/2020

  • Besoin de ressources sur le documentaire "Hold Up" ?

    Il y a une personne de la team sceptique avait commencé à rassembler des ressources disponibles ici : https://docs.google.com/document/d/1UU2Gp_YH4NnJ2tRYPD1-pFli-F7TM1PtO_Ll95J2LQI suite à quoi nous avons lancé un pad collectif qui, depuis, s’est étoffé et continue à l’être : https://frama.link/Debunk-HoldUp (à diffuser avec parcimonie)
    et il y a #CaptainFact qui propose une vérification collective enrichie là https://captainfact.io/videos/4Y7d (je suis persuadée que c’est le genre d’outils qu’on a besoin de développer)

    En attendant, je dois avouer que je fais un peu le yoyo sur le sujet parce que lire ça et là que les gens sont stupides de relayer ça, bah, même si j’ai des ras-le-bol très très fort, ça me va pas comme réponse, ou plutôt, ça me rend encore plus triste et pessimiste. Je ne peux m’empêcher de penser à l’électorat de Trump, qu’on moque plus facilement qu’il est à distance, en sachant que dans le même temps la France est en train de faire pire dans certains domaines. Il me semble que ne pas entendre les besoins auxquels ce film répond, c’est passer à côté de ce qu’il nous faut pour faire "société" et pousser les biens communs et non individualités malmenées par des décrets qui nous maintiennent dans l’impuissance. Je suis persuadée, années après années, que le plus important est l’accessibilité aux informations et savoirs mais je suis aussi de plus en plus convaincue que la solution pour mieux passer les crises passe par rétablir plein de liens d’entraide dans notre voisinage immédiat...
    Mille douceurs sur tous vos univers et sur vos bulles nécessaires 💚

    Loi de Brandolini : « La quantité d’énergie nécessaire pour réfuter des idioties est supérieure d’un ordre de grandeur à celle nécessaire pour les produire. »
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_de_Brandolini

    Avant de partir piocher dans les données, une première question à se poser est peut-être "Pourquoi vouloir changer l’opinion des gens sur Hold-up ?" afin de mieux répondre à la question "Comment changer l’opinion d’une personne sur Hold-up ?" Pour ça, le visionnage de la nouvelle vidéo de Hygiène Mentale peut être salutaire ;)
    https://www.youtube.com/watch?v=VnbhrwNXry0

    Et donc, pour ce qui est déjà listé :

    Précisions / mises au point d’intervenant-e-s

    Philippe Douste-Blazy s’explique et se désolidarise du documentaire
    https://twitter.com/pdousteblazy/status/1326623595502718978 +archive : https://archive.vn/Vn91s
    Interview RTL : “Hold-Up” : Douste-Blazy “scandalisé” par le documentaire où il apparaît : https://www.rtl.fr/actu/politique/hold-up-douste-blazy-scandalise-par-le-documentaire-ou-il-apparait-7800921675 )
    Explication plus complète sur BFMTV : “Hold-Up” : “scandalisé”, Douste-Blazy demande à être retiré du documentaire aux relents complotistes : https://www.bfmtv.com/sante/hold-up-scandalise-douste-blazy-demande-a-etre-retire-du-documentaire-aux-rel

    Monique Pinçon-Charlot explique comment elle a été trompée à la fois sur le sujet mais aussi sur la coupe qui a été faite dans ses propos. Elle présente aussi ses excuse pour l’allusion inappropriée à l’holocauste. Elle refuse d’être associée à la promotion du film :
    https://twitter.com/PINCON_CHARL0T/status/1327309067879141377 +archive : https://archive.vn/EfkkO

    Analyses, critiques et désinfox disponibles

    Sur Twitter :
    –Thread debunk et analyse, de @C19Federation (collectif Covid 19 Fédération, centre d’information sur le coronavirus) :
    https://twitter.com/C19Federation/status/1326595799858475009 +archive : https://archive.vn/SmBVG

    –Thread debunk, de @Tristanmf :
    https://twitter.com/tristanmf/status/1326510738966532096 +archive : https://archive.vn/9GSdJ

    –Thread debunk, de @VictorBoissel
    https://twitter.com/VictorBoissel/status/1326797394269401088 +archive : https://archive.vn/XomKt

    –Thread debunk, de @lucifer_le_vrai
    https://twitter.com/lucifer_le_vrai/status/1325967852332077062 +archive : https://archive.vn/s0l4S

    –Courtes vidéos de @Gollumilluminat

    le Diamond Princess prédit-il 55 000 morts pour la Grande Bretagne ?

    https://twitter.com/Gollumilluminat/status/1326844683440582658

    "L’OMS a interdit les autopsies" ?

    https://twitter.com/Gollumilluminat/status/1326882895781355526

    "les médecins touchent plus d’argent lorsqu’ils dénoncent des cas contact" ?

    https://twitter.com/Gollumilluminat/status/1326876315018989569

    –Thread debunk de @AnasseKazib, belles mises en évidence d’incohérences dans le film.
    https://twitter.com/AnasseKazib/status/1326995516354334731 + archive : https://archive.vn/sM5QK

    –Thread de @medmedfr qui regroupe aussi divers thread, articles et debunk :
    https://twitter.com/medmedfr/status/1326606239300775941 +archive : https://archive.vn/FSIEG

    –Thread Alexandre Boucherot, COE de Ulule, sur la récolte d’argent pour Hold Up sur la plateforme :
    https://twitter.com/cemonsieur/status/1326873749531074560 +archive : https://archive.vn/0R48k
    → Il y explique que l’intégralité de la commission perçue va aller à une association de défense de l’information : https://community.ulule.com/topics/politique-de-moderation-que-fait-ulule-si-un-projet-contrevient-a-s

    Sur Facebook :
    –Post de Jean-Loic Le Quellec, notamment sur les invités du film :
    https://www.facebook.com/jeanloic.lequellec/posts/3798547896845205 +archive : https://archive.vn/dzRzx

    –Post de Dany Nuremberg, notamment sur les invités du film et l’HCQ :
    https://www.facebook.com/story.php?story_fbid=10223237673481214&id=1565238776 +archive : https://archive.vn/s3xtd

    –Alerte du collectif Covid19 (centre d’information sur le coronavirus) :
    https://facebook.com/Covid19.Federation/photos/a.109195057395696/194108348904366 +archive : https://archive.vn/1MiLc

    –Post analyse de Loïc Steffan, Professeur agrégé Éco-gestion, à l’Institut National Universitaire Champollion :
    https://www.facebook.com/loic.steffan/posts/10221632402871394 +archive : https://archive.vn/iJQxy

    –Courtes vidéos de Pierre Ratbb identiques à celles de @Gollumilluminat sur twitter :

    le Diamond Princess prédit-il 55 000 morts pour la Grande Bretagne ?

    https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=1251684621880487&id=100011168831576

    "L’OMS a interdit les autopsies" ?

    https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=1251791825203100&id=100011168831576

    "les médecins touchent plus d’argent lorsqu’ils dénoncent des cas contact" ?

    https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=1251773601871589&id=100011168831576

    Sur Youtube :
    –Courtes vidéos par Le Moment Neuneu :

    le Diamond Princess prédit-il 55 000 morts pour la Grande Bretagne ?

    https://www.youtube.com/watch?v=2A6Bo-swumQ

    "L’OMS a interdit les autopsies" ?

    https://www.youtube.com/watch?v=8f6LxmG3GCo

    "les médecins touchent plus d’argent lorsqu’ils dénoncent des cas contact" ?

    https://www.youtube.com/watch?v=CauCCT3L1pw

    Sur Internet :

    Très très gros boulot de Débunkage du documentaire Hold-up : analyse personnelle et semi-collaborative par Thibaut P. & Christophe P. avec timing précis et au format CC-BY-NC-SA : https://hackmd.io/Vxh9X6C8RIyh0zRPcgh_BA?view +archive : https://archive.vn/yo9do

    –Captain Fact : travail d’analyse collectif minutieux point par point des membres de CaptainFact :
    https://captainfact.io/videos/4Y7d

    –Travail d’analyse minutieux point par point du collectif Fédération Covid19 (centre d’information sur le coronavirus)
    https://spark.adobe.com/page/xiBTzlo8ML8Hv

    Fiche Conspiracy Watch en cours de réalisation : https://www.conspiracywatch.info/hold-up

    Instant critique : HOLD-UP, la comédie fiction de Pierre Barnérias
    https://instantcritique.fr/divertissement/hold-up-la-comedie-fiction-de-pierre-barnerias

