Carnet d’un confiné, #Coronavirus 2020, #Jour10

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  • Carnet d’un confiné, #Coronavirus_2020 #Jour10
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    A 20h05, il s’avance dans son long manteau, sans maquillage, les yeux rougis, les mains et la voix blanches. Il sort le grand jeu, ses communicants ont glissé au journal L’Opinion qu’il faut bien mesurer ce qui se passe ; ce n’est pas un petit déplacement présidentiel, ce Macron à Mulhouse, devant un hôpital militaire de fortune, c’est une « ​présence thaumaturge ​ ».

    Sur toutes les chaînes, il s’élance en direct, d’abord fatigué, peut-être ému, retourné sans doute par ce qu’il a vu, ici épicentre du désastre, Grand Est qui va tout balayer, et voilà qu’il se ressaisit, qu’il passe à Action Joe, lui le jeune Quadra devant sa tente kaki, il nous prend pour des poupées, à jouer le père de la Nation, au petit Clémenceau-pour-BFM, qui voudrait nous faire croire qu’il est soldat connu dans les tranchées. Au loin, au dessus du chapiteau, vacillent les lumières d’une fenêtre de l’hôpital de la ville, le vrai, le en dur. On ignore si ce clignotement est une panne, ou la métaphore d’une panne.

    Guerre, guerre, guerre, Macron persiste et signe, il a perdu la fragilité de ses premières phrases. Il annonce, martial, froid, mécanique, l’Opération Résilience, qui couvait : la militarisation de notre espace de paix, l’occupation de nos rues, bientôt de nos Jadis.

    Thaumaturge ? « Personnage, parfois mythique, dont les actions sont considérées comme miraculeuses » dit le Larousse. Et dire que tout ce cirque est faux ici, que tout est foireux. Un hôpital de campagne ? Mais laquelle ? Campagne sanitaire ? Publicitaire ? Campagne politique ? Trente misérables lits, sur un misérable parking, derrière le Président, voilà le dérisoire de la débâcle. Et encore, derrière lui, un seul lit est occupé, dit-on. Une semaine pour faire venir tentes et armatures --- une semaine ! Les vingt neuf autres places, ce sera pour ce week-end, quand le Barnum aura pris fin.

    • Billet d’humeur. Honte aux fractureurs !

      Je dénonce par avance ceux qui voudraient profiter du grandiose discours de notre grandiose chef de guerre pour fracturer. Je les vois venir ! Des malveillants ! Ils diront : « si le grand plan pour les personnels hospitaliers et les enseignants était si nécessaire, il aurait fallu en donner un avant-goût dans la loi de finances rectificative votée vendredi dernier ». Et ils continueront leur jacassin. « Après tout avec une garantie d’emprunt de 300 milliards, qu’est-ce que ça aurait fait un ou deux milliards de plus ? Surtout après que la Commission européenne abroge tous les critères d’austérité antérieurs ». Honte à ce genre de fractureurs !

      « C’est la guerre », nom d’un chien ! Il faut donc dénoncer les critiques de ceux qui démoralisent la ligne de front et même la deuxième ligne. Ceux-là agissent sans aucun doute pour le compte du coronavirus ! Alors que le généralissime s’épuise à faire oublier la triste réalité en évitant d’en parler, les fractureurs se préparent à démoraliser sciemment les combattants ! Ils vont vouloir rappeler que de gel, de masque, de tests et de respirateurs, pourtant indispensables sur la première et deuxième ligne de front, il n’y aura pas eu un mot. Ni des usines textiles à réquisitionner, ni de Luxfer à nationaliser et ainsi de suite.

      Quel scandale ! Pourquoi refusent-ils de voir l’effort de guerre en pleine action ? Tout de même : les porte-hélicoptères seront là ! La preuve que c’est « la guerre ». Ils seront là. Avec leurs noms terribles, cités un par un. Ils seront là. Enfin… ils seront dans le coin. Aux environs. Par exemple aux environs, dans les Caraïbes entre Saint-Martin, la Guadeloupe, la Martinique et ainsi de suite. Un porte-hélicoptères pour une zone certes bien vaste, mais c’est l’intention qui compte, sale fractureur ! Et d’ailleurs, que tous les coronavirus du coin se le tiennent pour dit : « nous ne céderons rrrrien ! car nous en avons les moyens ». D’ailleurs le porte-hélicoptères s’occupera aussi de la Guyane, même si elle ne fait aucun effort pour se situer dans les Caraïbes, après avoir déjà refusé d’être une île en décembre dernier. Mayotte se contentera des stocks de masques moisis en attendant le passage du porte-avions sans doute.

      Sinon, il y aura aussi des militaires dans la rue. Attention, ce sera en plus des patrouilleurs de Sentinelle qui « continuent la guerre contre le terrorisme ». Ça fait deux guerres en même temps quand même. Mais nous ne « cèderons rrrrrien car nous en avons les moyens ». Des militaires vont donc porter les sacs des gens qui n’ont pas le droit de sortir, visiter les Ehpad où il est interdit d’entrer, à moins qu’ils n’aillent ramasser des asperges et des patates comme les hôtesses d’accueil et les coiffeurs feraient bien d’y penser.

