• Pour la planète, l’indispensable réduction des inégalités | CNRS Le journal
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    La destruction conjointe de la nature et des liens sociaux à laquelle nous assistons est, selon moi, le fruit d’une philosophie politique qui fait obstacle à la transition écologique. Cette philosophie, dont les Anglais Thomas Hobbes et John Locke sont des figures emblématiques, a contribué à faire de la propriété privée moderne un droit sacré et inviolable, statut qu’elle n’avait jamais revêtu dans l’Europe antique et médiévale. Nous sommes hantés par l’imaginaire d’une appropriation du monde, qui nous retient de consentir collectivement à la mise en commun des ressources, des biens et des services, et à leur préservation.

    En 1789, le caractère sacré de la propriété privée s’est imposé dès l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, relayé par le Code civil napoléonien et la déclaration de 1948. En attribuant à la propriété privée le statut que la scolastique accordait au « droit naturel », nous prenons alors le risque qu’aucune autorité ne puisse imposer des limites à la toute-puissance imaginaire du propriétaire privé. Par exemple, dans le droit américain actuel, rien ni personne ne peut empêcher une personne qui découvre du pétrole dans son jardin de l’en extraire. C’est sa propriété, il en jouit de manière exclusive. De même, il n’existe aucune autorité légale capable de remettre en cause la souveraineté de l’État brésilien, même lorsqu’il détruit la forêt amazonienne.