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  • Retour vers un monde où règne la #brutalité

    https://legrandcontinent.eu/fr/2025/01/21/se-preparer-a-lempire-curtis-yarvin-prophete-des-lumieres-noires

    Curtis Yarvin naît en 1973 d’un père diplomate américain, dont les parents étaient des Juifs communistes américains, et d’une mère protestante. Après une scolarité dans des écoles progressistes d’élite, il étudie la science informatique à l’université Brown puis à Berkeley avant de rejoindre une entreprise numérique. En 2002, il crée une plateforme de serveurs informatiques décentralisée Urbit puis en 2013 une entreprise visant à la développer, Tlön Corp, avec des investissements de Peter Thiel.

    Curtis Yarvin commence à publier sur des blogs sous le pseudonyme de Mencius Moldbug dont notamment un manifeste intitulé « The Mencius vision » en 2007 sur le blog Blowhards, où il défend le « formalisme » en se réclamant d’auteurs comme Jouvenel, Kuehnelt-Leddihn, Leoni, Burnham et Nock. Il lance à cette période son propre blog, Unqualified Reservations, sur lequel il développe sa théorie « néo-réactionnaire » qu’il définit comme « l’union de deux forces : l’esprit d’ingénierie moderne, et le grand héritage historique de la pensée pré-démocratique de l’Antiquité, de la période classique et de l’ère victorienne ». Il crée enfin une page Substack appelée Grey Mirror en 2020, où il développe l’idée que la démocratie serait une expérience politique ratée à laquelle il faut mettre fin.

    Ce nouvel article reprend les arguments de Curtis Yarvin, dénommé le prophète des Lumières noires (Dark Enlightments) dans le précédent article.
    Comprendre la politique européenne de Donald Trump : le plan Yarvin pour l’Ukraine | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2025/03/15/trump-va-ceder-leurope-a-poutine-la-prophetie-de-curtis-yarvin

    La politique de Donald Trump sur l’Ukraine paraît erratique, énigmatique.

    En réalité, la Maison-Blanche pourrait suivre une stratégie très précise.

    Formulée par Curtis Yarvin en janvier 2022, elle doit être étudiée de près aujourd’hui.
    Nous la traduisons.

  • « Nous découvrons le visage de l’Amérique que le reste du monde connaît depuis longtemps », une conversation avec Pierre Haski | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2025/03/11/nous-decouvrons-le-visage-de-lamerique-que-le-reste-du-monde-connai

    PIERRE HASKI — Dans le pays aux 400 guerres, la violence fait partie de la vie quotidienne.

    Le soft power américain avait suffi à conquérir l’Europe à bas bruit — nous faisons aujourd’hui, comme le reste du monde, l’expérience de la brutalité d’une nation guerrière à l’Ouest.

    Alors qu’Arte diffuse ce soir le documentaire « L’Amérique en guerre », nous revenons avec Pierre Haski sur l’actualité d’une histoire militaire réactivée par le tournant impérial de Trump.

  • Ursula von der Leyen dévoile un plan de près de 800 milliards d’euros pour la défense européenne et l’aide à l’Ukraine
    https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/manifestations-en-ukraine/ursula-von-der-leyen-devoile-un-plan-pour-mobiliser-pres-de-800-milliar

    Il prévoit notamment de mettre quelque 150 milliards de prêts à disposition des 27 pays de l’UE pour financer le renforcement de leurs capacités militaires.

    On est sauvé ! Gaffe Poutine, on va te montrer que les dernières démocraties (IGP) de l’univers connu ne se laissent pas impressionnées. On va tous prendre un fusil, quelques bombes H, et on va te montrer qui s’est le patron.

    Avant 2022, les européens ont tout fait pour que ça pète pas avec les russes alors que les américains voulaient que ça pète (fuck the eu, nuland, etc). Et depuis que ça a pété, ils font tout pour que ça ne s’arrête pas, alors que désormais, ce sont les américains qui veulent que ça s’arrête. Et ça va s’arrêter, mais on va dépenser plein d’argent pour faire la guerre et ça, y-a plein de gens qui adorent ça.

  • https://legrandcontinent.eu/fr

    Le Grand Continent est une revue nouvelle, fondée en mai 2019 à Paris, en plein développement et en construction. Il s’agit de la première hypothèse crédible de produire une revue écrite dans les principales langues du débat européen. À partir de mars 2022 une édition intégrale du Grand Continent paraît en espagnol. Dans les prochains mois, des éditions italienne, allemande et polonaise verront également le jour.
    La revue est éditée par le Groupe d’études géopolitiques, un centre de recherche indépendant domicilié à l’École normale supérieure et reconnu d’intérêt général.

  • « Je suis frappé par les similitudes entre les milliardaires de la Silicon Valley et les bolcheviks les plus radicalisés », conversation avec Timothy Snyder
    https://legrandcontinent.eu/fr/2025/02/15/je-suis-frappe-par-les-similitudes-entre-les-milliardaires-de-la-si

    Ceux qui prônent une vision mécaniste du monde ont déjà pris le contrôle du discours sur la liberté. Il est donc essentiel de redéfinir celle-ci dans une perspective plus riche, qui intègre l’humain, les valeurs, la vie et même la mort. Pour cela, il faut agir concrètement. Source : Le Grand Continent

  • Dérégulation plutôt que dette commune : le « tournant libertarien » de la Commission von der Leyen sur le rapport Draghi | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2025/02/16/deregulation-plutot-que-dette-commune-le-tournant-libertarien-de-la

    Si le moins disant réglementaire, social et environnemental était une condition sine qua non de l’émergence de technologie de pointe, le Bangladesh serait déjà de longue date devenu un paradis des start-ups.

  • Un coup d’État libertarien ? Comment Elon Musk, appuyé par Trump, a mis la main sur le département du Trésor américain | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2025/02/03/un-coup-detat-libertarien-comment-elon-musk-appuye-par-trump-a-mis-

    Pendant le week-end, le secrétaire au Trésor Scott Bessent a donné accès aux systèmes informatiques du Trésor américain à Elon Musk et certains de ses proches.

    L’homme le plus riche du monde aurait désormais à sa disposition les données financières de millions d’Américains et semble en mesure de contrôler les dépenses de l’État fédéral en bloquant ou redirigeant des paiements préalablement autorisés par les agences et départements.

    Selon le prix Nobel Paul Krugman : « les Américains ont peut-être déjà vécu ce qui s’apparente à un coup d’État du XXIe siècle. Il n’y a peut-être pas de chars dans les rues, mais le contrôle effectif du gouvernement pourrait déjà avoir échappé aux mains des élus ».

    Scott Bessent, le secrétaire au Trésor de Trump, a octroyé ce samedi au DOGE (Department of Government Efficiency), piloté par Elon Musk, l’accès aux systèmes de paiement du département du Trésor.
    • Le « Department of Government Efficiency » (les guillemets sont utilisés dans le décret), contrairement à ce que son nom semble indiquer, n’est ni un département ni une agence fédérale mais une entité ad hoc rattachée au bureau du président. La structure n’est par ailleurs pas nouvelle, mais correspond au U.S. Digital Service créé par Barack Obama en 2014, qui a simplement été renommé par un décret de Trump le 20 janvier.
    • En qualité de directeur du DOGE, Elon Musk ne dispose d’aucune autorité vis-à-vis d’autres branches de l’exécutif fédéral. Contrairement aux responsables des départements, le milliardaire n’a pas été confirmé par le Congrès et s’était vu refuser en décembre, avant l’investiture de Trump, une habilitation défense en raison de sa consommation de drogue.
    • Comme le souligne le sénateur démocrate et membre de la Commission des Finances Ron Wyden, dans un courrier adressé à Bessent, les activités conduites par Musk en Chine via Tesla seraient susceptibles de constituer un conflit d’intérêt. En accédant à d’importantes quantités de données de millions d’Américains et de données ayant trait aux paiements réalisés par le gouvernement, Musk pourrait constituer « un risque pour la sécurité nationale ».

    L’irruption de Musk dans le logiciel interne du département du Trésor, responsable du déboursement de plusieurs milliards de dollars par jour, a été précédée au cours des dernières semaines par un déploiement de plusieurs de ses proches au sein d’autres agences de l’exécutif — et la mise à la porte de hauts-fonctionnaires de carrière.
    • David Lebryk, Fiscal Assistant Secretary depuis 11 ans au sein du département du Trésor (soit le plus haut poste auquel un fonctionnaire de carrière puisse prétendre) et nommé secrétaire par intérim par Trump, en l’attente de la confirmation de Bessent, a été poussé à la porte par l’administration après avoir refusé à Musk d’accéder au système de paiement.

    Dès le mois de décembre, soit avant l’investiture de Trump, des proches de Musk qui intégreront par la suite le DOGE avaient demandé à Lebryk des informations sur le « code source » du système, officiellement pour examiner les « paiements inappropriés ».
    • Parmi les personnes ayant rencontré Lebryk à ce moment figurent Baris Akis, un allié de Musk et venture capitalist fondateur de Human Capital ainsi que Tom Krause, PDG de Cloud Software Group, une entreprise de la Silicon Valley spécialisée dans l’utilisation de données pour accélérer et améliorer le processus de prise de décision.
    • Plusieurs sources ont confié à CNN avoir vu Akis et d’autres personnes affiliées à DOGE « se promener en meute » dans les bâtiments du département du Trésor ces derniers jours.

    Musk a placé au sein d’autres agences fédérales — toujours sous l’étiquette du DOGE —, notamment au Office of Personnel Management, chargé des relations humaines, et de la General Services Administration, qui gère notamment le parc immobilier de l’exécutif, des jeunes diplômés et anciens stagiaires passés par ses entreprises.
    • Le magazine WIRED a identifié six de ces jeunes hommes, âgés de 19 à 24 ans, qui ne disposent d’aucune expérience au sein du gouvernement et, pour certains, d’aucune expérience professionnelle : Akash Bobba, Edward Coristine, Luke Farritor, Gautier Cole Killian, Gavin Kliger et Ethan Shaotran.
    • Coristine, qui a récemment obtenu son baccalauréat, a effectué un stage de trois mois cet été chez Neuralink, fondé par Musk, avant de rejoindre DOGE. Farritor a quant à lui fait un stage chez SpaceX puis a obtenu au printemps 2024 une bourse de la Thiel Foundation.
    • La plupart des membres du DOGE disposeraient aujourd’hui d’une adresse mail gouvernementale et d’un accès à des informations classifiées qu’ils ne sont pas autorisés à consulter. Il semblerait qu’ils aient principalement été recrutés par Musk pour leurs compétences techniques, Killian allant jusqu’à supposément travailler en tant que « bénévole ».

    Selon une source diplomatique qui s’est confiée à la revue, l’accès au système de paiement du Trésor aurait été donné pendant le week-end afin d’éviter toute possibilité de blocage par un juge et en limitant également la réaction législative.

