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  • Coronavirus : la mortalité en réanimation beaucoup plus forte qu’annoncée en France
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/27/coronavirus-la-mortalite-en-reanimation-beaucoup-plus-forte-qu-annoncee-en-f

    Quel est le taux de mortalité des patients malades du Covid-19 en réanimation ? Selon le ministère de la santé, il serait de 10 %. Ce chiffre a été annoncé par Jérôme Salomon, le directeur général de la santé, lors de saconférence de presse du 17 avril. Selon les informations du Monde, il est largement sous-estimé. Aujourd’hui, il serait en effet de l’ordre de 30 % à 40 %, soit trois à quatre fois plus important que le bilan officiel communiqué par le gouvernement. Dimanche 26 avril, 4 682 patients Covid étaient en réanimation.

  • Masques, tests, consignes peu claires : les agences régionales de santé, boucs émissaires de la crise sanitaire
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/25/les-ars-bouc-emissaire-de-la-crise-sanitaire_6037745_3244.html

    En première ligne dans la gestion de l’épidémie, les agences régionales de santé font face à diverses critiques. Enquête sur ces administrations contestées depuis leur création en 2010.

    Pénurie de masques, médecins généralistes sans boussole, Ehpad en déshérence, difficultés dans le lancement des tests… Le coupable de tous les maux de la crise du Covid-19, pour les élus comme pour les soignants, est souvent tout désigné : les ARS. Il y a quelques semaines, ces trois lettres familières des professionnels du secteur l’étaient encore peu du grand public. Créées voilà dix ans, les Agences régionales de santé sont en première ligne de l’organisation sanitaire. Pour le meilleur, parfois. Pour le pire, aussi, si l’on en croit les critiques qui fleurissent.

    « L’ARS est débordée, ça ne suit pas », cingle ainsi le maire (LR) de Reims, Arnaud Robinet. « L’ARS forme une élite qui ne rend de comptes à personne et qui prend des décisions technocratiques, loin des besoins concrets des territoires » , raille Syamak Agha Babaei, médecin urgentiste à Strasbourg et élu écologiste. La charge est lourde, répétée, polyphonique, trouvant des artilleurs dans tous les partis, jusque dans la majorité. « Les ARS ont trop de pouvoir et ne sont pas soumises au contrôle parlementaire », ajoute Sacha Houlié, député (La République en marche, LRM) de la Vienne.

    Boulets de la crise pour leurs contempteurs, les ARS sont plutôt un bouc émissaire, estiment d’autres voix. L’ancienne ministre de la santé #Marisol_Touraine (PS) joue les avocats de la défense. « Je suis frappée par cet “ARS bashing”. Je n’en comprends pas le sens ni les enjeux. Moi j’en ai un avis plutôt positif, même si on peut toujours s’améliorer. Elles ont fait au mieux dans cette crise. Je ne sais pas si elles étaient dimensionnées pour, mais rien ne l’était. Je trouve ces critiques excessives et injustes » , juge-t-elle. « C’est facile de s’en prendre aux ARS. Elles font ce qu’on leur demande de faire. Les ARS, c’est l’Etat » , constate quant à lui Thomas Mesnier, député LRM de Charente et urgentiste.

    Tour de force logistique

    De fait, à quoi servent ces agences, face au coronavirus ? A énormément de choses. Trop, peut-être. « On doit décliner sur le terrain la gestion de la crise sanitaire. Nous sommes un chef d’orchestre » , détaille Pierre Pribile, le directeur général de l’ARS Bourgogne-Franche-Comté. Et d’énumérer l’étendue de ses récentes missions : « Il a fallu multiplier par deux les capacités en réanimation des hôpitaux, faire la passerelle public-privé, assurer un soutien opérationnel des Ehpad avec les conseils départementaux, mobiliser la médecine de ville, les kinés, infirmiers libéraux, les équipes mobiles, veiller aux équipements de protection, au soutien gériatrique… » [comme si ça avait été fait, ndc]

    Cette longue liste n’est pas exhaustive. Des ARS ont aussi organisé les spectaculaires évacuations sanitaires qui ont permis d’envoyer, par train, autocar ou avion, des malades hors d’Ile-de-France ou du Grand-Est. Un vrai tour de force logistique. « Les ARS viennent de montrer qu’elles sont capables ! Qu’il y ait eu des ratés ici ou là, certainement, ça me paraît inévitable. Mais ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain » , demande #Roselyne_Bachelot, ancienne ministre de la santé à l’origine de leur création en 2010. Elle déplore des critiques « récurrentes », remises opportunément au goût du jour.

    La naissance des ARS, en effet, ne s’est pas faite sans heurts, comme leur parcours depuis. Elles ont succédé, avec un champ de compétences beaucoup plus vaste, aux Agences régionales de l’hospitalisation (ARH). Elles sont chargées de mettre en œuvre la politique de santé publique dans les régions, ont un rôle central de coordination territoriale mais aussi de « rationalisation » de l’offre de soins. Autrement dit, elles jouent au quotidien le rôle du marteau et de l’enclume. Elles fixent les objectifs, font appliquer des normes sévères, tout en tenant fermement les cordons de la bourse. Une quadrature du cercle, parfois.

    Elles ont aussi été conçues pour reprendre le pouvoir aux « mandarins », chefs de service alors omnipotents dans les hôpitaux. « Il y avait des rivalités, une gestion à améliorer. Mais le pouvoir est totalement passé dans les mains des administratifs, avec les directeurs d’hôpitaux, et derrière eux les ARS. C’est allé trop loin. Aujourd’hui les chefs de service n’ont plus rien à dire » , estime Philippe Chalumeau, député LRM d’Indre-et-Loire et médecin. Il reconnaît à ces agences d’avoir amené « une culture qualité qui n’existait pas » . Au prix de nouvelles tâches parfois mal acceptées, protocoles et autres tableaux à remplir.

    Du côté des élus, comme à l’hôpital, les tensions ne datent pas d’hier. Maires, présidents de département, de région, députés, se heurtent souvent à cette administration, qui applique sans état d’âme la ligne officielle. Ainsi, récemment, quand des collectivités ont décidé d’acheter des masques, elles ont été rappelées à l’ordre par les gendarmes régionaux de la santé : priorité aux soignants, comme le veut la doctrine du gouvernement.

    Cette logique a été poussée à son paroxysme sur le tarmac de l’aéroport de Mulhouse, où une cargaison destinée à la région Bourgogne-Franche-Comté a été réquisitionnée le 5 avril, sur ordre du préfet, créant un petit scandale. « Pour les masques, les ARS suivent logiquement la ligne du gouvernement… et il est logique que les élus s’en agacent. Quand j’étais ministre, je répétais aux ARS “vous avez la responsabilité du dialogue avec les élus”, ce n’est pas toujours dans leur culture, contrairement à celle des préfets, qui l’ont appris », raconte [pipote ?] Marisol Touraine.

    A l’époque, entre 2012 et 2017, des élus lui faisaient déjà remonter des piles de doléances. Deux ans plus tard, c’est Agnès Buzyn qui a pu mesurer le mécontentement. Lors de la crise des « gilets jaunes », des maires, des députés, des sénateurs sont remontés à la charge contre ces administrations jugées trop verticales, inhumaines. Dans leur viseur, les fermetures de services, urgences ou maternités, qui mobilisent les habitants contre l’Etat… et contre des élus de la majorité, qui jouent sur de tels dossiers leur réélection.

    Institution « inopérante »

    Emmanuel Macron lui-même semble avoir entendu le message. En 2019, le chef de l’Etat s’est opposé deux fois à des décisions de fermeture de maternités décidées par des ARS, à Guingamp (Côtes-d’Armor) et à Creil (Oise) [mais les suppressions de lists hospitaliers continuent en ce moment mêm, ndc] . L’Elysée vient aussi de limoger le 8 avril, sans sourciller, le patron de l’agence du Grand-Est, Christophe Lannelongue, dans l’une des régions les plus touchées par le Covid-19. Ce haut-fonctionnaire a poussé la logique administrative jusqu’à la faute politique : alors que les blouses blanches étaient en première ligne face au coronavirus, il a assuré que la restructuration du CHRU de Nancy allait se poursuivre… .

    Au-delà des jeux de rôles classiques entre élus, médecins et Etat, des problèmes très concrets sont venus ajouter ces dernières semaines aux ressentiments. « A un moment, il n’y avait plus de gel hydroalcoolique. On s’est tourné vers l’ARS. Ils nous ont dit “pas de problème, on en a plein”. Ils en avaient plein, mais on n’en avait pas , raconte ainsi Delphine Bagarry, députée (ex-LRM) des Alpes-de-Haute-Provence et médecin. Ils sont sympas [...] , c’est une institution nécessaire… mais elle est inopérante. »

    Autre souci, d’une ARS à l’autre les réponses peuvent différer sur une même question. Lorsque des médecins libéraux ont décidé de créer des centres de détection des malades du Covid-19, hors hôpitaux, ces initiatives ont été accompagnées… ou non. « Certaines ARS considèrent qu’il n’y a pas lieu d’aider les professionnels de santé libéraux. A part en Ile-de-France, en Bretagne et en Auvergne Rhône Alpes, il n’y a pas eu d’aides pour ceux qui ont mis en place des centres de dépistage » , explique Jacques Battistoni, président de #MG_France, le premier syndicat chez les médecins généralistes.

    « Les ARS sont restées hospitalo-centrées » , appuie le député LRM Philippe Chalumeau. Dans les Ehpad, des résidents sont morts étouffés, sans accompagnement médical, faute de moyens ou de savoir-faire. Et les ARS n’ont, parfois, pas entendu les cris d’alarme des familles. « Dans l’Ehpad où je travaille, à Tours, on a voulu créer une structure Covid, pour les onze malades. Cela revient à créer un petit hôpital. On a demandé à l’ARS comment faire. Ils nous ont dit de voir avec le service de gériatrie de l’hôpital, qui n’en avait pas les moyens. On a donc fait seuls. Les ARS n’ont pas la culture du médico-social » , poursuit M. Chalumeau.

    La gestion de la crise dans les Ehpad souligne aussi une autre faiblesse des ARS : un ancrage local insuffisant, une entente aléatoire avec les conseils départementaux. Lorsque le politique et l’administratif ne s’accordent pas, l’orchestre joue faux. « Si les directeurs régionaux tiennent la route face aux préfets de région, ce sont des profils plus divers au niveau départemental. C’est problématique, car la réponse aux élus se fait beaucoup à cette échelle » , pointe Marisol Touraine.
    En matière d’organisation, les ARS ont également souffert de la réforme territoriale de 2015 de François Hollande. L’Etat a réduit le nombre de régions, imposé une restructuration paralysante. Les salaires, par exemple, n’étaient pas partout les mêmes. Pas facile, dès lors, de fusionner les agences. Le chantier a consommé beaucoup d’énergie. « Sur une organisation encore juvénile, cette réforme inutile a eu un effet délétère », estime Roselyne Bachelot.

    Faut-il désormais, pour plus d’efficacité, une redistribution des rôles pour gérer les risques sanitaires ? Certains poussent dans cette direction. « La préfecture doit reprendre la main, en faisant le lien entre les ARS, les départements et les intercommunalités », propose Philippe Chalumeau. Une piste qui ne plaît guère à Marisol Touraine, qui y voit le retour de vieilles lunes. « L’idée des ARS, c’est de coordonner, de rassembler les politiques de santé à l’hôpital, en ville, dans le médico-social. Cette politique spécifique ne peut pas être portée par les préfets. Les préfectures n’ont en pratique pas le temps de s’occuper des politiques médico-sociales. Il y a une frustration des préfets et du ministère de l’intérieur, qui cherchent à pousser leurs pions » , considère l’ancienne ministre.

    Rivalité au quotidien

    Cette rivalité, entre représentants de l’Etat, date du premier jour. Et elle se vit au quotidien. « Lors de l’inauguration d’une maison de santé, vous avez deux discours, celui du directeur de l’ARS et celui du préfet, qui ne disent pas forcément la même chose. Qui parle en dernier ? Qui est le chef ? » , demande le député Thomas Mesnier.

    La crise du coronavirus a fait bouger beaucoup de lignes, montrant les forces, soulignant les failles. « Avec cette crise, l’hôpital revient à sa vocation première, qui est de soigner des patients. Les finances et les exigences budgétaires sont souvent loin du médical. Lorsqu’on est sur le soin, ça râle moins… » , observe Bernard Dupont, directeur général du CHRU de Nancy.

    En filigrane, la question-clé reste donc posée : celle des moyens. Des budgets ont été débloqués pour contrer le Covid-19. Et après ? Les ARS se sont abîmées, aux yeux des soignants, à incarner de longues années de politique d’austérité dans les hôpitaux, dont elles ont été les exécutrices zélées. « Les ARS ont un défaut de conception. On a construit un gros machin avec pour objectif de réduire les dépenses de santé, de rationaliser, c’est un outil conçu pour faire fermer des lits, pas pour gérer des crises », estime ainsi Ugo Bernalicis, député (La France insoumise) du Nord.

    La question des moyens ne s’arrête pas aux hôpitaux. Pour Roselyne Bachelot, un péché originel explique en partie les difficultés des ARS lors de la gestion de la crise sanitaire dans les Ehpad : « Dans leur feuille de route, il y avait au départ d’affronter la problématique du grand âge. Mais j’ai échoué à obtenir la réforme de la prise en charge de la dépendance. J’ai perdu l’arbitrage. Et tout le monde s’est retrouvé les bras ballants. » La réforme enterrée par Nicolas Sarkozy, qui l’avait pourtant érigée en priorité, est toujours un projet dix ans plus tard.

