Mobilisation exceptionnelle en Russie pour le journaliste Ivan Golounov
▻https://www.franceculture.fr/emissions/revue-de-presse-internationale/la-revue-de-presse-internationale-emission-du-lundi-10-juin-2019
Des motifs d’inquiétudes... et des raisons d’espérer, aussi, nous arrivent ce matin de l’Est.
A commence bien sûr par la Russie, où l’évènement médiatique ce matin, c’est cette Une commune pour les trois grands journaux nationaux que sont Kommersant, RBK et Vedomosti.
« Nous sommes Ivan Golunov », voilà ce qu’on lit sur cette Une, déclinée dans les couleurs de chacun des quotidiens. C’est une marque franchement exceptionnelle de solidarité entre journalistes, pour s’indigner ensemble de l’arrestation donc d’Ivan Golounov.
Golounov, 36 ans, est un journaliste russe spécialisé dans l’investigation, collaborateur du site d’info indépendant Meduza dont je vous parle régulièrement ici et qui se revendique comme un média d’opposition à Vlaidmir Poutine tout en rajeunissant sérieusement le genre. Pas étonnant d’ailleurs que sa rédaction en chef soit basée à Riga en Lettonie pour garantir sa liberté de ton.
Mais Ivan Golounov, lui, vit et travaille à Moscou : c’est de là qu’il a fait trembler le vice-maire de la capitale en révélant son luxueux autant que douteux patrimoine immobilier... c’est aussi de là qu’il a enquêté sur la mafia des pompes funèbres, un commerce très lucratif que se partagent en bonne intelligence officiels et criminels.
Je vous parle de ces deux enquêtes parce qu’elle sont représentatives du travail de Golounov pour Meduza et que le magazine Republic les a republiés ce week-end en hommage à leur auteur.
Et c’est donc dans le centre de Moscou, qu’Ivan Golounov a été arrêté jeudi par des policiers, qui ont fort opportunément trouvé quelques grammes de stupéfiants dans son sac. Depuis, retrace Republic, le journaliste en est passé par la détention provisoire, les interrogatoires musclés, les pressions pour lui soutirer des aveux, la présentation à un juge qui l’a inculpé pour trafic de drogues et l’a renvoyé vers un procès dans lequel il risque 10 à 20 ans de prison...
Il a fallu une mobilisation vraiment inédite des défenseurs de la liberté de la presse en Russie pour qu’il soit finalement, samedi soir, libéré et placé en detention à son domicile en attendant son procès.