« La "nouvelle laïcité" est une technique disciplinaire »

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  • « La "nouvelle laïcité" est une technique disciplinaire » | jef klak
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    Pour analyser la construction de ce consensus, vous utilisez la distinction entre établis et marginaux7, ce qui laisse penser que le terme d’ islamophobie serait un moyen pour les établis d’affermir leur pouvoir…

    Nous avons voulu essayer de comprendre sociologiquement l’islamophobie, et de ne pas la réduire à un phénomène strictement idéologique. Certains chercheurs qui travaillent sur le sujet font un lien trop rapide entre les croisades, les Lumières, l’orientalisme, la période actuelle, comme s’il s’agissait à chaque fois de la même idéologie. Certains disent même que tout commence en 1492 avec la Reconquista espagnole.

    Contre ces simplifications, nous avons plutôt décidé de mener une sociologie des élites dans une perspective historique, notamment en comparant la situation entre 1989 et 2003. En 1987 déjà, avec la commission présidée par Marceau Long sur la nationalité française8, apparaît l’idée que l’islam pose problème en soi. Cependant, on veut encore croire à la bonne marche de l’intégration : un processus d’assimilation serait capable d’aboutir à l’extinction de la pratique musulmane chez les enfants d’immigrés, pratique perçue comme incompatible avec les « coutumes » françaises. Ainsi, avant 1989, même si la majorité des élites administratives, médiatiques et politiques voient l’islam d’un mauvais œil, elles restent divisées sur la question de l’interdiction du port du hijab à l’école publique.

    Or 1989 correspond à une remise en cause de la croyance dans l’homogénéité nationale et le processus d’assimilation. Régis Debray, Élisabeth Badinter, Catherine Kintzler et Alain Finkielkraut sont les pionniers de ce basculement, lorsqu’ils dénoncent un « Munich de l’école républicaine »9. Même si ce point de vue est dans un premier temps minoritaire, l’idée selon laquelle les jeunes filles ont trahi l’espérance intégratrice des « républicains » s’installe peu à peu, et elles incarnent désormais la montée en puissance des mouvements « islamistes » dans les quartiers populaires français.