    #ARS #hôpital #offre_de_soin #territoires #santé

  • Rentrée scolaire dès mi-mai, un choix « politique », selon le Conseil scientifique
    https://www.lci.fr/politique/deconfinement-rentree-scolaire-des-11-mai-2020-un-choix-politique-selon-le-conse

    « Le Conseil scientifique a pris acte de la décision politique de réouverture prudente et progressive des établissements scolaires à partir du 11 mai prenant en compte les enjeux sanitaires mais aussi sociétaux et économiques », souligne l’instance présidée par le professeur Jean-François Delfraissy, dans une note mise en ligne samedi soir. Le Conseil était de son côté favorable à ce que les crèches et établissements scolaires restent fermés jusqu’en septembre, souligne-t-il dans un second avis publié en même temps, portant sur les mesures nécessaires à un déconfinement.

    Le document lui-même :
    https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/note_enfants_ecoles_environnements_familiaux_24_avri_2020.pdf

    • Avec cette déclaration du Conseil scientifique, je suspecte qu’on n’est pas loin de l’annulation pure et simple par le gouvernement : parce que ça ouvre illico la porte à la responsabilité juridique du gouvernement.

      S’il y a un cluster (et c’est assez inévitable) dans un lycée, et que des gamins ou des membres des familles meurent, il y aura des plaintes pénale contre les responsables politiques, et je ne vois pas derrière quel argument ils pourraient alors utiliser pour leur défense.

    • Anyway, vu l’absence totale de politique de prévention et d’information lisible et argumentée quant aux comportements à privilégier (entre injonctions contradictoires sans raison sanitaire et flou au carré) et vu l’amorce de #déconfinement observé, nous devrions malheureusement assister dès la fin du mois (avant ?) à une remontée des hospitalisations (le seul indicateur qui fasse effet dans l’ignorance entretenue). Je parie que ce sera en Ile de France.
      Quoi qu’en ait Jupiter, E. Philippe avait bien raison de couaquer en parlent de « granuler » (une expression que je découvre et que l’on retrouve chez #Babinet) et de régionaliser le déconfinement. Sauf à laisser filer, y aura pas moyen de faire autrement. L’école et les transports en commun des grandes villes (en particulier à Paris, en particulier sur la ligne 13), ça va pas le faire dans beaucoup d’endroits pour le 11 mai.

      #conseil_scientifique #déconfinement #école #politique_du_massacre_tranquille #épidémiologie_de_la_ligne_13

    • Déconfinement : entre l’avis du conseil scientifique et le plan du gouvernement, d’embarrassantes contradictions
      https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/26/deconfinement-entre-l-avis-du-conseil-scientifique-et-le-plan-du-gouvernemen

      Cette fois, les quatorze membres du conseil scientifique Covid-19 chargés de conseiller le chef de l’Etat pour lutter contre la pandémie ne s’en sont pas laisser conter. On pourrait même dire qu’ils se sont affranchis de leur tutelle élyséenne. Dans leur avis en date du 20 avril et rendu public samedi 25 avril, intitulé « Sortie progressive de confinement, prérequis et mesures phares », ils ont mis sur le papier « les conditions minimales nécessaires pour préparer de façon cohérente et efficace une levée progressive et contrôlée du confinement ».

  • #Coronavirus : masques, travail, écoles, transports… Le conseil scientifique très prudent sur les conditions du déconfinement
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/25/coronavirus-masques-systematiques-teletravail-ecoles-le-conseil-scientifique

    Pour répartir au mieux les patients selon leur état de santé et éviter l’embouteillage dans les hôpitaux, il suggère la création d’« établissements intermédiaires pour la prise en charge des patients issus des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (#Ehpad) ». Il insiste aussi sur une « une médecine de ville repositionnée en première ligne », dotée d’outils de suivi numérique des patients. L’accès « sur tout le territoire » à des #tests « fiables » est un autre prérequis, avec la création de centres de diagnostics dédiés.

    #paywall

  • Un objectif de 500 000 tests par semaine d’ici le 11 mai

    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/25/pour-le-gouvernement-un-week-end-de-travail-pour-preparer-le-deconfinement_6

    Le ministre de la santé, Olivier Véran, visite samedi matin à Saint-Denis (Saine-Saint-Denis) un laboratoire qui réalise des tests PCR, c’est-à-dire des tests virologiques permettant de dire qu’un malade est infecté ou non. L’entreprise a dû réorganiser son plateau technique pour répondre aux besoins de l’épidémie. Il s’agit du premier déplacement de M. Véran depuis un mois.

    L’objectif du gouvernement est de pouvoir réaliser 500 000 tests par semaine d’ici le déconfinement le 11 mai. Selon M. Véran, la France en effectue « 40 000 à 50 000 par jour » en ce moment. L’enjeu réside aussi dans la généralisation prochaine de tests sérologiques, en attente d’homologation. Ces tests sanguins permettent de savoir si une personne a été infectée par le virus et le niveau d’anticorps développé offrant une potentielle immunité.

    Tester l’ensemble des Français pour savoir s’ils sont porteurs du coronavirus serait en revanche « impossible » et « n’a pas de sens au niveau médical », a jugé Olivier Véran, réaffirmant la « priorité » donnée au dépistage des malades. « On va faire tester 60 millions de Français tous les jours ? C’est impossible, aucun pays au monde ne le fait », a déclaré le ministre, expliquant, d’une part, que les capacités de tests actuelles n’étaient pas suffisantes et, d’autre part, qu’un test virologique négatif un jour donné n’empêchait pas d’être infecté sans le savoir dès le lendemain.

    La « priorité nationale » sera alors de tester les personnes présentant des symptômes du Covid-19 et celles ayant été en contact rapproché avec des cas confirmés de la maladie, a-t-il rappelé. « Si, après, on voit qu’on n’est pas saturés en capacité de tests et qu’on peut élargir les critères, on le fera progressivement », a-t-il affirmé.

    Ces trucs c’est aussi des procédés de bons élèves. On pose une fausse question/hypothèse (tester tout le monde), on montre qu’elle est sans intérêt et/ou intenable et on peut ensuite parler d’autre chose, comme prévu. (cf, les intros de disserts ENS dont on retrouve trace dans tant d’articles, voir par exemple toute une série d’éditos de feue Vacarme). Bon là, il arrive pas trop à faire le malin (les thèses de médecine, c’est par normal sup’).
    Pas un mot d’épidémiologie dont une part du taff supposerait il me semble de tester des échantillons de population pour en savoir davantage sur le Covid-19, et y compris pourquoi avec des entretiens détaillés sur les pratiques, avec ou sans masque, par exemple, puisque la pratique se répand. C’est comme l’immunité de troupeau, ils sont aveuglément sur le ex-post, l’après-coup comme moment de vérité, ça se vérifie toujours, malgré leur scientisme, ils dédaignent ce qui pourrait permettre d’anticiper, de de prévoir.

    #à_radier_de_l'ordre_des_médecins_rapido

  • Coronavirus : avec les équipes mobiles chargées de casser les chaînes de contagion jusqu’au sein des familles
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/23/coronavirus-avec-les-equipes-mobiles-chargees-de-casser-les-chaines-de-conta


    RAFAEL YAGHOBZADEH POUR « LE MONDE »

    REPORTAGE « Le Monde » a suivi une équipe de la Pitié-Salpêtriêre qui intervient au domicile de personnes potentiellement contaminantes pour les tester et leur proposer des solutions d’isolement.

    Lorsque Mme L. a vu débarquer dans son salon Hélène, Camille et Jean-François dans leurs « pyjamas bleus » d’hôpital, surblouses, gants et masques sur le visage, elle ne s’est pas vraiment détendue. Hors de question que sa petite famille (quatre enfants) se fasse tester au Covid-19. Et surtout pas elle.

    « Je déteste l’hôpital, les prises de sang… Alors qu’on me fasse un prélèvement dans la narine, ce qu’il y a de plus délicat, quelle angoisse ! » Déjà, elle n’avait « pas dormi de la nuit » après avoir appris de son mari qu’il avait vu récemment son oncle et sa tante, et que tous les deux étaient contaminés. « Notre fils aîné s’est mis à pleurer et a crié : “Papa, si tu as ramené ça à la maison... !” » Pour en avoir le cœur net, le père a appelé le centre « Covisan » de la Pitié-Salpêtrière, dans le 13e arrondissement à Paris.

    Covisan, c’est le dispositif qu’expérimente l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) à partir de quatre sites pilotes. Lancé mercredi 15 avril à la Pitié-Salpêtrière, il est désormais également testé à Bichat (18e) et Louis-Mourier à Colombes (Hauts-de-Seine), et depuis le 22 avril à Avicenne à Bobigny. Robert-Debré (19e) et l’Hôtel-Dieu (4e) doivent le rejoindre en fin de semaine.

    Si les résultats sont jugés probants, il sera étendu à l’ensemble de l’Ile-de-France et a vocation à essaimer partout dans le pays. Il préfigure une nouvelle stratégie face à la pandémie. Les mesures de distanciation sociale et de confinement ont atteint leur limite pour endiguer la progression de l’épidémie. Il s’agit désormais de casser les chaînes de transmission en identifiant et en isolant les personnes potentiellement contaminantes – et dont l’état ne nécessite pas une hospitalisation – jusqu’au sein des familles. Une façon de préparer le déconfinement du 11 mai en évitant une deuxième flambée.

    Hélène, Camille et Jean-François ont « mis la musique des Experts » les premiers jours où ils ont pris la Zoé électrique pour partir en mission. Ils forment le rouage essentiel du dispositif : les équipes mobiles qui interviennent à domicile.

    Résultats communiqués en vingt-quatre heures

    A la Pitié-Salpêtrière, trois équipes constituées de trios enchaînent les visites de 10 heures à 20 heures. Tous sont bénévoles. Camille, cadre dans l’industrie pharmaceutique, s’est inscrite à la réserve sanitaire. Jean-François, « en télétravail très amenuisé dans l’informatique » , a fait ses classes de secouriste à la Croix-Rouge. Hélène est interne en gynécologie. Elle a reçu une formation express pour pratiquer le dépistage du Covid-19 avec un écouvillon. Le lendemain, c’était son baptême du feu chez Mme L. « Finalement, ça s’est très bien passé, on a pu prélever toute la famille. J’ai juste eu du mal à aller jusqu’au fond des fosses nasales de l’un des plus jeunes car elles n’étaient pas encore complètement formées. » Les résultats seront communiqués dans vingt-quatre heures.

    « Surtout, vous n’oublierez pas de m’appeler, ça me déstressera ! » , lance la mère de famille. Après trois quarts d’heure de discussion, elle a retrouvé le sourire et même donné son feu vert pour se faire dépister. « Ce n’était pas si terrible » , concède-t-elle.

    Mme L. a également accepté de porter un masque désormais ( « Ça m’oppresse, mais s’il faut le faire, je le ferai » ) pour aller faire les courses. Après chaque visite, l’équipe laisse deux « kits » par foyer comprenant gel hydroalcoolique et quatorze masques chirurgicaux. De quoi « tenir » théoriquement pendant une semaine. « Doit-on rester en quarantaine en attendant les résultats ? » , s’inquiète cette assistante d’éducation au chômage partiel. « Non, il vous suffit de limiter les sorties et de respecter les gestes barrières », rassure Jean-François.

    Le trio a pris le temps de bien montrer comment se laver les mains, porter un masque, désinfecter les poignées de portes et les interrupteurs, insister sur l’importance d’aérer l’appartement ou de laver le linge à 60 °C, et tant pis pour les économies d’énergie. A la fin de l’entretien, le fils aîné glisse tout de même qu’il tousse un peu le soir, dans son lit, depuis quelques jours. Rien d’inquiétant pour l’équipe. Aucun autre symptôme n’a été associé. « A priori, il n’y a pas de personne à risque qui nécessite un isolement » , juge Camille, qui, le dimanche précédent, était intervenue chez l’oncle et la tante malades.

    « Cinq personnes dans un studio sans fenêtre »

    Par précaution, et sans présumer des résultats des tests, l’équipe explique les possibilités qui s’offrent à la famille : s’isoler à domicile (ce que permet dans leur cas le nombre suffisant de pièces) ou à l’hôtel. Le groupe Accor a mis à disposition trois établissements aux portes de Paris et se dit prêt à en ouvrir 300 dans toute la France. « Si par malheur mon mari est positif, je préfère qu’il aille à l’hôtel car le petit dernier est toujours collé à son père et ce sera la crise de nerfs si on doit l’empêcher d’aller le voir dans sa chambre » , prévient Mme L.

    Depuis le début de l’expérimentation, très peu de personnes ont fait le choix de l’hôtel. Un ressortissant cambodgien vivant avec ses parents de 73 ans a accepté d’être exfiltré. « Il se plaignait de courbatures et était inquiet pour ses parents qui ne respectaient pas les gestes barrières » , explique Lila, une autre bénévole. Selon le protocole retenu, il devra rester sept jours dans sa chambre, dont deux sans présenter de symptômes, avant de pouvoir retourner chez lui. Au gré de leurs visites, les équipes découvrent des situations qui nécessiteraient un isolement en dehors du domicile familial mais ils se heurtent aux réalités sociales.