    Médias scientifiques & spécialisés

    Sciences et avenir : Covid-19 : 4 "fake news" majeures présentes dans le documentaire complotiste "Hold-Up"
    https://www.sciencesetavenir.fr/sante/covid-19-4-fake-news-majeures-presentes-dans-le-documentaire-complo

    "Le virus a particulièrement sévi du 15 mars au 15 avril, période où nous étions tous confinés grâce à une mesure historique censée ne pas faire apparaître cette courbe" (à 8’05’’)

    RT-PCR : "l’ARS ne communique pas sur le nombre de cycles" (à 8’54’’)

    "On a interdit les autopsies à cause d’une instruction de l’OMS" (39’16’’)

    "Jusqu’à maintenant, les virus venant du monde animal ont du mal à se transmettre d’Homme à Homme" (entre 1h39’ et 1h50’)

    Différents médias mainstreams :

    –Article de ChekNews (payant) :
    https://www.liberation.fr/checknews/2020/11/11/que-sait-on-du-documentaire-hold-up-qui-denonce-une-manipulation-mondiale
    @medmedfr l’a rendu public ici : https://twitter.com/medmedfr/status/1326606239300775941
    et en version libre là : https://www.msn.com/fr-fr/actualite/france/que-sait-on-du-documentaire-c2-abhold-up-c2-bb-qui-d-c3-a9nonce-une-c2-abmanipulation-c2-bb-mondiale-sur-le-covid-19/ar-BB1aUrx1

    Articles cités (Libé ou autres) dans le débunk de Checknews :

    18 mars : Le brevet du Covid-19 par l’institut Pasteur : https://www.liberation.fr/checknews/2020/03/18/non-le-covid-19-n-a-pas-ete-invente-par-l-institut-pasteur_1782209

    25 mars : Pourquoi un billet de blog de pro Raoult a disparu du blog Médiapart : https://www.liberation.fr/checknews/2020/03/25/mediapart-a-t-il-supprime-un-billet-de-blog-favorable-au-professeur-raoul

    13 avril : Pas de déploiement “sauvage” de la 5G pendant le confinement : https://www.liberation.fr/checknews/2020/04/13/le-gouvernement-a-t-il-generalise-la-5g-pendant-le-confinement_1785045

    15 avril : L’OMS et les recommandations de port du masque : https://www.liberation.fr/checknews/2020/04/15/pourquoi-l-oms-ne-recommande-t-elle-pas-le-port-du-masque-a-toute-la-popu

    27 avril : Véran pris en flagrant déli de mensonge sur le port du masque : https://www.liberation.fr/france/2020/04/27/masques-comment-le-gouvernement-a-menti-pour-dissimuler-le-fiasco_1786585

    2 juin : Les critiques de l’étude du Lancet : https://www.liberation.fr/checknews/2020/06/02/pourquoi-l-etude-du-lancet-sur-l-hydroxychloroquine-est-elle-sous-le-feu-

    21 septembre : Le mythe de la prime décès Covid versée aux hopitaux : https://www.liberation.fr/checknews/2020/09/21/non-les-hopitaux-ne-touchent-pas-une-prime-de-5-000-euros-par-deces-du-au

    4 octobre : 5 arguments des “rassuristes” passés au crible : https://www.liberation.fr/france/2020/10/04/cinq-arguments-des-rassuristes-passes-au-crible_1801400

    13 octobre : Analyse de l’association Bon Sens et de ses membres : https://www.liberation.fr/checknews/2020/10/13/qu-est-ce-que-l-association-bonsens-cofondee-par-la-deputee-martine-wonne

    Sur Christian Perronne :

    2016 : Raoult clashe les docteurs complotistes prétendant que Lyme est une maladie créée par les nazis (dont Perronne fait partie) : https://www.lexpress.fr/actualite/sciences/christian-perronne-avec-didier-raoult-on-a-de-l-estime-mutuelle_2130142.htm

    19 juin : Létalité du Covid-19 : 19% en France contre 6% aux USA selon Perronne ? https://www.liberation.fr/checknews/2020/06/19/est-il-vrai-que-la-letalite-du-covid-en-france-a-ete-de-19-contre-6-aux-e

    8 juillet : Perronne défend le protocole Raoult : https://www.lexpress.fr/actualite/sciences/christian-perronne-avec-didier-raoult-on-a-de-l-estime-mutuelle_2130142.htm

    Sur les élections US :

    4 novembre : Pourquoi le nombre de voix démocrates dans le Michigan et le Wisconsin a soudainement augmenté : https://www.liberation.fr/checknews/2020/11/04/pourquoi-le-nombre-de-voix-democrates-dans-le-michigan-et-le-wisconsin-a-

    5 novembre : Pas plus de votants que d’inscrits dans le Michigan : https://www.liberation.fr/checknews/2020/11/05/non-il-n-y-a-pas-eu-plus-de-votants-que-d-inscrits-dans-le-wisconsin_1804

    10 novembre : Pourquoi France Soir n’est plus un journal : https://www.liberation.fr/checknews/2020/11/10/francesoir-ceci-n-est-plus-un-journal_1803644

    Les Décodeurs : Covid-19 : les contre-vérités de « Hold-up », documentaire à succès qui prétend dévoiler la face cachée de l’épidémie : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2020/11/12/covid-19-les-contre-verites-de-hold-up-le-documentaire-a-succes-qui-pretend-

    RTBF.be : Le coronavirus, fruit d’une "manipulation mondiale" ? "Hold-Up", un docu soutenu par des milliers de contributeurs
    https://www.rtbf.be/info/medias/detail_le-coronavirus-fruit-d-une-manipulation-mondiale-hold-up-un-docu-soutenu

    Le Parisien : Covid-19 : labos, masques et domination du monde… on décrypte « Hold Up », le docu qui agite les complotistes
    https://www.leparisien.fr/societe/covid-19-labos-masques-et-domination-du-monde-on-decrypte-hold-up-le-docu

    France Info : Covid-19 : “Hold-up”, le documentaire qui dénonce un “complot mondial”, fait polémique : https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/covid-19-et-complot-mondial-le-documentaire-hold-up-fait-polemique_4178

    – RTL :
    "Comment le documentaire "Hold up" est devenu une affaire politique ?" : chronique de Jean-Mathieu Pernin
    https://www.youtube.com/watch?v=Ge5qEf_FW7Q


    à retrouver en article ici https://www.rtl.fr/actu/debats-societe/comment-le-documentaire-hold-up-est-devenu-une-affaire-politique-7800922012

    "Hold Up : le piège redoutable des théories du complot" : edito

    https://www.youtube.com/watch?v=6yS8C0ZuXL4


    à retrouver en article ici : https://www.rtl.fr/actu/politique/hold-up-le-piege-redoutable-des-theories-du-complot-7800921922
    – Europe 1 : de 3’28 à 5’36, avec intervention de Tristan Mendès
    https://www.youtube.com/watch?v=yZveTRGAn4g

    BFMTV (article un peu brouillon mais qui a l’avantage de lister la plupart des autres publications et de comprendre pourquoi Philippe Douste-Blazy dit s’être fait pièger) : TOUT COMPRENDRE - “Hold-up”, le documentaire aux relents complotistes qui veut dénoncer les “mensonges” sur le Covid-19 : https://www.bfmtv.com/societe/tout-comprendre-hold-up-le-documentaire-aux-relents-complotistes-qui-veut-den

    lien vers le doc hors "promotion" : https://hdstreaming.ch/movies/hold-up-retour-sur-un-chaos

  • L’œil et la main de Darmanin (14 septembre 2020)

    https://www.la-srf.fr/article/l%C5%93il-et-la-main-de-darmanin-2

    La SRF tient à réagir à la déclaration du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, d’exiger aux télévisions et aux réseaux sociaux de flouter les « images montrant les visages » des policiers en opérations. La raison avancée serait de protéger les policiers d’éventuelles représailles. En cela, Gérald Darmanin est le continuateur d’une logique instaurée depuis les attentats de 2015 et qui consiste à sacrifier toujours plus la liberté sur l’autel de la sécurité.

    Mais derrière cette raison publique, difficile de ne pas débusquer une raison cachée : faire disparaître dans un grand trou noir les violences policières. Ces dernières, longtemps invisibilisées par l’absence de preuve malgré les témoignages des victimes, ont explosé devant les yeux du grand public grâce à la force des images filmées par des citoyens et diffusées sur les réseaux sociaux.

    « Et qui nous protège de vous ? » Alors que la célèbre formule de La Haine s’est répandue dans les consciences de tout un pays, des quartiers populaires aux régions des Gilets Jaunes en passant par les exilés du Calaisis, de la région parisienne, de la Roya et d’ailleurs, Gérald Darmanin n’hésite pas à sous-entendre, dans un retournement spectaculaire des responsabilités, que c’est à la police de se protéger d’une population regardée uniquement comme menaçante.

