• Pour une ortografe qui vive ! | Le Club de Mediapart
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    En revanche, il est vrai que l’orthographe française est symbole d’instruction et de distinction de classe, elle a même été créée pour cela. Depuis le début, depuis le 17e siècle quand Richelieu a accepté d’adouber le club privé de l’Académie française et le mandater pour choisir une variante graphique lorsque plusieurs étaient en concurrence, ce petit groupe coopté s’est donné pour mission de trouver une orthographe éloignée de la prononciation, qui puisse distinguer les gens lettrés. On a longtemps considéré qu’on pouvait écrire le français directement ou bien « en mettant l’orthographe », selon les besoins et les compétences qu’on avait. La diversité des graphies a été la règle pendant des siècles, d’autant plus que la plupart les gens n’allaient pas à l’école, ou y allaient très peu de temps. On « mettait l’orthographe », pour se distinguer, essentiellement pour exhiber sa connaissance du latin et du grec, et non pour se faire mieux comprendre. Cette philosophie de la graphie française nous porte toujours préjudice. Cela nous oblige à y consacrer un temps démesuré par rapport au temps nécessaire à apprendre à écrire dans toutes les autres langues romanes, qui ont utilisé l’alphabet latin essentiellement pour noter leurs prononciations et non pour exhiber des étymologies en multipliant l’usage de lettres muettes. Par rapport aux hispanophones, par exemple, les élèves francophones perdent énormément de temps à acquérir un code inutilement complexe. Ce code n’a pas cessé de se modifier jusqu’au 19e siècle quand il s’est figé sans raison.