BALLAST | À l’assaut des murs

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  • BALLAST | À l’assaut des murs
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    Une fois ren­trée, je vou­drais me fondre inno­cem­ment dans la douce cha­leur de mon chez-moi, poser mon corps vidé dans mon lit, mais ma tête bouillonne tou­jours. Quand je colle, je ne dors pas. Les mes­sages me hantent, même si je les ai faits miens. J’ai pen­sé les slo­gans, je les ai peints, je les ai affi­chés non sans fier­té. J’ai tout fait pour que tous et toutes les voient dès le len­de­main, à l’aube grise, sur le che­min du bou­lot, de l’école, de la fac. Et pour­tant, moi-même, je ne les sup­porte pas. Je colle ces tranches de vie pour qu’elles ne res­tent plus des drames fami­liaux confi­nés dans les foyers, et je me réfu­gie dans le mien, inca­pable de sup­por­ter la vio­lence de leur visi­bi­li­té, constam­ment éprou­vée par leur exis­tence. Coller, ça m’accable par­fois. Ça m’enferme, ça me déses­père. Conquérir l’extérieur en tant que femme me paraît un com­bat sans cesse renou­ve­lé, jamais vrai­ment gagnant, et seule­ment par­tiel­le­ment éman­ci­pa­teur : tout paraît tou­jours à refaire, à recom­men­cer. Nul doute que Sisyphe était une femme.