• De la pacotille aux choses qui durent, par Razmig Keucheyan (Le Monde diplomatique, septembre 2019)
    https://www.monde-diplomatique.fr/2019/09/KEUCHEYAN/60371

    Comment sortir du consumérisme ? En étendant la durée de garantie des objets. Un simple constat justifie cette proposition : 80 % des marchandises tombées en panne pendant la garantie sont rapportées au vendeur ou au constructeur pour réparation. La proportion varie bien entendu selon les cas : on tient moins à une imprimante qu’à une montre, et on attend de la seconde une plus grande longévité, quand bien même toutes deux affichent le même prix. Même s’il représente une estimation globale, ce chiffre peu connu indique que l’écrasante majorité des consommateurs fait valoir son droit quand l’occasion se présente.

    Or, sitôt la période de garantie terminée, le taux de réparation chute de plus de moitié — à moins de 40 % pour les appareils électriques et électroniques, par exemple. À tort ou à raison, le propriétaire juge alors plus pratique et/ou moins onéreux d’acheter un nouveau grille-pain ou un nouvel ordinateur. Il est donc possible de prolonger la vie des objets en changeant le droit : plus on étend la durée de la garantie, plus on répare les marchandises, et plus on accroît leur longévité. Le rythme de leur renouvellement, de l’exploitation des ressources naturelles et des flux d’énergie qu’implique leur fabrication s’en trouve par là même ralenti. La garantie, ça n’a l’air de rien. Elle constitue pourtant un puissant levier de transformation économique, et par là politique.

    #obsolescence_programmée #capitalisme #réparation #paywall