    Cette opération soulève de graves inquiétudes d’ordre démocratique. On pourrait avoir assisté pendant le week-end à une prise de contrôle par l’homme le plus riche du monde du système des paiements fédéraux.
    • L’infrastructure des paiements du Trésor repose sur des technologies vieillissantes comme ACL et COBOL . Toute intervention mal maîtrisée pourrait la déstabiliser, menaçant la capacité du gouvernement fédéral à assurer ses paiements.
    • Wyden a confirmé que le secrétaire au Trésor Scott Bessent avait consenti à DOGE un « accès total » au système de paiement 8. Il a également dénoncé la possibilité d’interférences politiques dans les paiements de la sécurité sociale, de Medicare et des contrats publics.
    • Comme l’a révélé Nathan Tankus : « Scott Bessent avait été informé que ce que Donald Trump attendait d’un secrétaire au Trésor était une personne qui aurait la crédibilité que Steve Mnuchin avait auprès de Wall Street, mais qui serait surtout loyale envers le président avant toute autre considération, selon deux sources familières du dossier. Cela incluait d’accepter inconditionnellement de travailler avec quiconque Trump enverrait au département du Trésor et d’aider à poursuivre les ennemis de Donald Trump. À la lumière des actions de Bessent cette semaine, et de ce qu’Elon Musk et le DOGE attendent du Bureau du service fiscal, ces engagements prennent une nouvelle signification — particulièrement sombre ».
    • Plusieurs experts ont noté que cela pourrait permettre au gouvernement de bloquer ou de rediriger des paiements en fonction de considérations politiques, en transformant matériellement le fonctionnement démocratique de l’État fédéral .

    Cette crise ne se limite pas au contrôle du budget fédéral. Par le DOGE, même en « lecture seule » et sans capacité d’intervention sur les paiements, l’homme le plus riche du monde a désormais accès à des données extrêmement sensibles (numéros de sécurité sociale, informations bancaires). Le respect du droit, du processus démocratique et des règles de confidentialité des paiements gouvernementaux est en jeu.
    • Elon Musk a affirmé qu’il annulait unilatéralement des centaines de millions de dollars de subventions publiques après avoir obtenu l’accès au système de paiements du Trésor américain.
    • Dans un post sur X, il a déclaré que son équipe aurait annulé des « paiements illégaux » après avoir partagé une liste de subventions à des organisations luthériennes, justifiant cette action en accusant le Trésor d’approuver aveuglément tous les paiements, y compris à des groupes frauduleux ou terroristes.

    The @DOGE team is rapidly shutting down these illegal payments https://t.co/GabhBL7gxf_
    — Elon Musk (@elonmusk) February 2, 2025_

    Depuis hier des adversaires républicains de Donald Trump sont exposés sur X.
    • Bill Kristol, qui a posté d’une manière polémique : « l’État profond est préférable à l’État Trump » s’est vu répondre par un compte anonyme qu’il profite de l’État profond en tant que président de l’organisation « Defending Democracy », financée par l’USAID via les Rockefeller Philanthropy Advisors.
    • La capture d’écran jointe illustre un graphique montrant des subventions publiques totalisant plus de 45 millions de dollars, attribuées à divers bénéficiaires dans le cadre d’initiatives soutenues par l’USAID.

    Hello Mr. Kristol,

    For you, the deep state is preferable because you are listed as the President of Defending Democracy (EIN 831567380) which is an indirect beneficiary of USAID through Rockefeller Philanthropy Advisors.
    You are exposed.
    Hat tip to @DannyCampsalot… pic.twitter.com/sihSufjcaB
    — DataRepublican (small r) (@DataRepublican) February 2, 2025

    • Selon le prix Nobel de l’économie Paul Krugman, les États-Unis ont « peut-être déjà vécu ce qui s’apparente à un coup d’État du XXIe siècle. Il n’y a peut-être pas de chars dans les rues, mais le contrôle effectif du gouvernement pourrait déjà avoir échappé aux mains des élus ».
    • Il appelle à une action immédiate pour rétablir le contrôle des fonctionnaires et bloquer toute interférence des milliardaires.

    Le logiciel du Bureau of Fiscal Service auquel Musk a obtenu l’accès agit au bout de la chaîne des paiements, dont les ordres sont communiqués par les agences et départements. En bloquant le déboursement à ce stade, Elon Musk nie l’autorité du Congrès mais transforme également l’exécutif en structure bicéphale capable d’autoriser des paiements puis de les annuler elle-même, selon la volonté d’un individu non-élu extérieur au gouvernement.

    • Musk, le coup de force au coeur de l’Etat américain – L’Express
      https://www.lexpress.fr/monde/musk-le-coup-de-force-au-coeur-de-letat-americain-RN6Z4IKV2NFMBJGZR6WSZL54P

      Washington - C’est une entreprise inédite dans l’histoire des Etats-Unis et peut-être des démocraties occidentales : Elon Musk, soutenu par Donald Trump, bouleverse le fonctionnement de l’Etat fédéral américain, sans mandat électoral, sans portefeuille de ministre, et sans autre supervision que celle du président américain.

      L’homme le plus riche du monde ne peut pas et ne pourra pas faire quoi que ce soit sans notre accord, a assuré lundi Donald Trump, interrogé sur le rôle du patron de Tesla, SpaceX et X, à la tête d’une commission pour l’efficacité gouvernementale, le Department of government efficiency (DOGE).

      Un journaliste lui a ensuite demandé s’il approuvait la méthode très interventionniste de son allié, qui a pris le contrôle de certains leviers administratifs très sensibles, comme le système de paiements du Trésor, et le président n’a guère laissé de place au doute.

      Pour l’essentiel, oui. S’il faisait quoi que ce soit qui n’a pas mon accord, je vous le ferais savoir très vite, a-t-il ajouté.

      Dans la nuit de dimanche à lundi, c’est Elon Musk lui-même qui a annoncé le démantèlement de l’Agence américaine pour le développement international (USAID), dotée d’un budget annuel de 40 milliards de dollars.

      Nous la fermons, a-t-il dit sur son réseau X. J’en ai parlé en détail (avec Donald Trump) et il est d’accord.

      Un test
      Personne n’a élu Elon Musk, s’est indignée la sénatrice démocrate Elizabeth Warren sur le réseau Bluesky.

      Musk et ses employés privés essaient de fermer une agence créée et financée par le Congrès. (...) C’est un test. Le Congrès doit utiliser ses pouvoirs, ou perdre ses pouvoirs, a averti un autre élu démocrate, Jason Crow, sur X.

      Le rôle du multimilliardaire, lui-même bénéficiaire de gros contrats fédéraux, échappe au fonctionnement institutionnel habituel.

      Les présidents ont souvent eu des conseillers informels du monde des affaires mais le rôle quasi-officiel d’Elon Musk et ses affirmations selon lesquelles il agit au nom de (Donald Trump) pour prendre des décisions (...) est, à ma connaissance, sans précédent, a déclaré à l’AFP Jeffrey Lubbers, professeur de droit à la American University.

      Malgré son nom de department, désignant les ministères fédéraux, DOGE est en réalité un organisme de conseil externe placé sous l’autorité directe de Donald Trump et à durée limitée - il doit cesser d’exister le 4 juillet 2026.

      Pendant la campagne, Elon Musk avait assuré pouvoir réduire la dépense publique fédérale de 2.000 milliards de dollars. Il a depuis revu ses intentions à la baisse et parle de 1.000 milliards de dollars, une somme qui reste absolument colossale.

      Le grand patron, qui n’a pas de mandat électoral, devra-t-il rendre des comptes au Congrès, détenteur du pouvoir budgétaire ? Est-il soumis à de quelconques règles déontologiques, au même titre qu’un ministre ou d’autres grands commis de l’Etat ? Rien n’est moins sûr.

      Cette opacité suscite une vive discussion sur de potentiels conflits d’intérêt, puisqu’il pourrait faire des recommandations ayant un impact direct sur ses entreprises, de l’automobile au numérique en passant par l’espace.

      La presse américaine fait état de tentatives, plus ou moins brutales, de jeunes employés de DOGE pour forcer l’entrée de certains bureaux ou systèmes informatiques d’agences fédérales.

      Paiements
      Selon plusieurs médias, le haut fonctionnaire du Trésor en charge des paiements de tout l’Etat fédéral, qui supervise le versement de milliards de dollars en prestations sociales, salaires et autres règlements de factures, a été écarté parce qu’il s’opposait aux lieutenants d’Elon Musk.

      Lequel a finalement obtenu l’accès à ce système et ainsi aux données personnelles et financières de centaines de millions d’Américains.

      Le seul moyen d’arrêter la fraude et le gaspillage de l’argent des contribuables est de suivre les circuits de paiement et de suspendre les transactions douteuses. C’est évident, a-t-il justifié sur X.

      Les fonctionnaires fédéraux sont la cible d’une mesure après l’autre depuis le 20 janvier, chacune portant la patte de l’homme d’affaires de 53 ans : fin du télétravail sous peine de licenciement, plan de départs volontaires, fin des politiques de diversité.

      Dans une tribune publiée le 20 novembre dernier par le Wall Street Journal, Elon Musk avait dit qu’il travaillerait comme un entrepreneur.

      Le patron de Tesla a raconté qu’il dormait à l’usine pendant des périodes chargées pour le constructeur automobile. Selon le site Wired, il a confié à des amis faire la même chose désormais au siège de DOGE, dans un imposant bâtiment administratif jouxtant la Maison Blanche.

    • Un court extrait de chaque article mis en lien ci-avant :

      https://www.techdirt.com/2025/02/03/a-coup-is-in-progress-in-america

      A coup is underway in the United States, and we must stop pretending otherwise. The signs are unmistakable and accelerating: in just the past 48 hours, Elon Musk’s DOGE commission has seized control of Treasury payment systems and gained unauthorized access to classified USAID materials, while security officials who followed protocols were removed.

      https://www.wired.com/story/elon-musk-government-young-engineers

      Elon Musk’s takeover of federal government infrastructure is ongoing, and at the center of things is a coterie of engineers who are barely out of—and in at least one case, purportedly still in—college.

  • Un coup d’État libertarien ? Comment Elon Musk, appuyé par Trump, a mis la main sur le département du Trésor américain | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2025/02/03/un-coup-detat-libertarien-comment-elon-musk-appuye-par-trump-a-mis-

    Selon le prix Nobel de l’économie Paul Krugman, les États-Unis ont « peut-être déjà vécu ce qui s’apparente à un coup d’État du XXIe siècle. Il n’y a peut-être pas de chars dans les rues, mais le contrôle effectif du gouvernement pourrait déjà avoir échappé aux mains des élus ».

  • Trump met le Projet 2025 en action : les 26 premiers décrets du président des États-Unis | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2025/01/21/trump-met-le-projet-2025-en-action-les-26-premiers-decrets-du-presi

    Il en avait annoncé 100. Dans une mise en scène de la puissance souveraine, Donald Trump a signé 26 décrets lors de sa première journée à la Maison Blanche. Retrait de l’OMS, état d’urgence, fin du droit du sol...

    Trump fait de l’exception un principe et de l’accélération un but des premières journées de sa présidence impériale. Nous publions et commentons la liste de tous ses décrets.

  • L’apocalypse de Donald Trump selon Peter Thiel | Le Grand Continent, via Jean-Marc Adolphe, https://www.leshumanites-media.com
    https://legrandcontinent.eu/fr/2025/01/10/lapocalypse-de-donald-trump-selon-peter-thiel

    Dans un texte aux tonalités eschatologiques qui vient de paraître dans le Financial Times, #Peter_Thiel, l’une des personnes les plus puissantes de l’Amérique de Trump au cœur de l’accélération réactionnaire, annonce la venue d’un temps nouveau : « des questions sombres émergeront dans les dernières semaines crépusculaires de notre interrègne ».

    Nous le commentons ligne à ligne.

