• Philippe Descola, Les animaux et l’histoire, par-delà nature et culture | Quentin Deluermoz et François Jarrige
    https://sniadecki.wordpress.com/2020/12/19/descola-animaux-histoire

    La question des animaux, d’une manière générale, occupe une place singulière et centrale dans cette œuvre très vaste et ambitieuse. Nous avons rencontré Philippe Descola pour évoquer avec lui la place des animaux dans la réflexion des sciences sociales, en particulier des historiens, puis leur rôle dans les diverses cosmologies, leur place au XIXe siècle, et plus largement dans sa propre réflexion. Source : Revue d’histoire du XIXe siècle via Et vous n’avez encore rien vu...

  • François Jarrige, Les origines répressives du capitalisme, 2019
    https://sniadecki.wordpress.com/2020/12/06/jarrige-repression

    l’ouvrage éclaire trois questions majeures de l’historiographie du XVIIIe siècle : l’histoire sociale et populaire de Londres, devenue une grande métropole commerciale qui atteint le million d’habitants à la fin du XVIIIe siècle ; l’histoire du crime et de la justice et de ses reconfigurations à l’heure de la répression des communs ; mais aussi celle de l’avènement du capitalisme industriel au moyen d’un arsenal normatif qui remodèle en profondeur les rapports sociaux au travail. Mêlant érudition historique et récits hauts en couleur, à la manière d’Edward Thompson, l’auteur nous plonge au cœur du quotidien des travailleurs londoniens. Il fait revivre ces pendus de Londres, dont il montre qu’ils n’étaient pas des criminels endurcis, mais des travailleurs ordinaires dont les us et coutumes apparaissaient comme une menace pour les élites au pouvoir et les nouvelles logiques d’accumulation.

    #Peter_Linebaugh #François_Jarrige #Histoire #Londres #Angleterre #capitalisme #justice

  • Fabian Scheidler, La fin de la mégamachine , 2020

    « La mégamachine se précipite dans le mur et ses pilotes jouent à l’aveuglette sur divers régulateurs, ce qui ne fait finalement qu’empirer la situation. Car les seuls outils qui pourraient maintenant nous être d’une aide quelconque n’ont jamais été prévus : un frein et une marche arrière . »
    La Fin de la mégamachine , p. 439.

    Contrairement à ce que le titre peut suggérer, il ne s’agit pas d’un livre de « collapsologie » (science de l’effondrement incarnée en France par Pablo Servigne, auteur du best-seller Comment tout peut s’effondrer , 2015). Les collapsologues agrègent des études dites scientifiques montrant que notre système économique et notre mode de vie ne sont pas soutenables (en raison de leurs impacts sur le tissu de la vie sur Terre, ainsi que de la finitude des ressources). En bref, ils font de la prospective catastrophique, sans toujours s’intéresser aux causes sociales et politiques structurelles de cette dynamique désastreuse qui est en cours depuis longtemps (au moins depuis la Seconde Guerre mondiale, qui constitue le début de la « grande accélération » dans les déprédations écologiques, voire depuis la Révolution industrielle ou l’apparition des premiers Empires). Scheidler fait exactement l’inverse : il revient sur l’histoire longue du système économique et politique dans lequel nous vivons (qu’on l’appelle société industrielle, capitalisme, modernité ou civilisation occidentale) pour mettre en lumière les causes sociopolitiques de l’effondrement en cours, causes qui sont ultimement liées à la quête de puissance, de pouvoir et de domination – qui se traduisent aujourd’hui par l’accumulation du capital, la croissance économique et l’innovation technologique – qui gouverne nos sociétés inégalitaires et hiérarchisées.

    Le livre de Scheidler constitue un antidote à la #bêtise_politique d’un Servigne !

    #Fabian_Scheidler, #mégamachine, #histoire_politique, #domination, #capitalisme, etc.

    https://sniadecki.wordpress.com/2020/11/11/scheidler-megamachine

    https://www.seuil.com/ouvrage/la-fin-de-la-megamachine-fabian-scheidler/9782021445602

    www.megamachine.fr

  • Le Monde en pièces | Racine de moins un
    http://www.zinzine.domainepublic.net/?ref=5279

    Présentation du second volume de l’ouvrage « Le Monde en pièces, pour une critique de la gestion » (éd. La Lenteur, 2019) par Nicolas Eyguesier (édition La Lenteur) et David Gaboriau (sociologue du travail). Par une collection de textes basés sur des cas précis d’informatisation (l’apiculture, la vocation d’informaticien, la commande vocale dans les entrepôts de la grande distribution), cet ouvrage montre que la numérisation détruit ce qui peut être encore sauvé dans les différents métiers, intensifie le travail, isole les individu et robotise les rapports sociaux. Durée : 1h11. Source : Radio Zinzine

    https://radiozinzine.org/emissions/RMU/2020/RMU20201006-n63-LeMondeEnPiece2.mp3

  • L’écosocialisme du XXIe siècle doit-il s’inspirer de Keynes ou d’Orwell ?, 2020, Aurélien Berlan et Jacques Luzi
    https://sniadecki.wordpress.com/2020/10/20/berlan-luzi-ecosocialisme

    Pour surmonter l’effondrement économique et le désastre écologique en cours, vaut-il mieux « la décence commune » et « l’autonomie matérielle » d’Orwell ou le « machiavélisme économique » et la « délivrance technologique » de Keynes ?

    […]

    Ce texte a été écrit au mois de juin, à destination du Monde diplomatique. Face à tous les partisans d’un retour à Keynes (c’est-à-dire à la relance de l’économie par l’État, promue aujourd’hui notamment par le biais d’un Green New Deal), nous y analysons les présupposés de la position de Keynes (et de la vieille gauche socialiste), qui ressortent nettement d’un texte que le célèbre économiste avait écrit pendant la crise de 1929, et qui dessinait de mirifiques perspectives économiques pour ses petits enfants (nous), faites d’abondance pour tous et de fin du travail grâce à la technologie.

    Aujourd’hui, nous en sommes encore très loin, mais surtout, le désastre écologique nous fait comprendre que ce rêve était calamiteux et qu’il faut donc changer d’imaginaire, à gauche. En comparant les idées de Keynes avec celles de son compatriote et contemporain G. Orwell, nous avons essayé de lancer quelques pistes dans cette direction, tout en rappelant qu’il y avait déjà, il y a un siècle, d’autres manières d’imaginer le dépassement du capitalisme.

    Sans surprise, Le Monde diplomatique ne nous a même pas adressé un message de refus pour notre texte, certes malicieux. Comme quoi, la vieille gauche a encore du chemin à faire pour se libérer des ornières industrialistes dans lesquelles elle s’enfonce (et le monde avec elle) depuis un siècle, et prendre en compte les réalités de la vie sur Terre…

    #écosocialisme #Aurélien_Berlan #Jacques_Luzi #Keynes #Orwell #keynésianisme #gauche #solutionnisme #critique_techno #autonomie

  • Radio : Silvain Laurens, Militer pour la science, 2019
    https://sniadecki.wordpress.com/2020/09/26/rmu-laurens-militer

    Certains savants considèrent que la science s’arrête aux portes des laboratoires. D’autres promeuvent auprès des citoyens l’« esprit scientifique », estimant que la science est le pilier d’un espace public reposant sur la vérité. C’est à ces derniers que s’intéresse le sociologue Sylvain Laurens avec son livre Militer pour la science, les mouvements rationalistes en France (1930-2005) (éd. de l’EHESS, 2019), qui cherche à rendre compte des conditions sociales et intellectuelles de l’engagement public des savants en faveur de la science et du rationalisme, notamment avec la création de l’Union rationaliste (UR) en 1930, de l’Association Française pour l’information scientifique (AFIS) en 1968 et de la zététique dans les années 1980.