    Si Gérald Darmanin ne l’a pas précisé, on se rappelle que la proposition de loi d’Eric Ciotti prévoyait 15 000 euros d’amende et un an d’emprisonnement pour les contrevenants, transformant ainsi en criminels ceux qui filment pour se protéger.

    En janvier dernier Emmanuel Macron avait déclaré ne pas vouloir utiliser le terme de violence policière, considérant que la violence était « d’abord dans la société ». Après le langage, c’est donc au tour de l’image d’être attaquée au plus haut sommet de l’État, d’être restreinte, en partie effacée, et avec elle tout un pan de la réalité. La disparition de l’expression « violences policières » ne suffisant visiblement pas, il faudrait encore en anonymiser les auteurs. Car dans cette proposition de floutage, il y a autre chose qu’un simple déni de la réalité : parce que l’image peut valoir pour preuve en justice, son floutage est le commencement de l’impunité. Dans le cas de violences, flouter le visage des policiers, reviendrait alors moins à les protéger qu’à les couvrir.

    Si une telle mesure était adoptée, non seulement il deviendrait impossible de filmer ou montrer des images de manifestations, mais combien d’oeuvres représentant les forces de l’ordre devraient alors être amputées ? Jusqu’où iront les ciseaux du ministère de l’Intérieur ? Car dès lors que nous laissons ce dernier décider à la place de la société civile de ce qui est montrable et de ce qui ne l’est pas, c’est de censure dont on parle. En tant que cinéastes et filmeurs nous déplorons radicalement ce projet de restriction de la liberté d’expression et d’information. La loi sur le droit à l’image avait pris le soin de le préciser : filmer les forces de l’ordre dans l’exercice de leur fonction relève de la liberté d’information et celle-ci « prime sur le droit au respect de l’image et de la vie privée ».

    Alors que le mouvement Black Lives Matter déferle encore sur tout l’Occident, et avec lui une demande d’apaisement des relations entre la police et les citoyens, Gérald Darmanin n’a pas autre chose à proposer qu’un blanc-seing à l’impunité policière. Du matricule RIO que les policiers ont progressivement fait disparaître de leur uniforme au port banalisé de la cagoule, d’ordinaire réservée aux équipes d’interventions spéciales, ce floutage viendrait parachever l’installation d’un état d’exception permanent pour une police qui assumerait alors tous les atours d’une milice sans loi et sans garde-fou.

    Nous rappelons au ministre de l’Intérieur que la police n’est pas un corps secret mais un service public qui doit pouvoir rendre des comptes aux citoyens, qu’il a pour mission première de protéger et de servir. Par-dessus tout, nous demandons au ministre de l’Intérieur de ne plus mettre son oeil et sa main dans nos images, et de laisser nos libertés fondamentales en paix.

    • « Police partout, images nulle part » Par la Société des réalisateurs de films (SRF), des cinéastes, organisations et collectifs — 11 novembre 2020 à 20:56 (mis à jour à 22:14)

      https://www.liberation.fr/france/2020/11/11/police-partout-images-nulle-part_1805319

      Face à la proposition de loi, de nombreux cinéastes revendiquent le droit des citoyens d’opposer leurs images à celles de l’Etat.

      Le 14 septembre, les cinéastes de la Société des réalisateurs de films, à travers un texte intitulé « l’Œil et la main de Darmanin », dénonçaient la volonté du ministre de l’Intérieur d’exiger que les médias et les réseaux sociaux floutent les visages des policiers en opération. Cette volonté s’est transformée en une proposition de loi au titre glaçant : « Sécurité globale. » Passée en commission des lois la semaine dernière, elle sera débattue à l’Assemblée le 17 novembre. En trois articles (21, 22, 24), le gouvernement se propose de déréguler l’utilisation des caméras mobiles portées par les forces de l’ordre, de permettre la reconnaissance faciale en temps réel, d’étendre la surveillance par drone, d’interdire au public de diffuser l’image de policiers. Cette loi, dont le rédacteur principal est l’ancien chef du Raid, préfigure une société gouvernée par la peur où les citoyen·ne·s, privé·e·s du droit de porter un regard sur les agissements de la police, verraient en retour leurs corps exposés sans limite à la surveillance des forces de l’ordre. Elle dessine un paysage asymétrique, sorte de panoptique géant, où nos libertés fondamentales sont gravement menacées, en premier lieu le droit à la vie privée et la liberté d’information.

      Après avoir progressivement entravé les manifestations de rue et grièvement blessé ou mutilé des dizaines de personnes, il s’agit désormais de systématiser l’identification, la surveillance, le fichage des individus souhaitant exercer ce droit fondamental. Après avoir nié et invariablement refusé de sanctionner les violences policières, il s’agit d’en effacer toute preuve, dans la mesure où seules les images tournées par des filmeurs anonymes permettent aujourd’hui d’en témoigner. Pour nombre de cinéastes, cette loi constituerait une censure pure et simple. Un film tel que le récent Un pays qui se tient sage de David Dufresne ne pourrait voir le jour, la majorité des sources d’images qu’il utilise tombant sous le coup de la loi. A l’hégémonie grandissante des images du pouvoir, les cinéastes, les photographes, les journalistes, ainsi que tou·te·s les habitant·e·s de ce pays doivent être en mesure d’opposer leurs propres images. Rappelons que l’Etat de droit tire avant tout sa légitimité du droit de porter un regard sur ce que fait l’Etat.

      Mesdames et messieurs les député·e·s, nous ne voulons pas d’un monde de surveillance généralisée, régi par un œil tout puissant sur lequel aucun regard ne pourrait se porter. Ne votez pas pour une loi qui rendrait les contre-pouvoirs aveugles, ils sont les garants de notre démocratie.

      Tribune initiée par la Société des réalisateurs de films (SRF), soutenue par 40 organisations et collectifs et signée par plus de 800 cinéastes et professionnel·le·s du cinéma et de l’image.

  • Personne ne s’explique la hausse brutale des contaminations en Savoie - Libération
    https://www.liberation.fr/france/2020/11/11/covid-personne-ne-s-explique-la-hausse-brutale-des-contaminations-en-savo

    Avec 1 167 cas positifs pour 100 000 habitants, ce département est désormais le plus touché, avec une incidence du coronavirus 2,5 fois plus élevée que la moyenne nationale, dans une région particulièrement touchée par la deuxième vague.

  • Confinement : veillée d’armes avant un nouveau tour de vis ? - Libération
    https://www.liberation.fr/france/2020/11/11/confinement-veillee-d-armes-avant-un-nouveau-tour-de-vis_1805244

    Officiellement, tout est donc sur la table comme l’a exposé, mardi, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal à l’issue du Conseil des ministres : « Soit le maintien des règles telles que nous les connaissons aujourd’hui, soit un éventuel durcissement sur certains points […], soit un éventuel assouplissement. »

    Deux jours avant que le chef du gouvernement nous annonce les nouvelles décisions, le porte-parole du gouvernement communique sur le fait que ce sera soit le maintien, soit un durcissement, soit un assouplissement ? Deux jours avant, ils ne savent pas ?

    Nan mais c’est quoi ces branques ? Castex attend que Macron demande à Brigitte si elle a eu Raoult récemment au téléphone ?

    Tu m’étonnes que les gens ne leur fassent pas confiance, avec cette impression permanente que soit ils gèrent la Covid au pifomètre, soit ils se foutent ouvertement de notre gueule.

  • «Le Covid est un animal sournois» - Clarisse Audigier-Valette, Pneumo-oncologue, chez Christian Lehmann, Libération
    https://www.liberation.fr/france/2020/11/09/le-covid-est-un-animal-sournois_1805051

    « Le Covid est d’autant plus sournois que la baisse de la saturation sanguine en oxygène ne sera quasiment pas ressentie par le patient qui présente ce phénomène particulier d’« hypoxie heureuse » caractéristique (la transmission neurologique de la sensation d’essoufflement ne se produisant pas, le patient suffoque mais ne s’en rend pas compte).