    Il disait voici déjà plus de vingt ans : « Je ne crois plus que la liberté et la démocratie soient compatibles ». Au moins, c’est clair…, Jean_Marc Adolphe.

    #É-U #libertariens #Palentir #fascisme #eschatologie #idéologue

    • Cette inauguration de la deuxième présidence Trump n’a rien à voir avec la précédente. Texte de Quentin Rodiguez (reçu par mel)

      Oubliez Trump. C’est un fou dangereux bien sûr. Et depuis 2016, immense différence, il a transformé le Parti républicain en mouvement authentiquement fasciste – les principaux historiens américains du fascisme le disent désormais (notamment Timothy Snyder et Robert Paxton, pour les plus célèbres).

      Mais avec cette nouvelle présidence Trump, nous assistons surtout à un pacte entre ce nouveau mouvement fasciste et la majeure partie de la #classe_capitaliste des #milliardaires propriétaires de l’#économie_numérique. Je ne veux pas tout ramener aux années 30, Trump n’est pas Hitler, on ne sort pas d’une guerre mondiale, etc. soyons clairs. Mais il y a un phénomène précis des années 30 qui se reproduit presque à l’identique aujourd’hui, c’est ce ralliement stratégique de la grande bourgeoisie industrielle allemande qui, face au risque de prise de pouvoir de la gauche socialiste et communiste qui menaçait sérieusement ses intérêts, choisit de parier sur le parti nazi, en le finançant massivement, et en mettant les #médias qu’elle contrôle au service de leur propagande électorale.

      Tant que la grande bourgeoisie peut garantir ses intérêts en s’accomodant d’un système démocratique, ça ne pose pas de problème. Mais si ce même système démocratique menace réellement leur position dominante, alors invariablement, ils sacrifient la démocratie sur l’autel du capitalisme. C’est ce que le principal penseur libertarien adulé de la nouvelle bourgeoise de l’économie numérique, Friedrich Hayek, expliquait posément en 1981, commentant son soutien au régime fasciste d’Augusto Pinochet : "Personnellement je préfère un dictateur libéral plutôt qu’un gouvernement démocratique manquant de libéralisme."

      Nous venons d’assister trait pour trait au même mouvement d’allégeance envers le mouvement trumpiste que les industriels allemands des années 30. Sur la photo du premier rang des invités d’honneur de la cérémonie, on voit ici #Elon_Musk, bien sûr, le véritable numéro 2 de l’administration Trump, qu’on ne présente plus, et à sa gauche #Jeff_Bezos, le PDG d’Amazon, et #Mark_Zuckerberg, le patron de Facebook. Les trois personnes les plus riches des États-Unis. Mais ils sont loin d’être les seuls : un mouvement profond s’est enclenché. On peut citer aussi #David_Sacks, autre capitaliste milliardaire de la Silicon Valley, qui vient d’être nommé par Trump en charge d’une politique de développement des cryptoactifs (#Bitcoin et cie), et à la tête du conseil du président pour la science et la technologie.

      L’administration Biden, sans être d’obédience socialiste, a voulu renouer avec une vieille tradition américaine "keynésienne-progressiste", disparue du paysage politique depuis Reagan, consistant à taxer fortement les plus riches, à soumettre les entreprises de taille critique pour l’économie à un contrôle étatique fort, et à démanteler les plus gros groupes monopolistiques considérés comme une menace pour la démocratie. Biden a donc rompu avec la politique de copinage avec la finance et la "Silicon Valley" cultivée par les Démocrates depuis Bill Clinton. Il a validé des accords internationaux sur une imposition mondiale minimale des multinationales, il a soumis les géants d’internet à un contrôle réel de son administration, a encouragé la syndicalisation dans ces entreprises (notamment chez Amazon et Tesla), et a engagé des procédures judiciaires très importantes contre ces entreprises, en exhumant les #lois_anti-trust du début du XXe siècle qui autorisent la justice américaine à démanteler des grandes entreprises lorsqu’elles sont devenues monopolistiques, en les vendant à la découpe. C’est notamment le sort qui était officiellement recherché contre #Google, avec une poursuite engagée par les procureurs de 50 États, ce qui faisait trembler toute la Silicon Valley.

      Je ne suis pas en train de dire que Biden était anticapitaliste, pas le moins du monde, mais enfin il a considéré que le poids et l’autonomie d’action acquises par les géants de l’économie numérique étaient arrivées à un stade critique pour la démocratie américaine, et s’est ouvertement attaqué à leur domination, distandant les liens antérieurs entre ladite "Silicon Valley" et le Parti démocrate. En social-libéral conséquent, il pensait certainement qu’un équilibre devait (et pouvait) être maintenu dans le système capitaliste pour qu’il continue à avancer de pair avec un système démocratique. C’est ce point précis qui explique la rupture de cette classe capitaliste avec les leaders démocrates (au sens premier du terme), pour prêter allégeance collectivement à un leader fasciste. Plutôt un dictateur libéral qu’un démocrate voulant brider le libéralisme économique, pour paraphraser Hayek.

      Là où Trump a été habile politiquement, c’est qu’au cours de la campagne, il n’a pas tendu les bras à ces milliardaires. Il aurait pu dire "Qu’est-ce que ces Démocrates sont ingrats avec vous, moi je serai reconnaissant si vous me soutenez !" Pas le moins du monde. Il a continué à s’en servir comme épouvantail politique pour ses électeurs, en les pointant du doigt comme des agents au service du parti démocrate et du "virus woke", insistant sur le libéralisme culturel qui unissait ces capitalistes californiens au Parti démocrate jusqu’à la présidence Biden. Durant toute l’année 2024, les Jeff Bezos, les Mark Zuckerberg et consorts, se sont retrouvés conspués de toutes parts – pour des raisons différentes. Pris entre le marteau et l’enclume, ils ont été mis sous une pression inédite. C’est pourquoi le retournement est si spectaculaire : quand les deux camps veulent ton scalp, tu as intérêt à t’aligner franchement avec l’un des deux camps, et de préférence celui qui pourra l’emporter, car rester pris entre les deux feux est ce qu’il y a de pire. On l’a vu dans la théâtralisation guignolesque de Zuckerberg, jurant la main sur le cœur qu’il était devenu un conservateur sincère, un vrai bonhomme macho anti-diversité, anti-inclusion, contrairement au portrait que la campagne Trump faisait de lui. C’était en fait contre son gré, forcé par le méchant Biden, qu’il défendait les valeurs opposées il y a encore 3 mois 🤡 Le zèle des transfuges, qui doivent donner des gages à leur nouvelle famille de la solidité de leur fidélité, à défaut de pouvoir convaincre sur la sincérité de leurs convictions. De façon moins pathétique, mais plus significative, Jeff Bezos avait signalé son ralliement en novembre, en censurant la publication d’un éditorial du Washington Post (le quotidien centriste n° 1 du pays), dont il est propriétaire, qui devait appeler à voter contre Trump. Un autre milliardaire de la "tech" californienne, Patrick Soon-Shiong, a fait de même au Los Angeles Times. Le LA Times est le "plus à gauche" des grands quotidiens du pays. Lorsque Soon-Shiong rachète le journal en 2018, il est encore connu pour être un soutien du Parti démocrate, et un donateur important de la campagne d’Hillary Clinton contre Trump. En novembre dernier, en censurant l’éditorial contre Trump, il licencie par la même occasion l’ensemble du comité de rédaction, et annonce que le journal fera désormais "plus de place" aux "opinions conservatrices".

      Derrière l’arrivée au pouvoir d’un mouvement fasciste, se cache en fait un deal consistant à mettre l’État américain dans les mains d’une oligarchie capitaliste, qui a fait le deuil d’une position conciliante avec la démocratie. C’est ce que disait déjà en 2009 l’un de ces nouveaux oligarques, encore un milliardaire de la Silicon Valley, Peter Thiel. Comme Musk et la plupart de ces gens, il se disait depuis longtemps "libertarien". Aux États-Unis, cette étiquette politique permet à une partie des élites économiques de défendre le libéralisme économique tout en se prétendant "neutres" politiquement, "ni droite ni gauche". Comme le RN... ou LREM 🤷 Être libertarien aux US, c’est surtout être "pro-business", et proclamer qu’on se fout des questions de valeurs, qu’elles soient démocratiques, progressistes, religieuses, conservatrices... en soutenant un coup un Démocrate, un coup un Républicain. Dans un article intitulé "L’éducation d’un libertarien", Peter Thiel fait alors une véritable confession : comme la plupart de ses congénères libertariens, il a longtemps prétendu être fermement pro-démocratie, mais c’est fini. Et il se fixe désormais pour tâche de convaincre ses coreligionnaires qu’il faut désormais lutter contre la démocratie, activement.
      Je cite : « I still call myself “libertarian.”
      But I must confess that over the last two decades, I have changed radically on the question of how to achieve these goals. Most importantly, I no longer believe that freedom and democracy are compatible. By tracing out the development of my thinking, I hope to frame some of the challenges faced by all classical liberals today. »

      https://www.cato-unbound.org/.../education-libertarian
      (Je me désigne toujours comme un "libertarien". Mais je dois avouer avoir radicalement changé d’avis au cours des deux dernières décennies sur la façon d’atteindre cet objectif. Pour l’essentiel, je ne crois plus que la liberté et la démocratie soient compatibles. En retraçant l’évolution de mes idées à ce sujet, j’espère fournir un cadre aux défis que rencontrent tous les libéraux classiques aujourd’hui.)

      S’ensuit une lamentation sur la racine du mal : le suffrage universel. Lorsqu’il fut accordé aux femmes, et aux "bénéficiaires des aides sociales" (c’est-à-dire les Noirs), ça a été le début de la fin pour les États-Unis, selon Thiel.
      Peter Thiel a joué le rôle de poisson pilote pour cette classe de milliardaires. C’est le premier à faire son "coming-out" antidémocrate, et le premier à soutenir Trump dès 2016. Musk fut le suivant, rallié par Thiel au cours du mandat de Biden. Derrière la figure publique de Musk, c’est Thiel, beaucoup plus secret et beaucoup plus #idéologue, qui a en réalité le plus de réseaux dans le camp Trump. C’est lui qui a placé #J.D._Vance comme vice-président auprès de Trump. Vance est, littéralement, un employé de Thiel. Thiel le recrute en 2016 pour diriger son fonds d’investissement personnel Mithril Capital. C’est encore lui qui le lance en politique en finançant sa première campagne électorale en 2021. C’est enfin lui qui le présente à Donald Trump, et qui convainc le candidat, avec l’aide de Musk, de le prendre comme vice-président, alors que son profil n’était électoralement pas très intéressant.

      Le deal est signé, Musk se lance à corps perdu dans la campagne pour Trump à l’instant où Vance est choisi.

      Thiel, Musk, et Sacks constituent la fraction la plus idéologisée et la plus réactionnaire de cette classe de milliardaires, dont l’essentiel suit le mouvement par pur intérêt tactique. Ils ne sont donc pas représentatifs de tout leur groupe social, mais leur activisme, désormais au cœur du pouvoir, mérite qu’on s’y attarde.