    En France, l’investissement rationaliste est né dans le contexte historique des années 1930, où certains scientifiques devaient à la fois gagner leur autonomie administrative face aux pouvoirs politiques et militaires et contrer la structuration d’un monde intellectuel sur des bases religieuses. Après la Seconde Guerre mondiale le combat contre les pseudo-sciences est devenu un point de consensus entre militants rationalistes venus de la galaxie communiste et des ingénieurs attachés à la défense de la méthode expérimentale.

    Mais dans le contexte des Trente Glorieuses, où se pose de plus en plus la responsabilité des savants et chercheurs dans le développement des sociétés capitalistes et industrielles, ces mouvements tendent à amalgamer l’opposition aux projets industriels et aux nuisances écologiques à des « croyances irrationnelles », à un rejet ou une ignorance du public vis-à-vis de la « Science ». Ainsi, non seulement ils en viennent à soutenir les réalisations industrielles (nucléaire, pesticides, OGM, etc.) au prétexte que leur nocivité pour l’homme n’est pas « prouvée scientifiquement », mais surtout, ils tiennent un discours anti-écologiste

    https://archive.org/download/rmu-062-laurens-militer-pour-la-science/RMU_062_LaurensMiliterPourLaScience.mp3

    #Sylvain_Laurens #sociologie #zététique #rationalisme #Science #Histoire #Union_rationaliste #AFIS #interview #radio #radio_zinzine #audio

    • Latour dissout le phénomène global du développement techno-scientifique et industriel et de la montée en puissance accélérée du pouvoir d’agir humain en une addition de processus distincts d’innovations particulières, sans lien les unes avec les autres et sans inscription dans la durée. De la sorte, on finit par perdre de vue le caractère nouveau de l’accélération technique : selon l’anthropologie des techniques proposée par Latour, notre rapport aux techniques et au monde reste toujours le même à travers l’histoire ; son écologie politique se veut scientifique mais elle fait délibérément l’impasse sur plusieurs dimensions importantes de la réalité technique contemporaine.

      Tout d’abord, le principe d’interactivité réciproque entre les actants dérive d’une analyse des pratiques techniciennes qui est myope par principe puisque Latour s’intéresse aux techniques, et principalement aux objets techniques « en train de se faire ». C’est pour lui un principe méthodologique : « Règle n° 1 : Nous étudions la science en action et non la science faite » [Latour, 2005]. Il en va de même pour les techniques. Selon Latour, pour être sérieux il faut surtout s’intéresser aux objets techniques et aux actants qui gravitent autour de leur genèse. Mais ce principe conduit à négliger les effets de système résultant des relations qui s’établissent à la longue entre ces objets techniques. En ne s’intéressant qu’à des techniques particulières examinées séparément les unes des autres (approche soi-disant « empirique »), la méthode ANT empêche de poser le problème du rôle de la technique dans notre monde. Dans le monde de Latour, il n’y a pas de place pour la technique mais pour des techniques qu’il faut examiner au moment où elles sont en train de se faire. De fait, si on examine le processus de création d’un objet ou d’un processus technique, on voit bien qu’il intervient une multiplicité d’acteurs et que rien n’est complètement déterminé. Il y a bien des négociations, des jeux d’acteurs, de l’aléa qui peuvent présider à la genèse d’un objet, d’un procédé ou d’une règle technique ; on pourrait croire alors que tout est négociable et affaire de diplomatie. Mais il n’en va pas de même si l’on s’intéresse à l’évolution des techniques dans la durée ainsi qu’à leur insertion dans un monde des objets, des techniques non matérielles, des processus et des règles techniques avec lesquelles elles sont en interrelation. Ce monde se construit et s’organise en fonction de logiques particulières qui définissent des complémentarités possibles, des incompatibilités, des synergies, etc., et qui bien souvent contribuent à définir le contexte d’action et les règles auxquelles devront s’adapter, tant bien que mal, les acteurs économiques et, plus généralement, les groupes sociaux et les individus. Et, bien souvent, à l’usage, les innovations s’avèrent difficilement réversibles et pèsent comme un destin sur ceux qui devront vivre avec et n’ont pas d’autre choix.

      [...]

      Latour se présente comme empiriste mais, à bien des égards, sa pensée est souvent plus prescriptive que descriptive. Son œuvre nous propose, avec un appareil intellectuel complètement renouvelé et plutôt baroque, une des thèses de la théologie catholique techniciste post-teilhardienne : il n’y a pas de problème de la technique en soi, toute puissance est bonne, il n’y a que des mésusages. Dans la mesure où les réalités techniques sont construites socialement, elles n’ont pas d’autonomie ni de finalités propres et il appartient aux humains de les reconfigurer ou d’en corriger le fonctionnement. C’est une affaire de politique, entendue au sens large, et que l’on peut résumer par la formule : « Il faut socialiser la technique. » Ce n’est pas original et c’est exactement ce qu’Emmanuel Mounier (1905-1950) proposait cinquante ans plus tôt dans La Petite Peur du XXe siècle [Mounier, 1959], titre d’un essai qui deviendra le bréviaire de l’optimisme technophile catholique des Trente Glorieuses. Ce philosophe catholique, fondateur et directeur de la revue Esprit, expliquait que, si les techniques modernes posent problème, ce n’est pas à cause de leur caractère intrinsèque, c’est parce que leur mise en œuvre est asservie aux objectifs particuliers du capitalisme, c’est-à-dire le profit et l’accumulation du capital. Comme Marx, Mounier pensait qu’il suffirait donc de libérer la technique des usages capitalistes particuliers pour en retirer tous les effets libérateurs. Il faut donc socialiser la technique. Latour reprend ce thème mais en l’adaptant à la conception du social qui découle de son anthropologie symétrique. De la sorte se trouve rétablie, sous couvert de science, avec un nouvel appareil méthodologique et un vocabulaire new look, la thèse centrale de la théologie techniciste catholique d’après-guerre [4] qui avait tant plu à la bourgeoisie moderniste et à la technostructure naissante.

      Rappelons que Bruno Latour est catholique, qu’il a été élève des Jésuites et qu’il a soutenu en 1975 une thèse de théologie sur l’exégèse biblique des textes de l’Évangile de Marc relatifs à la résurrection. Les catégories qu’il nous propose pour analyser le rôle de la technique, loin d’être dégagées à partir de l’examen des faits d’expérience, nous semblent plutôt construites pour légitimer un certain nombre de convictions initiales qui convergent avec un courant de théologie techniciste catholique, portée par des théologiens français, notamment des pères jésuites. Chez Latour, les convictions théologiques sont associées à une métaphysique et une ontologie qui, dès les débuts de sa carrière, fondent ses options méthodologiques et orientent fortement les « résultats » de ses enquêtes. Les analyses qui semblent résulter de la mise en œuvre de ces méthodes peuvent être considérées comme autant de défenses et illustrations d’une conception spiritualiste du rôle de la technique qui ne voudrait pas dire son nom. Dans cette perspective, on peut considérer que l’œuvre de Bruno Latour joue le rôle d’une théodicée apaisante pour l’âge industriel et techno-scientifique.