    « Ces patients avec signes respiratoires présentent un risque d’aggravation survenant classiquement sept à dix jours après le début des symptômes et pour eux la surveillance doit être hospitalière, la désaturation brutale se produit très souvent en moins de dix minutes faisant basculer l’oxygéno-requérance de 1-2 litres/minute à 6-9 litres/minute, ce qui conduit à poser l’indication d’oxygénothérapie à haut débit de 50 à 100 l/min avec transfert en unité de soins intensifs. Les propositions récentes par nos autorités sanitaires d’initier l’oxygénothérapie à domicile à la phase précoce relèvent de l’inconscience médicale face à cette hypoxie heureuse/silencieuse dont le patient ne ressent pas l’aggravation. Quel Samu de France peut intervenir en moins de dix minutes chez un patient en détresse respiratoire, quelle stratégie d’urgence à mettre en place chez ces patients livrés à eux-mêmes et à leur famille ? L’oxygène reste la pierre angulaire de la gestion du Covid mais la phase précoce peut entraîner un arrêt cardiaque hypoxique.

    #covid-19 #oxygénothérapie #HAD

  • Réforme de l’assurance chômage : « Le gouvernement fait des économies sur les précaires »
    https://www.liberation.fr/france/2020/11/06/reforme-de-l-assurance-chomage-le-gouvernement-fait-des-economies-sur-les

    L’Unédic vient de rendre un rapport calculant l’impact de la réforme de l’assurance chômage en l’état à partir du 1er avril 2021. Ces prévisions, encore plus inquiétantes que les précédentes, sont une carte de plus dans le jeu des syndicats, prêts à en découdre lors des prochaines concertations à Bercy.

    Après avoir obtenu un report de trois mois pour la réforme de l’assurance chômage, les syndicats se réuniront une fois de plus à la table des négociations du ministère du Travail, le 12 novembre. Son entrée en vigueur, initialement prévue le 1er janvier 2021, laissera aux partenaires sociaux quelques semaines supplémentaires pour réclamer son abandon, au vu de l’inquiétant scénario rendu par l’Unedic, en charge de l’assurance chômage.

    Si les premières simulations étaient alarmantes, ce rapport commandé par les cinq principaux syndicats fait froid dans le dos. Le document atteste que plus d’1,2 million de personnes seraient perdantes parmi les 2,56 millions de personnes qui ouvriraient un droit entre le 1er avril 2021 et mars 2022. Parmi elles, 400 000 verraient leur indemnisation moyenne chuter de 890 à 535 euros par mois, et pour 72 000 chômeurs, elle passerait même à 389 euros. Les premiers pénalisés ? Les personnes alternant contrats courts et périodes de chômage.(...)

    Malgré le contexte de la crise sanitaire, le gouvernement « n’entend pas renoncer à la réforme majeure de l’assurance chômage » , affirmait Jean T2A Castex à l’issue de la dernière consultation avec les partenaires sociaux. « Le gouvernement s’entête à vouloir garder l’esprit de la réforme alors que l’Unedic indiquait fin octobre, 420 000 demandeurs d’emploi de plus qu’en 2019 à la fin de l’année à cause de la destruction de 670 000 emplois salariés due au confinement » , s’insurge Michel Beaugas, secrétaire confédéral chargé de l’emploi Forces ouvrières.

    #chômage #emploi #revenu #allocations_chômage

  • « Vivre à la rue tue » : 659 morts recensés par un collectif pour l’année #2019

    Depuis 2002, le Collectif des morts de la rue tente de recenser le nombre de personnes sans domicile décédées, de connaître les causes de leur mort, leur âge... Des données très compliquées à rassembler.

    https://www.liberation.fr/france/2020/11/02/vivre-a-la-rue-tue-659-morts-recenses-par-un-collectif-pour-l-annee-2019_
    #décès #morts #SDF #sans-abri #sans-abrisme #statistiques #chiffres #France

  • Extrême droite : le patron des Zouaves Paris part combattre au Haut-Karabakh - Libération
    https://www.liberation.fr/france/2020/10/30/extreme-droite-le-patron-des-zouaves-paris-part-combattre-au-haut-karabak

    Des paroles il est visiblement passé aux actes. Le leader du groupuscule d’extrême droite Zouaves Paris (ZVP), Marc de Cacqueray-Valmenier, a fait savoir sur Instagram qu’il est parti se battre aux côtés des Arméniens au Haut-Karabagh en conflit avec l’Azerbaïdjan. Sur leurs canaux de communications habituels, les Zouaves Paris avaient annoncé à plusieurs reprises leur soutien à la province séparatiste, l’inscrivant dans un conflit plus global contre les musulmans. Ils estiment en effet que « le futur de notre continent et de notre civilisation est en jeu au Haut-Karabagh ».

    #extrême_droite #en_croisade

  • « Tout ce que nous avons appris du sida est effacé, on gère cette épidémie comme si c’était la première » - Christian Lehmann donne la parole à un militant d’Act up
    https://www.liberation.fr/france/2020/10/30/il-est-temps-d-envoyer-chier-ces-mandarins-egocentriques_1803948

    J’ai rencontré Fred Bladou dans une autre vie, en 2007, quand je militais au côté d’Act Up contre les franchises qu’imposait Nicolas Sarkozy pour défaire la prise en charge solidaire des soins. Jeune médecin en loden, bon client pour les journaux télévisés, j’ai été adopté par cette troupe courageuse. Ces « usual suspects » n’hésitaient pas à zapper les meetings de Sarkozy, à asperger de faux sang l’entrée du ministère de la Santé. Ils poursuivaient dans les allées de Solidays Roselyne Bachelot, alors ministre de la Santé, qui réformait l’hôpital public et mettait en place la tarification à l’activité et des économies drastiques qui ont fait le lit de la situation actuelle. Nous avons perdu. Les malades ont payé dans leur chair. Parce qu’il n’y avait déjà pas d’argent magique, et que piquer de la petite monnaie dans la poche des cancéreux et des séropos était mieux vu que de taxer les stock-options, comme l’avait alors proposé Philippe Seguin, qui n’était pourtant pas exactement le sous-commandant Marcos. Toujours militant, toujours en colère, toujours activiste du sida, Fred Bladou aborde le Covid avec en mémoire la lutte contre cette autre pandémie :

    [...]

    « Françoise Barré-Sinoussi et Jean-François Delfraissy ont demandé à de nombreuses reprises la création d’une instance citoyenne composée d’acteurs de la santé, de citoyens, d’associatifs. Ces demandes sont restées vaines. La santé de toute la population ne dépend que de la décision politique sur fond de luttes fratricides entre médecins médiatiques et experts choisis prompts à soutenir un Etat défaillant. L’expérience du sida nous a enseigné que les politiques publiques, la prévention et la prise en charge des personnes vivant avec le VIH se construisent entre médecins, décideurs politiques et représentants associatifs des groupes les plus exposés. Pour qu’une stratégie de santé fonctionne, il faut susciter l’adhésion du plus grand nombre. On construit avec les gens et pas pour les gens.

    « Les erreurs du gouvernement ont lâché sur la Toile des milliers de conspirationnistes. Il faut changer de braquet et coconstruire avec le peuple, une stratégie adaptée. Il est temps d’envoyer chier ces quelques mandarins égocentriques qui monopolisent le débat public et les chaînes d’infos pour vendre un traitement inefficace. Il est temps de prendre la place des associations plus préoccupées par leur train de vie et les cocktails ministériels que par notre survie, notre bien-être et notre qualité de vie.

    #act-up #sos_addictions #serge_bladou #réduction_des_risques #auto_support #acteurs_de_santé #covid-19 #prévention #mensonges_d'État #madarins #conspirationnistes #usagers_du_système_de_santé #malades

  • Cassandre : si on fait un confinement « light », avec les gens qui continuent d’aller travailler en transports en commun, qui vont manger ensemble à midi, et les gamins à l’école, au collège et à la cantine, c’est pas compliqué : on va rester confinés jusqu’à ce qu’on ait développé le bon vaccin et qu’on ait assez de doses pour tout le monde.

    Ça ne baissera pas, et au mieux on restera sur un plateau extrêmement haut, avec des services hospitaliers à la limite de la saturation en permanence, des niveaux de mortalité toujours élevés, des Covid longs de plus en plus pénalisants, et un massacre en continu chez les vieux… Au mieux.

