• Des parents et des enfants sans domicile hébergés dans des écoles à Lyon

    Des parents d’élèves de cinq écoles se sont mobilisés pour mettre à l’#abri dans les #locaux_scolaires des élèves et leurs parents qui n’ont pas de logement.

    Pour échapper à la rue, ils ont trouvé refuge à l’école. Depuis la rentrée des vacances de la Toussaint, le groupe scolaire Michel-Servet, dans le Ier arrondissement de Lyon, héberge la nuit 17 enfants, âgés de 2 à 12 ans, et 9 parents. C’est l’une des cinq écoles occupées à ce jour par le collectif Jamais sans toit : des parents d’élèves, des enseignants, des habitants qui se mobilisent chaque année pour mettre à l’abri les familles en difficulté en attendant les hypothétiques places en hébergement ouvertes dans le cadre du plan froid. Au total, 30 enfants seraient hébergés dans ces établissements scolaires. « Aujourd’hui, les administrations trient et dissèquent les critères de vulnérabilité des familles pour ne pas les prendre en charge », dénonce le collectif, à l’origine d’un rassemblement de plusieurs centaines de personnes mercredi soir devant l’hôtel de ville de Lyon.

    En 2018, Jamais sans toit a pu faire dormir au chaud une centaine d’enfants pendant plusieurs semaines avant leur prise en charge, qui s’est soldée pour une partie d’entre eux par un retour à la rue aux beaux jours. « Le grand changement cette année, c’est que même les demandeurs d’asile se retrouvent dehors, une marche de plus a été franchie », constate Pauline Manière, mère d’élève à Michel-Servet. Raphaël Vulliez, enseignant de l’école, pointe un « manque de volonté politique » : « Il y a 24 000 logements vides, pour certains chauffés et surveillés, dans la métropole mais on en est encore à ce faux concept de l’appel d’air, de dire que si on loge tout de suite les gens, ça va en attirer d’autres. » Pour lui, payer sporadiquement des nuits d’hôtel ne règle rien : « C’est brutal pour les familles, ça coûte cher à la collectivité et ça condamne à être chaque année dans ce schéma d’urgence plutôt que de pérennisation. »
    « Tenir sur la durée »

    Alors l’entraide prend le pas au quotidien. En parallèle de la collecte de nourriture, de couettes, de vêtements chauds, Jamais sans toit organise des « goûters solidaires » pour constituer une cagnotte. Elle sert à faire des courses pour les dîners et les petits-déjeuners des familles, parfois à leur payer l’hôtel le week-end. La mairie du Ier arrondissement s’est également engagée à en financer un certain nombre. L’objectif du collectif Jamais sans toit : « tenir sur la durée », explique Céline Hernu, mère présente ce mercredi soir à Michel-Servet.

    Il est 19 heures, Naslati vient d’arriver dans le hall de l’école avec ses 4 enfants, âgés de 3 à 12 ans. Les trois plus jeunes sont nés à Mayotte, sur le territoire français donc, tandis que leur mère et son aîné sont comoriens. Naslati, 31 ans, a atterri en métropole en février pour « trouver une vie meilleure », « voir grandir ses petits sans bêtises ». Elle a d’abord été hébergée chez des amis, avant d’obtenir un récépissé de carte de séjour l’autorisant à travailler. Mais depuis un mois, elle est à court de solution de logement.
    « J’ai honte, je n’ai jamais été assistée »

    Elle a essayé de s’installer pour la nuit dans le hall d’un hôpital avant d’en être chassée. Alors elle s’est débrouillée une dizaine de jours, campant sous le porche de stations de métro, veillant sur ses enfants endormis contre elle. Depuis le 5 novembre, le dortoir de fortune de Michel-Servet est sa bouée. Elle va pouvoir entamer sa formation en français à Pôle Emploi, peut-être trouver quelques heures de ménage. « A Mayotte, je m’occupais du nettoyage chez des gens. Mais même en travaillant cinq jours par semaine, je gagnais 200 euros par mois et je n’avais pas de fiches de paie », raconte-t-elle.

    Fatima et Abdel El Marhani, 40 ans, ont, eux, déjà des promesses d’embauche, comme employée en grande surface et agent d’entretien, mais n’ont pas réussi à trouver un appartement en arrivant le 12 novembre de Colmar (Haut-Rhin), où leurs affaires attendent dans un garage. Ils sont sur liste d’attente pour un logement social. D’abord hébergés avec leurs trois filles chez des amis, ils sont venus par le bouche-à-oreille à l’école. « J’ai honte, je n’ai jamais été assistée. Je ne demande pas une villa en centre-ville, je veux juste un appartement avec une chambre pour les filles, de quoi faire à manger chaud », dit Fatima, « citoyenne française qui paie ses impôts ».

    « On a de plus en plus l’impression de faire le travail de l’Etat qui ne veut pas assumer », souligne Raphaël Vulliez. Alors Jamais sans toit a décidé « d’aller plus loin » en organisant, samedi, les baptêmes républicains des enfants accueillis. « Chaque fois que les familles frappent à une porte administrative, elles sont retoquées. C’est un moyen de leur signifier qu’elles ont leur place dans notre société, qu’on veille sur elles, qu’on ne va pas les lâcher », explique Anne Lasseur, conservatrice des musées Gadagne et habitante du quartier. Egalement en première ligne de la « crise » de l’hébergement dans la métropole, un collectif de travailleurs sociaux appelle à une grève le 28 novembre.

    https://www.liberation.fr/france/2019/11/21/des-parents-et-des-enfants-sans-domicile-heberges-dans-des-ecoles-a-lyon_
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