Notes de lecture : « Capitalisme : Le temps des ruptures » sous la direction de Michel Aglietta*

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    Ce livre, ouvrage collectif sous la direction de Michel Aglietta, fait suite à un rapport commandé par l’institut pour la recherche de la Caisse des Dépôts et Consignations sur le thème du risque de stagnation séculaire et de la transformation du régime de croissance.

    Il s’inscrit dans une perspective historique selon le principe d’étude de la théorie de la régulation et cherche à penser autrement et à long terme les rapports entre finance, croissance et climat. Il mélange à la fois une approche macro-économique avec une estimation de la croissance potentielle, un retour sur les déterminants de l’inflation, l’importance de la prise en compte du cycle financier mais également des études micro-économiques sur le comportement d’épargne des ménages et d’investissement des entreprises. L’étude du comportement d’investissement met l’accent sur le caractère stratégique du choix auquel les directions d’entreprises sont confrontées en arbitrant entre croissance interne et externe et, parallèlement, entre versement des dividendes et préservation de la capacité d’autofinancement. Sont mises en avant la dépendance de l’investissement au cours des actions et la domination du cycle financier sur le cycle conjoncturel. Du côté des ménages, la forte hausse des inégalités patrimoniales a pour conséquence une inadéquation entre les comportements d’épargne des ménages et les besoins des entreprises. En conclusion, le livre revient sur la nécessaire prise en compte du risque climatique. Il est refusé de réduire la complexité du climat à une fonction de dommage monétaire propice à un arbitrage entre coût et avantage de l’action climatique. Il est considéré comme fondamental de lier les facteurs de transition et de transformation du capitalisme en liant la temporalité écologique avec les temporalités sociales, économiques et financières.

    • Depuis les années 80, la théorie néolibérale dominante a créé un capitalisme de rente du fait de la concentration du capital : une rente financière favorisée par l’endettement à bas coût, une rente digitale par l’appropriation gratuite des données individuelles, une rente d’agglomération spatiale avec la création des mégalopoles mais également une rente d’influence sur la puissance publique qui se nourrit de l’évasion fiscale.

      Aujourd’hui, il importe de prendre en compte ce large problème de l’économie de rente et de la concentration des entreprises avec des situations de monopole et monopsone qui vont de pair avec une forte concentration des patrimoines, la très forte hausse des inégalités, la fragmentation sociale, la montée de la pauvreté, le fractionnement des chaînes de valeur comme conséquence de la guerre commerciale, mais également la détérioration des ressources naturelles et l’aggravation de la dérive climatique.

    • Dans cet environnement, le rôle de l’Etat n’a cessé de se réduire. En effet, dans la logique néo-libérale actuelle, l’Etat doit reconnaître les droits de propriété et les sauvegarder mais ne pas avoir un rôle plus ample dans nos économies. Conséquence, une nette baisse de la part des dépenses publiques dans le Pib et une faible part de l’investissement public.

      La financiarisation et la mondialisation ont également conduit à une forte hausse des inégalités et une destruction du contrat social existant avec l’explosion du contrat de travail, des inégalités de genre marquées, une fragmentation du marché du travail avec la hausse des contrats non standards et la hausse de la part des bas salaires. Parallèlement, au-delà des discours, les engagements pour le climat sont largement insuffisants.

    • Un nouveau contrat social doit être défini. Il est proposé que celui-ci inclue quatre propositions formant un cercle vertueux :
      1. Il ne peut y avoir transition écologique sans justice sociale perçue et réelle
      2. Il ne peut y avoir de justice sociale sans salaires décents et une protection sociale préservée
      3. Il ne peut y avoir plein emploi sans transformation de l’appareil productif vers une économie circulaire rétablissant la complémentarité urbain/rural
      4. Il ne peut y avoir transformation de l’appareil productif sans transition écologique