Le livre. Pour sa troisième rentrée en tant que ministre de l’éducation, Jean-Michel Blanquer dispose toujours, malgré quelques turbulences durant l’année écoulée, d’un confortable capital d’image. Un discours critique envers sa politique s’est néanmoins affirmé, dont plusieurs livres qui viennent de paraître sont l’illustration. A cet égard, un des plus consistants est signé par Philippe Champy, qui évoque rien moins qu’une « nouvelle guerre scolaire ».
Le point de départ de cet auteur est la situation des éditeurs scolaires, métier qu’il a exercé pendant vingt ans à la tête des éditions Retz, spécialisées dans l’enseignement primaire. Contre toute tentative, qu’il perçoit aujourd’hui, de contrôle indirect ou de labellisation des manuels scolaires par le ministère, il plaide pour le pluralisme des offres, donc pour le maintien d’une « triple liberté » remontant à Jules Ferry : celle, pour les éditeurs, de produire en conformité avec les programmes mais en les interprétant ; celle, pour les enseignants, de faire leur choix dans cette production ; celle enfin, pour ces derniers, d’utiliser ou non les manuels, à leur gré.
Autant de conditions pour que les éditeurs scolaires ne deviennent pas de simples prestataires, voués à diffuser la doctrine ministérielle du moment. Car dans la suite de son livre, il inscrit ce combat dans l’opposition à un « agenda de reprise en main des professeurs », dont il juge la liberté pédagogique aujourd’hui menacée par une « technocratie sous hypnose numérique ». Prétendant « tout capter », celle-ci s’installe en phase avec la formidable montée en puissance, sous l’égide de Jean-Michel Blanquer, des sciences cognitives et des neurosciences, qui tendent à se muer en une « orthodoxie figée » aboutissant à « nier l’expertise professorale ». « Neuros » et « technos », explique-t-il, se conjuguent pour organiser le « grand reformatage » de l’éducation nationale.