      [...]
      La vision du monde qui sous-tend l’anthropologie symétrique de Latour a plusieurs points communs avec la Monadologie de Leibniz. Bien qu’elle se présente comme scientifique, il s’agit en réalité d’une métaphysique qui a pour conséquence l’exclusion de tout ce qu’Ellul appelle des « processus sans sujets » tels que le capital, la bureaucratie, la technique ou l’État, et dont la logique impersonnelle peut être cause d’aliénation pour l’homme. Pour Latour, au contraire, il semble que l’impersonnel n’existe pas, ou plutôt, qu’il ne doit pas exister ; il n’y a que des « actants » en interrelation, ce qui permet de rabattre l’impersonnel sur le personnel. Ainsi, dans le prolongement de la métaphysique leibnizienne, la philosophie de Latour nous propose une nouvelle théodicée [Leibniz, 1710] qui dédramatise notre condition en éliminant toute possibilité d’aliénation radicale, de déshumanisation politique, économique ou technicienne ; elle permet de faire fusionner les contraires et de tout réconcilier. Démarche somme toute assez confortable et qui peut arranger tout le monde car, comme le remarque Nathalie Heinich, Bruno Latour nous « invite surtout (heureusement… ?) à changer de conception de la société beaucoup plus qu’à transformer l’organisation sociale ». Il s’agit de promouvoir « une nouvelle façon de voir » qui nous réconcilie avec l’évolution sociale.

      Et ceci n’a rien d’original. Il y a cinquante ans, les adeptes de la Théorie générale des systèmes élaborée par Ludwig von Bertalanffy [1971] disaient la même chose avec un vocabulaire différent. Puis, une fois que le systémisme eut fait long feu, ce fut le tour des théories de la Complexité, de la Nouvelle Alliance promue par Isabelle Stengers et Ilia Prigogine [1979], puis de La Méthode d’Edgar Morin, etc., pour ne proposer que quelques exemples francophones de métaphysiques réconciliatrices et rassurantes dissimulées sous le masque de l’objectivité scientifique.

      Pas d’emballement, pas d’interdépendance systémique entre les techniques, rien de fondamentalement nouveau dans notre rapport aux techniques ? Latour se dit « empiriste » mais son discours si sophistiqué et rassurant ne fait guère justice à ce dont chacun peut faire l’expérience : une avalanche continue d’innovations qui bouleversent notre monde et notre vie quotidienne ; une impuissance à en corriger en temps voulu les effets négatifs et les absurdités car l’imbrication entre les dispositifs techniques matériels et immatériels est telle que, pour modifier un élément, c’est, de proche en proche, tout un ensemble qu’il faudrait réformer.

      Que la technique ait affaire avec la puissance, c’est l’expérience la plus commune, et il n’est pas vrai que « tout est négociable » ; elle résiste. À bien des égards, la contrepartie de la montée de la puissance technique collective, c’est l’expérience de l’impuissance personnelle. Qui dans sa vie professionnelle n’est pas contraint de se conformer à des prescriptions absurdes, voire immorales, sous couvert de rationalité technique ? Et, pour comprendre pourquoi il en est ainsi, il vaut mieux lire Ellul que Latour. Pour qu’une véritable socialisation de la technique soit envisageable, il ne suffit pas de créer quelque « parlement des choses », il faudrait au moins que nous ayons le temps d’enregistrer les effets de l’innovation avant qu’elle ne soit partout un fait accompli. Cela supposerait un tout autre rythme de l’innovation et la renonciation à l’obsession de la puissance.

  • Otto Ullrich, Technologie, 1992

    Une fusée qui poursuit « implacablement » sa trajectoire à travers l’espace, c’est-à-dire sans aucune perturbation, qui peut être guidée avec une grande précision vers une cible prédéterminée pour y libérer des forces de proportions cosmiques à son arrivée – un système technologique aussi puissant figure en tête de liste des produits en adéquation idéale avec la logique des sciences naturelles expérimentales et mathématiques. C’est pourquoi ce n’est pas un hasard si presque toutes les réalisations de pointe de la technologie contemporaine sont rassemblées, par exemple, dans un missile de croisière – technologie informatique ; technologie radio, radar et vidéo ; propulsion des fusées et technologie nucléaire ; métallurgie ; aérodynamique ; logistique et technologie de l’information ; etc.

    De nombreux pays du tiers monde se sont familiarisées, avant tout autre chose, avec ces réalisations de la technologie occidentale. Par le biais des bases militaires des grandes puissances, de leurs propres régimes militaires ou de la mégalomanie de leurs gouvernements, une part substantielle de leurs ressources financières limitées a été, et est encore, dévolue à l’importation de technologies militaires. En outre, une quantité importante instruments de guerre arrivent par le biais de « l’aide militaire au développement ». Je soupçonne, et cela devra faire l’objet un jour d’une enquête plus approfondie, que jusqu’à présent, la plus grande partie de l’aide technologique occidentale a consisté en ces armes destructrices. L’effet de toute cette technologie hautement moderne dans ces pays peut être décrit sans ambiguïté – elle augmente la faim et la misère, elle entrave le développement indépendant et elle protège les régimes corrompus contre les révolutions populaires.

    Article “#Technologie” du #Dictionnaire_du_développement, un guide de la connaissance comme pouvoir dirigé par #Wolfgang_Sachs en 1992.

    https://sniadecki.wordpress.com/2020/08/02/dictionnaired-technologie-fr

    Ce dictionnaire, traduit dans de nombreuses langues... sauf en français, bien sûr !

    #technocritique, #critique_techno, #dictionnaire, #colonialisme, etc.

    En anglais : https://sniadecki.wordpress.com/2020/08/02/dictionnaired-technology-en

    En espagnol : https://sniadecki.wordpress.com/2020/08/02/dictionnaired-tecnologia-es

  • Instagram Live | Jeanne Burgart Goutal - YouTube
    https://www.youtube.com/watch?v=pPmc6HBjj_E

    Oppression des femmes et destruction de la nature seraient deux facettes indissociables d’un modèle de civilisation qu’il faudrait dépasser : telle est la perspective centrale de l’écoféminisme. Mais derrière ce terme se déploie une grande variété de pensées et de pratiques militantes. Rompant avec une approche chic et apolitique aujourd’hui en vogue, ce livre restitue la richesse et la diversité des théories développées par cette mouvance née il y a plus de 40 ans : critique radicale du capitalisme et de la technoscience, redécouverte des sagesses et savoir-faire traditionnels, réappropriation par les femmes de leur corps, apprentissage d’un rapport intime au cosmos…

    Dans ce road trip philosophique alternant reportages et analyses, l’auteure nous emmène sur les pas des écoféministes, depuis les Cévennes où certaines tentent l’aventure de la vie en autonomie, jusqu’au Nord de l’Inde, chez la star du mouvement Vandana Shiva. Elle révèle aussi les ambiguïtés de ce courant, où se croisent Occidentaux en quête d’alternatives sociales et de transformations personnelles, ONG poursuivant leurs propres stratégies commerciales et politiques, et luttes concrètes de femmes et de communautés indigènes dans les pays du Sud.