    « On a eu le cas d’une famille de cinq personnes vivant dans un studio sans fenêtre , raconte Carole qui fait équipe avec Lila. Un des membres a été hospitalisé et tout le monde se repasse le virus. On a proposé d’isoler la maman mais on nous a opposé un grand “non : qui va faire à manger ?” ! On ne peut pas les forcer, c’est du volontariat. »

    L’équipe doit adapter sa stratégie. Elle considère que le foyer est « condamné » et essaie désormais de « protéger l’extérieur » . Un des fils a été testé positif mais continue à travailler « plus ou moins légalement » . Le médecin traitant de la famille a été contacté pour qu’il tente de le convaincre de cesser.

    « Un problème de transmission hallucinant »

    La médecine de ville est un maillon essentiel à la réussite et à la généralisation de l’expérience. Les généralistes seront précieux pour assurer le suivi des malades après le passage des équipes mobiles. Pour l’heure, certains commencent à adresser leurs patients au centre Covisan. D’autres arrivent par les urgences ou après avoir appelé le SAMU.

    Aurore Sousa, elle, a été identifiée à partir d’un patient passé par la Pitié-Salpêtrière. Elle est venue en voisine. Elle est gardienne d’un immeuble dans le 13e arrondissement. « J’ai reçu un appel hier me demandant de me présenter car j’aurais travaillé avec quelqu’un qui a le coronavirus » , dit Mme Sousa, 53 ans, « pas inquiète » et « en forme » . L’équipe qui n’est pas en visite l’installe dans la « salle d’entretien ».

    « De la toux ? Non.

    – De la fièvre ? Non.

    – Pas de diarrhées ? Non.

    – Pas de perte d’odorat ? Je n’en ai jamais trop eu. Mais si quelqu’un sent mauvais ça me dérange. »

    Mme Sousa est ce que les professionnels du Covid-19 appellent une personne « contact ». Elle a été en relation avec un propriétaire malade. La gardienne lui monte le courrier et les courses mais reste toujours sur le palier, assure-t-elle. Elle est arrivée avec un masque, qu’elle porte à l’envers et qui ne lui protège pas le nez. On lui montre comment l’ajuster correctement avant de lui suggérer un dépistage, qu’elle accepte ( « Ça me rassurera même si je pense que je n’ai rien » ). Pas la peine, en revanche, de lui proposer un hôtel pour un éventuel isolement, Mme Sousa habite avec son mari un pavillon en banlieue de 230 m2 qu’elle désinfecte « à fond à la Javel » . Elle repartira quand même avec son kit de gel hydroalcoolique.

    Parfois, les équipes Covisan sont aussi confrontées à des problématiques qui les dépassent. Ils ont identifié deux clusters dans des foyers sociaux ou de travailleurs. « Il y a un problème de transmission hallucinant avec des cas positifs qui cohabitent dans une chambre avec des migrants. On n’a pas la force d’intervention » , expliquent les bénévoles. Le relais a été passé à l’Agence régionale de santé et aux organisations humanitaires.

    « On a trois mois de retard »

    « Idéalement, il faudrait avoir 500 équipes déployées juste sur Paris pour parvenir à casser la chaîne des transmissions et étouffer le virus » , estime Jean-Sébastien Molitor. Veste kaki, jean et barbe de baroudeur, il détonne dans le centre Covisan, installé à l’entrée de la Salpêtrière. Avec l’ONG Solidarités international, M. Molitor est intervenu en Afrique sur le front Ebola et en Haïti contre le choléra. Il met aujourd’hui son expérience au service de Covisan.

    Depuis le début de l’expérimentation, une centaine de personnes sont suivies sur l’ensemble des sites pilotes dont une très grande majorité par les équipes de la Salpêtrière.

    « On a trois mois de retard , déplorent Hélène et Camille. Si on avait déployé cette stratégie dès le début de l’épidémie, comme l’ont fait certains pays, on aurait payé un tribut beaucoup moins lourd. Mais on manquait de masques, de gels et de tests. Et aujourd’hui, encore, on ne peut laisser que deux kits par foyer. »

    #Covisan #dépistage #medecine_de_ville #hôpital_hors_les_murs #isolement

    • La réponse ne doit pas être centrée sur l’hôpital : Coronavirus : « Pour déconfiner sans provoquer une deuxième vague, une approche centrée sur le patient » , Renaud Piarroux, Bruno Riou, Profs de médecine
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/04/27/coronavirus-pour-deconfiner-sans-provoquer-une-deuxieme-vague-une-approche-c

      Les professeurs Renaud Piarroux et Bruno Riou décrivent, dans une tribune au « Monde », la stratégie qu’ils prônent pour une sortie maîtrisée du confinement : détection, analyse, et proposition de solutions individuelles, sans contraindre les patients.

      Tribune. Le confinement a permis de ralentir la propagation du virus et ainsi d’éviter que les services de réanimation ne se trouvent débordés. Pour permettre d’aborder la période du déconfinement sans courir le risque d’une deuxième vague de l’épidémie, nous proposons une approche centrée sur le patient pour enrayer la propagation du virus dans son entourage. Cette approche, dont la mise en œuvre a débuté, implique des médecins généralistes, des services d’urgence, mais aussi des équipes mobiles, des pharmaciens, des services d’aide à la personne, des travailleurs sociaux, des collectivités locales, des volontaires d’ONG et de la Croix-Rouge et des structures hôtelières pour isoler les patients.

      La stratégie que nous proposons ne s’oppose pas aux mesures générales déjà prises (mesures barrières, distanciation sociale, confinement généralisé), mais elle les potentialise, permettant à terme de lever progressivement le confinement tout en limitant la propagation du virus. Elle est basée sur trois piliers essentiels : détecter, analyser, répondre.

      Il s’agit d’abord de détecter les patients, mais aussi les porteurs sains, puisqu’ils contribuent à la propagation du virus. La généralisation des tests diagnostiques au niveau de l’ensemble de la population n’est pas réaliste : même si tous les Français pouvaient être dépistés, cela prendrait trop de temps et ne nous donnerait qu’une image transitoire de la situation, une personne négative un jour pouvant être positive le lendemain. En revanche, la trajectoire de soins des patients peut guider cette stratégie de dépistage : il y a de fortes chances que le sujet symptomatique interagisse avec le système de soins, appelant le 15, se rendant à une pharmacie, à un cabinet médical ou dans un service d’urgence.

      Cartographier la transmission

      Une fois le diagnostic effectué, il est possible d’aborder avec le patient les mesures à prendre pour protéger son entourage. Les acteurs du système de soins deviennent alors des sentinelles, permettant d’accéder à un premier maillon des chaînes de transmission. L’important est ensuite d’emporter l’adhésion du patient et d’enclencher avec lui l’intervention d’équipes d’investigation et de réponse, permettant la recherche active de cas. Les sujets contacts des patients positifs, y compris ceux qui sont asymptomatiques, sont avertis de la possibilité d’être porteurs et diffuseurs de virus ou de le devenir rapidement. Ils doivent être testés. Avec eux, on peut envisager les mesures pour éviter toute propagation.

      Des équipes travaillent à des applications informatiques qui, grâce aux données de géo-localisation des téléphones, pourraient faciliter la recherche des sujets contacts lors d’une consultation médicale. Cela constituerait une sorte de complément à un interrogatoire médical classique. Un autre type d’application pourrait servir à prévenir un utilisateur lorsqu’il a été mis en présence d’une personne infectée. L’alerte donnée par l’application aurait alors pour but d’inciter les personnes à se faire détecter. Les limites de cette approche ne doivent pas être ignorées : l’utilisation de l’application étant basée sur le volontariat, si une personne omet de se déclarer positive, il ne sera pas possible de l’identifier, sans parler de tous ceux qui ne possèdent pas de téléphone portable. Comme cette application d’alerte est prévue pour être utilisée de manière anonyme et en l’absence de géolocalisation, elle ne sera pas utilisable à des fins de surveillance épidémiologique.

      Les éléments de la trajectoire de soins des patients pourraient être mis à profit pour cartographier dans le détail l’intensité de la transmission sur notre territoire. Identifier un quartier, une rue, un immeuble, où le nombre de cas est anormalement élevé (« hotspots ») permettrait de lancer une investigation ciblée et de déterminer les mesures appropriées. Les adresses et la connaissance des déplacements des personnes sont à la base de l’épidémiologie. Aucune intervention ciblée ne peut être envisagée en leur absence.

      Prise en compte du contexte

      L’interrogatoire des patients, le traçage de leurs contacts, l’établissement de cartes précises et quotidiennes de la détection des cas, l’identification des lieux fréquentés et les investigations de terrain sont autant d’outils qui peuvent permettre d’identifier les zones où l’épidémie persiste et de suivre les chaînes de transmission. Ces analyses doivent se faire au niveau local et général, car les solutions sont parfois locales, parfois plus générales. Elles nécessitent de l’expérience et des échanges entre les différents niveaux, des bases de données et des scripts informatiques pour en tirer les informations essentielles, modéliser l’évolution épidémique, anticiper les résultats attendus des interventions.

      Là encore, des solutions informatiques plus complexes, avec ou sans intelligence artificielle, ont été proposées. Il ne faut pas les écarter si elles rendent des services mais les outils informatiques ne peuvent remplacer le travail d’épidémiologistes qui engrangent les données, échangent avec le terrain, et s’y rendent lorsque c’est nécessaire.

      La surveillance épidémiologique n’a de sens que si elle est suivie d’actions. Il y a autant de modalités de réponse que de situations : on n’intervient pas de la même manière dans un hôpital, un établissement pour personnes âgées, un foyer d’immigrés, sur un bateau ou au domicile d’un patient. Même dans ce dernier cas, la réponse doit être adaptée au contexte. Selon le quartier, la composante sociale sera particulièrement importante, nécessitant l’intervention de travailleurs sociaux, de l’hospitalisation à domicile, d’associations de quartier, d’acteurs humanitaires, de services municipaux, de leaders communautaires. Dans d’autres cas, il s’agira surtout d’aider la famille à organiser son confinement, et un relogement dans un hôtel doit pouvoir être proposé. Il s’agit de proposer et en aucun cas de contraindre, d’emporter l’adhésion du patient et de sa famille autour d’un objectif simple : les protéger et leur éviter de tomber malades, d’être hospitalisés.

      Des équipes multidisciplinaires et mobiles

      Les équipes mobiles que nous mettons en place à l’AP-HP s’inscrivent dans cette stratégie. Elles sont là pour établir un plan de confinement avec les familles qui le souhaitent, effectuer des prélèvements pour détecter la présence de cas secondaires au sein du foyer. Elles sont composées au minimum d’un binôme associant une personne possédant une compétence dans le domaine social et une autre dans celui des soins (infirmier, médecin, pharmacien biologiste, interne, externe). Il ne s’agit pas de la seule modalité de réponse, des visites pouvant aussi être organisées par des travailleurs sociaux, des organisations humanitaires. L’activation de la réponse ne doit pas être centrée sur l’hôpital. Les médecins de ville, le SAMU, les services des mairies, des départements, des régions et de l’Etat, la Croix-Rouge sont partie prenante, enclenchant une réponse, l’accompagnant ou assurant des services supports pour la rendre effective (aide pour faire les courses, solutions d’hébergement).

      Ces équipes mobiles font le lien entre le système de soins et le cadre de vie du patient et s’inscrivent dans la relation thérapeutique. Elles sont une source inestimable de renseignements sur le contexte de la transmission du virus. Il s’agit d’aider le patient à protéger ses proches, un objectif qu’il peut volontiers comprendre. Cette relation de confiance doit pouvoir s’opérer, y compris pour des patients en situation irrégulière, ou pour d’autres, amenés, par nécessité, à enfreindre les règles du confinement. Il s’agit d’expliquer, de faciliter, d’aider, de convaincre, jamais de contraindre. Sinon, bon nombre de patients nous échapperont.

      Lutter contre la transmission du Covid-19 est un sujet complexe qui implique la mise en œuvre d’approches multiples et complémentaires. Il est important que tous les acteurs impliqués puissent se retrouver autour d’une table – ou, confinement oblige, autour d’une conférence téléphonique – afin d’échanger sur leurs pratiques, de partager des informations, de se répartir le travail, bref, de se coordonner. Une stratégie commune, pour atteindre un objectif partagé, un système d’information opérationnel et une coordination : il n’y a là rien de nouveau, mais c’est d’autant plus nécessaire que la crise est grave et que la solution est complexe.

      À rapprocher d’un texte plus ambitieux : Une nouvelle définition politique du soin (U.S.A) car explicitement #médecine_sociale ≠ pontes APHP
      https://seenthis.net/messages/848403

      #patient #relation_thérapeutique #trajectoire_de_soins #épidémiologie_de_terrain #multidisciplinarité

    • Covisans, Coronavirus : « Il faudra suffisamment d’équipes mobiles opérationnelles », pour empêcher un rebond de l’épidémie, Renaud Piarroux, chef du service de parasitologie de l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière, propos recueillis par Paul Benkimoun et Chloé Hecketsweiler, 2 mai 2020
      https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/05/02/coronavirus-avec-covisan-nous-formons-des-centaines-d-equipes-mobiles-pour-l

      Pour le professeur Renaud Piarroux, chef du service de parasitologie de l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière, promoteur du dispositif, le traçage et l’isolement des malades devraient faire ralentir la circulation du virus.

