 %) vit à Toulouse depuis plus d’un an, et 30 % depuis moins de six mois. « Un chiffre qui s’explique par l’arrivée récente de populations migrantes », confirme le rapport, comme par exemple de ressortissants albanais ou géorgiens. « 52 % des personnes ont des ressources financières, c’est plutôt une bonne nouvelle pour le programme de Logement d’abord, veut croire Daniel Rougé. Notre objectif sera désormais de fluidifier l’accès au logement, car 80 % ne font pas de demandes de logements, elles sont hors radar. »

    L’élu cite l’exemple des 1 100 personnes évacuées dans des bidonvilles depuis 2015, avec des taux de relogements très importants. Un relatif succès que souligne Thomas Couderette, membre du Collectif d’entraide et d’innovation sociale : « Je considère que c’est l’Etat, et donc la préfecture, qui sont défaillants, principalement dans l’accueil d’urgence. Des efforts et une vision à long terme sont nécessaires plutôt que de traiter le sujet simplement à l’entrée de l’hiver. »

    Du côté du DAL, le porte-parole départemental François Piquemal ne se dit « pas étonné de ces chiffres. A Toulouse, on compte plus de 30 000 logements vides ou vacants. Nous, ce que l’on demande, c’est un audit sur cette aberration et des réquisitions ». L’idée a fait écho du côté de la mairie, et un groupe de travail sur l’encadrement des loyers, mesure souvent réclamée par le milieu associatif, va voir le jour. M. Rougé travaille sur la création d’une agence immobilière municipale à vocation sociale qui « sécuriserait les locations, pour les petits propriétaires privés qui rechignent souvent à louer à des personnes en difficulté ».

    L’Etat dépense 40 millions d’euros par an

    Si le mot réquisition n’est pas employé, la municipalité veut créer des « espaces intercalaires », sorte de lieux d’hébergement gérés par la collectivité et des associations dans des bâtiments inoccupés. Dans une ville qui dénombre 42 000 demandes de logement HLM en attente, ces solutions nouvelles paraissent indispensables. Du côté de la préfecture, on met en avant « une attractivité de la ville, avec près de 15 000 nouveaux arrivants chaque année, et une pression migratoire qui explose, rendant la situation effectivement très tendue », commente son secrétaire général Jean-François Colombet. « Nous avons créé 2 300 places d’hébergement d’urgence en trois ans, augmenté de 245 % les places pour les demandeurs d’asile, et de 300 % sur la même période pour les nuitées d’hôtel. Pour l’Etat, cela représente 40 millions d’euros par an », affirme-t-il.

    Alors que le nombre de repas quotidiens distribués par les Restos du cœur est passé de 300 à 500 par jour à Toulouse et que la saturation des services d’appels d’urgence du 115 est toujours aussi problématique – ils peuvent recevoir jusqu’à 300 appels par jour –, l’étude a été saluée par tous les acteurs. Il y a urgence. Le 2 avril, un autre rapport publié par le collectif Les morts de la rue, avait dénombré dix-huit personnes décédées dans la rue à Toulouse en 2018. Quasi exclusivement des hommes, âgés de 28 à 71 ans, la plupart anonymes.

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