  • #Covid à l’#école, l’omerta et le déni - Libération
    https://www.liberation.fr/france/2020/10/26/covid-a-l-ecole-l-omerta-et-le-deni_1803450

    L’omerta sur les contaminations

    « Quasiment aucune information ne circule, ni vers les profs, ni vers les familles. »

    « Quand il s’agit d’un cas de gale, oui on doit le dire, mais là… »

    « Une élève de 5e attend les résultats de son test (après un cas positif dans la famille). Cours d’EPS, sans masque. Ses parents appellent pour prévenir que le test est positif. Elle est tout de suite sortie de cours mais comme elle était asymptomatique, personne n’a été considéré cas contact dans la classe. »

    « On a su après coup que certains élèves cas contacts sont venus quand même sans le dire parce qu’ils ne voulaient pas manquer sept jours de cours. Les élèves sont très perplexes de ne pas être déclarés cas contact quand un élève de leur classe est positif alors qu’ils font sport sans masque. J’ai eu des cas positifs dans mes nombreuses classes et n’ai jamais été déclarée contact, les élèves non plus vu qu’ils ont tous des masques. Masques non fournis par la région ou le ministère, donc la plupart des élèves gardent le même masque plusieurs jours, voire une semaine, voire plus. »

    « Le virus se propage dans d’autres classes et la vie scolaire avertit de moins en moins le personnel à chaque cas (seulement les profs intervenants dans une classe concernée et avec plusieurs jours de retard). Ce sont les élèves restant en classe qui avertissent leurs profs et tiennent les comptes. La communication est beaucoup plus efficace sur leurs réseaux qu’entre personnels d’éducation. »

    « Un cas de Covid chez un élève, qui n’a impliqué le confinement que de la moitié de la classe (il ne s’agissait que des noms que l’élève positif a donnés), alors qu’ils font sport ensemble et mangent ensemble sans masque. La direction n’a parlé du cas de l’élève, uniquement contrainte et forcée, car la colère grondait : on étouffe les cas, il faut faire illusion auprès du rectorat que la direction gère la crise et n’a aucun cas. Les élèves n’ont pas été prévenus, ni les familles, ce qui pourtant aurait été incitatif à mettre les masques correctement. »

    • En passant, il avait fait un article sur ces superbes visières...

      Ceci n’est pas un masque - Libération
      https://www.liberation.fr/france/2020/10/03/ceci-n-est-pas-un-masque_1801309
      https://medias.liberation.fr/photo/1339109-visieres.jpg?modified_at=1601731993&picto=fb&ratio

      J’interpelle Olivier Véran sur Twitter en lui demandant de clarifier rapidement la situation. Des journalistes s’en emparent, suivis par l’AFP, et le lendemain la Direction générale de la santé confirme enfin l’inefficacité de cette mangeoire à oiseaux non homologuée, pendant la pandémie :

      « Ces objets ne peuvent en aucun cas être considérés comme un équipement de protection, ni pour la personne porteuse, ni pour les personnes qu’elles rencontrent. Effectivement il ne s’agit pas de visières, qui elles couvrent également les yeux et sont donc un complément possible (et non un substitut) au masque comme le rappelle le HCSP dans son avis du 13 mai 2020… Le porteur de ces objets contrevient donc au port du masque dans les lieux où il est légalement obligatoire. Il s’expose donc à une amende. »

    • Covid à l’école, l’omerta et le déni
      Par Christian Lehmann, médecin et écrivain — 26 octobre 2020

      Depuis le début de la pandémie j’ai gardé contact avec des soignants sur l’ensemble du territoire, jusqu’en Guyane, et dans des services et des lieux auxquels je n’ai pas accès au quotidien (réanimation, urgences, Ehpad, soins palliatifs). J’ai recueilli des témoignages édifiants, j’en ai publié certains. Je croyais avoir un peu fait le tour des émotions. L’incrédulité, le désarroi, la colère. Et puis la semaine dernière, j’ai demandé aux personnels de l’Education nationale de témoigner. Et je vais vous dire un truc. Je n’étais pas prêt.

      Après avoir milité pour le port du masque en lieu clos à cause des risques d’aérosolisation, en s’inspirant des exemples de pays ayant mieux préparé leur rentrée, un collectif de professionnels de santé dont je fais partie, ducotedelascience.org, avait alerté dans une tribune le 29 août sur les failles prévisibles du protocole sanitaire mis en place pour l’école.

      « Le protocole prévu pour la rentrée du 1er septembre ne protège ni les personnels ni les élèves et leurs familles, et est insuffisant pour ralentir l’augmentation actuelle du nombre de nouveaux cas de Covid-19, écrivions-nous alors. Nous proposons de recommander le port du masque en lieu clos pour tous les élèves de plus de 6 ans et de leur distribuer des masques […], d’appliquer les mesures d’aération préconisées pour les lieux clos professionnels en s’aidant notamment d’appareils de mesure de qualité de l’air […], de mettre en place au plus vite des procédures dédiées dans les zones de forte circulation virale (allègement des classes en alternant présentiel et enseignement à distance, limitation des contacts entre les classes, échelonnement des récréations et de la cantine) […], de préciser la conduite à tenir lorsqu’un enfant ou un adulte est testé positif ou a été en contact avec un cas positif, et d’instaurer un système réactif et transparent de remontées des données concernant le nombre de sujets positifs, les écoles et classes fermées, le nombre d’enfants testés, les délais des tests et des résultats. »

      A ces recommandations, Jean-Michel Blanquer opposait une mâle assurance : « Nous sommes préparés à tout. » Le 1er septembre, la rentrée a lieu avec un protocole sanitaire allégé : alors que les effectifs en France sont les plus bondés d’Europe, il est mis fin à la distanciation physique en classe si elle ne permet pas de faire rentrer tous les élèves. Le 10 septembre, les agences régionales de santé indiquent que les quelques masques en tissu distribués aux enseignants et aux élèves pauvres sont insuffisamment protecteurs et ne dispensent pas d’être déclaré cas contact (à la différence des masques chirurgicaux). Le 21 septembre, alors que les classes ferment par dizaines, Blanquer allège le protocole. Il faut maintenant trois cas positifs la même semaine dans des fratries différentes pour fermer une classe. Au vu de la difficulté à obtenir les résultats de PCR à cette époque, cela contribue à casser le thermomètre, à afficher une normalité de façade en laissant flamber l’épidémie. Le 25 septembre, sans surprise, le milieu scolaire et universitaire devient la première source de clusters en France.

      Le 29 septembre, dans un entretien au Figaro, Jean-Michel Blanquer assure : « L’école n’est pas le nid du virus. On ne doit pas engourdir la société. » Conforté par la Société française de pédiatrie, qui s’arc-boute depuis le début sur la doctrine selon laquelle « le Covid-19 concerne vraiment très peu les enfants » et s’indigne que parmi les auteurs de notre tribune demandant le port du masque dès 6 ans, ne figurerait « aucun médecin ou soignant d’enfant » (seulement neuf sur vingt et un…), le ministre ment : « Quelques médecins ne voulaient pas que l’école reprenne, moi j’écoute le Haut Conseil de santé publique et les sociétés de pédiatrie. » C’est un choix, alors que s’accumulent les études internationales démontrant la place des enfants dans les chaînes de contamination…

      Un mois plus tard, la France est en échec, le Covid-19 est en passe de déborder à nouveau les hôpitaux. Le gouvernement instaure un couvre-feu, prône timidement le télétravail, commence péniblement à parler d’aération des locaux… et prépare la rentrée scolaire du 2 novembre, comme si de rien n’était. Alors j’ai demandé aux personnels de témoigner, anonymement bien sûr, puisque, obligation de neutralité, devoir de réserve, et école de la confiance obligent, les personnels de l’Education nationale se sentent contraints à l’omerta.

      L’omerta sur les contaminations

      « Quasiment aucune information ne circule, ni vers les profs, ni vers les familles. »

      « Quand il s’agit d’un cas de gale, oui on doit le dire, mais là… »

      « Une élève de 5e attend les résultats de son test (après un cas positif dans la famille). Cours d’EPS, sans masque. Ses parents appellent pour prévenir que le test est positif. Elle est tout de suite sortie de cours mais comme elle était asymptomatique, personne n’a été considéré cas contact dans la classe. »

      « On a su après coup que certains élèves cas contacts sont venus quand même sans le dire parce qu’ils ne voulaient pas manquer sept jours de cours. Les élèves sont très perplexes de ne pas être déclarés cas contact quand un élève de leur classe est positif alors qu’ils font sport sans masque. J’ai eu des cas positifs dans mes nombreuses classes et n’ai jamais été déclarée contact, les élèves non plus vu qu’ils ont tous des masques. Masques non fournis par la région ou le ministère, donc la plupart des élèves gardent le même masque plusieurs jours, voire une semaine, voire plus. »

      « Le virus se propage dans d’autres classes et la vie scolaire avertit de moins en moins le personnel à chaque cas (seulement les profs intervenants dans une classe concernée et avec plusieurs jours de retard). Ce sont les élèves restant en classe qui avertissent leurs profs et tiennent les comptes. La communication est beaucoup plus efficace sur leurs réseaux qu’entre personnels d’éducation. »