    via @gata
    #écoféminisme #philosophie

  • Michel Barrillon, Les marxistes, Marx et la question naturelle, 2013

    Résumé

    Nombre d’auteurs marxistes ou néomarxistes contemporains admettent « l’immense retard théorique » du marxisme dans l’appréhension de la question naturelle. Ils le déplorent d’autant plus que le paradigme marxien leur paraît parfaitement en mesure d’intégrer la dimension socio-écologique dans la critique ordinaire du mode de production #capitaliste. En marxistes conséquents, ils s’interrogent sur les raisons historiques de ce « rendez-vous manqué » avec l’écologie politique. Certains poussent l’analyse jusqu’à revenir aux écrits fondateurs de Marx et Engels. J. B. Foster a ainsi défendu la thèse d’un « Marx écologiste »… Cette thèse ne résiste pas à l’épreuve d’un examen critique du mode de traitement de la nature chez Marx. Rétrospectivement, Marx et la plupart de ses épigones apparaissent comme des théoriciens demeurés fidèles au projet baconien et cartésien inscrit dans l’imaginaire de la modernité ; prisonniers d’une vision progressiste de l’histoire, ils n’ont pu, en fait de critique radicale du capitalisme, que « le reproduire comme modèle ».

    https://sniadecki.wordpress.com/2020/06/04/barrillon-marxistes

    #Marx, #marxistes, #écologie, #critique_techno, #modernité, etc.

    En définitive, pour avoir voulu mener un combat scientifique sur le terrain de l’#économie_politique, le terrain même de ses ennemis désignés, Marx s’est pris au piège de la #théorisation froide et a fini par reproduire le capitalisme comme modèle, au lieu de dénoncer fermement ses crimes écologiques et humains sans lui faire de concession au nom d’une arbitraire nécessité historique. Paradoxalement, il a consacré ce qu’il croyait critiquer à la racine, vraisemblablement par désir de #scientificité, mais aussi parce qu’il demeurait convaincu que le capitalisme est un mal historique nécessaire, investi, malgré lui, d’une mission « civilisatrice ». En reconnaissant au capitalisme l’immense mérite d’avoir rendu la nature exploitable sans limites, il n’a pas simplement conforté le #productivisme capitaliste, il a aussi pleinement souscrit au projet baconien et cartésien puisque c’est dans le cadre de l’imaginaire de la modernité qu’il conçoit le passage au communisme. Si, aujourd’hui, le retour aux œuvres de Marx doit être une source d’enseignements, c’est bien pour nous éviter de répéter ses erreurs.

    Quelques chose me dit que la #WertKritik pourrait en prendre de la graine...

    • La wertkritik ne pense absolument pas que le capitalisme est une étape nécessaire à quoi que ce soit. :p
      Elle ne prend de Marx que telle ou telle partie qu’elle considère la plus importante de son travail, sur la critique du cœur de comment fonctionne le capitalisme. Et justement rejette ou tout du moins ne garde pas, la plupart des idées politiques de Marx, qui étaient propres à son temps.

  • François Partant, Retour à l’autonomie ?, 1982
    https://sniadecki.wordpress.com/2020/06/06/partant-autonomie

    Ya à peu près rien de François Partant sur Seenthis, ça va pas ça…

    On s’accorde généralement à penser que la terre peut nourrir la totalité de la population mondiale, mais que la progression exponentielle de cette dernière, qui augmentera encore pendant une trentaine d’années, doit être rapidement stoppée (son alimentation n’étant pas seule en cause). La faim et la malnutrition pourraient donc être éliminées si les productions agricoles étaient orientées dans ce but. Quant à l’autorégulation des naissances, sans doute serait-elle également possible, si chaque société était consciente des limites dans lesquelles elle peut se reproduire, limites que fixe le milieu dans lequel elle vit, qui n’est pas extensible et doit pouvoir se reconstituer. C’est donc le rapport de l’homme à la terre, à son milieu physique qui est aujourd’hui malsain. Malsain, il l’est en effet, à deux niveaux liés : au plan mondial et, dans la plupart des pays, au plan local.

    #François_Partant #autonomie #démocratie #autogestion #économie

  • Michel Barrillon, De la nécessité de sortir du faux dilemme primitivisme/progressisme, 2016
    https://sniadecki.wordpress.com/2020/05/10/barrillon-primitivisme

    En s’appuyant sur la critique de la valeur, Anselm Jappe expose un raisonnement comparable : dans son « besoin boulimique de trouver des sphères toujours nouvelles de valorisation de la valeur », le capital étend progressivement « la production marchande à des secteurs toujours nouveaux de la vie », « en occupant et en ruinant les sphères non marchandes ». La valeur, résume Jappe, est « une espèce de “néant” qui se nourrit du monde concret et le consomme ». Ce monde concret, ce sont entre autres les communautés traditionnelles et leurs milieux naturels de vie. Cependant, contrairement à Luxembourg, Jappe condamne cette dynamique qui, sans doute, provoquera l’effondrement du capitalisme, mais pour abandonner aux hommes « un paysage de ruines » d’autant plus difficiles à redresser qu’auront été écrasées « les autres formes de vie sociale […] qui auraient pu constituer un point de départ pour la construction d’une société postcapitaliste ».

    :p

    Pour revenir au XVIIIe siècle, l’histoire se montre juge paradoxal : de l’image du Sauvage rattachée à ce siècle, on ne retient habituellement que celle qualifiée abusivement de « rousseauiste » : la vision misérabiliste des économistes est ignorée. Or c’est précisément cette conception qui, par la suite, sera reconnue comme une vérité de fait indiscutable, tandis que la représentation du « bon sauvage » sera reléguée dans la mythologie. Ce basculement traduit l’hégémonie du capitalisme et de l’idéologie économique dans les consciences. La nostalgie de l’âge d’or primitif ne connaîtra un véritable renouveau que dans la seconde moitié du XXe siècle. Entre-temps, l’ethnologie s’est constituée comme discipline scientifique. Par leurs travaux, certains anthropologues jouèrent un rôle décisif dans la réhabilitation de la figure du Sauvage : Claude Lévi-Strauss avec notamment sa critique radicale de l’histoire universelle [28] ; Marshall Sahlins par sa remise en question décapante de la vision misérabiliste du primitif ; Pierre Clastres par son analyse originale de la question du pouvoir dans les sociétés « contre l’État »…

    #Histoire #progressisme #primitivisme #anthropologie

  • Bertrand Louart, À écouter certains écolos, on a l’impression que les machines nous tombent du ciel !, 2020
    https://sniadecki.wordpress.com/2020/05/14/louart-itw-casaux

    Interview de @tranbert par Nicolas Casaux

    Nicolas Casaux : Je me suis entretenu avec Bertrand Louart, auteur, notamment, de Les êtres vivants ne sont pas des machines (éd. La Lenteur, 2018), animateur de l’émission Racine de Moins Un sur Radio Zinzine, rédacteur du bulletin de critique des sciences, des technologies et de la société industrielle Notes & Morceaux choisis (éd. La Lenteur), contributeur au blog de critique du scientisme Et vous n’avez encore rien vu…, et membre de la coopérative européenne Longo maï où il est menuisier-ébeniste.