      Epidémiologiste de terrain et chef du service de parasitologie de l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière, le professeur Renaud Piarroux est le promoteur de Covisan, un réseau d’équipes mobiles à Paris et en Ile-de-France destiné à aider les personnes atteintes par le Covid-19 à se confiner. Il estime qu’une fois développé, ce dispositif permettrait de faire face à une reprise de l’épidémie.

      Comment anticipez-vous l’évolution de l’épidémie de SARS-CoV-2 dans les semaines qui viennent et en particulier à partir de la sortie progressive du confinement ?

      L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) travaille sur une modélisation des admissions à venir de patients atteints d’un Covid-19 dans les services de réanimation de nos hôpitaux. Elle est basée sur la version la plus récente du modèle de Simon Cauchemez de l’Institut Pasteur. Cette modélisation envisage l’évolution ultérieure de ces admissions jusqu’à la fin juin selon différentes hypothèses sur la circulation du virus.

      De plus de 2 500 au début avril, le nombre de patients hospitalisés en réanimation en Ile-de-France se situerait le 21 mai autour de 559, dont 256 dans des hôpitaux de l’AP-HP. Il s’agit d’un « point bas », établi dix jours après le début du déconfinement soit l’intervalle moyen entre la contamination et l’admission en réanimation.

      En partant de l’hypothèse d’un nombre de reproduction [le nombre moyen de contaminations à partir d’un même individu infecté] de 1,2, cette courbe descendante se poursuivrait, avant de s’infléchir légèrement à la hausse pour atteindre 497 patients en réanimations en Ile-de-France au 30 juin. Ce chiffre s’élèverait à 1 139 avec un nombre de reproduction à 1,5, sachant qu’il atteignait 3,5 au début de l’épidémie.

      A mon avis, l’évolution pourrait même être encore meilleure, avec un taux de reproduction autour de 1, si nous parvenons à généraliser le dispositif Covisan [d’accompagnement des patients pour les aider à se confiner], que nous testons actuellement dans différentes zones de l’Ile-de-France.

      Avez-vous travaillé sur des scénarios plus pessimistes ?

      Les modèles incluent toujours des hypothèses d’une absence de mesures ou d’un retour à la situation qui préexistait au moment de l’instauration du confinement. On peut cependant écarter cette éventualité, qui prendrait la forme d’un rebond de l’épidémie en juin avec un retour à un niveau presque aussi élevé que celui du début avril.

      Il n’y a aucune raison pour que l’épidémie se développe de la même manière qu’en mars. Les comportements de la population ont évolué par rapport à cette époque où beaucoup de gens ne percevaient pas bien le danger que le Covid-19 représentait.

      Comment vous préparez-vous face à l’éventualité d’une seconde vague de l’épidémie ?

      Nous devons nous mettre dans des conditions nous permettant de sentir venir une éventuelle nouvelle vague. Si nous parvenons à maintenir un nombre de reproduction ne dépassant pas 1,5, la montée du nombre des hospitalisations et des admissions en réanimation sera lente. Le plus probable est que le mois de mai et le début juin soient un peu plus calmes pour les services hospitaliers, en particulier en réanimation.

      Après cela, l’épidémie reprendra-t-elle ? Cela dépendra de ce que nous ferons pour l’éviter. En pratique, cela signifie détecter les cas possibles d’infection, tester et isoler les sujets infectés et retracer leurs contacts qu’il faudra aussi tester et isoler s’ils sont positifs.

      C’est le travail des équipes mobiles – terme que je préfère à celui, plus militaire, de « brigades » –, qui doivent joindre ces personnes avant qu’elles ne transmettent le virus.
      L’objectif d’un déconfinement progressif est de rester avec un nombre de reproduction inférieur à 1. Qu’est-ce que cela implique ?

      Il faudra suffisamment d’équipes mobiles opérationnelles. Tous les jours, je présente le dispositif Covisan à un amphi d’une centaine de volontaires qui viennent se former pour intégrer ces équipes. Ce sont des étudiants en médecine et en soins infirmiers, mais aussi des stewards et des hôtesses de l’air, des membres d’associations…

      Nous formons des centaines d’équipes mobiles pour l’Ile-de-France, mais la formation en quelques jours aux tâches qu’ils auront à accomplir ne suffit pas. Ils doivent être encadrés par des personnes plus chevronnées, et équipés, véhiculés, soutenus. Le défi est d’être opérationnel en quelques jours.

      Quelle est actuellement la force de frappe de ces équipes mobiles ?

      Nous avons déjà formé plus de 500 personnes. Une trentaine nous a rejoints à l’hôpital de la Pitié ; d’autres ont été dispatchés sur une dizaine d’autres sites hospitaliers de l’AP-HP. Je souhaite que le dispositif s’étende au plus vite. Ce travail se développe aussi en ville à Aubervilliers, Pantin et Bondy, ainsi que dans plusieurs arrondissements de Paris avec l’implication forte des médecins généralistes et des services municipaux.

      Les patients inscrits sur le site de télésuivi Covidom seront aussi contactés. Nous espérons disposer d’un maillage assez serré d’ici au milieu de la semaine prochaine, afin de rater de moins en moins de patients atteints du Covid-19.

      Quel est le principal enjeu à vos yeux ?

      C’est de former des équipes qui sachent parler aux patients et à leurs proches, capables de gagner la confiance de personnes parfois traumatisées par l’épidémie, ou en situation de grande précarité ou sans papiers, et avec elles de voir comment protéger et dépister leurs proches, leur entourage.
      Il s’agit tout autant d’aider les patients et leur famille que de casser les chaînes de transmission. L’un ne doit pas aller sans l’autre.

      Où les personnes que rencontrent les équipes mobiles seront-elles testées ?

      Elles pourront être testées n’importe où, y compris à l’occasion de visites à domicile, où le prélèvement peut être effectué. Les analyses seront ensuite réalisées soit sur une plate-forme à l’hôpital Broussais, soit dans d’autres centres.

      Nous n’attendons pas les résultats pour isoler les personnes pour lesquelles il existe une suspicion de Covid-19. Elles ont consulté un médecin qui a posé un diagnostic, les a orientées vers le Covisan, évalué s’il y a lieu d’hospitaliser le malade ce qui, dans la très grande majorité des cas n’apparaît pas nécessaire.

      A chaque fois que possible, le médecin de ville doit être dans la boucle. C’est plus simple là où les médecins se sont organisés comme dans les communes et arrondissements parisiens que j’ai cités précédemment.

      Que nous apprennent les statistiques de décès sur la surmortalité liée au Covid-19 ?

      En nous servant des données de l’Insee, nous établissons des graphiques sur la mortalité en population générale toutes les semaines. Nous sommes toujours dans une période de surmortalité, mais cela va mieux.
      Depuis le 1er mars, plus de 24 000 décès liés au Covid-19 ont été à déplorer dans les hôpitaux et les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), mais il ne semble pas y avoir eu beaucoup de décès au domicile, à la différence par exemple de ce qui s’est produit à New York.

      En dehors des décès liés au Covid-19, il y a probablement des morts supplémentaires par rapport à 2019 et 2018, avec plus de décès dus à des infarctus ou des AVC [accidents vasculaires cérébraux], mais aussi moins dans les accidents de la route.

      Finalement, comment voyez-vous les mois à venir ?

      Nous connaîtrons deux moments critiques : juin-juillet, pour les effets du déconfinement, et octobre-novembre, période de réémergence des épidémies de virus respiratoires, avec notamment la grippe saisonnière. Nous devons anticiper afin de proposer une réponse pour éviter que la situation ne dérape.

      Les épidémiologistes sont pour une fois d’accord entre eux : la catastrophe envisagée n’a pas eu lieu grâce au confinement. Pour l’instant, il faut en profiter pour récupérer et permettre à notre système de soins de reconstituer ses forces.

      Edit
      Comment vont fonctionner les « brigades sanitaires » anti-coronavirus ? 3 Mai 2020
      https://www.zinfos974.com/Comment-vont-fonctionner-les-brigades-sanitaires-anti-coronavirus_a154023

      #épidémiologie_de_terrain #équipes_mobiles #médecins_généralistes #patients #détecter #tester #isoler #Covidom

  • Dépistage du #coronavirus : les raisons du fiasco français sur les tests

    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/24/nous-attendons-d-etre-contactes-par-l-ars-mais-il-ne-se-passe-rien-le-fiasco

    « Testez, testez, testez ! » Aucun conseil de lutte contre le Covid-19 n’a été moins suivi, en France, que celui énoncé le 16 mars par Tedros Adhanom Ghebreyesus, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). L’idée est pourtant simple. Dépister les personnes suspectées d’être porteuses du virus, même faiblement symptomatiques, permet de les isoler et de rompre la chaîne de transmission de la maladie.

  • Covid-19 fait désormais plus de morts chaque jour aux États-Unis que les attentats du 11 septembre 2001. Il va devenir urgent de trouver un pays à bombarder.
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/24/le-coronavirus-dans-le-monde-pres-de-50-000-morts-aux-etats-unis-apres-l-une

    Les Etats-Unis ont connu l’une de leurs pires journées depuis le début de la pandémie, avec 3 176 morts enregistrés sur vingt-quatre heures. Le pays de loin le plus touché par l’épidémie déplore près de 50 000 morts.

  • Coronavirus : les applications de traçage des malades divisent les chercheurs en Europe
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/23/covid-19-les-applications-de-tracage-des-malades-divisent-les-chercheurs-en-

    Sécurité, technologie, protection des données : les experts, notamment français, s’étrillent sur les différentes solutions techniques proposées pour faciliter le repérage des « cas contacts » au coronavirus. La tension monte autour des futures technologies dites de suivi de contacts, qui doivent aider à contrôler l’épidémie de Covid-19 en enregistrant les personnes qui ont été en contact avec un malade afin qu’elles s’isolent. Un consortium de chercheurs développant une telle solution vient de se (...)

    #DP3T #surveillance #santé #COVID-19 #BigData #métadonnées #FAI #géolocalisation #anonymat #TraceTogether #StopCovid #smartphone #PEPP-PT #Bluetooth #contactTracing #algorithme #Google (...)

    ##santé ##Apple

  • « Ce n’est pas le moment de soutenir l’aviation coûte que coûte » : le Haut Conseil pour le climat rappelle l’urgence de la transition écologique
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/21/ce-n-est-pas-le-moment-de-soutenir-l-aviation-coute-que-coute-le-haut-consei

    L’instance indépendante appelle le gouvernement à conditionner les aides publiques destinées aux secteurs sinistrés à « des plans précis » en faveur du climat.

    Sortir du carbone, c’est-à-dire des énergies fossiles, pour faire face au choc sanitaire, mais également au choc climatique. Voilà le principal appel du Haut Conseil pour le climat (HCC), dans son rapport spécial « Climat, santé : mieux prévenir, mieux guérir », publié mardi 21 avril et envoyé au gouvernement afin de l’aiguiller dans la sortie de crise du Covid-19.

    Les treize experts de cette instance indépendante, installée fin novembre 2018 par Emmanuel Macron, exhortent l’exécutif à placer la transition écologique et l’égalité sociale au cœur de la relance économique afin de renforcer notre résilience aux risques sanitaires et climatiques. Ils font dix-huit recommandations pour y parvenir, et demandent notamment de conditionner les aides publiques destinées aux secteurs sinistrés à « des plans précis » en faveur du climat.

    « Cette catastrophe sanitaire nous rappelle de manière brutale notre fragilité. Elle montre le peu d’attention que l’on prête aux alertes, le manque de préparation et de prévention, mais également les conséquences de choix politiques qui ont conduit, depuis plus de quarante ans, à des transformations écologiques, sociales et économiques majeures produisant ces vulnérabilités », souligne Corinne Le Quéré, la climatologue franco-canadienne qui préside le HCC. Et de rappeler : « La plupart des causes du Covid-19, comme la déforestation ou les énergies fossiles, sont aussi à l’origine du changement climatique. Il faut donc s’attaquer à ces causes profondes, et la transition bas carbone est une réponse. »

  • Nous v’là bien… Coronavirus : la nicotine pourrait-elle protéger de la maladie ?
    https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/coronavirus-la-nicotine-protegerait-de-la-maladie-1587531131

    Le professeur de médecine interne Zahir Amoura, qui a mené l’étude, a constaté qu’il y a très peu de fumeurs parmi ces patients. Les médecins ont regardé s’ils fumaient plus ou moins que la population générale de même sexe ou de même âge. « On avait un taux de fumeurs qui était de l’ordre de 5%, ce qui est bas », explique Zahir Amoura à France inter. « Il y a à peu près 80% de moins de fumeurs dans les populations Covid que dans la population générale, de même sexe et de même âge. »

    Il y aurait donc quelque chose dans le tabac qui protège contre le Covid-19, et pourquoi pas la nicotine. Par l’entremise d’une connaissance commune, le prix Nobel de physique Serge Haroche, Zahir Amoura rencontre le neurobiologiste de renommée mondiale Jean-Pierre Changeux qui suggère que la nicotine pourrait empêcher le virus de pénétrer dans les cellules. « L’idée était que la nicotine interfèrerait avec l’attachement du coronavirus sur le récepteur de la nicotine, et puisse donc s’opposer à la propagation du virus. »

    • Breaking news ; : la victoire sur le Covid-19 ?