      « Un cas de Covid chez un élève, qui n’a impliqué le confinement que de la moitié de la classe (il ne s’agissait que des noms que l’élève positif a donnés), alors qu’ils font sport ensemble et mangent ensemble sans masque. La direction n’a parlé du cas de l’élève, uniquement contrainte et forcée, car la colère grondait : on étouffe les cas, il faut faire illusion auprès du rectorat que la direction gère la crise et n’a aucun cas. Les élèves n’ont pas été prévenus, ni les familles, ce qui pourtant aurait été incitatif à mettre les masques correctement. »

      « En début d’année scolaire, l’équipe enseignante a été mise en quarantaine suite à la présence d’un cas positif parmi les enseignants. Ils ont ensuite été rappelés au travail car il n’y avait plus assez de remplaçants, on leur a simplement demandé s’ils avaient des symptômes. Ils ont repris la classe sans avoir les résultats des prélèvements. Sur les quatorze enseignants, huit ont ensuite eu des résultats positifs et tous avaient repris la classe. »

      Des mesures barrière fantômes

      « La prévention, c’est le néant : plus de gel depuis mi-septembre (sauf à l’entrée où les assistants d’éducation mettent trois gouttes sur les mains des entrants), salles nettoyées une fois par quinzaine, fenêtres vissées, aucune distanciation dans les classes (36 élèves dans 43 m2). »

      « Prof de SVT, je suis obligé d’acheter moi-même des masques FFP2 pour travailler avec les élèves en TP. En effet nous sommes obligés d’être en contact étroit avec les élèves sur leur poste de travail : démonstration, manipulation du microscope, etc. Comme beaucoup d’élèves ont des masques de qualité douteuse et qu’ils portent souvent très mal malgré les nombreux rappels et que j’ai plus de 50 ans, j’ai choisi de m’offrir la sécurité que mon employeur refuse de me donner. »

      « Je suis prof en lycée professionnel. En juin, film plastique sur les claviers, sens de circulation dans les couloirs, virucide dans les classes, et gel hydro, les élèves restent dans la même salle. Depuis septembre, film plastique et virucides supprimés, classes complètes à 26, qui changent de salle toutes les heures, emplois du temps des profs mal faits qui imposent qu’eux aussi changent de salle toutes les heures. Résultat : 500 personnes se croisent dans les couloirs. »

      « Dans mon établissement, depuis mi-septembre c’est comme si le Covid avait disparu. Plus de désinfection car on interdit l’utilisation de l’eau de Javel aux personnels d’entretien. A part le gel en entrant dans la classe (que l’on a à notre disposition), aucune désinfection des salles et des tables. Certaines salles n’ont pas la possibilité d’avoir des ouvertures de fenêtre car bloquées pour des raisons de sécurité. Les profs portent leurs propres masques car aucun n’est fourni par le lycée. »

      « En tant que parents, nous nous battons pour la mise en place de purificateurs d’airs (on a même réussi à négocier des prix à la place de la mairie) pour ventiler au mieux les salles de classe… Mais on se heurte à une mairie qui semble avancer avec des œillères. »

      « Aucune sanction pour les élèves qui ne cessent d’enlever le masque en cours toutes les dix secondes. Les profs sont livrés à eux-mêmes, et n’ont que l’aération possible des salles, quand il y a des fenêtres, car certaines salles n’en ont pas. Pourtant, elles sont bondées toute la semaine, sous prétexte qu’il y a une aération, puisque VMC. Quand d’autres salles avec fenêtres sont libres certains jours. »

      Sans oublier le facteur humain, et le déni

      « Les collègues n’ont pas été formés aux gestes barrières, n’avaient pas le temps ou l’envie de se renseigner et s’étaient souvent résignés à l’idée de la contamination générale "parce qu’il faut vivre avec le virus". J’essaye d’être constructif et de trouver des compromis sans passer pour un illuminé… Je suis dépité que nous ne fassions pas tout notre possible pour travailler en demi-groupes et alterner présentiel et distanciel afin de préserver la santé de chacun et aussi le personnel de santé, mais je sens être arrivé au bout de ce que je peux faire seul. »

      « Au retour d’une des Atsem [agent territorial spécialisé des écoles maternelles] malade, l’institutrice avec laquelle elle travaille lui reproche de l’avoir "dénoncée" à l’ARS. »

      « Le protocole est d’évacuer les élèves au premier signe clinique de Covid. Et comment dire… Tout est un signe clinique de Covid. On passe notre temps à appeler les parents, qui nous pourrissent joyeusement (parce que c’est vrai que quitter son taf dès que son môme tousse, c’est compliqué pour beaucoup) et à essayer de placer les élèves à l’isolement en attendant qu’ils partent. »

      « Lorsqu’on renvoie un élève qui joue au petit malin en ôtant son masque, on nous le renvoie… »

      « Les réunions de travail ont lieu le midi, en mangeant… sans masque et sans aération. J’envisage de faire jouer mon droit de retrait. Pour l’instant, j’y ai assisté masquée en ayant mangé avant. »

      « Mon principal m’a demandé de "ne pas angoisser les collègues" bien que je montre un "souci louable de les éclairer avec de vrais arguments". "Gardez vos angoisses, ne sombrons pas dans la psychose." Et surtout pas de vague. »

      « Je pourrais aussi parler des collègues qui viennent bosser alors qu’ils sont manifestement malades (personne n’a envie de perdre son jour de carence…). »

      « Quand on demande aux enfants pourquoi ils viennent alors qu’ils sont malades, la réponse est : "Mes parents m’obligent." J’ai même eu "Ma mère veut que je vienne et ne veut pas me faire tester." »
      Pas de protocole cohérent, juste la bonne volonté et la résilience individuelles

      « Avec des petits CP, j’ai retrouvé toutes mes habitudes de travail. Il n’y a pas de respect de la distanciation car… comment faire des lacets ? Ouvrir un bouton de pantalon trop difficile à défaire ? Aider à gommer sans faire de rature ? Accompagner un geste d’écriture ? Bref, c’est impossible et inhumain pour moi d’envisager de ne plus faire ces gestes du quotidien qui font partie de ma relation à mes élèves. Je prends donc des risques, consciemment, en espérant ne pas être contaminée à nouveau… »

      « L’immense majorité de mes collègues et moi-même pensons que les cours en présentiel, malgré toutes les contraintes, sont infiniment plus productifs que les cours à distance, qui nous ont laissés, ainsi qu’aux étudiants, un souvenir atroce de mars à juin (j’ai dû m’arrêter trois jours, épuisé, première fois de ma carrière de seize ans et avec la culpabilité supplémentaire de savoir que ce que les soignants vivaient à l’hôpital était infiniment plus difficile que notre situation, mais bon, ce que l’esprit sait, le corps ne voulait vraisemblablement pas l’entendre). Nous nous plierions bien entendu à un reconfinement s’il était décidé, mais les mensonges du ministre, le "prof-bashing" à outrance nous ont rendu amers et nous ne sommes plus prêts à compenser avec la même énergie les "Nous sommes prêts" mensongers de Blanquer pour ensuite nous faire insulter par des connards qui ne feraient notre boulot pour rien au monde. Enfin, vous le savez très bien vous-même, c’est exactement la même chose, en pire, pour vous les soignants. »

      « Les adaptations que je fais sont les suivantes : je porte mon masque correctement et en continu. Je mange le plus possible à la maison pour éviter les moments où nous ne portons pas les masques. Jusqu’à présent, j’ai laissé deux fenêtres opposées ouvertes pour assurer l’aération de la classe. J’adapterai en fonction de la température extérieure, mais j’ai d’ores et déjà prévenu les familles et conseillé aux enfants de laisser un gilet en classe afin que nous puissions aérer au mieux. »

      « Après sept semaines de cours, je continue de lutter afin que tous les enseignants consentent à aérer, ne serait-ce qu’une minute, leur salle de classe entre deux cours. Beaucoup sont encore hermétiques au concept. D’autant que le ménage est purement factice dans cet établissement. Des années que dure le conflit avec l’entreprise de nettoyage, que la crasse s’incruste, un coup de balai en guise de désinfection des locaux, seuls les toilettes, les bureaux, le réfectoire semblent propres. Nous sommes entassés avec une moyenne de 32 élèves et 2 adultes dans des salles parfois minuscules et pour certaines pleines à craquer, totalement inadaptées à des classes entières. Je parle ici d’un établissement scolaire privé sous contrat public. Lutter aussi pour obtenir des masques papier pour les collègues sachant que certains ont des difficultés financières, que les profs ont été servis mais qu’eux n’osent pas demander. De toute façon, c’était juste pour la rentrée, trop onéreux sur le long terme. La précarité peut faire trembler, je le comprends parfaitement. »