      Les trois compères font partie de ce que les médias US ont baptisé la "mafia Paypal", car ils ont noué des liens proches au lancement de #Paypal, et continuent à se rendre des services depuis, avec une stratégie d’infiltration de l’État américain (via #SpaceX pour Musk, via la société de renseignement Palantir pour Thiel). Il est intéressant de noter qu’ils ont tous trois grandi au sein de la #bourgeoisie_blanche raciste de l’#Afrique_du_Sud de l’#apartheid. (Un article très bien fait le point à ce sujet : https://www.humanite.fr/en-debat/donald-trump/elon-musk-peter-thiel-david-sacks-et-roelof-botha-les-autres-sud-africains-). Musk et Sacks sont nés en Afrique du Sud, Thiel est Allemand, mais a grandi là-bas car son père travaillait pour la principale mine d’uranium du pays. Le père de Musk était quant à lui déjà millionnaire, propriétaire d’une mine de diamants ; durant l’apartheid, donc autant dire qu’il était esclavagiste de profession. Tous trois ont donc baigné dans l’environnement intellectuel du Parti national afrikaner, fondé notamment par des sympathisants nazis déclarés (Hetzog), qui professaient l’inégalité des races, la pureté génétique, et le droit par onction divine à la domination des autres races.

    • Elon Musk : Peter Thiel, David Sacks et Roelof Botha, les autres sud-africains de l’équipe Trump, Jacqueline Dérens, ancienne militante contre l’apartheid, autrice.
      https://www.humanite.fr/en-debat/donald-trump/elon-musk-peter-thiel-david-sacks-et-roelof-botha-les-autres-sud-africains-

      Tous trois ont uni leurs talents pour lancer la plateforme de paiement Paypal, qui au début n’employait ni femmes, ni Noirs, reflet de leur aversion commune pour le multiculturalisme.

    • La société post-apartheid de Anton Kannemeyer & Conrad Botes, nés respectivement en 67 et 69, deux têtes pensantes de la BD underground sud-africaine, ont créé la revue de bande dessinée « Bitterkomix », alors que l’apartheid était encore en vigueur. Critique acerbe du conservatisme et du racisme.
      https://www.du9.org/entretien/anton-kannemeyer


      https://www.cornelius-boutique.com/product/le-pays-de-judas
      #bandes_dessinées

    • Quand même, on découvre maintenant l’influence de Peter Thiel qui a pourtant toujours conceptualisé à partir de Ayn Rand la philosophie fasciste des GAFAMS ?

      Maintenant qu’on est jusqu’au cou dans leur fosse à purin, que tous les médias ont trouvé formidable d’utiliser FB et consorts depuis presque 20 ans, il faudrait penser à cesser de gazouiller comme des veaux sur X et FB ?

      Ne reste qu’à rire jaune.

      Aucun d’eux ne s’est jamais caché de ses ambitions.

  • Quelques semaines avant son investiture « Uncle Donald » décide de « chier dans le bocal » ...

    https://legrandcontinent.eu/fr/2025/01/08/trump-et-la-doctrine-mar-a-lago-coordonnees-dune-presidence-imperia

    Lors d’une conférence de presse historique dans sa résidence de Mar-a-Lago, le président élu Donald Trump a dessiné les contours de ce qu’on pourrait désormais appeler une doctrine géopolitique : les États-Unis doivent devenir un Empire, en étendant leur territoire du Panama au Groenland en passant par le Canada ; l’OTAN doit se transformer en une alliance purement asymétrique, sur le modèle du Pacte de Varsovie.

    Ironie, bluff, annonce d’un plan : les mots de Donald Trump marquent un tournant — il faut les lire.

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  • « Joe Biden porte une extraordinaire responsabilité dans la victoire de Trump », une conversation avec Patrick Weil | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2024/11/08/joe-biden-porte-une-extraordinaire-responsabilite-dans-la-victoire-

    Je me souviens très bien de la campagne de Trump en 2016. Je l’ai suivie de près et dès l’été 2015, j’avais prédit à mes collègues qu’il allait gagner parce que, incroyablement talentueux politiquement, il construisait sa campagne autour de trois axes : l’électorat chrétien voulait la suppression de l’avortement, il lui promettait des « bons » juges à la Cour Suprême ; l’électorat raciste était préoccupé par l’immigration, il lui promettait un mur à la frontière du Mexique. Et puis il y avait un troisième volet. Il s’est présenté devant les électeurs en affirmant : « I am a builder ». Les routes, les trains, les ponts sont obsolètes aux États-Unis, et Trump avait promis d’investir dans les infrastructures. Dans sa dernière campagne, les trois volets subsistent : l’attachement aux valeurs chrétiennes s’est porté sur le respect des genres et l’interdiction des opérations transgenres ; l’obsession anti immigrée reste le deuxième volet ; l’amélioration des infrastructures a été remplacée par les activités et les projets d’Elon Musk qui redonneront aux Blancs chrétiens une suprématie mondiale — y compris jusqu’à la conquête de Mars.

    C’est quelque chose de terrifiant, parce qu’il y a derrière comme cette idée que l’on se fout des Africains qui pourront crever sous la chaleur. Les Américains vont créer toutes les technologies qu’il faut pour protéger les meilleurs d’entre eux. Et la démocratie, et le reste de la planète — on s’en moque complètement.

  • Israël, #Palestine, #Gaza : le tragique par la non-fiction, une conversation avec Nathan Thrall, prix Pulitzer 2024 | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2024/07/13/israel-palestine-le-tragique-par-la-non-fiction-une-conversation-av

    Au-delà des rapports froids et des images choquantes, comment dire le réel de la vie en Israël et en Palestine ?

    À l’occasion de son passage à Paris, nous avons invité Nathan Thrall, lauréat du prix Pulitzer pour Une journée dans la vie d’Abed Salama (Gallimard, 2024) à revenir sur son approche narrative : partir de la douleur d’une expérience humaine pour explorer un système complexe et bureaucratique de domination.

    #sionisme

  • Que s’est-il passé en Bolivie ? Autopsie d’un coup d’État manqué | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2024/06/27/que-sest-il-passe-en-bolivie-autopsie-dun-coup-detat-manque

    Hier, mercredi 26 juin à 15h (heure locale), le général en chef de l’armée bolivienne, Juan José Zúñiga, a essayé de renverser le gouvernement du président Luis Arce (MAS, de gauche) en entrant avec des soldats lourdement armés dans l’enceinte du Palais présidentiel.

    Une première analyse de cette tentative de coup d’État.

    • Mardi 25 juin, au cours d’un entretien à la télévision, celui qui était encore chef de l’armée bolivienne, Juan José Zúñiga, était interrogé sur la possibilité que l’ancien président (2006-2019) Evo Morales redevienne président à la suite des prochaines élections de 2025.

      Zúñiga a répondu qu’en tant que « bras armé de la Patrie », il ferait en sorte d’empêcher que cela se produise en n’excluant pas d’arrêter Morales.

      Face à ces déclarations, le président Arce lui a demandé de présenter sa démission.

      En réaction, mercredi 26 juin à 15h (en Bolivie), le général et chef de l’armée qui venait d’être destitué, Zúñiga, est arrivé sur la place Murillo, à La Paz — où se trouve le palais présidentiel —, accompagné de soldats et de véhicules blindés de combat.

      En maintenant une certaine prudence, le président Luis Arce a publié sur X : « Nous dénonçons les mobilisations irrégulières de certaines unités de l’armée bolivienne. La démocratie doit être respectée »1.

      De son côté, l’ancien président Evo Morales a immédiatement condamné un « coup d’État en cours »2.

      À ce moment-là, les soldats ont commencé à barricader la place mais la confusion était encore grande sur ce qui était en train de passer et, surtout, sur les véritables intentions de Zúñiga.
      Comme le souligne le coordinateur du Groupe de Puebla Marco Enríquez-Ominami dans nos pages, Zúñiga semble être seul et soutenu par une petite partie de l’armée seulement.

      Les troupes du général déchu ont ensuite enfoncé l’entrée du Palais présidentiel à l’aide d’un véhicule blindé avant d’y entrer lourdement armés.

      Au sein du palais, une scène peu commune s’est ensuite produite : le président s’est retrouvé dans un face à face avec le général. D’un côté, Luis Arce accompagné de ses ministres ; de l’autre, Zúñiga entouré de ses soldats.

      Arce a alors ordonné au général déchu de replier ses hommes et de se retirer car il est lui seul le chef de l’État. Après plusieurs discussions et moments de flottement, Zúñiga s’est finalement exécuté.

      Sur ses réseaux sociaux, Arce a publié une vidéo en compagnie de ses ministres en appelant le peuple bolivien à se mobiliser pour éviter le coup d’État.

      Des manifestants se sont rassemblés sur la place Murillo en soutien au gouvernement et des affrontements ont eu lieu avec les militaires.
      La condamnation du putsch est totale dans le paysage politique bolivien et la communauté internationale.
      Après les messages de soutien adressés à Arce notamment par Lula, Petro, Boric et López Obrador, on peut noter dans la région le silence de Javier Milei — seule sa ministre des Affaires étrangères a réagi sur X en condamnant la tentative de coup d’État3.

      Le président Luis Arce a nommé un nouveau chef d’État-major de l’armée, José Wilson Sánchez, qui a ordonné aux troupes de rentrer dans leurs casernes et d’arrêter le putschiste.

      Les soldats ont alors obéi et commencé à se replier et Zúñiga a été arrêté dans la foulée.

      Ses premières déclarations consistèrent à dire qu’il n’a fait qu’obéir au président Arce qui lui aurait demandé de feindre un coup d’État afin d’accroître sa popularité.

      Cette séquence a lieu dans un contexte de grave crise économique et politique dans le pays.

      La Bolivie connaît des grandes pénuries de dollars et de carburant. Des manifestations dans les rues sont prévues dans les prochaines semaines dans un climat d’instabilité politique dont le pays peine à sortir.

      En 2019, un autre coup d’État s’était produit — et avait fonctionné cette fois-ci — avec Jeanine Áñez qui depuis purge une peine de 10 ans de prison.
      Ironie de l’histoire, même Áñez a condamné les agissements de Zúñiga qui réclamait pourtant hier la libération de tous les acteurs du coup de 2019 — y compris d’Áñez.
      Cette tentative a lieu également sur fond de crise interne au sein du parti Mouvement vers le socialisme (MAS) entre le président Arce et l’ancien président Evo Morales qui dirigent chacun de leur côté deux factions au sein du MAS : les arcistas d’un côté, les evistas de l’autre. Comme se le demandait Ominami, reste à savoir si ce coup va rapprocher les deux camps ou, au contraire, approfondir les tensions dans le parti.

    • Bolivie : tentative de coup d’État, ballon d’essai ou auto-putsch ?
      https://www.revolutionpermanente.fr/Bolivie-tentative-de-coup-d-Etat-ballon-d-essai-ou-auto-putsch?

      Après l’échec de la tentative de coup d’État d’hier en Bolivie, un scénario d’instabilité demeure, dans lequel les forces armées apparaissent comme un acteur de premier plan. Nous relayons la déclaration de la Ligue Ouvrière Révolutionnaire de Bolivie, organisation sœur de Révolution Permanente.

      Le soulèvement militaire du 26 juin en Bolivie met en évidence le l’influence considérable des forces armées sur la politique du pays. Vers 15 heures mercredi, une mobilisation irrégulière des forces armées, sous la direction du commandant général Juan José Zúñiga, est entrée en treillis, avec des fusils et des tanks, sur la Plaza Murillo, au centre de capitale La Paz, où se trouve le palais présidentiel.