    #critique_techno #anti-industriel #écologie #démocratie #acier #production #machine-outil #communalisme

  • Écran Total, Des lits, pas des applis !

    Comment expliquer autrement qu’un service public de santé, que l’on dit exsangue, qui manque de l’essentiel [...], ait pu affronter la « vague », selon l’expression quotidiennement matraquée ?

    Puisque les analogies guerrières sont à la mode, la situation fait penser à celle du front russe, pendant la Deuxième Guerre mondiale, qui a cessé d’enregistrer catastrophe sur catastrophe (du point de vue soviétique) à partir du moment où l’on a aboli l’institution des commissaires politiques et relâché le contrôle idéologique et politique sur l’armée, l’économie et la société en général. Dans certaines régions, la machine bureaucratique avait même complètement disparu, et les populations ont pu organiser elles-mêmes des régiments de partisans.

    De la même manière, en mars 2020 en France, les bureaucrates font profil bas, ont arrêté de mettre des bâtons dans les roues du personnel. On ne parle plus de suppression de lits, de plan de modernisation, mais de soin, de dignité. Il faut applaudir les « héros ». La doctrine officielle a changé. C’est pour l’avoir compris trop tard que le directeur de l’ARS Grand-Est a été limogé. [...]

    Nous, membres du collectif Écran Total, nous disons : attention ! Car les coupes budgétaires ne sont qu’un aspect de la modernisation de l’hôpital. Le deuxième tranchant du sabre utilisé pour saccager le service public, c’est le déploiement des outils gestionnaires, en particulier informatiques, c’est le pouvoir insupportable de l’administration qui empêche les soignants de faire le métier pour lequel ils ont été formés en leur imposant une « #rationalisation » de leur activité. Avant la crise, durant le mouvement de grève des hôpitaux, on a entendu cette revendication, qui indique le niveau d’absurdité où nous sommes arrivés : il faut que ce soient les praticiens qui organisent les soins, pas les gestionnaires.

    Or nulle part on ne lit ni n’entend : Embauchez des infirmières, virez des managers ou, plus simplement : Des lits, pas des applis .

    https://sniadecki.wordpress.com/2020/04/28/num-hopital-t2a

    #hopital, #T2A, #technocratie, #technocritique, #critique_techno, #Ecran_total, #coronavirus, #autonomie_politique, #bureaucratie.

  • Il n’y a pas de « continuité pédagogique » : éteignez les tablettes ! | Des membres du collectif de l’Appel de Beauchastel contre l’école numérique
    https://sniadecki.wordpress.com/2020/04/11/num-confinement

    Confinement oblige, l’Éducation nationale invite à la « continuité pédagogique », possible grâce au numérique. Or, selon les auteurs de cette tribune, « la pédagogie virtuelle n’existe pas », et « seuls les élèves éveillés, enfermés avec des parents désœuvrés au fort niveau d’études vont bénéficier d’une pédagogie efficace : l’instruction en famille ». Source : Et vous n’avez encore rien vu...

    • Il est urgent que le ministre annonce : […] en lien avec le ministère de la Santé, que le temps d’écran doit être limité : tant pour préserver sa santé que sa capacité à étudier, il faut réduire au strict minimum sa consommation d’écran – travail scolaire compris ;

      Et comment ils comptent faire pour que les gamins ne passent pas leur journée devant BFMTV, Netflix et Gully, ou WhatsApp, au motif que Blanquer leur aurait dit que « le temps d’écran doit être limité » ? A coup de LBD ou en faisant débarquer les flics à l’improviste dans les appartements pour contrôler les « temps d’écran » ?

      Je n’arrive pas à comprendre pourquoi il faudrait préférer une solution imparfaite à une solution absolument pire, avec des gamins laissés en total désœuvrement, enfermés à la maison et quasiment aucune chance de faire autre chose que regarder la téloche. Parce qu’on ne peut pas sortir, on ne peut pas aller se promener avec ses gamins, on ne peut pas faire de sport avec ses gamins, on ne peut pas les laisser jouer dehors avec les voisins, on ne peut même pas les emmener quand on fait les courses, etc. Je veux dire qu’ici le désœuvrement n’est pas un jugement moraliste, c’est le fait social incontournable imposé par le confinement. Je suis désolé, mais pour le coup, les tentatives (que je trouve pas du tout satisfaisantes par ailleurs) de garder le contact avec l’école, c’est un motif assez incontournable – le seul ? – pour arrêter de regarder la téloche.

      Je note notamment que le texte évacue avec une facilité déconcertante les cours en téléconférence, pour ensuite se plaindre du fait que sans interaction avec les enseignants l’école ça peut pas fonctionner, que les parents laissés seuls avec leurs gamins ça creuse les inégalités… Ce que, justement, les cours en téléconférence tentent de limiter.

      Enfin je pige pas quoi.

    • Un autre argument : et comment les auteurs comptent interdire aux familles qui le peuvent d’assurer la « continuité pédagogique » tout seuls au motif que d’autres ne peuvent pas et que ce serait un facteur d’inégalités ?

      C’est tout de même épatant cette logique : d’un côté on aura toujours les parents qui, comme actuellement, sont capables d’assurer « l’école à la maison » (bagage éducatif, qui ont le temps…), même si les structures scolaires n’essaient plus de maintenir cette « continuité pédagogique ». Les plus aisés se tourneront directement vers des écoles privées spécialisées, qui savent très bien faire ça.

      Et de l’autre côté, tous les autres qui, du coup, n’auront même plus les quelques outils fournis par l’école publique – dont, par exemple en Italie, les cours en téléconférence avec les enseignants pour les établissements publics.

      La logique de l’appel ci-dessus revient à imposer un renforcement des inégalités qu’il prétend dénoncer : ceux qui peuvent déjà continueront à assurer la pédagogie à la maison, les autres n’auront plus rien du tout.

    • Je vois pas en quoi les cours en téléconférence assurent une forme de "contact avec l’enseignant" particulièrement susceptible de "limiter le creusement des inégalités".

      Au contraire, la "culture" de la téléconférence, c’est aussi et d’abord celle de celles et ceux qui, justement, "sont [aussi] capables d’assurer « l’école à la maison »"

    • Je n’ai pas du tout écrit : « particulièrement susceptible ». J’ai au contraire explicitement précisé « que je trouve pas du tout satisfaisantes par ailleurs », et « tentent de limiter » ; deux formulations qui signifient à peu près l’exact opposé de « particulièrement susceptible ».

      Mes deux arguments principaux (dans les deux messages successifs), c’est que si, au motif que les tentatives sont insatisfaisantes et déjà inégalitaires (ce avec quoi je suis bien d’accord), il faudrait totalement s’en priver sans les remplacer par quoi que ce soit, alors en pratique ce qu’on propose c’est une situation encore plus catastrophique : téloche 12 heures par jour pour des gamins à qui on interdit rigoureusement toute autre activité et renforcement de l’inégalité d’accès à l’éducation.

      Parce que (1) on retirera la seule alternative vaguement « obligatoire » pour que les gamins fassent autre chose que regarder la télé ou buller sur Whatsapp, (2) de toute façon les parents « qui peuvent déjà » pourront toujours.

    • Tout à fait d’accord avec @arno j’allais écrire sensiblement la même chose (en moins développé) quand j’ai lu cette tribune.