      Bref, comme dit BFM : « Macron en chef de guerre » c’est quelque chose ! Et tout ça à peine un mois et demi après avoir sauvé le glacier du Mont-Blanc. Et tout juste un mois après avoir démasqué les séparatistes islamistes. Déjà à Mulhouse. Quel homme ! Dommage qu’il n’ait pas eu une pensée affligée pour les mille cinq cents évangélistes dont la réunion à Mulhouse a contaminé tout le grand est du pays. Le fait est qu’ils ne sont pas musulmans, ce qui leur enlève toute fonction utile dans l’une des guerres que « nous menons » .

      Macron remplit sa fonction de thaumaturge selon son entourage par sa présence physique ! Thaumaturge : bouffe, fractureur ! Et ne viens pas nous dire que thaumaturge c’est un « faiseur de miracles ». Fractureur, ne vient pas nous saouler avec le fait que c’était un don attribué aux rois de France ! Et surtout ferme-la une bonne foi quand tu prétends que les rois, eux, touchaient les écrouelles, bubons purulents qui fondaient à son contact ! « Le roi te touche, tu es guéri » disait le prêtre ! Car la prochaine fois qu’il ira à Mulhouse ou sur un porte-hélicoptères ou ramasser des asperges avec les coiffeurs, il le fera. Et tu iras voir ta mère ! Honte aux fractureurs !

      Jlm

    • Aux fraises

      ""Je n’ai jamais aimé apprendre l’Histoire, mais cet embêtement n’est rien à côté de l’obligation de la vivre"" disait, parait-il, Tristan Bernard, d’après le délicieux David Caviglioli, consolateur de confinement, camarade de chambrée que nous assigne la tempête. Et nous voilà acteurs malgré nous de l’Histoire tempêtueuse. Et nous voilà cramponnés à la bulle de liberté que nous laissent les restrictions, tremblant chaque jour que ça empire. Et nous voilà troisièmes lignes sur canapé, qui se retrouvent le soir devant Jérôme Salomon, porte-parole en gris des Autorités, à tenter de lire entre les lignes les défaites qu’il ne peut pas avouer.

      Jérôme Salomon ânnonne gestes-barrières, héroïsme des soignants, guerre totale, lueurs d’espoir, replis stratégiques. Il détaille les annonces de ce nouveau comité central, rebaptisé conseil scientifique. Ainsi ânnonnait Gunther schabowski, porte-parole du Parti Communiste de RDA, dans les semaines tumultueuses précédant la chute du Mur. Jusqu’au jour où devant le peuple incrédule, il ânnonna un communiqué de plus, sans comprendre lui-même que l’Histoire parlait par sa bouche.

      Nous vivons l’Histoire, mais laquelle ? A la vieille télé, tout est ronronnement. Un ronron de bureau à la Salomon, qu’interpellent à la fin les questions mécaniques, façon Siri, d’une speakerine invisible. Un ronron bonnasse à la Cymès, qui remue vaguement le souvenir du temps lointain des grivoiseries de carabins, et nous masque savamment l’hécatombe. Un soir, on nous parle des EHPAD où les vieux meurent comme des mouches, mais sans nous faire comprendre que le front s’y est déplacé, que c’est désormais là que ça se passe, là que l’on crève étouffé, soulagé dans le meilleur des cas par la morphine livrée en douce, dans l’abandon des statistiques.

      Sur les réseaux sociaux, pour nous évader, il nous reste de ricaner ensemble des autorités, de leurs masques, de leurs tests de nomenklaturistes. Et de leurs incohérences. Vous avez entendu celui-ci, qui veut nous envoyer cueillir les fraises, quand les autres font décoller des drones pour surveiller qu’on se calfeutre bien ? Et celle-là, qui veut nous envoyer en douce au turbin, 60 heures par semaine, et le dimanche, et sans rouspéter ?

      Tous les deux jours en moyenne, apparaissent les deux dirigeants suprêmes. Ils mentent tous deux, nous le savons, pour cacher la misère scandaleuse de nos stocks, misère qu’ils ont organisée, eux et tous leurs prédécesseurs, en soumettant l’hôpital aux lois du management. Mais ils ne mentent pas pareil. Le N° 2 du régime ment solide, concret, appliqué, crédible. Il ment comme la droite a toujours menti au peuple. Il ment familier, rassurant. Il fait la part des choses : c’est Pompidou réouvrant la Sorbonne en 68. La surprise, c’est le dirigeant suprême, qui lui n’ose pas nous regarder en face. Il se perd en promesses incompréhensibles. Il court derrière un texte qui fracasse tout son catéchisme antérieur. Il s’épuise en répétitions infructueuses, mais rien à faire, il est toujours à côté. Quand ça ne veut pas, ça ne veut pas. En 68, on connait la suite de l’histoire.

      https://www.arretsurimages.net/chroniques/le-matinaute/aux-fraises