      La police militaire a ordonné l’expulsion du personnel des organes exécutifs et législatifs, a gazé de manière indiscriminée et pris le contrôle de la place. L’ancien commandant général de l’armée a annoncé la formation d’un nouveau cabinet et la libération de tous les « prisonniers politiques », parmi lesquels Luis Fernando Camacho Vaca, Jeanine Áñez et les militaires poursuivis pour le coup d’État de 2019, tandis qu’un blindé pénétrait dans le palais Quemado.

      À 17 h 18, le Président Luis Arce Catacora, depuis la résidence présidentielle, la Casa Grande del Pueblo, a fait prêter serment à un nouveau haut commandement militaire, renouvelant la direction des trois forces armées. Le nouveau commandant de l’armée, José Wilson Sánchez, a immédiatement ordonné la démobilisation et le retrait des troupes, réussissant à dégager la Plaza Murillo. L’inquiétude généralisée dans tout le pays a entraîné la paralysie des voix de circulations, des marchés, des stations-service et des distributeurs automatiques de billets, par crainte d’une pénurie consécutive à la tentative de coup d’État.

      Une crise qui vient de loin

      La crise trouve son origine dans les provocations du désormais ex-commandant général de l’armée, Juan José Zúñiga, lors de l’interview télévisée No Mentirás du 24 juin, dans laquelle il a exprimé son rejet absolu d’une éventuelle candidature d’Evo Morales à l’élection de 2025. Il a menacé d’utiliser toute la puissance du « bras armé de la patrie » pour « faire respecter la Constitution politique de l’État » et arrêter Evo Morales, président de la Bolivie de 2006 à 2019, actuellement au cœur d’un bras de fer avec le Président Luis Arce, alors que tous deux sont membres du MAS (Movimiento Al Socialismo – Mouvement pour le socialisme).

      Même aujourd’hui, avec la tentative de coup d’État, ou soi-disant d’auto-coup d’État – le général putschiste Zúñiga prétend avoir agi en faveur du Président Arce et avec son accord –, certains analystes soulignent que la politique bolivienne a changé dans un aspect central, avec le rôle renforcé joué par les forces armées, auxquelles se sont ajoutées certaines forces de police, qui ont consolidé leur position comme acteur toujours plus en plus prépondérant dans la politique nationale. Cette donnée commence à apparaître comme une évidence, notamment sur les réseaux sociaux. On pourrait suggérer que leur action corporative des militaires s’exprime, d’une part, dans la demande de libération des auteurs du coup d’État de 2019 contre Evo Morales, qui sont en prison, et, d’autre part, dans leur ressentiment face à ce qu’ils décrivent comme un mauvais traitement de leur institution. Ces indicateurs montrent que les forces armées vont de plus en plus se positionner comme un facteur politique autonome, au sein des classes, partis et institutions du pays, faisant de plus en plus pencher la situation vers la droite.

      Les forces répressives en Bolivie, comme dans l’ensemble du continent latino-américain, ont une sombre histoire de soumission aux intérêts impérialistes. La nature de l’appareil répressif de tout État est fondée sur la classe, c’est-à-dire, dans le capitalisme, sur la défense de la propriété privée des moyens de production. La formation militaire en Amérique latine par l’École des Amériques, une institution américaine, perdure encore aujourd’hui. De nombreux officiers supérieurs ont étudié dans les salles de classe de cette école, imprégnée de la doctrine militaire des États-Unis.

      Les tendances bonapartistes qui se renforçaient sous Evo Morales, lequel s’appuyait en fin de mandat sur une hégémonie en déclin et donc de plus en plus autoritaire, ne laissent aujourd’hui avec Arce, sans hégémonie possible, que des tendances autoritaires de plus en plus fortes qui prennent vie d’elles-mêmes.

      Le danger que représente le rôle des forces armées et de la police en tant qu’acteurs principaux de la politique nationale est une conséquence de l’impunité de la grande majorité des putschistes de 2019 après la transition convenue entre le régime de facto d’Áñez, la Présidente issue du coup, et le gouvernement de Luis Arce Catacora, élu pour le MAS en novembre 2020. Les magnats de l’agro-industrie qui ont ouvertement admis avoir financé le coup d’État de 2019 se réunissent depuis avec le gouvernement du MAS et bénéficient du pacte en 10 points, signé en début d’année pour augmenter le nombre de réserves en dollars.

      Les politiques d’Evo Morales et de Luis Arce ont conduit à ce renforcement et cette autonomisation de l’appareil militaire, alimentant et solidifiant les tendances putschistes très présentes dans l’armée, où Zúñiga n’est que la partie émergée de l’iceberg. La délégitimation croissante des institutions centrales, telles que le pouvoir judiciaire et l’Assemblée législative plurinationale, paralysée depuis des mois par l’action du gouvernement, encourage et renforce ces tendances putschistes et autoritaires...

  • L’Union européenne s’apprête à sanctionner pour la première fois le gaz russe | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2024/06/20/lunion-europeenne-sapprete-a-sanctionner-pour-la-premiere-fois-le-g

    Aujourd’hui, les États membres se sont accordés pour inclure dans le prochain train de sanctions contre la Russie des mesures visant son secteur gazier. Si les mesures à venir ne réduiront pas drastiquement les sommes versées à Moscou pour l’importation de gaz, elles brisent néanmoins un tabou qui nuisait à la crédibilité du bloc.

    Ah ben ça alors. On te dit depuis deux ans que l’Europe sanctionne. Et en fait, elle ne sanctionne pas vraiment. C’est comme les US qui sanctionnent. Mais en fait, ils ne sanctionnent pas vraiment (l’uranium par exemple).
    En fait, ils font comme ils veulent, et ils te disent ce qu’ils veulent. L’important c’est de les laisser faire ce qu’ils veulent, mais que toi, tu continues à croire ce qu’ils disent. C’est le grand n’importe quoi, mais c’est en quelque sorte volontaire.

    • Le GC ne parle pas de l’existence d’une « flotte fantôme » permettant à la Russie d’exporter son pétrole en échappant aux sanctions occidentales.

      https://www.geo.fr/geopolitique/ukraine-comment-les-marins-de-kiev-luttent-pour-eviter-d-etre-recrutes-par-la-fl

      L’Occident dominant le secteur de l’assurance maritime, il semblait cependant difficile pour le Kremlin d’échapper à une sanction promettant de raboter son budget de plus en plus tourné vers l’effort de guerre. Mais la Russie a rapidement réagi à l’aide d’une mesure controversée : ne plus recourir à des assurances occidentales pour continuer de vendre son pétrole à des prix élevés, en courant le risque de perdre des cargaisons non remboursées en cas d’accident.
      Cette méthode correspond à ce que l’on nomme une « flotte fantôme », ou « shadow fleet ». Via des navires possédés par des entreprises installées en Turquie, aux Emirats Arabes Unis ou encore en Inde, comme le révélait le Wall Street Journal en août 2023, Moscou a pu continuer à exporter son pétrole sans craindre une riposte occidentale.

      Et qui plus est, un collectif de marins Ukrainiens qui essayaient de lutter au départ pour de meilleures conditions de travail tout en voulant éviter de travailler pour des compagnies douteuses a suscité l’intérêt d’une équipe d’investigateurs du journal « Wired »

      Un problème supplémentaire s’est cependant posé pour les navigateurs d’un pays en particulier, l’Ukraine : comment s’assurer que le navire qui les embauche ne sert pas la cause du Kremlin ? Wired a pu rejoindre un réseau Telegram de 8 000 ukrainiens, allant de marins sortant de l’école à des capitaines vétérans, s’échangeant des informations depuis des années sur différents navires. Leur but originel était simplement de repérer des vaisseaux où les retards de payement sont nombreux, où la nourriture est mauvaise... Mais le groupe Telegram est désormais tourné vers l’identification de navires appartenant à la flotte fantôme, et qui aident donc l’effort de guerre russe.
      .../...
      La mauvaise surprise de Bondar s’est répétée pour d’autres marins ukrainiens : le système opaque qui permet à la flotte fantôme de circuler passe par des entreprises-écrans disséminées autour du monde, ainsi que des navires à l’identité dissimulée, empêchant de les repérer facilement. D’après Wired s’appuyant sur des données de recrutement maritime, au moins six compagnies ukrainiennes ont contribué au recrutement de personnel pour 10 navires russes transportant du pétrole depuis février 2022.

      L’article de Wired : https://www.wired.com/story/shadow-fleet-shipping-russia-ukraine-climate-change

    • Cet autre article de « l’Essentiel » (nom de domaine enregistré au Luxembourg) pointe les « méchants » qui contribuent au contournement des sanctions de l’Occident :
      https://www.lessentiel.lu/fr/story/petrole-une-flotte-fantome-larme-russe-pour-contourner-les-sanctions-1030
      et nous apprend que :

      « Plus de 70% du pétrole russe transporté par la mer l’est grâce à la flotte fantôme », affirme Elina Ribakova. L’institut KSE estime dans son rapport « Russian Oil Tracker » de décembre que « 179 pétroliers » pleins d’or noir « ont quitté les ports russes en novembre 2023 ». En octobre, la flotte noire russe a ainsi permis l’exportation d’environ 2,3 millions de barils par jour de pétrole brut et de 800 000 barils par jour (mbj) de produits pétroliers, sur une production russe totale de 10 mbj, ajoute KSE.

      Le plus dramatique dans l’affaire c’est que les marins de cette « shadow fleet » risquent gros. Les « vaisseaux fantômes » étant aussi des poubelles (plus ou moins) flottantes.

  • La mobilisation de l’électorat de la gauche et du centre peut fortement affaiblir le RN | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2024/06/18/la-mobilisation-de-lelectorat-de-la-gauche-et-du-centre-peut-fortem

    Points clefs

    Ce 9 juin, 67 % des électeurs de Marine Le Pen de 2022 (en France métropolitaine, hors Paris) auraient à nouveau glissé un bulletin RN dans l’urne, alors que seulement 30 % des électeurs d’Emmanuel Macron de 2022 auraient fait de même pour la liste « Besoin d’Europe » menée par Valérie Hayer.

    Le résultat est intermédiaire pour les partis de gauche et de centre-gauche : sur 100 électeurs de gauche en 2022, 58 % ont plébiscité une liste de gauche ou de centre-gauche le 9 juin.

    L’abstention n’est que de 28 % parmi les électeurs de Marine Le Pen, contre 42 % pour les électeurs d’Emmanuel Macron et 36 % pour les électeurs des candidats de gauche et de centre-gauche à la présidentielle.

  • En Chine, Internet est en train de disparaître
    https://legrandcontinent.eu/fr/2024/06/02/en-chine-internet-est-en-train-de-disparaitre

    2.6.2024 par He Jiayan - « Si Internet est l’avenir de la civilisation, alors notre génération n’aura pas d’histoire — parce qu’Internet n’aura laissé de nous aucune trace. »

    On a longtemps cru qu’Internet serait la plus puissante des bibliothèques. La mémoire exhaustive de l’humanité. Le web chinois, dont les contenus sont désormais davantage produits et consommés depuis des téléphones, démontre le contraire : Internet n’archive rien. He Jiayan dissèque une révolution aux conséquences aussi violentes que souterraines.

    « Nous avons longtemps conçu Internet comme une mémoire — nous ne savions pas que c’était celle d’un poisson rouge. » En une décennie, alors même qu’il devenait de plus en plus universel par son nombre d’utilisateurs, Internet a perdu plus d’un tiers de son contenu.