      Je trouve ça dit de manière totalement théorique et hors-sol. Comme si c’était dans un autre monde, avec des si si si. Là on ne parle pas de deux semaines sans école, mais de plusieurs mois, dans le monde actuel.

      La conséquence très concrète, s’il n’y avait pas ce suivi avec internet, y compris s’il y avait des manuels papiers, ça serait de renforcer encore plus les inégalités qu’actuellement, et que seuls les familles avec un capital culturel élevé ET du temps (il faut avoir les deux) forcent les enfants à continuer d’apprendre. On pourra toujours arguer que telle famille populaire le fait aussi etc, on s’en fout, dans tout il y a des exceptions. Sur la population entière ça sera négligeable.

      Quand bien même c’est la présence en face à face qui restera à jamais le moyen d’avoir de vraies relations pédagogiques (j’en suis convaincu), les profs actuellement font ce qu’ils peuvent pour suivre où en sont leurs élèves (et la majorité le font au mieux), les incite à poser des questions, savoir où ils en sont, etc. En tout cas à partir du collège, car ça doit être bien plus compliqué en maternelle et primaire.

      Par ailleurs les profs sont pas gogols hein. Au collège le prof de français du fils leur fait bien lire des textes longs, des nouvelles (Poe en ce moment).

      Que les auteurices de la tribune répondent à cette question : s’il n’y avait pas ce suivi fort imparfait, concrètement là maintenant tout de suite il se passerait quoi dans les familles avec moins de capital culturel, les familles nombreuses, les parents qui bossent ? Répondre sans aucun « si » dans la phrase.

      Par contre je suis tout à fait d’accord qu’il faut insister sur le fait que tout devra reprendre où ça en était, sans préjuger que les élèves aient tous acquis des nouvelles choses.

    • Je trouve, pour ma part, qu’il n’y a aucune « tentative de limitation » des inégalités par l’usage de la téléconférence, mais, qu’au contraire, cet usage renforce les inégalités existantes. L’usage « productif » de la téléconférence dans le domaine de l’éducation ne peut se déployer qu’en s’inscrivant dans un habitus qui est déjà celui concourant aux inégalités croissantes en ce domaine. Raison pour laquelle il faut bien s’en passer, et ce non pas en la dénonçant comme solution individuelle de repli, mais comme mesure systématique préconisée par un ministère cherchant un mettre en œuvre un agenda qui a peu à voir avec l’attention à porter aux gamins.
      D’ailleurs, le terme « continuité pédagogique » est brandi par Blanquer comme un écran de fumée : il n’est pas là question du lien enseignant/écolier, mais bien de la continuité du fonctionnement de l’institution (sa capacité à « produire », en temps et en heure, des instruits conformes aux attentes du « plan quinquennal » défini par les indicateurs PISA et autres)

      Les enseignant.e.s n’ont pas attendu Blanquer pour ne pas laisser totalement sombrer une version de continuité pédagogique qui, cette fois ci, correspond bien au lien privilégié entre pédagogue et enfant, non médiatisé par un appareil de « production »). Illes ne s’en sont pas remis à la téléconférence, qui s’avère une bien piètre solution dans ce cas, à la fois sur le plan technique et sur le terrain de la pédagogie.

      La téléconférence n’est pas un moyen « imparfait » de maintenir un lien prof/élève ou d’occuper à moindre conséquence l’esprit des enfants. C’est un moyen parfaitement efficace pour renforcer l’habitus des gagnants et se donner des prétextes de renvoyer les superflus à leur incapacité de « bien utiliser les outils qu’on leur donne ». La télévision, en son temps, a connu exactement les même débats et sert aujourd’hui, par les usages différenciés qui en ont émergé, de marqueur social assurant la reproduction des inégalités.

    • Mais pourquoi tu ne parles que de téléconférence ? La tribune ne parle absolument pas de ça spécialement mais de « continuité pédagogique par le numérique » en général, téléconférence ou pas.

      Concrètement, il n’y a quasiment aucun prof qui utilise la téléconférence, ou alors seulement ponctuellement. La majorité des profs utilisent les ENT en place (pronote nous), qui sont uniquement textuels, et ils l’utilisent pour lister des choses à faire ou à lire, et pour messagerie (textuelle encore donc) pour que les élèves leur posent des questions et renvoient parfois leur travail régulièrement (faire des exercices de maths, et les donner au prof etc).

      Pour l’instant la seule téléconférence que j’ai vu, c’est en langue, la prof d’italien qui leur donne parfois rendez vous (à son heure habituelle de ses cours) sur une visioconf, où elle leur parle en italien à l’oral donc, et elle leur demande de parler eux, histoire de leur faire prononcer des choses.

      Mais bref, aussi bien la tribune que nos réponses sont sur l’ensemble, pas juste la téléconférence.

    • Je crois que c’est important qu’émergent des discours critiques de la possibilité non pas de faire de la sous-école en temps de crise comme celle-ci mais des discours qui ne manquent pas sur « qu’est-ce que c’est génial la continuité pédagogique le seul problème c’est notre manque de préparation alors préparons-nous mieux ». Ça me fait assez flipper qu’on s’empare de ces semi-succès (litote) pour avancer sur une voie aussi inquiétante en se disant qu’on fera ça mieux et sans en saisir l’enseignement principal qui est : c’est en présentiel que se passent les interactions les plus constructives.

      C’est un peu comme le revenu garanti : on ne peut pas dire que le revenu garanti, c’est génial en général simplement parce que c’est le meilleur moyen d’assurer la survie en temps de crise. Mais on ne peut pas non plus se passer des béquilles que ça représente dans cette situation si particulière.

      Et ceci dit, je teste la continuité pédagogique à Langues O’ et nos profs ont continué les cours pendant toutes les vacances d’avril : d’abord pour compenser l’enseignement de moindre qualité en ce moment, en plus parce qu’on y prend tou·tes plaisir, enseignant·es et étudiant·es (effectif de 3 à 6), c’est le truc anti-déprime pour les étudiant·es isolé·es qui n’arrivent pas à s’y mettre (malgré des années d’études sup, il n’y a pas que les gosses de pauvres qui ont du mal). On a tout essayé : Teams (pas pu entrer dans le salon), Skype (pour les cours magistraux ou avec la fonction chat pour des TD), WhatsApp pour les cours moins magistraux (je rattrape ceux-là en lisant le fil après coup avec les trads AV envoyées à côté par Wetransfer). C’est du bricolage avec des outils corporate...

    • Il me semble que le temps ordinairement passé devant la télé depuis les années 70, et depuis un bon moment, d’autres écrans, réseaux ou pas, en fait déjà -hors confinement - un temps de formation des subjectivités et à des savoirs, ce qui a contribué à une mise en cause radicale de l’école comme institution, mise en cause tout autre que celle autrefois exercée par des critiques internes (Freinet, pédagogie institutionnelle, etc), ou externes (Illitch, par exemple).
      La disqualification sociale (et salariale) des profs tient pour partie à cette émergence de la formation hors l’école. Hanouna-Youtube valent plus qu’eux. On peut avoir une capture par le divertissement, mais il y a des usages étonnants qui se greffent sur ce primat de l’image, si on envisage ce que font certains youtubeurs, ou encore l’application tiktok, bien plus horizontale, et ancrée dans des réseaux de relations affectives, où les utilisateurs font sur le mode du jeu des apprentissages, produisent et se produisent.
      Pédagogiser l’utilisation des écrans (téléconférence) suffira pas à modifier ce rapport. Surtout si l’investissement de ces moyens est laissée à l’atomistique de la famille nucléaire. Quelque chose comme une « éducation populaire », supposerait l’invention de collectifs ad hoc. Est-ce que c’est ce qui se cherche à travers ce basculement (bien partiel, socialement distribué) des pratiques, à travers ces débats ? No sé.