      "Ce soir en exclusivité mondiale dans « C’est à vous », Anne Elsabeth Lemoine et Patrick Cohen vous racontent minute par minute leurs 24 heures de vol avec la Première dame et Marlène Schiappa dans l’Airbus présidentiel jusqu’au Melanokistan, d’où elles ont exfiltré pour la reconduire à Paris la doctoresse Fu-Mancha, réfugiée Ouîghoure qui vient de réussir, dans un hôpital clandestin sponsorisé par Danone une première mondiale qui va changer la face du monde ;

      En effet la doctoresse Fu-Mancha vient de réussir à annihiler le Corona en injectant de l’amiante à deux pangolins et demi.

      Le président Macron qui a suivi le vol depuis le bunker de l’Elysée vient d’annoncer à l’AFP qu’une messe solennelle sera prononcée demain à Notre-Dame et que Christophe Castaner vient d’ordonner à tous les préfets de faire sonner demain les cloches de toutes les églises de France, ce qui signera la fin anticipée du confinement.

      Vive Danone, vive la doctoresse Fu-Mancha, vive Moi !"

      Ne quittez pas l’antenne.

      Et maintenant une page de publicité...

    • L’effet cancérigène de la nicotine seule n’a pas pu être prouvé sur des rats soumis à des concentrations élevées de nicotine pendant une période significative28. Par contre son effet sur les récepteurs d’acétylcholine facilite la croissance des tumeurs en favorisant l’angiogenèse29. WP
      Vapotez !!

    • Quand je pense que ça fait un mois qu’on a habitué nos enfants à boire un petit verre de Picon tous les soirs avant de se coucher. Et que maintenant on apprend qu’en fait c’était pas ça…

    • à la pointe de l’actualité, @supergeante !

      Le Covid-19 est une inflammation vasculaire systémique plus qu’une pneumonie, selon une étude suisse - RTL Info
      https://www.rtl.be/info/monde/international/le-covid-19-est-une-inflammation-vasculaire-systemique-plus-qu-une-pneumonie-sel

      Les premiers patients présentaient surtout des pneumonies difficiles à traiter, a indiqué l’Hôpital universitaire de Zurich (UZH) dans un communiqué. Puis, par la suite, les médecins ont constaté de plus en plus de cas de troubles cardio-vasculaires et de défaillances multiples d’organes sans lien apparent avec la pneumonie. L’équipe de Zsuzsanna Varga à l’UZH a donc examiné au microscope des échantillons de tissus de patients décédés et constaté que l’inflammation touchait l’endothélium - la paroi interne des vaisseaux sanguins - de différents organes. Le virus SARS-CoV-2 a pu être détecté dans l’endothélium lui-même, où il provoque la mort des cellules, puis des tissus et organes touchés.

    • Après quelques explications de Le Monde
      https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/22/coronavirus-une-proportion-reduite-de-fumeurs-parmi-les-malades_6037365_3244

      Comment expliquer une telle proportion ? Une hypothèse mentionne le rôle central que pourrait jouer le récepteur nicotinique de l’acétylcholine dans le Covid-19, ont indiqué le neurobiologiste Jean-Pierre Changeux (découvreur du récepteur nicotinique) et Zahir Amoura dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences (disponibles sur Qeios).

      « Nombreux agents toxiques »

      Pour aller plus loin, indique Zahir Amoura, « des essais thérapeutiques vont être proposés pour évaluer l’effet des patchs de nicotine », incluant des patients infectés hospitalisés et des soignants non infectés. « Nous sommes en train de mettre en place une évaluation rigoureuse de ces approches avec le soutien du ministère de la santé », explique Florence Tubach. En effet, « il faut être très vigilant sur les effets secondaires de la nicotine, surtout pour les non-fumeurs », souligne le pneumologue Bertrand Dautzenberg.

      l’article se conclut par un rappel des méfaits du tabac et par un plaidoyer de tabacologues

      « Le confinement peut être un moment opportun pour arrêter de fumer » , ajoute Anne-Laurence Le Faou, présidente de la Société francophone de tabacologie.

      « C’est bien de lutter contre ce virus, mais il serait logique que les Etats consacrent plus de moyens à la guerre contre le tabac qui tue environ 7 millions de personnes chaque année dans le monde, c’est-à-dire un fumeur sur deux », assure le professeur de pneumologie Alexandre Duguet (Sorbonne Université).

      comme si, sauf exception ou minorité qui arriveraient à se saisir de ce moment, tout montrait pas au contraire que le caractère anxiogène de la pandémie, du confinement, de la situation socio-politique et de ses développements éventuels ne pouvaient qu’encourager les nicotinomanes à recourir davantage à cette drogue, comme pour l’alcool.

      #nicotine

  • Coronavirus : le Conseil d’Etat demande une « vigilance particulière » avec les épandages agricoles, Stéphane Mandard
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/20/coronavirus-le-conseil-d-etat-demande-une-vigilance-particuliere-avec-les-ep

    Les épandages agricoles sont à l’origine de pollution aux particules fines dont des études montrent qu’elles aggravent la mortalité du Covid-19.

    S’appuyant sur plusieurs études scientifiques démontrant le lien de plus en plus solide entre la pollution de l’air et la mortalité du Covid-19, l’association Respire et son avocate, Corinne Lepage, avaient demandé en référé au Conseil d’Etat d’enjoindre au gouvernement de prendre toutes les mesures pour limiter les sources de pollution, en particulier les épandages agricoles (lisiers, engrais). Dans une ordonnance rendue lundi 20 avril, le juge des référés du Conseil d’Etat rejette la requête de l’association spécialisée dans la préservation de la qualité de l’air.

    La haute juridiction encourage toutefois l’administration à « faire preuve d’une vigilance particulière dans le contexte actuel d’état d’urgence sanitaire, en veillant à ce que soient prises, au besoin préventivement en cas de menace avérée de franchissement des seuils, des mesures propres à éviter la survenue ou au moins à réduire la durée des épisodes de franchissement des seuils, notamment en limitant les pratiques agricoles polluantes, l’activité agricole demeurant, en raison de la très forte diminution des pollutions liées à l’industrie et aux transports, la principale source d’origine humaine d’émission de particules avec celle provenant du secteur résidentiel, à plus forte raison dans la période actuelle d’épandage » .

    Pics de pollution printaniers

    Malgré une baisse historique de la pollution liée aux émissions d’oxydes d’azote (principalement dues au trafic routier et aux activités industrielles), la pollution aux particules fines, les plus dangereuses car elles pénètrent plus profondément les voies respiratoires, n’a en effet pas disparu avec le confinement. Des pics (avec des dépassements des normes) ont même été constatés fin mars en Ile-de-France ou dans le Grand-Est, les deux régions les plus touchées par le coronavirus. Selon Atmo-France, la fédération des organismes de surveillance de la qualité de l’air, qui doit publier, mardi 21 avril, un nouveau bilan, ces épisodes de pollution printaniers sont notamment dus aux épandages agricoles. Le mécanisme est bien connu : lors des épandages de lisier, de l’ammoniac est libéré qui va favoriser la formation de particules fines.

    « Ces particules fines [PM 2,5, de diamètre inférieur à 2,5 micromètres] abîment les muqueuses des voies respiratoires et du poumon, ce qui fait pénétrer plus facilement les virus au fond des voies aériennes » , explique Isabella Annesi-Maesano, directrice du département d’épidémiologie des maladies allergiques et respiratoires de l’Inserm et membre du collectif Air-Santé-Climat. Regroupant une dizaine de médecins et chercheurs, le collectif avait également interpellé les préfets pour leur demander de « limiter drastiquement les épandages agricoles, afin de tout mettre en œuvre pour limiter la propagation du virus » . En vain
    .
    Une hausse de seulement 1 μg/m3 de particules fines dans l’air est associée à une augmentation de 15 % de la mortalité du Covid-19
    L’association Respire avait de solides arguments. Plusieurs publications scientifiques montrent que la pollution de l’air est un facteur aggravant des impacts sanitaires du coronavirus. La dernière en date, publiée le 7 avril par des chercheurs de l’université Harvard, aux Etats-Unis, établit un lien entre pollution de l’air et létalité du Covid-19. A partir de l’analyse des données d’environ trois mille comtés américains, ils concluent qu’ « une légère augmentation de l’exposition à long terme [dix à quinze ans] aux particules fines PM2,5 entraîne une forte augmentation du taux de mortalité par Covid-19 » . Ainsi, une hausse de seulement 1 μg/m3 de particules fines dans l’air est associée à une augmentation de 15 % de la mortalité du Covid-19.

    Une étude italienne, publiée le 17 mars, par la Société italienne de médecine environnementale, montrait aussi une corrélation entre les niveaux de pollution élevés en Lombardie et le nombre important de victimes du coronavirus. Et, en 2003 déjà, une étude publiée dans la revue scientifique de santé publique Environmental Health et consacrée au SRAS montrait que les patients chinois vivant dans des zones fortement polluées avaient deux fois plus de risques de mourir du SRAS que ceux des régions peu polluées.

    Le Conseil d’Etat fait valoir que ces études ne concernent pas explicitement les épandages. Il estime surtout que l’Etat a appliqué l’arrêté de 2016 permettant aux préfets de prendre des mesures pour réduire la pollution lors des pics. Ainsi, du 25 septembre 2017 au 15 avril 2020, 237 arrêtés préfectoraux mettant en place des mesures prévues dans le cadre d’un dépassement des seuils de pollution ont été pris, dont 227 comportaient des mesures relatives aux pratiques agricoles, selon l’ordonnance du juge des référés.

    « Principe de précaution »

    « Je suis très surprise par ce chiffre. A ma connaissance, il n’y a jamais eu d’arrêté de pris pour réduire les épandages » , indique au Monde Corinne Lepage. L’ancienne ministre de l’écologie se dit à la fois « déçue » par cette décision et « pas surprise » . « On sent bien l’embarras du Conseil d’Etat, qui demande au gouvernement d’appliquer des mesures contre la pollution de manière rigoureuse et préventive, car, aujourd’hui, ce n’est absolument pas le cas » , estime l’avocate.

    Pour le président de Respire, Olivier Blond, « il est criminel de ne pas mettre en œuvre tous les moyens dont nous disposons contre le virus. Or, lutter contre la pollution de l’air en fait partie. Et il est bien évidemment trop tard d’attendre les pics pour agir, d’autant que les épandages vont se poursuivre et que les effets de la pollution sur la pandémie se font sentir même en dessous des seuils légaux dont la réglementation ne prend pas en compte les PM2,5 » . M. Blond regrette que le Conseil d’Etat ne fasse pas « respecter le principe de précaution » .

    Le gouvernement, dont seul le ministère de l’agriculture avait répondu au référé de l’association, n’a pas réagi à la décision du Conseil d’Etat. Mme Lepage prévoit, elle, de se retourner de nouveau dans les prochains jours devant la haute juridiction. Il s’agira, cette fois, de dénoncer, avec le collectif des maires antipesticides, les épandages de pesticides qui continuent à proximité immédiate des habitations malgré le confinement.

    #crise_sanitaire #particules_fines #agriculture #conseil_d'État

  • Coronavirus : 5,7 % de la population française aura été infectée le 11 mai, selon une étude inédite
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/21/coronavirus-5-7-de-la-population-francaise-aura-ete-infectee-le-11-mai-selon

    Une étude publiée par une équipe d’épidémiologistes donne pour la première fois une photographie de l’épidémie en France et souligne « l’impact massif » du confinement sur la propagation du virus.



    Le 11 mai, lorsque le confinement commencera à être progressivement levé en France métropolitaine, 3,7 millions d’habitants, soit 5,7 % de la population, auront déjà été en contact avec le SARS-CoV-2. Une prévalence de l’infection très loin des 70 % qui seraient nécessaires pour obtenir une protection collective par la seule immunité de groupe. Voilà ce que révèle la première « photographie » de l’épidémie réalisée par des chercheurs de l’Institut Pasteur, de Santé publique France et de l’Inserm.

    Mis en ligne mardi 21 avril,
    https://hal-pasteur.archives-ouvertes.fr/pasteur-02548181
    leurs résultats et leurs prévisions montrent « l’impact massif qu’a eu le confinement en France sur la propagation du SARS-CoV-2 » . Selon leurs calculs, le nombre d’individus contaminés par chaque personne infectée est passé de 3,3 avant la mise en place du confinement le 17 mars à 0,5, soit une réduction de 84 %.

    En Ile-de-France, 12 % de la population immunisée

    Le fait que moins de 6 % de la population seulement ait pu développer des défenses immunitaires contre le nouveau coronavirus pose un problème majeur. « Nos résultats suggèrent fortement que, sans un vaccin, l’immunité de groupe sera insuffisante à elle seule pour éviter une seconde vague à la fin du confinement. Des mesures de contrôle efficaces devront être maintenues au-delà du 11 mai » , concluent-ils.

    Cette proportion varie d’une région à l’autre. En Ile-de-France ou dans le Grand-Est, les régions les plus touchées, les épidémiologistes estiment le taux d’immunisation à 12 % en moyenne, mais elle chute à moins de 2 % en Nouvelle-Aquitaine, en Bretagne ou en Pays de la Loire. Elle oscille entre 5 % et 6 % dans les régions où le SARS-CoV-2 a davantage circulé comme les Hauts-de-France, la Bourgogne-Franche-Comté ou encore la Corse. « Il y a encore pas mal d’incertitudes sur ces chiffres, avec des fourchettes assez larges » , précise l’épidémiologiste de l’Institut Pasteur Simon Cauchemez, auteur principal de l’étude. « Mais qu’on soit à 5 % ou à 10 %, cela ne change pas grand-chose pour la suite » , ajoute-t-il.