    Pour la Chine, cet effondrement archivistique est encore plus important. He Jiayan, journaliste chinois spécialisé dans le web et le secteur des nouvelles technologies, travaille à partir d’archives informatiques datant d’avant l’Internet mobile. Il montre que le durcissement politique chinois est loin d’être le premier facteur de la disparition de pans entiers du web. L’autocensure et la course à la rentabilité ont conduit souterrainement à la disparition d’une quantité énorme d’informations des serveurs. À l’heure où l’Internet mobile semble être en train de remplacer le premier âge d’Internet, cette disparition semble peu visible — elle est pour autant tout à fait réelle.

    Au-delà de la dimension technique, Jiayan alerte sur la disparition d’une mémoire commune constitutive d’une culture populaire encore vivante, confiée à des serveurs qu’on croyait immortels — et qui menace aujourd’hui de s’effondrer. Pour toute une génération qui a immatériellement construit sa vie dans l’Internet des vingt premières années du XXIe siècle, le risque très concret est de se retrouver avec deux décennies sans mémoire.

    Commençons par une petite expérience.

    Si l’on cherche « Jack Ma » sur Baidu et qu’on fixe une période de référence courant de 1998 à 2005, combien d’informations apparaîtront ? Plutôt 100 millions, 10 millions ou 1 million ?

    J’ai posé la question à plusieurs groupes et l’opinion majoritaire considère toujours que l’ordre de grandeur se situerait entre quelques millions et quelques dizaines de millions. Après tout, Internet est si vaste. Jack Ma, l’ancien entrepreneur haut en couleur, a dû y laisser beaucoup de traces.

    En réalité, pour une recherche Baidu sélectionnant la plage de dates « 22 mai 1998 à 22 mai 2005 », le total des résultats contenant l’expression « Jack Ma » s’élève à 1.

    Et ce seul résultat est lui-même faux : en cliquant dessus, on constate que l’article a en fait été publié en 2021, c’est-à-dire en dehors de la période délimitée ci-dessus. S’il apparaît dans notre recherche, ce n’est que de manière inexplicable.

    En d’autres termes, si l’on veut connaître les expériences de Jack Ma, ses relations, les discussions à son sujet, ses discours ou l’histoire de son entreprise Alibaba pendant cette période, la quantité d’informations brutes valables qu’on obtient sur Internet est nulle.

    Pour une recherche Baidu sélectionnant la plage de dates « 22 mai 1998 à 22 mai 2005 », le total des résultats contenant l’expression « Jack Ma » s’élève à 1.
    He Jiayan

    Peut-être est-ce un problème de Baidu ? Peut-être qu’en utilisant Bing ou Google, la recherche est davantage probante ?

    J’ai essayé : ces deux sites affichent bien des résultats valides — un peu plus que Baidu — mais seulement une petite dizaine. Il y a aussi davantage de résultats invalides qui n’entrent pas dans la période sélectionnée — probablement pour une raison purement technique.

    Portrait d’un monde cassé

    Sous la direction de Giuliano da Empoli.

    Avec les contributions d’Anu Bradford, Josep Borrell, Julia Cagé, Javier Cercas, Dipesh Chakrabarty, Pierre Charbonnier, Aude Darnal, Jean-Yves Dormagen, Niall Ferguson, Timothy Garton Ash, Jean-Marc Jancovici, Paul Magnette, Hugo Micheron, Branko Milanovic, Nicholas Mulder, Vladislav Sourkov, Bruno Tertrais, Isabella Weber, Lea Ypi.

    On peut alors se demander si ce n’est pas parce que Jack Ma est controversé en Chine que ces résultats ne sont pas consultables.

    Ce serait vrai si c’était seulement le cas de Jack Ma. Mais j’ai aussi fait des recherches pour la même période sur Ma Huateng, Lei Jun, Ren Zhengfei, et même Luo Yonghao et Sister Fu Rong — qui étaient à l’époque des célébrités sur Internet — ou encore Jay Chou, Li Yuchun — qui étaient alors des stars de la musique. Les résultats sont du même ordre.

    Dans le cas de la recherche sur Lei Jun, après avoir testé différents sites web, différents noms de personnes et différentes périodes, j’ai découvert un phénomène étonnant. Presque toutes les archives des sites web chinois qui étaient populaires à l’époque — tels que NetEase, Sohu, SMTH BBS, Xizi Hutong, Keyhole Forum, Tianya Club, RenRen Network, Sina Blogs, Baidu Tieba — ont disparu. Un grand nombre de contenus sur des sites web personnels ont également disparu sur une période ancienne, et la plupart des sites web ont même disparu pour toutes les périodes. La seule exception est Sina.com, où l’on peut encore trouver des informations datant de plus de dix ans — mais en nombre assez limité. Plus de 99,9999 % du contenu a disparu.

    Nous avons longtemps conçu Internet comme une mémoire — nous ne savions pas que c’était celle d’un poisson rouge.
    He Jiayan

    Nous sommes en train de passer à côté d’un problème préoccupant : l’Internet chinois s’effondre de manière inéluctable — et le contenu qui existait avant l’émergence de l’Internet mobile a aujourd’hui presque complètement disparu.

    Nous avons longtemps conçu Internet comme une mémoire — nous ne savions pas que c’était celle d’un poisson rouge.

    Au cours des deux dernières années, je me suis forgé une conviction très claire : le nombre d’informations que l’on peut trouver en ligne se réduit chaque année à une vitesse vertigineuse. Il n’y a pas si longtemps, je pouvais encore trouver certaines sources originales. C’est progressivement devenu impossible. Je pouvais encore découvrir les discours des protagonistes ou les articles qu’ils avaient écrits — puis je ne les ai plus trouvés. Je pouvais encore voir de nombreuses interviews ou des vidéos en ligne — elles ont été effacées progressivement.

    Au cours des deux dernières années, je me suis forgé une conviction très claire : le nombre d’informations que l’on peut trouver en ligne se réduit chaque année à une vitesse vertigineuse.
    He Jiayan

    Tout se passe comme si un monstre d’un nouveau genre était apparu, qui dévore les pages web tout au long de l’histoire, les avalant du passé vers le présent, d’abord par petites bouchées, puis par grandes bouchées, dévorant tout l’Internet chinois — cinq ans par-ci, dix ans par là.
    © DPPI-SIPA

    Lorsque l’on regardera en arrière, on constatera que tout ce qui existait dans l’Internet chinois avant la création du mobile — qu’il s’agisse d’un portail, du site officiel d’une organisation, d’une page web personnelle, de forums publics, des blogs Sina, de posts Baidu, de documents, de photos, de musique, de vidéos, etc. — aura disparu.

    Je me souviens qu’il y a plus de dix ans, j’avais l’habitude de changer d’ordinateur parce que mes photos et mes articles compressés étaient stockées sur un serveur. Quelques années plus tard, j’ai découvert que l’entièreté du serveur avait disparu. J’avais l’habitude d’utiliser hotmail, et puis tout a disparu. J’ai également écrit des messages sur RenRen et MySpace… tous disparus.

    Tout se passe comme si un monstre d’un nouveau genre était apparu, qui dévore les pages web tout au long de l’histoire.
    He Jiayan

    Nous pensions qu’Internet pouvait tout sauvegarder. Il s’est avéré qu’il ne peut rien garder.

    Pourquoi cela s’est-il produit ?

    Je pense qu’il y a deux raisons principales.

    La première est d’ordre économique.

    Un site Internet nécessite de la bande passante, une salle de serveurs, du personnel pour le gérer et l’entretenir, ainsi qu’une quantité non négligeable de coûts réglementaires et d’entretien divers. S’il existe une valeur stratégique — par exemple, informer de ses activités pour une entreprise — ou une valeur de trafic à court terme — par exemple, s’il y a toujours des gens qui viennent voir le site de temps en temps —, et si en même temps les comptes de l’entreprise ne sont pas mauvais, alors il y aura une raison de maintenir le site en vie.

    Mais si l’entreprise est sur une mauvaise pente et n’a plus d’argent, c’est tout le site qu’elle gère qui mourra, tout simplement. Renren en est un exemple typique.

    D’un point de vue opérationnel, si une page web n’est pas visitée par quelques personnes tout au long de l’année, elle deviendra un fardeau pour l’entreprise, et le plus rationnel d’un point de vue économique sera de la supprimer — et ce même si l’entreprise n’a pas de problèmes financiers. Les premières années de Sohu ; le site NetEase dont le contenu a été essentiellement perdu ; ainsi que la disparition collective des forums hébergés dans Tianya en sont de bons exemples.

    Si une entreprise est sur une mauvaise pente et n’a plus d’argent, c’est tout le site qu’elle gère qui mourra.
    He Jiayan

    Deuxièmement, les raisons réglementaires.

    En général, la réglementation sur Internet augmente progressivement et devient de plus en plus stricte. Le contenu qui pouvait exister légalement auparavant ne répond plus aux exigences réglementaires ; et ce qui pouvait exister dans la grise auparavant a depuis basculé dans la zone rouge. Tous ces contenus sont directement supprimés.

    Il y a aussi des cas où la polarisation de l’opinion publique est devenue plus forte avec le temps et où un contenu qui était « tout à fait normal » est devenu très sensible pour l’opinion publique. Même s’il n’est pas illégal, il peut intensifier le conflit et créer de la confusion — si bien que le régulateur peut demander qu’il soit éliminé.

    Au-delà des autorités officielles, les internautes en colère agissent parfois comme des modérateurs ou au contraire des faiseurs d’opinion. Ils peuvent faire sortir de l’ombre quelque chose que quelqu’un a posté en passant il y a plus de dix ans, s’y accrocher et cyber-harceler l’auteur jusqu’à sa « mort sociale ».

    En Chine, l’effet le plus important de la réglementation n’est donc pas tant ce que font les régulateurs ou les attaques des internautes en colère que l’« autocensure » qu’ils provoquent au sein des entreprises et chez les particuliers.

    En Chine, l’effet le plus important de la réglementation n’est donc pas tant ce que font les régulateurs ou les attaques des internautes en colère que l’« autocensure » qu’ils provoquent au sein des entreprises et chez les particuliers.
    He Jiayan

    Personne ne sait si un contenu sur un site web ou un mot prononcé par quelqu’un entraînera la mort de cette personne dans plusieurs années. Le meilleur moyen de survivre est donc de supprimer toutes ces « bombes à retardement » potentielles — c’est-à-dire de fermer le site web ou d’en supprimer tout le contenu.

    Bien entendu, les autres causes sont nombreuses qui peuvent expliquer la disparition d’anciennes pages web.

    Peu après la dissolution de l’ex-Yougoslavie, tous les contenus web hébergés sous le nom de domaine international « .yu » — abréviation de Yougoslavie — ont disparu. Un autre exemple est la disparition de sites de musique et de films qui étaient autrefois facilement disponibles pour le téléchargement, en raison du renforcement de la protection des droits d’auteur. Certaines organisations et des individus, pour des raisons purement personnelles, ne veulent parfois simplement plus montrer leurs informations au public et ferment donc leurs sites web officiels ou leurs pages d’accueil personnelles.

    Mais ces raisons sont secondaires et localisées.

    La disparition systématique et à grande échelle du contenu Internet dans son ensemble est principalement due aux lois économiques et à l’autocensure.