      #enfants #école #continuité_pédagogique #téléconférence #éducation #capital_humain #formation #famille #habitus

    • Je me demande comment se positionne « Acadomina » (© @mad_meg)

      École à la maison - COVID-19
      [Acadomina] propose des solutions d’accompagnement scolaire en ligne, depuis votre domicile, quotidiennes ou hebdomadaires : cours particuliers en visioconférence, cours collectifs en classes virtuelles.
      Nos Conseillers Pédagogiques sont joignables par téléphone au : 09XXXXXXXX
      Dans le contexte du confinement, les cours à distance bénéficient de 50% de crédit d’impôt sur le coût horaire.
      EN SAVOIR PLUS

    • Je viens mettre l’image d’Acadomina
      http://www.madmeg.org/delizie/#5/0.117/0.220
      Illes sont sympas de faire une remise de 50% de crédit d’impôt chez Acadomina - encore faut il être imposable !

      On ne prête qu’aux riches et comme on dit dans le management (et dans l’évangile dans la parabole des talents)
      WINNER TAKES ALL (version cannibale)
      https://www.youtube.com/watch?v=mjxaa_Vu7bU

      The winner takes it all
      The loser standing small

    • @rastapopoulos

      Effectivement ; je ne parle jusque là que de téléconférence car je réagissais en premier lieu à la dernière phrase du premier commentaire d’@arno

      Concernant le rapport au numérique en général, j’aurais du mal à résumer ici mon approche en quelques lignes. Je peux éventuellement envoyer à https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-02493223 dans un premier temps.

      Si je m’accorde avec les promoteurs de l’appel de Beauchastel sur la nécessité de critiquer le numérique dans l’éducation et au-delà, je sais par ailleurs que cette position n’est pas fondée aujourd’hui sur les mêmes prémisses.

    • @arno "Un autre argument : et comment les auteurs comptent interdire aux familles qui le peuvent d’assurer la « continuité pédagogique » tout seuls au motif que d’autres ne peuvent pas et que ce serait un facteur d’inégalités ?"

      Ta logique est en effet épatante. Personne parmi les signataires n’ambitionne de devenir Blanquer à la place de Blanquer. Quand pense-tu ?

      @rastapopoulos En ce qui concerne la téléconférence, Renaud Garcia nous a donné un aperçu de son usage sur Radio Zinzine mardi dernier : il y a des prof qui fond l’appel de leurs élèves dès 8h comme ça.

      Mais bon, à part ça, tout va très bien, tout va très bien, madame la marquise (air connu)...

    • C’est évidemment une question rhétorique par l’absurde (et donc absurde d’y répondre en disant que c’est illogique) : si évidemment les signataires de la tribune ne comptent pas interdire aux familles qui le peuvent (avec le temps, les savoirs, etc) d’assurer la continuité, alors encore une fois concrètement c’est ce qui va se passer, dans des proportions bien bien plus qu’actuellement : celles qui le peuvent vont évidemment le faire à fond, et toutes les autres ne vont juste rien faire (alors qu’actuellement les profs tentent de garder un lien et donc de fait, sans la supprimer évidemment, réduisent quand même cette inégalité).

      S’il n’y avait pas ce lien, aussi nul soit-il, mais ce lien quand même, sans « si on avait fait ci ou ça avant » (là on parle de quoi faire dans le monde de maintenant), il se passerait quoi pour la majorité des familles sans temps et sans capital culturel ? Les N gosses iraient gambader dans la garrigue et « apprendraient de la vie » comme dans un bon Pagnol ? Ah bah non, on n’a pas le droit. Ils seraient juste en train de binge-watcher les 220 épisodes de Naruto, pendant que les parents bossent (à la maison ou ailleurs).

    • alors qu’actuellement les profs tentent de garder un lien et donc de fait, sans la supprimer évidemment, réduisent quand même cette inégalité

      Je pense que rien aujourd’hui ne démontre que le lien numérique réduit l’inégalité, que ce soit par rapport à la situation de pédagogie en présence, bien sûr, mais aussi par rapport au scénario « binge-watcher les 220 épisodes de Naruto, pendant que les parents bossent ». L’hypothèse qu’il le renforce peut même être légitimement mise sur la table si l’on se réfère à d’autres exemples historiques, comme la télévision ou le plan informatique pour tous de 1985, que je connais bien.

      Ce que j’essaye de dire, c’est que se convaincre malgré tout que c’est le cas est peut-être un biais qui peut avoir deux sources : la distinction, au sens bourdieusien, et la confiance mal placée dans l’outil pour celleux qui y sont trop bien acclimatés par leur pratique professionnelle

  • Günther Anders, Machines, 1987
    https://sniadecki.wordpress.com/2020/04/08/anders-machines

    Pourquoi sommes-nous en droit d’avancer cette thèse exagérée ?

    Pas simplement parce qu’il y a aujourd’hui tant d’appareils et de machines (politiques, administratifs, commerciaux ou techniques), ou parce qu’ils jouent un rôle tellement puissant dans notre monde. Cela ne justifierait pas cette désignation. Ce qui est décisif, c’est quelque chose de plus fondamental, lié au principe de la machine – et c’est sur ce principe-là qu’il nous faut revenir maintenant. Car il contient déjà les conditions dans lesquelles le monde entier devient machine. Quel est le principe des machines ?
    Performance maximale.

    Et c’est pourquoi nous ne devons pas nous représenter les machines comme des objets insulaires, isolés, par exemple selon le modèle des pierres qui ne sont que là où elles sont et demeurent donc encloses dans leurs limites physiques, chosales. Comme la raison d’être des machines réside dans la performance, et même dans la performance maximale, elles ont besoin, toutes autant qu’elles sont, d’environnements qui garantissent ce maximum. Et ce dont elles ont besoin, elles le conquièrent. Toute machine est expansionniste, pour ne pas dire « impérialiste », chacune se crée son propre empire colonial de services (composé de transporteurs, d’équipes de fonctionnement, de consommateurs, etc.). Et de ces « empires coloniaux » elles exigent qu’ils se transforment à leur image (celle des machines) ; qu’ils « fassent leur jeu » en travaillant avec la même perfection et la même solidité qu’elles ; bref, qu’ils deviennent, bien que localisés à l’extérieur de la « terre maternelle » – notez ce terme, il deviendra pour nous un concept-clé – co-machiniques. La machine originelle s’élargit donc, elle devient « mégamachine » ; et cela non pas seulement par accident ni seulement de temps en temps ; inversement, si elle faiblissait à cet égard, elle cesserait de compter encore au royaume des machines.

