Grenelle des violences conjugales : “Il faut mettre le paquet pour changer l’offre de soins” - Idées

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  • Grenelle des violences conjugales : “Il faut mettre le paquet pour changer l’offre de soins” - Idées - Télérama.fr
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    Les violences (conjugales, sexuelles…) ne sont pas liées à des fragilités individuelles, montrez-vous. Et elles enclenchent une série de réactions systématiques pour supporter l’agression et lui survivre.
    Les violences sexuelles (intrafamiliales, à l’égard des enfants) portent atteinte à l’intégrité mentale et physique de la personne. Elles ont des conséquences neurologiques, et le cerveau est d’autant plus vulnérable à la violence que l’on est jeune, en développement.

    Ce mécanisme est universel : les violences provoquent une effraction psychologique intense et un stress extrême lié à l’incompréhension. La victime vit une situation de cruauté, d’injustice et de non-sens absolu ; une irruption de l’ordre de l’impensable. C’est le démarrage de tout un processus.

    Dans une première phase dite de sidération, elle se trouve dans l’impossibilité de penser l’événement « débordant ». Le corps produit alors de fortes doses (non régulables) d’adrénaline et de cortisol, les « hormones de stress ». Le cerveau « disjoncte » ensuite de lui-même le système, car l’adrénaline représente un risque cardio-vasculaire et peut entraîner un arrêt cardiaque. Oui, on peut mourir de stress ! Le cortisol, lui, peut causer des atteintes neurologiques.

    Par conséquent, le cerveau répond de façon automatique, en « buggant » pour permettre la survie de la personne qui se retrouve comme anesthésiée, déconnectée. Les victimes disent souvent qu’elles se sentaient « comme des mortes vivantes », capables de supporter l’insupportable. C’est ce qu’on appelle la « dissociation traumatique ».
    “Avoir subi des violences sexuelles et physiques dans l’enfance multiplie par seize le risque de subir plus tard des violences conjugales.”

    Souvent mal comprise par l’entourage, cette dissociation donne un sentiment d’étrangeté, d’irréalité à l’individu, qui agit un peu en mode « automate » et semble complètement vidé de ses émotions. Ce manque de réactivité dû à la dissociation, on va d’ailleurs le reprocher continuellement à la victime, en mettant en doute son récit, ou en lui disant : « Mais pourquoi vous n’avez pas crié ? Pourquoi vous ne vous êtes pas débattu(e) ? »

    Mais le drame de la violence ne s’arrête pas là : naît ensuite la « mémoire traumatique », « bombe émotionnelle prête à exploser à tout moment ».
    La dissociation mise en place, la mémoire de l’événement n’est pas traitée comme elle l’est habituellement. Plutôt que devenir une « mémoire autobiographique » classique, elle reste bloquée au moment de l’agression. Et cette mémoire traumatique ressurgit à la moindre pensée, vision, sensation qui rappellera le moment des violences, hantant la victime.

    Tant que dure la dissociation (dix minutes, un quart d’heure, une heure, mais aussi des jours, des mois, des années…), cette mémoire s’allume continuellement. Et la victime de revivre à l’identique les moments de douleur, le stress, la détresse, l’impression de mourir, mais aussi les hurlements de son agresseur, son mépris… Elle a l’impression d’entendre en elle qu’elle est coupable, ne vaut rien, n’a aucun droit : c’est « la colonisation par l’agresseur » qui peut faire irruption avec sa colère, sa haine et sa rage, la terroriser, voire la conduire au suicide. C’est un mécanisme très complexe et un véritable enfer pour les victimes.

    À quoi attribuer la prise de conscience sur ces sujets, maintenant ?

    Les réseaux sociaux ont eu un impact positif énorme. Internet a permis aux victimes de prendre la parole librement, sans filtre. Un barrage s’est levé et cela ne pourra pas s’arrêter. Il faut nommer les choses telles qu’elles sont, pour que les violences ne restent pas minimisées, banalisées, voire niées.

    Quand on parle d’« abus sexuels » pour les enfants, on nie la réalité. Ce ne sont pas des « abus », c’est de la « torture » ! Non, les « pédophiles » ne sont pas des « personnes qui aiment les enfants ». Dans « pédo-criminalité », on entend le mot « crime », on perçoit l’horreur. Et non, ces violences ne sont pas des « différends familiaux » ou des « crimes passionnels ».

    Les réseaux sociaux ont permis de diffuser les bons mots, les bons chiffres, de rappeler que nos enfants ne sont pas nos choses sur lesquelles on aurait le droit de vie ou de mort, et que la famille et le couple ne sont pas des zones de non-droit. Plus les voix des victimes et de tous ceux qui les soutiennent sont entendues, plus cela affaiblit les stéréotypes et mieux on rétablit une pensée cohérente, normale, humaine chez tous ceux qui souhaitent aimer, vivre et être heureux.

    #Féminicides #Violences_conjugales #Inceste #Psychanalyse