    Pour obtenir ces chiffres, les scientifiques ont utilisé deux jeux de données : le nombre de décès dans les hôpitaux en France, et l’enquête menée à bord du Diamond-Princess, ce navire de croisière mis en quarantaine au large des côtes japonaises. Tous les passagers à bord avaient été testés, ce qui a permis de connaître la proportion des personnes infectées par le SARS-Cov-2 finalement décédées.

    1 décès pour 200 personnes infectées

    Ces informations, qu’ils ont croisées et corrigées pour tenir compte notamment de la structure d’âge, leur ont permis de déterminer le taux de létalité du Covid-19 : 0,53 %, soit un chiffre proche des 0,5 % à 0,7 % avancés dans d’autres études à partir des données chinoises. A partir de là, il a suffi aux épidémiologistes de « remonter le temps ». « Si vous avez 100 morts et que la probabilité de mourir lorsqu’on est infecté est de 0,5 %, on peut en déduire le nombre de personnes infectées au départ » , explique Simon Cauchemez.

    Ces estimations varient cependant beaucoup selon l’âge et le sexe : le taux de létalité n’est que de 0,001 % chez les moins de 20 ans, mais s’élève à 8,3 % chez les plus de 80 ans. Quel que soit l’âge, les hommes présentent un risque supérieur à celui des femmes d’hospitalisation pour le Covid-19, de passage en réanimation et de décès.



    Pour préciser leur tableau de l’épidémie, les épidémiologistes ont aussi calculé la probabilité pour une personne infectée d’être hospitalisée. Selon leurs calculs, elle s’élève à 2,6 %, ce qui est bien inférieur à une première estimation de 4,5 % réalisée sur la base des données chinoises. Une fois hospitalisés, une minorité des patients doivent être admis dans un service de réanimation : c’est le cas de 18,2 % d’entre eux, après un délai moyen d’hospitalisation d’un jour et demi. Sans surprise, la probabilité de devoir aller en réanimation augmente avec l’âge, avec un « plafond » à 70 ans. Au-delà, les malades sont plus rarement transférés dans ces unités-là, car les chances de guérison sont très faibles.

    En analysant les délais entre l’hospitalisation et le décès du patient, les chercheurs ont clairement distingué deux sous-populations : des personnes décédant moins d’un jour après leur entrée à l’hôpital représentant 15 % des décès ; et les 85 % restants, des personnes mourant un peu plus de treize jours après leur admission en moyenne.

    Après le 11 mai, 1 300 nouveaux cas par jour

    Les données recueillies jusqu’au 14 avril indiquent un impact spectaculaire du confinement sur le nombre d’admissions quotidiennes en réanimation : il s’élevait à 700 à la fin du mois de mars et n’atteignait plus que 200 à la mi-avril. Au 11 mai, les chercheurs estiment qu’il y aura dans ces unités entre 1 370 et 1 900 lits occupés, contre plus de 5 600 aujourd’hui.

    A partir du 11 mai, « il faudra faire quasi aussi bien que le confinement sans le confinement » , souligne Simon Cauchemez, en précisant que ces modélisations ne donnent pas d’indication sur l’efficacité des mesures qui peuvent être utilisées seules ou en combinaison pour ralentir l’épidémie : fermeture des écoles, télétravail, fermeture des lieux publics. Dans la mesure où, lors du confinement, tout le monde reste à la maison, « il sera difficile de différencier celles qui ont été les plus efficaces » .

    La contribution des enfants à la transmission, qui a été bien mesurée pendant des épidémies de grippe, reste ainsi incertaine. Il faudra attendre le résultat d’enquêtes de terrain, avec un dépistage systématique de la population pour mieux apprécier l’impact de différentes mesures de distanciation sociale, dans les régions où elles ont été mises en place avant le confinement du pays.

    La reconstitution précise de cette chaîne de transmission permettra en revanche d’alerter en temps réel les autorités sur la dynamique de l’épidémie. « L’objectif est de pouvoir dire plusieurs semaines à l’avance : si on continue sur cette trajectoire, voilà ce à quoi il faut s’attendre en nombre d’admissions, explique Simon Cauchemez. Cela permettra de savoir s’il faut renforcer les mesures de contrôle ou au contraire si on peut les relâcher. » Le nombre d’admissions en réanimation étant un indicateur « tardif » – compte tenu du délai entre l’infection et l’aggravation de la maladie –, de nouvelles données, comme les appels au 15, devraient être intégrées à l’avenir pour disposer d’un indicateur « avancé ».

    https://seenthis.net/messages/845766
    https://seenthis.net/messages/845839

    #crise_sanitaire #épidémiologie

  • Institut Pasteur - Estimating the burden of SARS-CoV-2 in France
    https://hal-pasteur.archives-ouvertes.fr/pasteur-02548181

    Abstract : France has been heavily affected by the SARS-CoV-2 epidemic and went into lockdown on the 17th March 2020. Using models applied to hospital and death data, we estimate the impact of the lockdown and current population immunity.

    We find 2.6% of infected individuals are hospitalized and 0.53% die, ranging from 0.001% in those <20y to 8.3% in those >80y. Across all ages, men are more likely to be hospitalized, enter intensive care, and die than women.

    The lockdown reduced the reproductive number from 3.3 to 0.5 (84% reduction). By 11 May, when interventions are scheduled to be eased, we project 3.7 million (range: 2.3-6.7) people, 5.7% of the population, will have been infected. Population immunity appears insufficient to avoid a second wave if all control measures are released at the end of the lockdown

    article résumé ici :
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/21/coronavirus-5-7-de-la-population-francaise-aura-ete-infectee-le-11-mai-selon

  • « Il faut se serrer un peu plus la ceinture » : quand chômage partiel rime avec fiche de paie amputée, Bertrand Bissuel, Julie Carriat
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/04/18/il-faut-se-serrer-un-peu-plus-la-ceinture-quand-chomage-partiel-rime-avec-fi

    A l’arrêt du fait de l’épidémie due au coronavirus, près de 9 millions de salariés en chômage partiel voient leurs revenus baisser. « Le Monde » a récolté les témoignages de certains d’entre eux.

    Thierry a beau s’y être préparé, le manque à gagner qu’il vient de subir lui a causé une petite émotion. Cadre dans un restaurant de la région parisienne, il ne travaille presque plus depuis la mi-mars, l’établissement qui l’emploie ayant dû fermer ses portes, comme tous les « lieux, recevant du public, non indispensables à la vie du pays ». Thierry a, du même coup, basculé en « activité partielle », dispositif plus connu sous le nom de chômage partiel ou chômage technique. Un changement de situation synonyme de salaire amputé : pour le mois de mars, « l’écart est de 340 euros net », affirme-t-il, soit environ « 10 % » de sa rémunération habituelle.

    Thierry ne se lamente pas, conscient du fait qu’il se situe en haut de l’échelle des revenus. Mais il va essuyer une perte financière plus importante sur avril, puisque cette période-là sera intégralement chômée. « Je suis locataire et n’ai donc pas de crédit immobilier à rembourser, confie cet homme, encarté à Force ouvrière (FO). Mais si mes ressources sont diminuées pendant trois ou quatre mois, je vais commencer à rencontrer des difficultés. »

    Aujourd’hui, ils sont près de 9 millions à relever, comme Thierry, de l’activité partielle, soit près d’un salarié du privé sur deux. Une situation sans précédent, en France. Le gouvernement a voulu faire jouer ce mécanisme au maximum, afin que les patrons conservent, autant que possible, leur main-d’œuvre durant la récession déclenchée par la pandémie due au coronavirus. Dans cette optique, les règles ont été revues en profondeur, le but étant de bâtir le système « le plus protecteur » d’Europe, selon la formule de la ministre du travail, Muriel Pénicaud. Grâce à ce dispositif, cofinancé par l’Etat et par le régime d’assurance-chômage (Unédic), les salariés perçoivent une indemnité correspondant, en moyenne, à 84 % de leur salaire net. L’employeur peut, s’il le souhaite, mettre la main à la poche pour compenser la différence et assurer, ainsi, le maintien de la paye.

    Un filet de sécurité, mais des limites

    Si le filet de sécurité dressé par l’exécutif préserve une large part du pouvoir d’achat des personnes concernées, il comporte des limites. Ainsi, certaines composantes de la rémunération du salarié ne sont pas prises en considération pour fixer le montant de l’indemnité d’activité partielle : parmi elles, il y a l’intéressement, la participation et les « primes ou indemnités ayant le caractère de remboursement de frais professionnels » – par exemple, la prime de panier, précise Patrick Bordas, vice-président du Conseil supérieur de l’ordre des experts-comptables.

    Maçon coffreur dans une entreprise de travaux publics, Ibrahim indique, lui, avoir perdu un peu plus de 200 euros sur sa paye du mois de mars – période durant laquelle il a chômé plusieurs jours. Un manque à gagner qu’il impute à la non-prise en compte de la prime de panier et de l’indemnité de transport. « Ça a des conséquences sur mon budget », souligne ce délégué syndical CGT, père de six enfants et dont l’épouse est sans profession. Il envisage « de supprimer certaines dépenses », sans trop savoir lesquelles à ce stade : peut-être cessera-t-il de participer au règlement des assurances des voitures appartenant à ses fils.

    Dans certains cas, les baisses de ressources s’avèrent plus importantes, à en croire les propos de salariés qui ont répondu à un appel à témoignages lancé sur Lemonde.fr. Salarié d’un grossiste pour la restauration dans les pays de la Loire, Lkif est au chômage partiel depuis le 14 avril. Sa rémunération fixe – 1 350 euros par mois – lui sera payée à 100 %, grâce à un coup de pouce de son employeur. En revanche, faute de clients, il fait son deuil des quelque 500 euros mensuels de commission qu’il empoche habituellement. « On [le salarié porte parole du patron, un must pour Le Monde] a trois emprunts à payer, jusqu’à quand ça va durer ? Je ne vais pas toucher mon salaire d’avant-crise avant plusieurs mois », présage-t-il. Pour autant, il estime ne pas être « à plaindre ». Sa compagne travaille, ce qui permet au couple de faire face aux mensualités de ses crédits, non négligeables, de 1 400 euros en tout.

    En activité partielle depuis le 23 mars, Mathilde, elle, a demandé à sa banque de décaler de trois mois les remboursements d’un prêt immobilier. « Ils me réclamaient presque 1 000 euros de frais de dossier pour accepter ma requête, j’ai refusé », raconte cette commerciale dans un laboratoire pharmaceutique, qui continue, du coup, à honorer ses créances.
    Il arrive que des ménages cumulent les manques à gagner. Assistante maternelle à proximité de Toulouse, Pascale perçoit 300 euros de moins qu’à l’accoutumée. Pour son conjoint, employé 39 heures par semaine, la perte se monte à un peu plus de 800 euros, notamment parce que le travail effectué à partir de la 36e heure a été exclu du calcul de l’indemnité en mars – ce qui ne devrait, toutefois, plus être le cas par la suite (la réglementation ayant très récemment évolué). Au total, les revenus du couple dégringolent de plus de 1 000 euros. Et la banque « refuse de me décaler les mensualités » d’un emprunt immobilier, soupire-t-elle.

    « Il y a une diminution de salaire, bien évidemment, mais pas de diminution des loyers ou des charges, donc il faut se serrer un peu plus la ceinture », abonde Pauline, 28 ans, responsable de salle dans un restaurant d’Annecy, qui est passée de 1 800 à 1 650 euros en mars. Désormais, il faut tenir les comptes au cordeau, entre la location du logement (650 euros par mois) et les achats plus fréquents de produits alimentaires, puisqu’elle ne mange plus avec ses collègues, avant le service. Si l’envie de retourner à son poste la tenaille – « les journées sont très longues » –, elle craint aussi le pire pour la saison d’été, plusieurs événements, dont le Festival international du film d’animation, ayant été annulés.

    « C’est un vol »

    Dans le monde de l’hôtellerie-restauration, les incidences du passage au chômage partiel sont fortes, observe Nabil Azzouz (FO) : les pourboires non déclarés échappent au calcul de l’indemnité. Et s’agissant des salariés dont la paye est indexée sur le chiffre d’affaires de leur société, le préjudice pourrait, là aussi, être important, complète M. Azzouz.
    Parfois, le chômage partiel n’a rien de chômé : sous pression de leur hiérarchie, des personnes poursuivent leurs missions
    Cependant, une rémunération amoindrie n’entraîne pas forcément des sacrifices supplémentaires. « Depuis que je suis au chômage partiel, je gagne 100 euros de moins que d’ordinaire, mais je ne le ressens pas », confie Laura, 27 ans, rédactrice dans une agence de relations presse en Ile-de-France. Avec le confinement, certaines dépenses ont disparu : l’abonnement aux transports en commun, les achats de livres… Elle en viendrait même à conclure qu’elle « épargne plus qu’avant ». Ce qui ne l’empêche pas d’être inquiète pour l’avenir : l’inactivité pourrait se prolonger « au moins jusqu’à l’été », relate-t-elle, et des « rumeurs » de licenciements économiques commencent à circuler parmi le personnel.