      « Nombreux sont les élèves qui viennent en classe avec des symptômes. Donc je n’ai pas particulièrement peur aujourd’hui mais je réclame ce qui me semble un minimum. La transparence des cas positifs, des masques non toxiques gratuits pour tout le personnel et obligatoires pour tous les élèves – ils côtoient des adultes, certains sont vulnérables (autre scandale) –, de l’air dans des classes propres… Bref un protocole sanitaire décent. Ils ont eu des mois pour y songer et pour mettre en place les adaptations nécessaires lorsque le virus circule très activement. Pour prévenir, puisque guérir reste très aléatoire. Parce que rien ne va dans les établissements scolaires, tout se dégrade. Parce que rien n’a été mis en place pour tenter de protéger au mieux les élèves comme les adultes. Pas de quoi susciter des vocations. Et c’est tellement dommage. Parce que j’adore ces gosses, ceux qui sont en marge et avec lesquels se construit une forme de pacte. Parce que ce métier utile et humble, peut être sous ses meilleurs aspects, très enrichissant. Parce que je côtoie aussi des profs et des instits extras. Le chouette quotidien d’une accompagnante d’élève en situation de handicap, un vrai sport de combat et tout ça pour un salaire dérisoire. »

      Lors d’un hommage à Samuel Paty devant l’Assemblée nationale, Jean Castex, Premier ministre et monsieur déconfinement, a eu ce mot : « L’Education nationale, notre majorité l’a particulièrement choyée, et nous allons continuer de le faire. » Et bien apparemment, c’est dur d’être choyé par des incompétents.

      Christian Lehmann médecin et écrivain

      https://seenthis.net/messages/883040

  • Avec Jean Le-bon-sens-près-de-chez-vous Castex, après « pour ne pas surcharger l’hôpital, la meilleure méthode c’est que les gens ne se fassent pas soigner », nous avons droit à « pour lutter contre le chômage, il suffit que les gens travaillent » :
    https://www.liberation.fr/france/2020/10/25/contre-la-pauvrete-jean-castex-mise-sur-l-insertion-par-l-activite_180340

    Qué s’appelerio « la philosophie du gouvernement ».

    • Le gouvernement va aussi doubler les aides à la construction de logements très sociaux (des HLM aux loyers minorés).

      et très, très, très social pour Castex c’est quoi ? la taule ?

      Car nous en sommes là : il arrive qu’après un accouchement, des mères et leurs bébés se trouvent sans solution de logement.

  • (10) La réanimation pour les nuls - Libération
    https://www.liberation.fr/france/2020/10/21/la-reanimation-pour-les-nuls_1802936?xtor=rss-450

    « Les crises passent les humains au révélateur. Et il y a eu du beau et du bon dans tout ce marasme. L’hôpital public (et le système de santé en général), dont la souffrance n’aura échappé à personne, a su rassembler ses forces, se lever, faire front. Nous avons vu des soignants de tous horizons épuisés, marqués physiquement par ces masques qui serrent trop, et la fatigue. Sans jamais reculer, soupirer, souffler, renoncer. Les biologistes. Les radiologues. Les ouvriers qui ont monté des cloisons à la vitesse de l’éclair. Les informaticiens, qui ont permis aux malades éveillés de communiquer par tablette avec leurs proches. Les administratifs. Tout le monde a apporté sa pierre et magnifiquement œuvré. Il y a eu de vrais héros. Mais pour moi tout cela n’atténuera pas le désastre ambiant. La médecine et la recherche éthiques et propres sont mortes et enterrées à l’occasion de cette crise sans précédent. Sur l’autel de la mégalomanie de quelques gourous à la tête de sectes mafieuses, dont la médiocrité scientifique n’a d’égal que la malhonnêteté intellectuelle. Les fleurs ont été déposées par les légions d’imbéciles des réseaux sociaux, parfois en service commandé. Les couronnes ont été déposées par des pantins de plateaux télé de chaînes d’info en continu irresponsables. Vol au-dessus d’un nid d’irresponsables. La malscience, comme toutes les fake news, tue. La malscience et les fake news précipitent les plus fragiles vers un abîme de détresse psychologique et la vague psychiatrique. La malscience et les fake news sont les mères de tous les relativismes, de tous les complotismes, de la perte de confiance dans les médecins et les chercheurs, au pire moment possible. Et cela, il faudra des années pour s’en remettre. Cette pandémie s’arrêtera un jour. Ça n’est ni la première ni la dernière. Elle s’éteindra dans un déluge de morts, médicaux et économiques, et comme d’habitude, les plus fragiles auront payé le plus lourd tribut. Il faudra alors sévèrement débriefer. Punir ceux qui doivent l’être, les escrocs, les renégats, quels que soient leur grade et leur fonction. Reconstruire pour que ces décès de patients, et ces sacrifices de soignants n’aient pas été inutiles. Je déteste le Covid. »

    • La réanimation, c’est ceux qui n’y foutent jamais les pieds qui en parlent le plus. Tous les paucineuronaux ayant passablement vomi sur les réanimateurs, accusés tour à tour de ne pas suivre le protocole du gourou phocéen, de refuser des malades ou de les euthanasier, j’ai choisi d’ouvrir ces colonnes à l’un d’entre eux pour qu’il confesse ses péchés. Damien Barraud a 45 ans, il est réanimateur à l’hôpital de Metz-Thionville, où il a survécu aux deux premières vagues : le Covid, et les Covidiots.

      « J’ai absolument détesté le Covid. Et je la déteste encore. Pas tant pour ce qu’elle a fait aux malades. C’est une maladie parfois grave, pas la pire. C’est un virus, ça ne réfléchit pas un virus, c’est con comme la Lune. Mais je la déteste pour ce qu’elle a fait aux humains, aux soignants. A la médecine, à la science qui me sont chères. Ce qui devait être une formidable opportunité pour nous tous a tourné en bérézina, ici et aux quatre coins du monde. Rien que d’y repenser me donne la nausée. Mais il faut raconter. C’est important. Parce que le virus rôde toujours et attaque de nouveau, et qu’à l’évidence, beaucoup n’ont pas mesuré ce qui s’était joué dans les réanimations de Paris et du Grand-Est. Cela leur permettra peut-être de ne pas sous-estimer, voire de nier sans la moindre décence les risques actuels.

      « Rembobiner la cassette d’une période extraordinaire. Que dois-je raconter ? La réanimation en période Covid ? Mais le public connaît déjà si mal la réanimation en général. MA réanimation en période Covid ? Comment elle s’est déroulée, comment je la conçois, celle que l’on m’a apprise et que j’essaie de transmettre à mon tour. Après tout c’est moi le héros en blouse blanche d’un jour de Libé, je fais ce que je veux, non ? Non. Comme pour John Carter face à M. et Mme Rubadoux dans Urgences, "It is not about me". Il s’agit des patients, des soignants, d’une médecine et d’une recherche nobles et éthiques.

      « Nous autres soignants des réanimations avons vécu l’histoire. J’imagine que lorsque l’on vit l’histoire en direct, on ne doit pas forcément s’en rendre compte, dans la chaleur du moment et concentré à sa tâche. Cela vient après, à l’heure de se poser et de se retourner. On a vécu un pan d’histoire. Je crois pouvoir dire sans me tromper qu’aucun soignant de réanimation ne veut revivre ce à quoi il a été confronté en mars-avril. Je suis un réanimateur "entre deux âges". En une vingtaine d’années de métier et 2 000 gardes au compteur, j’ai vu à peu près tout ce qui peut se voir dans une réanimation lourde dans un hôpital français. Je n’ai pas peur. Sûr de mes forces, lucide sur mes limites, je sais faire les gestes, j’ai vécu au moins une fois toutes les situations possibles. Eh bien je n’avais jamais vu cela. Jamais. Ce que nous avons vécu au printemps dans le Grand-Est et en Ile-de-France n’était pas une vague. C’était un tsunami de 30 mètres de haut qui emporte tout. On était prêts pourtant. On le croyait. On en avait, des plans. Pleins, à activer au fur et à mesure. Et puis on nous avait déjà fait le coup avec le Sras, le Mers, la grippe aviaire… Les images d’Italie ? C’est là qu’on s’est dit que ça commençait à sentir très mauvais. Les supporteurs de foot se moquent des Italiens. Les réanimateurs, eux, savent que la Lombardie est riche. Qu’elle est surtout riche des plus grands spécialistes du monde dans cette maladie qui n’en est pas une, le Syndrôme de détresse respiratoire aiguë (SDRA). A Milan, on sait oxygéner et ventiler. Alors si c’est la catastrophe là-bas, il devient assez clair qu’on va prendre la foudre. On se prépare. Sérieusement. Mais sans y croire réellement. Sans imaginer que chacun des plans mis au point sera dépassé en trois jours.

