La justice est malade de ses procureurs, et c’est la faute des politiques - Page 1

/la-justice-est-malade-de-ses-procureurs

  • La justice est malade de ses procureurs, et c’est la faute des politiques
    https://www.mediapart.fr/journal/france/240719/la-justice-est-malade-de-ses-procureurs-et-c-est-la-faute-des-politiques

    Le zèle excessif des procureurs de Nice, de Marseille et de Paris à satisfaire le pouvoir politique plutôt qu’à servir la justice illustre la nécessité de couper définitivement le lien entre le parquet et l’exécutif.

    #Parti_pris #parquet,_magistrature,_Marseille,_Edouard_Philippe,_Emmanuel_Macron,_Nicole_Belloubet,_procureurs,_Nice,_violences_policières,_PNF,_Justice

    • Quel crédit apporter à la justice quand elle fait de la désinformation et tente de verrouiller les enquêtes sensibles ? Le Code de procédure pénale autorise les procureurs à communiquer sur les affaires en cours – ce que ne peuvent faire les juges du siège –, mais il ne leur demande pas de mentir. Ce même Code de procédure leur confie la direction des enquêtes préliminaires, qu’ils peuvent ouvrir ou classer sans suite à leur guise. Les pouvoirs des procureurs ont été considérablement renforcés ces dernières années aux dépens des juges indépendants. Mais comment peut-on croire qu’un procureur qui ment sciemment dans une affaire « signalée » ne veuille pas l’étouffer ? Comment ne pas imaginer que chez certains, l’envie de faire carrière au parquet s’accompagne d’une complaisance particulière envers l’exécutif, qui a le pouvoir de promouvoir ou de muter les procureurs ?

      L’affaire Prêtre est une catastrophe pour l’image (terne) de la justice et la confiance (assez mince) qu’elle inspire aux citoyens. Ce n’est pas la première, on l’a notamment vu lorsque, en 2016, l’alors procureur de Pontoise, Yves Jannier, tordait les faits pour dédouaner les gendarmes après la mort d’Adama Traoré (il a depuis été muté). Depuis le départ en retraite d’Éric de Montgolfier, les procureurs libres, indépendants et courageux ne courent pas les tribunaux.

      Entre contrevérités, obéissance servile et décisions prises en opportunité pour ne pas déplaire au pouvoir, il existe aussi des mensonges par omission. Le procureur de Marseille, Xavier Tarabeux, n’a ainsi pas cru bon d’informer son supérieur hiérarchique, le procureur général de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, Robert Gelli, que le numéro 2 du parquet de Marseille, André Ribes, était sur le terrain avec les forces de l’ordre pendant la répression des manifestations des 1er et 8 décembre, qui ont notamment causé la mort de Zineb Redouane, 80 ans, touchée en plein visage par une grenade lacrymogène alors qu’elle fermait ses volets.

      Dans ces conditions, comment croire que le parquet veut réellement faire toute la lumière sur le tir de grenade qui a gravement blessé l’octogénaire, morte à l’hôpital ? Certes, une information judiciaire a été ouverte en 48 heures. Mais comment accepter qu’en six mois, un juge d’instruction de Marseille n’ait rien trouvé ? Comment ne pas s’indigner de ce que les CRS ont refusé de fournir les lance-grenades utilisés le 1er décembre, ce qui aurait permis d’identifier le tireur, et que le juge n’a pas insisté ? Conscient que la question de l’objectivité du parquet de Marseille était – a minima – posée publiquement, le procureur général Robert Gelli a demandé et obtenu le dépaysement du dossier Redouane vers un autre tribunal.