    Parfois, le chômage partiel n’a rien de chômé. Sous la pression de leur hiérarchie, des personnes sont contraintes de poursuivre leurs missions, en dépit des mises en garde répétées de Mme Pénicaud qui a martelé que de telles pratiques étaient contraires à la loi.
    Cadre dans une entreprise de rachat de crédits, Christophe, qui témoigne sous un prénom d’emprunt, se souvient du jour où son supérieur lui a annoncé qu’il était désormais en activité partielle : « Il m’a demandé directement de continuer à faire avancer les projets, pour qu’on ne soit pas en perte de vitesse. » Occupant une position élevée dans la société, il a protesté mais continue, toutefois, de travailler, à son domicile, pendant les siestes de ses enfants, par conscience professionnelle. Avec ce dispositif financé par des deniers publics, « ils ont limité la casse, fortement », dit-il, mais en agissant de manière « immorale ».

    « C’est un vol au détriment de la collectivité », renchérit Nathalie, employée dans une société de services à la personne, dont le prénom a été modifié. En théorie, elle est au chômage partiel à 90 % mais dans les faits, elle consacre beaucoup plus de temps à son métier : « Il n’y a pas d’injonction directe, mais l’entreprise fonctionne avec une culture du “travailler plus”. C’est un choix qui est fait, au nom de la sauvegarde des emplois, mais ce n’est pas honnête car aucun cadre clair n’a été posé. »

    Consultant dans un cabinet de conseil parisien, spécialisé en santé et sécurité au travail, Nicolas, qui témoigne également sous un prénom d’emprunt, se trouve dans une situation similaire. « Les choses sont dites à l’oral, il est conseillé à tout le monde de travailler, même durant ses congés, RTT, et au chômage partiel », rapporte-t-il, en dénonçant une « organisation hypocrite et opportuniste ». « Il y a un intérêt bien compris entre les consultants et les associés, qui est de dire : “Vous continuez à bosser parce que sinon, la boîte se casse la gueule”, ajoute-t-il, amer. On l’accepte parce qu’on comprend pourquoi c’est fait, mais sur le principe, ça choque. »

    Le chômage partiel en deux chiffres
    8,7 millions
    C’est le nombre de personnes concernées par une demande de chômage partiel déposée par leur employeur, à la date du 14 avril. Quelque 732 000 entreprises avaient accompli une démarche en ce sens, selon les services du ministère du travail.
    84 %
    C’est la part que représente l’indemnité allouée à la personne au chômage partiel, par rapport à son salaire net. Autrement dit, sa rémunération est amputée de 16 %. Il s’agit d’une moyenne, le pourcentage pouvant varier selon les situations, comme le montrent des simulations faites pour Le Monde par l’ordre des experts-comptables. Ainsi, dans l’hypothèse où la personne n’a pas du tout travaillé au cours du mois, la somme qui lui est versée correspond à 100 % de son salaire net, si elle est au smic. Pour un individu touchant 2 000 euros brut par mois, l’indemnité d’activité partielle représente 88,6 % de sa rémunération nette, soit une perte de 179,80 euros. Dans le cas d’un salarié payé 3 000 euros brut par mois, le manque à gagner équivaut à 17 % de son salaire net, soit près de 408 euros.

    30 mars 2020 : Coronavirus : le chômage partiel entraîne une perte de revenus de 1,2 milliard par mois pour les ménages, selon l’OFCE
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/03/30/coronavirus-le-chomage-partiel-entraine-une-perte-de-revenus-de-1-2-milliard

    (...) Parmi les éléments étudiés par les économistes de l’OFCE figure l’impact du dispositif de chômage partiel, sollicité vendredi 27 mars par 220 000 entreprises pour 2,2 millions de salariés au total. Ce chiffre pourrait plus que doubler et atteindre 5,7 millions d’employés − soit 21 % de l’emploi salarié en France − si l’ensemble des entreprises touchées par la baisse de l’activité économique déposent une demande de chômage partiel auprès des services du ministère du travail.

    Au global, selon les calculs de l’OFCE, ce dispositif représente, pour les salariés, un « manque à gagner » de 1,2 milliard d’euros pour un mois de chômage partiel. Soit, en moyenne, pour un salarié, 216 euros en moins sur la fiche de paie. Sous réserve que « les entreprises ne compensent pas les pertes de revenus des salariés », précise l’Observatoire.

    En effet, si le gouvernement a fait le choix d’indemniser à 100 % les salariés qui touchent le smic, ceux au-dessus du smic, eux, ne touchent que 84 % de leur salaire net dans la limite de 4,5 smic. Mais chaque employeur conserve, bien évidemment, la latitude de prendre à sa charge cette perte de revenus pour ses salariés. Le coût pour les finances publiques du dispositif atteindrait, lui, 12,7 milliards d’euros par mois, chiffre auquel il faut ajouter une perte de cotisations sociales de 8,7 milliards, soit un total de 21,4 milliards d’euros mensuels.

    Une aide proratisée

    L’OFCE a également examiné la situation des salariés des entreprises dont la fermeture a été ordonnée par le gouvernement (commerces non alimentaires, hôtels, restaurants…). Ils représentent un effectif de total 2,4 millions de personnes, dont 2 millions de salariés. Pour eux, le chômage partiel se traduit par une baisse globale de revenus de 349 millions d’euros par mois de chômage, soit environ 175 euros par mois pour chaque salarié concerné. Le coût pour les finances publiques, lui, est de 3,8 milliards d’euros d’indemnités versées et de 2,4 milliards de cotisations sociales non versées, soit 6,2 milliards d’euros par mois.
    Les personnes employées en contrats courts (CDD, fins de mission d’intérim…) pourront toucher une indemnisation, à condition d’avoir travaillé suffisamment longtemps

    A noter que la baisse de l’activité, qu’elle soit imposée du fait du confinement ou non, impacte également environ 1,2 million de personnes dont le statut n’ouvre pas droit au chômage partiel. Une partie d’entre elles est non salariée. Elles peuvent alors prétendre − si elles remplissent les conditions − au fonds de solidarité créé par Bercy. Selon les dispositions présentées lundi 30 mars, une aide forfaitaire de 1 500 euros sera versée aux personnes dont l’activité a été totalement arrêtée. Celles qui ont subi une perte d’au moins 50 % de leur chiffre d’affaires toucheront une indemnité proratisée, à concurrence de 1 500 euros.

    Restent enfin les personnes employées en contrats courts (CDD, fins de mission d’intérim, fin de période d’essai…), soit entre 140 000 et 150 000 personnes, qui ne peuvent non plus prétendre au chômage partiel. A condition d’avoir travaillé suffisamment longtemps, elles pourront toucher une indemnisation de l’assurance-chômage. Mais ce « seront, au final, les plus impactés », souligne Bruno Ducoudré, économiste à l’OFCE. L’organisme de prévision prévoit d’analyser plus en détail dans les jours qui viennent les conséquences du choc économique dû au confinement et à la baisse d’activité sur les revenus des ménages.

    Rappel, sous peu on aura au moins 11,1 millions de salariés payés hors emploi : Les salariés en arrêt de travail pour garde d’enfants et les personnes vulnérables vont passer au chômage partiel
    https://seenthis.net/messages/844741

    #chômage_partiel #revenu_garanti

    • Coronavirus : déjà 11 milliards de pertes de revenus pour les ménages en France
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/04/21/coronavirus-deja-11-milliards-de-pertes-de-revenus-pour-les-menages-en-franc

      Cette dégradation du pouvoir d’achat, pour l’instant due à l’arrêt de l’activité, risque de s’amplifier dans les mois à venir.

      Si la crise économique liée à l’épidémie de coronavirus est d’une ampleur inégalée, elle ne pèse encore que peu, en France, sur les ménages. Les 120 milliards d’euros perdus depuis le début du confinement, le 17 mars dernier, n’ont affecté les particuliers qu’à hauteur de 11 milliards d’euros, selon les scénarios établis par les économistes de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Soit 7 % du total. Les entreprises, elles, « perdent » environ 35 % du total, tandis que l’Etat essuiera, via le déficit public, le reste de l’ardoise.

      « Pour les ménages, cela représente une perte de pouvoir d’achat d’environ 50 euros par semaines, soit 400 euros sur la totalité de la période de confinement » , précise Xavier Timbeau, économiste à l’OFCE. Un chiffre moyen, qui recouvre une grande hétérogénéité de situations : les salariés au smic bénéficient dans le dispositif du chômage partiel du maintien intégral de leur salaire, ceux au-dessus du smic touchent 85 % de leur rémunération.

      Une « cassure »

      Les indépendants, à eux seuls, qui se rémunèrent directement avec leur activité, participent pour 2 milliards d’euros à cette baisse des revenus. Les salariés en fin de contrat court, ou en fin de mission d’intérim, et dont la mission n’a pas été renouvelée du fait de la crise voient eux leur revenu pris en charge par l’assurance-chômage – dans la mesure où les droits leur sont ouverts, et pour une durée variable.

      « Nous estimons que 460 000 personnes vont se retrouver sans emploi à l’issue du confinement, précise Bruno Ducoudré, économiste à l’OFCE. Parmi elles, environ 180 000 personnes en contrat court, et 288 000 personnes qui étaient en période d’essai, par exemple, ou qui sont licenciées – éventuellement pour d’autres raisons que le Covid-19. » Enfin, une dernière catégorie de personnes subit une amputation significative de leurs revenus – ce sont celles qui subsistaient en partie grâce à « l’économie grise » , comme le dit Xavier Timbeau, c’est-à-dire ce qui est à la frontière de la légalité et dont le nombre est par nature difficile à évaluer.

      « Seul le recul de l’inflation (importée notamment) permet d’amortir le choc et de redonner un peu d’oxygène à la dépense des ménages » , estime l’institut Xerfi.
      Toutefois, pour les ménages français, ce recul relativement faible du pouvoir d’achat risque de n’être que temporaire. En sortie de crise, l’arrêt des mesures de soutien aux entreprises, et notamment du chômage partiel, peut donner un coup d’accélérateur à la dégradation des revenus, notamment avec l’arrivée des premières défaillances d’entreprises ou des plans de licenciement. L’institut Xerfi fait l’hypothèse d’une « forte cassure de la dynamique du pouvoir d’achat des ménages » sur l’année 2020. « En 2019, le gain de pouvoir d’achat avait été de 1,9 % en moyenne » , rappelle-t-il. « En 2020, le pouvoir d’achat devrait reculer de près de 1 %. On observe donc un ralentissement de 2,5 à 3 points du pouvoir d’achat entre 2019 et 2020. Ce dernier pourrait stagner encore en 2021. »

      Xerfi explique cette « cassure » par plusieurs éléments : au chômage partiel, déjà cité, qui va entamer de 0,9 point le pouvoir d’achat des ménages et à la forte dégradation du revenu des indépendants, il faut ajouter les heures supplémentaires et les primes perdues, et enfin le recul de l’emploi à venir. « Seul le recul de l’inflation (importée notamment) permet d’amortir le choc et de redonner un peu d’oxygène à la dépense des ménages » , conclut Xerfi. Ajoutons à cela l’impact des politiques salariales à venir, qui seront « fragilisées » , de même que l’emploi, par la récession, comme le souligne Philippe Waechter, chef économiste chez Ostrum Asset Management.

      Or, si ces dernières années l’Etat a soutenu le pouvoir d’achat, notamment par les baisses d’impôt, le scénario à venir pourrait fort bien être différent. « Le rôle massif de la dépense publique en 2020 pour soutenir le pouvoir d’achat ne peut qu’être temporaire » , analyse Olivier Vigna, chef économiste chez HSBC France. « Prévus pour atteindre des niveaux record en 2020, déficit public et dette publique devront revenir ensuite sur des trajectoires plus soutenables, ce qui rendra l’évolution du pouvoir d’achat tributaire des choix fiscaux à venir. » Au programme de l’année, il faudra sans doute prévoir un retour du débat sur le partage des richesses entre les entreprises et les salariés et les politiques de redistribution.

      #travailleurs_indépendants #économie_grise

    • Les jeunes sont les premiers et les plus touchés par les effets de la récession
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/04/21/les-jeunes-sont-les-premiers-et-les-plus-touches-par-les-effets-de-la-recess


      Hassan, étudiant confiné dans sa chambre de la residence Evariste Galois, à Villeneuve d’Ascq (Nord), le 18 avril 2020. Sarah Alcalay pour Le Monde

      Les secteurs très affectés par les mesures de confinement sont aussi ceux qui emploient beaucoup de 18-25 ans. Les étudiants récemment diplômés vont également en pâtir.

      Si les jeunes sont les moins touchés par la pandémie, ils sont en première ligne de la crise économique. Ils sont particulièrement employés par les entreprises qui ont dû fermer à cause du confinement : restaurants, commerces, centres de loisirs… Au Royaume-Uni, par exemple, 30 % des employés de moins de 25 ans travaillent dans ces secteurs, contre seulement 13 % des plus de 25 ans, selon l’Institute for Fiscal Studies (IFS), un centre d’études économiques. En France, la situation est similaire.

      « Contrairement à la crise de 2008, qui a aussi touché la finance ou les services professionnels, l’effet est cette fois-ci plus concentré sur les moins qualifiés, les bas salaires et les plus jeunes » , explique Xiaowei Xu, auteure de l’étude de l’IFS.