    La disparition systématique et à grande échelle du contenu Internet dans son ensemble est principalement due aux lois économiques et à l’autocensure.
    He Jiayan

    Au fond, tout se passe comme si le contenu d’Internet — à l’instar de la vie — était régi par la théorie de l’évolution. Il n’a qu’un seul critère d’existence : attirer le plus d’attention possible au moindre coût.

    Lorsqu’un contenu est capable d’attirer suffisamment d’attention, et que le coût de maintien de ce contenu — en ce compris le coût économique, le coût de la réglementation et le coût de la lutte contre la réglementation — est faible, ce contenu a des chances de survivre sur Internet. Il est probable qu’il changera même de support — par exemple en passant du texte à l’image, de l’image fixe à l’image animée, de l’image animée à la vidéo et, à l’avenir, peut-être de la vidéo bidimensionnelle à la vidéo holographique tridimensionnelle, et ainsi de suite. La plateforme qui sert de véhicule à ce contenu changera également. On passera du portail au forum, aux blogs personnels, au microblogging — et à l’avenir peut-être à une plateforme dont nous ignorons tout pour l’instant.

    Lorsqu’un contenu ne peut plus attirer suffisamment l’attention ou que le coût de maintenance de ce contenu est trop élevé, il disparaîtra d’Internet. La disparition collective de l’Internet traditionnel, avec des ordinateurs servant de terminaux de navigation et des pages web comme supports, est simplement le résultat inévitable de cette « concurrence évolutive pour l’information ».

    La disparition collective de l’Internet traditionnel est simplement le résultat inévitable d’une « concurrence évolutive pour l’information ».
    He Jiayan

    Darwin nous a appris que la clef de l’évolution biologique était la « sélection naturelle, la survie du plus apte ». La clef de l’évolution du contenu d’Internet est la « concurrence de l’information, la sélection de l’attention ». En raison de l’effet de réseau, cette concurrence est dix mille fois plus féroce que dans la nature — dix mille fois plus cruelle. L’Internet traditionnel n’emportera pas l’extinction d’une seule espèce mais l’extinction de la quasi-totalité du contenu.

    À chaque nouvelle génération d’Internet, l’ancienne génération, arrimée à une structure obsolète, s’effondrera. C’est la destinée de tous les sites web et de tous leurs contenus.

    Portrait d’un monde cassé

    Sous la direction de Giuliano da Empoli.

    Avec les contributions d’Anu Bradford, Josep Borrell, Julia Cagé, Javier Cercas, Dipesh Chakrabarty, Pierre Charbonnier, Aude Darnal, Jean-Yves Dormagen, Niall Ferguson, Timothy Garton Ash, Jean-Marc Jancovici, Paul Magnette, Hugo Micheron, Branko Milanovic, Nicholas Mulder, Vladislav Sourkov, Bruno Tertrais, Isabella Weber, Lea Ypi.

    Si Internet est l’avenir de la civilisation, alors notre génération n’aura pas d’histoire — parce qu’Internet n’aura laissé de nous aucune trace.

    Si Internet est l’avenir de la civilisation, alors notre génération n’aura pas d’histoire — parce qu’Internet n’aura laissé de nous aucune trace.
    He Jiayan

    « Pas d’histoire ». Est-ce si important ?

    Bien sûr que oui.

    Pour écrire un article sur Shao Yibo, j’ai essayé par tous les moyens de mettre la main sur la vidéo originale de la participation de Shao Yibo à l’émission « Boshi Tang » en 2007 ainsi que les posts de sa femme, Bao Jiaxin, sur le site Baby Tree, postés depuis quelques années sous le pseudonyme de « Wen Ai Mummy ». Je ne suis pas parvenu à les retrouver — et je ne peux que le regretter.

    Bien que l’article « Red Dust Has Forgotten Shao Yibo » soit toujours très populaire — avec plus de 700 000 lecteurs et 20 000 retweets en seulement une semaine — je suis presque sûr que j’ai dû passer à côté d’informations très importantes et que la qualité de l’article aurait été meilleure si j’avais eu accès à de telles informations.

    Vous vous dites peut-être : « cela n’est utile qu’aux chercheurs et aux rédacteurs comme He Jiayan, je n’écris pas d’articles de ce genre, et ce n’est pas comme si cela n’affectait. »

    Vraiment ?

    Si nous ne pouvons plus avoir accès à tous les discours de Jack Ma, tous les articles de Ren Zhengfei, My Father and Mother et The Spring River Flows East, et tous les messages de Duan Yongping dans Snowball, ne seriez-vous pas un peu triste ?

    Vous me direz que vous êtes insensibles.

    Alors, si nous ne pouvons plus chercher le numéro de Huang Zheng, si nous ne pouvons plus voir les messages de Zhang Yiming ou de Wang Xing, est-ce que vous n’éprouverez pas un peu de regret ?

    Vous m’assurerez que vous ne vous sentez pas désolé non plus.

    Si un jour, Zhihu disparaît comme Tianya Forum, Douban s’efface comme RenRen, B-site se vide comme Sina Blog — ne ressentirez-vous pas un peu de chagrin ?

    Si un jour, les pages Internet de votre blogueur préféré affichent que « l’auteur a choisi de n’afficher que la moitié des posts de l’année » ou que « ce blog n’est plus visible », si vous lisez souvent que « ce compte a été bloqué », que « le contenu ne peut être affiché », si vous recherchez certaines informations dans Shake Voice ou Xiaohongshu, et que les résultats affichent que « l’auteur a effacé tout le contenu »…

    Cela ne vous attristera-t-il pas — ne serait-ce qu’un instant ?

    Les générations de l’Internet traditionnel, nées dans les années 1970 et 1980 ne peuvent plus retrouver leur histoire. Leurs traces en ont pratiquement disparu.

    Les générations de l’Internet traditionnel, nées dans les années 1970 et 1980 ne peuvent plus retrouver leur histoire. Leurs traces en ont pratiquement disparu.
    He Jiayan

    La nouvelle génération peut encore garder les messages de cercles d’amis privés, mais même de cercle d’amis est, de plus en plus, « visible seulement trois jours ». Messages éphémères… — jusqu’à ce que tout s’efface.
    © DPPI-SIPA

    La seule chose qui produit encore du contenu de manière frénétique, c’est le marketing en cascade.

    Mais à l’avenir, il y a fort à parier que même ces messages marketing finiront par disparaître.

    Si quelque chose est important pour nous et qu’il est en train de disparaître, existe-t-il un moyen de le sauver ?

    Certains ont essayé de le faire.

    Il existe aux États-Unis un site web appelé Internet Archive, qui se traduit en chinois par « 互联网档案馆 » et qui préserve un grand nombre de pages web originales. Mais pour avoir essayé de l’utiliser, les pages web originales en chinois sont très peu sauvegardées. L’utilisation en est très difficile, les fonctionnalités de recherche assez primitives et inefficaces. En définitive, quantitativement, elles n’ont pas permis de sauvegarder grand-chose.

    D’un point de vue technique, il ne devrait pas être difficile de sauvegarder toutes les pages web de l’Internet chinois jusqu’à l’essor de l’Internet mobile au cours des dix dernières années. Et le coût n’en serait pas élevé. Après tout, si on la compare à l’ère actuelle de l’Internet, où la vidéo est hégémonique, cette ère faite de pages web au graphisme limité est négligeable en termes d’espace.

    Si on la compare à l’ère actuelle de l’Internet, où la vidéo est hégémonique, cette ère faite de pages web au graphisme limité est négligeable en termes d’espace.
    He Jiayan

    La question est de savoir qui saura le faire, et mû par quoi.

    Les entreprises ne le feront pas. Elles n’y auraient pas d’intérêt commercial.

    Le gouvernement pourrait être en mesure de créer des archives qui conservent toutes les pages — tout comme il construit des bibliothèques et des musées. Mais dépenserait-il de l’argent pour cela ? Il semble qu’il n’y ait pas d’autre raison que de préserver l’histoire. Or même si le gouvernement le faisait, cela ne changerait rien pour les utilisateurs ordinaires d’Internet, car ces archives nécessiteraient un traitement immense concernant les données personnelles et ne seraient accessibles qu’à quelques-uns pour éviter précisément tout abus dans l’utilisation de ces données.

    D’ailleurs, même si un organe quelconque était disposé à le faire, il serait désormais trop tard. Après l’essor de l’Internet mobile, selon une estimation approximative, plus de 99 % du contenu de l’Internet chinois traditionnel devrait avoir disparu.

    D’une certaine manière, les articles que j’ai rédigés ont contribué à la préservation de l’histoire de leurs sujets. Si je n’avais pas écrit sur eux, une grande partie de cette histoire serait déjà introuvable en ligne. Pourtant il ne s’agit pas d’informations originales, mais seulement d’informations de seconde main que j’ai consolidées.

    Après l’essor de l’Internet mobile, selon une estimation approximative, plus de 99 % du contenu de l’Internet chinois traditionnel devrait avoir disparu.
    He Jiayan

    Aujourd’hui, sur tous les événements majeurs qui se sont produits au cours de la première décennie de ce siècle, toutes les célébrités qui ont laissé des traces profondes, les informations que l’on peut encore trouver sur l’Internet chinois sont presque toujours des informations de seconde main éditées par des médias pure player — ou même des informations qui ont été maintes fois reprises et republiées et qui sont depuis longtemps complètement différentes de leur forme originale.

    Les rapports originaux, les vidéos originales, les discours originaux, les observations originales des internautes, les commentaires originaux — tout cela a disparu.

    Dans quelques années, toutes ces informations de seconde main auront également disparu. Tout se passe comme si ces événements n’avaient jamais eu lieu. Comme si ces personnes n’avaient jamais existé.

    Il n’y a rien d’autre à faire que d’accepter la réalité.

    À l’ère d’Internet, les vingt premières années du XXIe siècle seront vingt années sans archives historiques.

    À l’ère d’Internet, les vingt premières années du XXIe siècle seront vingt années sans archives historiques.
    He Jiayan

    Si vous pouvez encore voir des informations anciennes de l’Internet chinois aujourd’hui, ce n’est que la dernière lueur du crépuscule.

    Si vous êtes saisis par leur nature éphémère, vous pourrez soupirer comme Faust sur son lit de mort implorant l’instant : « Arrête-toi, tu es si beau ! »

    Mais cette lueur sera bientôt engloutie par le temps et tombera dans le vide — en même temps que votre exclamation.

    Il n’y a pas d’échappatoire.

    Presque tout ce que vous voyez et créez maintenant — cet article, cette plateforme — finira par se noyer dans le vide.

    As China’s Internet Disappears, ‘We Lose Parts of Our Collective Memory’
    https://www.nytimes.com/2024/06/04/business/china-internet-censorship.html

    4.6.2024 by Li Yuan - The number of Chinese websites is shrinking and posts are being removed and censored, stoking fears about what happens when history is erased.

    Chinese people know their country’s internet is different. There is no Google, YouTube, Facebook or Twitter. They use euphemisms online to communicate the things they are not supposed to mention. When their posts and accounts are censored, they accept it with resignation.

    They live in a parallel online universe. They know it and even joke about it.

    Now they are discovering that, beneath a facade bustling with short videos, livestreaming and e-commerce, their internet — and collective online memory — is disappearing in chunks.

    A post on WeChat on May 22 that was widely shared reported that nearly all information posted on Chinese news portals, blogs, forums, social media sites between 1995 and 2005 was no longer available.