    […]

    Et cela : le monde en tant que machine, c’est vraiment l’État technico-totalitaire vers lequel nous nous dirigeons. Remarquons que cela ne date pas d’aujourd’hui ou d’hier, au contraire, cette tendance découlant du principe même de la machine, de sa pulsion d’auto-expansion, elle existe depuis toujours. C’est la raison pour laquelle nous pouvons tranquillement affirmer que le monde en tant que machine, c’est l’empire millénariste vers lequel se sont portés les rêves de toutes les machines, depuis la première ; et il est désormais devant nous réellement, cette évolution étant entrée depuis quelques décennies dans un accelerando de plus en plus forcené.

    Je dis devant nous. En effet, que cet « empire » ait déjà trouvé sa réalisation ultime et intégrale, il ne nous appartient pas de l’affirmer. Cependant, nous consoler avec cette concession, nous n’en avons plus le droit non plus. Car la partie décisive du chemin qui conduit à la « machine mondiale » se trouve déjà derrière nous.

    #Günther_Anders #machinisme #critique_techno #mégamachine #techno-totalitaire

  • Rapiécer le monde. Les éditions La Lenteur contre le déferlement numérique | Terrestres
    https://www.terrestres.org/2019/12/20/rapiecer-le-monde-les-editions-la-lenteur-contre-le-deferlement-numeriqu

    L’objectif de leurs écrits est de construire une critique anticapitaliste de la technologie qui ne soit pas réactionnaire. Une critique en acte qui associerait la parole et l’action, l’analyse critique et la construction de nouveaux mondes. Si, à partir du XIXe siècle, le progrès technique s’est inventé comme la condition de possibilité de l’émancipation sociale et de la liberté, peu à peu s’est imposé un divorce croissant entre ce progrès technique et le progrès humain. La thèse des textes publiés à la Lenteur est que le numérique actuel accélère ce divorce ancien, que les technologies dites numériques facilitent de plus en plus le démontage des droits sociaux, des solidarités tout en restreignant sans cesse la liberté. Loin de rompre avec les logiques de destruction et de contrôle des techniques modernes, les technologies numériques apparaissent de plus en plus comme le franchissement d’un nouveau seuil. Ce constat semble de plus en plus partagé, comme le montre les mobilisations massives autour des compteurs communiquants Linky et les doutes autour de la cybersurveillance et l’impact écologique et énergétique croissant des infrastructures et objets numériques. La thèse selon laquelle le numérique est un enjeu politique central, qui implique de lutter contre les entreprises et l’État qui rendent cette dépendance au numérique généralisée, s’étend.

    #technocritique #critique_techno #La_Lenteur #François_Jarrige #livre

    • Comment envisager d’instaurer un monde vivable et écologiquement moins destructeur si partout explosent les consommations énergétiques, des infrastructures matérielles destructrices, et des promesses abstraites et creuses sur les futurs technologiques heureux. Mais aussi, que signifie concrètement s’opposer à l’informatisation du monde et de nos vies alors que le consumérisme high tech ne cesse d’être vantée, promue et encouragée partout, y compris dans les milieux militants qui invitent à liker, tweeter et partager sur Facebook leurs actions pour les rendre visibles.

      […]

      L’informatique offre de multiples avantages et facilités apparentes – c’est comme ça qu’il s’impose – tout en multipliant les nouvelles complexités, les nouvelles dépendances et les nouvelles fragilités. Les deux vont ensembles et sont indissociables, c’est toute l’ambivalence de ce qu’on nomme le « progrès technique ». Ce débat travaille de nombreux groupes militants qui consacrent un temps croissant à s’agiter sur le net, et une revue en ligne comme Terrestres elle-même n’est pas exempt de ce défaut en faisant le choix de circuler en ligne, via des réseaux sociaux, tout en invitant à redevenir terrestre. Il ne s’agit pas de culpabiliser ni de renvoyer aux usages individuels, car la plupart des gens n’ont pas choisi ni ne sont enthousiastes face à la numérisation en cours. Il s’agit d’abord de penser ces questions d’un point de vue collectif et global, et de s’opposer aux discours officiels et médiatiques dominants, conditions préalables à la possibilité de formes de vies et d’expérimentations différentes.

      […]

      Contre le philosophe et économiste Frédéric Lordon, la critique se fait plus ravageuse puisqu’il est présenté comme un habile rhéteur, aux positions visibles dans la gauche radicale contemporaine, mais qui refuse obstinément de penser la question technique comme une question politique, ni d’affronter totalement le monde réel tel qu’il est.

  • Matthieu Amiech, Notre libre-arbitre est aspiré par Internet, 2019
    https://sniadecki.wordpress.com/2020/02/08/amiech-coma

    Est-ce qu’on prend la mesure de cette somme de petits basculements ? De la portée politique, écologique et anthropologique de cette véritable délocalisation de la vie sur le réseau ? Nous pensons d’une part que la question sociale aujourd’hui se joue là, car c’est de cette « délocalisation » que le capitalisme et l’oligarchie tirent une partie de leur pouvoir, de leur capacité assez inédite à réduire les peuples à l’impuissance, quelle que soit la colère qui couve ou explose. Mais nous pensons aussi que ces évolutions n’ont rien de naturel ou d’inéluctable : elles sont le fruit de décisions technocratiques auxquelles il est possible de s’opposer.

    Encore faut-il pour cela identifier collectivement leur importance. Or, jusqu’ici, le lien est trop rarement fait entre asservissement économique et usage intensif du numérique, entre régression démocratique et informatisation galopante. Ces questions sont maintenues à la périphérie des discussions politiques. Tel est l’enjeu de notre livre : faire entrer la technologie dans le champ de la délibération politique ; montrer que son développement permanent et programmé est un outil de choix dans l’arsenal des couches dirigeantes, pour réduire à néant les formes de solidarité et de justice sociales existantes, les liens directs entre les gens, les capacités populaires de résistance ; et qu’il est donc possible et indispensable de s’opposer à ce développement – sans être réactionnaire, au contraire.

    #Matthieu_Amiech #informatisation #internet #critique_techno #Écran_total

  • Matthieu Amiech, Comme le nez au milieu de la figure, 2019
    https://sniadecki.wordpress.com/2020/02/09/amiech-sud-ouest

    Comment en est-on arrivé là ? Comment une ville longtemps caractérisée par son faible dynamisme industriel est-elle ainsi parvenue à la pointe de l’hypermodernité et du capitalisme français ? L’aménagement volontariste du territoire par un Etat central soucieux de compenser des déséquilibres économiques structurels a joué un rôle important. Mais il faut souligner que l’effort de décentralisation a fonctionné à ce point parce qu’il a porté sur des domaines liés à l’armement, au(x) militaire(s), à la guerre. C’est le secret de famille de Toulouse – secret de polichinelle, mais la discrétion à ce sujet a des effets : la prospérité et le dynamisme de la ville et de l’ensemble de la région reposent sur un véritable complexe militaro-industriel, dont je vais brièvement ici retracer la formation.

    Je vais m’appuyer largement, pour cela, sur l’ouvrage (dont les auteurs ont préféré garder l’anonymat) Toulouse nécropole, publié en 2014 et qui a un peu circulé depuis. Ensuite, j’ébaucherai une cartographie du complexe techno-militaro-industriel toulousain à partir de recherches plus personnelles.

    #Toulouse #critique_techno #complexe_militaro-industriel #Matthieu_Amiech #armement #aéronautique #capitalisme