      « Début mars, on attend. Une attente mêlant du stress positif, de la concentration, l’envie d’en découdre, comme avant un match. Les Thermopyles. Et puis un matin, ça a commencé. Un malade contact du rassemblement de Mulhouse. Et puis un deuxième. Puis un troisième. Et là nous sommes tous pris dans la lessiveuse. On ne pense plus. On fait. Mécaniquement. Non-stop pendant deux mois. Je suis de l’ancienne école. Le matin en arrivant, je ne consulte jamais le dossier informatisé des malades dans mon bureau, comme le font les jeunes. J’ai besoin de voir les malades en vrai, de "sentir", de penser aux objectifs de soin de la journée, de donner les premières consignes. Une sorte de rituel, souvent joyeux, où l’on dit bonjour aux équipes, où l’on plaisante un peu, avant le deuxième rituel du staff : le café. Et bien pendant deux mois, cette ambiance matinale était remplacée par un silence pesant, une ambiance de tranchées, un bunker. C’est la guerre. Les couloirs des secteurs sont vides. Les soignants sont dans les chambres, pour les toilettes, dans un habit de cosmonaute, véritable étuve fastidieuse à enfiler, désagréable à porter, et, on le sait maintenant, un peu excessive. Il ne fallait pas tomber malade. Pour les patients. Pour soi. Pour ne pas contaminer sa famille, que certains, comme moi, ont tenue à distance. Pour pouvoir continuer à travailler. Pas un bruit. Les portes et les sas des chambres sont fermés. Les malades sont en majorité intubés, et souvent sur le ventre. Seuls les plus graves des plus graves sont là. Les moins graves, on ne les voit pas. Ils sont en secteur, sous des débits déraisonnables d’oxygène. En réa, ceux qui vont un peu mieux après quelques jours, qui redonnent le moral aux troupes, sont… transférés. Dans ces évacuations sanitaires que des malotrus galonnés ont qualifiées de spectacle. Pour faire de la place à de nouveaux arrivants. Ne restent que les plus graves des plus graves. Ceux qui vont avoir des séjours longs, et pour beaucoup, mourir.

      « Cette spécialité est trop riche pour être racontée en peu de mots. Que dire ? Peut-être parler de certains aspects que nombreux ont découverts à cette occasion ? Logiquement, on commence par admettre le patient en réanimation. On nous a accusés de "trier". C’est le mot en vigueur, de "triage" in English. On vient en réanimation quand on a un ou plusieurs organes qui défaillent, et qu’il faut suppléer, le temps que le traitement fasse son œuvre. Et on vient en réanimation pour survivre. Pas pour mourir. La finalité de la réanimation est de rendre au patient, sur le long terme, une vie que lui juge digne d’être vécue. Et la réanimation est un marathon olympique. C’est une rude épreuve, dont on sort déplumé, rincé, essoré, et il ne faut pas l’infliger de manière indue à quelqu’un qui n’a à l’évidence pas les réserves pour l’affronter. Il ne faut pas réanimer à tout prix et coûte que coûte. Il faut trier. Trier n’est pas décider qui va vivre ou mourir. C’est un acte d’humanité, et certainement une des choses les plus difficiles à maîtriser du métier. C’est vrai en temps de paix, tous les jours, avec pour seul horizon le malade. Ça l’est d’autant plus en temps de guerre, avec le spectre du manque de moyens. En médecine de catastrophe, on alloue les moyens aux patients qui ont le plus de chance de survivre. Cette justice distributive ne me perturbe pas non plus. Je ne suis pas responsable des moyens qui sont mis à ma disposition. Je suis juste responsable de leur utilisation optimale. Manquons-nous de lits de réanimation en France ? Je ne pense pas. Cela n’a pas de sens de juger de l’adéquation entre offre et besoin à l’occasion d’une catastrophe centenaire. Cela n’a pas de sens de se comparer au voisin allemand, dont la pléthore de lits ne sert à rien. Cela n’a pas de sens de dire que cet hypothétique manque de lits de réanimation est la cause de tous les maux, dont de prétendues privations de liberté. Il faut des lits activables en cas de besoin. Et surtout du personnel formé. Cela ne se fait pas en six mois, quoi qu’en pensent les populistes, les physiologistes du sport, ou les ânes, entités parfois difficiles à distinguer.

      « Il y a eu plusieurs pandémies en une. Le virus, bien sûr, mais également une épidémie bien française d’ultracrépidarianisme – l’art de parler de ce qu’on ne connaît pas. Après avoir subi des millions d’épidémiologistes et de virologues, nous avons vu apparaître des millions de réanimateurs. On nous a accusés d’avoir fait des conneries, d’avoir intubé très tôt, trop tôt. Que la mortalité observée était liée à nos traitements. Oui, c’est vrai en partie. Cent pour cent de ce que l’on fait dans une réanimation a des effets indésirables. Nous ne sommes pas homéopathes. L’intubation, la ventilation mécanique, la sédation, l’adrénaline, la dialyse rénale, tout cela a des effets indésirables. Ce n’est pas grave. Ce n’est pas grave si le rapport bénéfice-risque a été bien pesé. On accepte ces effets adverses. Et on les minimise, en appliquant cette technique dans les règles de l’art. Pour cela il faut du bon matériel, un peu, et de bons professionnels, beaucoup. Si vous appliquez ces techniques dans des endroits non prévus pour cela, avec du matériel non prévu pour cela, et des personnels non formés… malgré leur admirable dévouement, que croyez-vous qu’il va advenir ?

      « Oui ; il y a eu beaucoup de morts. Selon les endroits et la gravité des patients, 30 voire 40% de décès. 25 à 30%, c’est la mortalité du SDRA sévère. 40% ça doit être ce qu’il arrive quand on réanime des malades graves dans des conditions suboptimales. La mort ne me perturbe pas. Quand on est malade, c’est parfois grave, et quand c’est grave, parfois on meurt. C’est un processus naturel que l’on essaie de freiner, perturber, retarder. On ne peut guérir tout le monde. Nous sommes des soignants, pas le Petit Jésus ou tout autre druide barbichu. S’en rendre compte est vital. Pour ne pas disjoncter. On tente de guérir le malade. Et quand on ne peut pas, il faut savoir s’arrêter, jeter l’éponge de soins devenus futiles, ne pas sombrer dans l’acharnement, et accompagner la fin de vie. A good life, and a good death. Bien accompagner un patient et ses proches, assurer une bonne fin de vie est aussi important qu’aboutir à la guérison. La mort ne me perturbe pas, sauf si un des maillons de la chaîne de la guérison ou de la fin de vie a dysfonctionné. Là, la mort devient inacceptable et une souffrance. La mort par Covid n’est pas une belle mort. Pour plein de raisons. Certes, les malades n’ont pas souffert. On a accompagné la fin de vie comme il se doit, dignement, comme à l’accoutumée, dans le respect de la loi Leonetti-Claeys. Nous n’avons pas eu besoin de recourir au Rivotril pour cela, n’en déplaise à ceux qui nous ont accusé d’euthanasie. On n’y a pas eu recours car on n’a jamais manqué de rien, même si ce fut juste. Je ne sais toujours pas comment nos pharmaciens ont réussi cet exploit. Mais il y a ces corps, enfermés immédiatement dans des sacs étanches, sans toilette mortuaire, et envoyés sans délai au funérarium. Et le plus pesant probablement, il y a cette absence des familles, interdites de visite, au moins au début, et dont le deuil a dû être catastrophique. Les familles sont souvent le seul élément raccrochant à la vie. On les voit, on leur parle tous les jours. Là elles étaient absentes. Et cette rencontre singulière ne peut pas être remplacée par un coup de téléphone, auquel nous n’avions de toute façon pas le temps de répondre. Il n’y a plus beaucoup de vie dans une réanimation Covid. Cela a laissé des traces, des blessures psychologiques. Et aucun soignant de réanimation ne veut revivre cela.

      « Bien sûr, à côté de cela, les accusations de "faire du chiffre", par un vieux professeur n’ayant plus toutes ses facultés, sont dérisoires. Il paraîtrait que l’on code "Covid-19" de manière excessive et que l’on garde trop les patients. Pour gagner de l’argent, un magot caché probablement. Et pour participer à un mensonge d’état. Pour priver les gens de liberté. Non bien sûr. Sauf dans les cerveaux tordus, on code ce que l’on fait, quand on le fait. Ni plus ni moins. Parce que le patient est une fin en soi. Point.

      #réanimation #hôpital #crise_sanitaire