    “The Chinese internet is collapsing at an accelerating pace,” the headline said. Predictably, the post itself was soon censored.

    “We used to believe that the internet had a memory,” He Jiayan, a blogger who writes about successful businesspeople, wrote in the post. “But we didn’t realize that this memory is like that of a goldfish.”

    It’s impossible to determine exactly how much and what content has disappeared. But I did a test. I used China’s top search engine, Baidu, to look up some of the examples cited in Mr. He’s post, focusing on about the same time frame between the mid-1990s and mid-2000s.

    I started with Alibaba’s Jack Ma and Tencent’s Pony Ma, two of China’s most successful internet entrepreneurs, both of whom Mr. He had searched for. I also searched for Liu Chuanzhi, known as the godfather of Chinese entrepreneurs: He made headlines when his company, Lenovo, acquired IBM’s personal computer business in 2005.

    I looked, too, for results for China’s top leader, Xi Jinping, who during the period was the governor of two big provinces. Search results of senior Chinese leaders are always closely controlled. I wanted to see what people could find if they were curious about what Mr. Xi was like before he became a national leader.

    I got no results when I searched for Ma Yun, which is Jack Ma’s name in Chinese. I found three entries for Ma Huateng, which is Pony Ma’s name. A search for Liu Chuanzhi turned up seven entries.

    There were zero results for Mr. Xi.

    Then I searched for one of the most consequential tragedies in China in the past few decades: the Great Sichuan earthquake on May 12, 2008, which killed over 69,000 people. It happened during a brief period when Chinese journalists had more freedom than the Communist Party would usually allow, and they produced a lot of high-quality journalism.

    When I narrowed the time frame to May 12, 2008, to May 12, 2009, Baidu came up with nine pages of search results, most of which consisted of articles on the websites of the central government or the state broadcaster China Central Television. One caveat: If you know the names of the journalists and their organizations, you can find more.

    Each results page had about 10 headlines. My search found what had to have been a small fraction of the coverage at that time, much of which was published on the sites of newspapers and magazines that sent journalists to the epicenter of the earthquake. I didn’t find any of the outstanding news coverage or outpouring of online grief that I remembered.

    In addition to disappearing content, there’s a broader problem: China’s internet is shrinking. There were 3.9 million websites in China in 2023, down more than a third from 5.3 million in 2017, according to the country’s internet regulator.

    China has one billion internet users, or nearly one-fifth of the world’s online population. Yet the number of websites using Chinese language make up only 1.3 percent of the global total, down from 4.3 percent in 2013 — a 70 percent plunge over a decade, according to Web Technology Surveys, which tracks online use of top content languages.

    The number of Chinese language websites is now only slightly higher than those in Indonesian and Vietnamese, and smaller than those in Polish and Persian. It’s half the number of Italian language sites and just over a quarter of those in Japanese.

    One reason for the decline is that it is technically difficult and costly for websites to archive older content, and not just in China. But in China, the other reason is political.

    Internet publishers, especially news portals and social media platforms, have faced heightened pressure to censor as the country has made an authoritarian and nationalistic turn under Mr. Xi’s leadership. Keeping China’s cyberspace politically and culturally pure is a top order of the Communist Party. Internet companies have more incentive to over-censor and let older content disappear by not archiving.

    Many people have had their online existences erased.

    Two weeks ago, Nanfu Wang found that an entry about her on a Wikipedia-like site was gone. Ms. Wang, a documentary filmmaker, searched her name on the film review site Douban and came up with nothing. Same with WeChat.

    “Some of the films I directed had been deleted and banned on the Chinese internet,” she said. “But this time, I feel that I, as a part of history, have been erased.” She doesn’t know what triggered it.

    Zhang Ping, better known by his pen name, Chang Ping, was one of China’s most famous journalists in the 2000s. His articles were everywhere. Then in 2011, his writing provoked the wrath of the censors.

    “My presence in public discourse has been stifled much more severely than I anticipated, and that represents a significant loss of my personal life,” he told me. “My life has been negated.”

    When my Weibo account was deleted in March 2021, I was saddened and angered. It had more than three million followers and thousands of posts recording my life and thoughts over a decade. Many of the posts were about current affairs, history or politics, but some were personal musings. I felt a part of my life had been carved away.

    Many people intentionally hide their online posts because they could be used against them by the party or its proxies. In a trend called “grave digging,” nationalistic “little pinks” pore over past online writings of intellectuals, entertainers and influencers.

    For Chinese, our online memories, even frivolous ones, can become baggage we need to unload.

    “Even though we tend to think of the internet as somewhat superficial,” said Ian Johnson, a longtime China correspondent and author, “without many of these sites and things, we lose parts of our collective memory.”

    In “Sparks,” a book by Mr. Johnson about brave historians in China who work underground, he cited the Internet Archive for Chinese online sources in the endnotes because, he said, he knew they would all eventually disappear.

    “History matters in every country, but it really matters to the C.C.P.,” he said, referring to the Chinese Communist Party. “It’s history that justifies the party’s continued rule.”

    Mr. Johnson founded the China Unofficial Archives website, which seeks to preserve blogs, movies and documents outside the Chinese internet.

    There are other projects to save Chinese memories and history from falling into a void. Greatfire.org has several websites that provide access to censored content. China Digital Times, a nonprofit that fights censorship, archives work that has been or is in danger of being blocked. Mr. Zhang, the journalist, is its executive editor.

    Mr. He, author of the WeChat post that went viral, is deeply pessimistic that China’s erasure of history can be reversed.

    “If you can still see some early information on the Chinese internet now,” he wrote, “it is just the last ray of the setting sun.”

    #Chine #internet #dead_link #amnésie #histoire

  • En une décennie, Internet a perdu plus d’un tiers de son contenu | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2024/05/31/en-une-decennie-internet-a-perdu-plus-dun-tiers-de-son-contenu

    Selon une étude réalisée par le Pew Research Center, 38 % des pages internet qui existaient en 2013 sont désormais inaccessibles — ce qui représenterait plus de 250 millions de sites. Les sites gouvernementaux, privés, les réseaux sociaux sont tous concernés par la « dégradation numérique ».

  • « L’archive, c’est le témoignage d’actes de paroles qui marquent l’arrachement à une condition », une conversation en deux parties avec #Jacques_Rancière
    https://legrandcontinent.eu/fr/2024/02/09/jacques-ranciere-et-lhistoire-volume-1

    L’#archive, on en fait toujours quelque chose. Ce que font les #historiens la plupart du temps, c’est l’interpréter, c’est-à-dire la mettre dans une grille explicative. Ce peut être la grille Labrousse qui était encore très en vigueur à l’époque de La Nuit des prolétaires : on commence par l’économique et puis on traverse les différentes couches pour arriver au niveau idéologique. Ce peut être la grille « #histoire des mentalités », style Le Roy Ladurie ; Montaillou, c’était quand même à l’époque la grande référence pour l’usage de la parole « populaire ». On va penser un texte comme le produit d’une certaine terre, d’une certaine manière de vivre, de penser etc., une sorte de conjonction de géographie au sens large du terme et de psychologie. L’historien va se mettre un peu dans la peau du petit gars de Montaillou qui se débrouille pour concilier les subtilités théologiques de l’hérésie avec son mode de vie bon enfant. Ces deux grilles alors dominantes sont deux pratiques réductionnistes qui réinsèrent une parole, ou un mouvement déviant dans les cadres déjà existants. Moi, mon problème, c’est que j’avais affaire à un type d’archives qui montrait en gros le mouvement de gens pour sortir des cadres, pour sortir des grilles au sein desquelles ils étaient enfermés. Par conséquent, mon problème, c’était de faire le contraire : ne pas réduire, en ramenant à des catégories sociologiques déjà existantes, mais au contraire créer une forme d’amplification : dénuder l’événement de parole dans sa singularité, et ensuite l’amplifier par la paraphrase, c’est-à-dire que ce mouvement par lequel ces ouvriers essayaient de sortir de leur monde, pour aller vers le monde des poètes, des intellectuels, etc., je me suis efforcé d’en montrer la portée en l’isolant et en l’amplifiant.

    [...]

    Pour moi, je n’ai pas prétendu décrire en général le #mouvement_ouvrier, j’ai essayé de pointer le paradoxe d’où naît l’idée même de mouvement ouvrier. Bien sûr, ça ne va pas couvrir l’encyclopédie de toutes les formes de mouvements, de grèves, de révoltes, d’insurrections, d’organisations ouvrières depuis les années 1830 jusqu’aux années 2020. Ça n’a pas vocation à ça, ça a vocation à donner une orientation générale à la recherche et à la narration. On a affaire à une réalité hétérogène. La question, c’est de savoir si on respecte l’hétérogénéité, ou bien si on la réduit de différentes manières. Mon idée, c’est qu’il faut respecter l’hétérogénéité, et avoir en même temps certaines lignes directrices, certaines orientations qui ne sont pas des vérités tombées du ciel ! Il m’a semblé à un moment donné que je pouvais tirer de mon matériau un certain type d’orientation sur ce qu’avait pu vouloir dire la constitution d’une #identité_ouvrière. Mais c’est tout ! Ce qui est important, c’est d’essayer de montrer à chaque fois qu’il y a quelque chose de plus dans l’idée de mouvement ouvrier qu’une simple lutte des ouvriers contre leurs conditions, qu’il faut toujours inclure la dimension de création d’une autre forme de monde. Et deuxièmement, au sein de ces mouvements, il y a toujours la présence d’autre chose : la #République au XIXe siècle, le #communisme au XXe qui n’est pas une invention proprement ouvrière mais qui donne une force d’attraction au mouvement et dont celui-ci, en retour, invente une version ouvrière. Voilà ce que je pourrais dire. Non, bien sûr, ça ne couvre pas toutes les situations. De toute façon, si on veut couvrir toutes les situations, on ne dit rien que des généralités vides.

    « L’important, c’est l’effort pour briser l’ordre normal du temps », une conversation en deux parties avec Jacques Rancière
    https://legrandcontinent.eu/fr/2024/02/11/jacques-ranciere-et-lhistoire-volume-2

  • La Russie développe-t-elle une arme nucléaire spatiale ? | Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2024/02/17/la-russie-developpe-t-elle-une-arme-nucleaire-spatiale

    Mercredi 14 février, l’élu américain Mike Turner mettait en garde contre le développement par la Russie d’une « arme nucléaire anti-satellite » dans l’espace. Le lendemain, un porte-parole de la Maison-Blanche tempérait la portée de cette menace. Que savons-nous de cette « arme nucléaire » spatiale russe ?

    Ce qui est assez cocasse, c’est que les services russes laissent filtrer ces informations qui ressemblent fort à la campagne d’intox initiée par Reagan dans les années 80, cette fameuse « guerre des étoiles » qui a contribué à l’affaiblissement économique de l’Union Soviétique.

    Ce programme de relance en matière de recherches en armement est considéré rétrospectivement comme étant l’un des éléments qui aurait pu amener à la chute de l’Union soviétique ; à tout le moins la stratégie reaganienne de confrontation avec le dit « Empire du mal », selon les discours présidentiels, consistait à mettre à genoux l’adversaire en l’amenant sur le terrain d’une compétition militaro-économique visant à l’étouffer financièrement, les crédits alloués par le politburo à cette course aux armements ne l’étant pas sur d’autres plans plus fondamentaux de l’économie de l’URSS.

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Initiative_de_d%C3%A9fense_strat%C3%A9gique