      Non-renouvellement des CDD

      Le deuxième effet négatif pour les jeunes est qu’ils vont entrer sur le marché du travail au pire moment. Les quelque 700 000 personnes qui vont sortir cette année de formation en France seront les premières victimes de la hausse inévitable du chômage, et leur carrière professionnelle va être durablement affectée. « Lorsque l’entreprise fait face à des chocs, elle essaie de conserver les salariés qualifiés et arrête d’embaucher » , rappelle Camille Landais, professeur à la London School of Economics.

      « La première forme de régulation de l’entreprise en période de crise est le non-renouvellement des CDD et des contrats d’intérim : or, les jeunes sont massivement représentés sur ces postes » . Cet effet s’était fait durement ressentir lors de la crise financière de 2008-2009, lorsque le taux de chômage des 15-24 ans avait augmenté de moitié, atteignant un niveau record de 26,2 % fin 2012.

      Les études au long cours montrent également que démarrer sa vie professionnelle sur fond de crise est pénalisant sur le long terme. Les enquêtes « Génération » menées par le Céreq (Centre d’études et de recherches sur les qualifications) à partir d’un échantillon représentatif de jeunes quittant le système éducatif à tout niveau de formation permettent de suivre leur trajectoire sur le marché du travail jusqu’à sept ans. Leurs conclusions sont sans appel. « On assiste à un ralentissement de la dynamique professionnelle, plus de temps passé au chômage et une trajectoire de stabilisation plus lente vers un CDI » , résume Florence Lefresne, directrice générale du Céreq et docteure en économie du travail.

      Baisse des salaires médians

      Ainsi, au bout de sept ans de vie active, les jeunes qui sont sortis en 2010 − qui ont donc vécu la crise de 2008 − avaient passé 73 % de leur temps en emploi, contre 80 % pour les jeunes sortis de formation en 1998. Pour 13 % des jeunes de 2010, la trajectoire professionnelle a été dominée par le chômage, contre 7 % seulement pour les jeunes de 1998. Seuls 55 % des jeunes de 2010 ont vu leur trajectoire se stabiliser sur un CDI, contre 66 % de ceux de la génération 1998. Toutefois, comme le précise la directrice du Céreq, « l’érosion de la norme du CDI dans le recrutement des jeunes tient sans doute autant de la transformation structurelle du marché du travail que de la crise elle-même » .

      Le choc a été observé de la même façon outre-Manche. Après la crise de 2008, les salaires médians réels ont baissé pour toutes les tranches d’âge pendant quelques années, avant de se redresser et de revenir à peu près au même niveau en 2019. Une exception : ceux qui ont aujourd’hui une trentaine d’années, et qui étaient en début de carrière il y a une décennie. Leur salaire médian demeure d’environ 7 % inférieur à leur niveau de 2008.
      Cet impact de la crise sur les carrières professionnelles n’est pas uniforme pour tous les jeunes. « Il y a de fortes chances que la crise amplifie les écarts observés entre les sans-diplôme et les diplômés , souligne Florence Lefresne. Il ne faut pas oublier que les non-diplômés sont plus durablement atteints en période de crise et connaissent une période plus longue d’exclusion du marché du travail. »

      A titre d’exemple, un non-diplômé de la génération 2010 a passé moins de la moitié des sept premières années de vie active en emploi. A cet égard, l’évolution des dispositifs d’apprentissage, qui sont très dépendants de la bonne santé des entreprises, jouera un rôle crucial. « L’impact de la crise actuelle sur les moins diplômés dépendra pour beaucoup des dispositifs de formation, en particulier des possibilités de maintenir et d’accroître les places en apprentissage, en dépit de la chute de l’activité » , ajoute Mme Lefresne.

      #jeunes #revenu

    • Chômage partiel, hôtellerie-restauration, tourisme
      https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/22/coronavirus-macron-en-deplacement-en-bretagne-les-ministres-rendent-leur-cop

      ...#hôtellerie-restauration, où 9 salariés sur 10 sont au chômage partiel, et le #BTP, où 93 % des salariés sont également au chômage partiel, a (...) détaillé [la manageure Pénicaud].

      A l’issue du conseil des ministres, la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a dit ne « pas confirmer » l’hypothèse d’une réouverture des cafés-bars-restaurants pour le 15 juin, dans l’attente du plan d’aide promis par le gouvernement pour ce secteur sinistré. (...)

      Les embauches dans le secteur privé ont connu une baisse mensuelle historique au mois de mars, selon les données de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) : le nombre de déclarations d’embauche de plus d’un mois dans le secteur privé, hors intérim, a plongé de 22,6 % le mois dernier.

      Lors d’une audition par la commission des affaires sociales du Sénat, Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, a prévenu que l’épidémie de Covid-19 allait faire exploser le déficit de la Sécurité sociale à plus de 41 milliards d’euros, « du jamais-vu », même au plus fort de la crise financière en 2008. Le record de 2010 (28 milliards) est effacé et ce montant, « qui peut donner le tournis » , reste de surcroît « une hypothèse favorable », compte tenu notamment de probables annulations de cotisations dans « certains secteurs » , comme la #restauration, l’#hôtellerie ou le #tourisme, a précisé M. Darmanin.

    • Je suis depuis peu en emploi dans une association. On va passer au chômage technique partiel, 3/5 de mai à août compris, avec rémunération complétée par l’asso pour nous laisser à 100 % de la rémunération. Je suis en CDD et j’ai un peu peur que ça grève mes droits au chômage pour plus tard...

      Et puis surtout notre activité n’a pas baissé avec la pandémie, on a annulé un truc massif de l’activité de l’association mais ça prend aussi plein de temps et c’est remplacé par d’autres trucs. Les revenus de l’asso ne sont pas impactés, on n’a pas de clients à servir qui auraient disparu (la baisse est à craindre plus tard, avec la récession économique).

      L’équipe salariée craint que dans cette asso en récession continue depuis des années (démographie assez âgée) cet épisode fasse partie d’un mouvement continu de baisse de la masse salariale. Faire financer par l’État une baisse de productivité pendant la pandémie (les premières semaines on n’a pas fait nos heures, entre les difficultés de concentration et les soucis techniques), c’est réglo, mais en profiter pour faire raquer pour deux mois d’été moins actifs, ça l’est beaucoup moins. Donc on se retrouve à dire non quand on nous demande d’assurer des tâches...

      Et moi je flippe à mort parce que j’ai choisi de ne pas faire de démarche pour renouveler mon revenu garanti (marre d’être une machine à bouffer-chier mon AAH dans un environnement social dont la qualité ne doit qu’à mes efforts) et c’est pile au moment où je n’ai plus aucune chance de retrouver un boulot. J’avais imaginé cette possibilité mais trouver enfin à me caser quelques mois à ma 93e candidature à un boulot de larbin, ça m’avait regonflé le moral et je retombe d’un peu haut.

    • La crise sanitaire entraîne déjà des chiffres du chômage
      catastrophiques

      https://www.mediapart.fr/journal/economie/280420/la-crise-sanitaire-entraine-deja-des-chiffres-du-chomage-catastrophiques

      Sur le front de l’emploi, les mauvaises nouvelles étaient attendues, mais la gravité de la situation a de quoi inquiéter même les plus blasés des experts. Lundi 27 mars, la Dares – la direction statistique du ministère du travail – a exceptionnellement dévoilé les statistiques des inscriptions à Pôle emploi pour le mois de mars, alors que le gouvernement avait décidé de publier ces chiffres seulement tous les trimestres. La situation est totalement hors du commun : fin mars, Pôle emploi a décompté 246 100 personnes de plus inscrites en un mois dans sa catégorie A, celle qui recense les chômeurs n’ayant effectué aucune activité durant le mois.

      Cette hausse mensuelle de 7,1 % est un record, du jamais vu depuis la création de ce décompte statistique en 1996. Au total, l’effectif des catégories A, B, C (qui comprennent des demandeurs d’emploi ayant un peu travaillé le mois précédent) a augmenté de 177 500 personnes en un mois (+ 3,1 %). C’est là aussi une situation inédite, de loin : pour trouver le « record » précédent, il faut remonter à avril 2009, en pleine crise économique déclenchée par le secteur des subprimes aux États-Unis, et la hausse était deux fois moindre, de 86 300 personnes.

      [...] Dans Le Parisien, Muriel Pénicaud reconnaît être « inquiète pour l’emploi » mais « refuse » tout pronostic, arguant de la bonne dynamique de l’emploi jusqu’au début de l’année et promettant des mesures supplémentaires, notamment pour les jeunes. Elle annonce aussi qu’une réflexion avec les partenaires sociaux va s’engager sur les règles de l’assurance-chômage.

      En guise de mesure d’urgence, la ministre a annoncé que, comme en avril, les allocations des chômeurs arrivant en fin de droit seraient reconduites pour le mois de mai. Le second volet de la réforme de l’assurance-chômage, qui devait entrer en vigueur le 1er avril, particulièrement dur pour les plus précaires des demandeurs d’emploi, est quant à lui toujours annoncé comme étant reporté au 1er septembre.

      De quoi exactement vont discuter le gouvernement et les partenaires sociaux ? Mystère.
      En tout cas, il n’est pour l’heure pas question d’abandonner ce second volet de la réforme. Encore moins d’annuler la première partie de la réforme, mise en place en novembre, et qui devait toucher négativement 710 000 personnes en un an.

      [...] Dans une note publiée ce mardi 28 avril en fin de journée, l’Unédic, qui gère le régime, a rendu publics ses calculs. Et l’addition est à l’aune du tsunami qui s’annonce pour l’emploi : cataclysmique. La baisse des cotisations pourrait coûter à l’assurance-chômage 3,5 milliards d’euros entre mars en juin, quand la facture du versement des allocations supplémentaires s’élèverait à plus de 1,3 milliard. Des sommes auxquelles il faut ajouter un milliard d’euros par semaine pour financer le chômage partiel, et encore une centaine de millions hebdomadaires pour assurer le transfert des arrêts maladie vers le chômage partiel.

      Le chômage partiel se doit d’être involontaire : si les enfants peuvent être accueillis à l’école garderie, c’est zéro euro
      https://fr.news.yahoo.com/coronavirus-pas-chomage-partiel-si-refusez-envoyer-enfants-ecole-0853

      « A partir du 1er juin, les parents devront fournir une attestation à leur employeur pour justifier que l’établissement scolaire de leur enfant n’est pas en mesure de l’accueillir. Sans ce justificatif, ils n’auront plus droit au chômage partiel. »

  • Coronavirus : l’AP-HP expérimente l’isolement de malades à l’hôtel
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/18/coronavirus-l-ap-hp-experimente-l-isolement-de-malades-a-l-hotel_6037024_324
    Un hôtel du groupe Accor à Paris, le jeudi 16 avril. Le groupe hôtelier accueille des personnes atteintes du Covid-19. Francois Mori / AP

    Le dispositif pilote « Covisan », lancé avec l’appui du groupe Accor, vise à casser les chaînes de transmission du virus. Ce dispositif pilote est destiné aux patients atteints de formes modérées.

    De nombreux spécialistes de santé publique réclamaient depuis plusieurs semaines la mise en œuvre d’une telle stratégie, c’est désormais une priorité pour l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) : limiter coûte que coûte les chaînes de transmission du Covid-19, notamment au sein des familles, en repérant et isolant des personnes potentiellement contaminantes. Et ce pour éviter toute nouvelle flambée épidémique alors que se profile la phase de déconfinement, prévue à partir du 11 mai.

    En concertation avec des collectivités territoriales, en premier lieu la Mairie de Paris et le Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, l’AP-HP expérimente depuis mercredi 15 avril un dispositif de suivi sur trois sites pilotes : la Pitié-Salpêtrière (13e arrondissement), les hôpitaux Bichat (18e) - Louis-Mourier à Colombes (Hauts-de-Seine), et Avicenne à Bobigny (Seine-Saint-Denis). Pour endiguer la transmission du virus à l’entourage, diagnostic, équipements et hébergement à l’hôtel si nécessaire sont proposés aux personnes infectées dont l’état ne nécessite pas ou plus d’hospitalisation.

    Baptisé « Covisan », « ce projet s’inscrit dans la politique nationale de déconfinement et de prévention d’une deuxième vague. On fonctionne sur un pied d’égalité avec la médecine de ville, ça leur permet d’inclure leurs propres patients », précise au Monde Martin Hirsch, le directeur général de l’AP-HP.

    L’initiative avait été ébruitée jeudi par Sébastien Bazin, PDG du groupe hôtelier Accor, qui avait annoncé, sur France Inter, mettre à disposition une partie de ses établissements pour ces malades pas ou peu symptomatiques. Pour l’heure, seuls trois hôtels du groupe, à proximité des quatre hôpitaux concernés, sont mobilisés. Il n’y aura pas de médicalisation des hôtels au sens strict. « C’est là où notre expérience d’avoir suivi 50 000 patients à distance à travers la plate-forme Covidom depuis un mois est utile, nous avons rodé un système de suivi de personnes porteuses de Covid » , assure Martin Hirsch, qui précise que la Croix-Rouge sera aussi mobilisée. Pour assurer les tests de dépistage, les équipes d’intervention seront constituées d’infirmiers et d’internes.

    Valeur de test pour Accor

    Le dispositif, sous l’égide de la préfecture d’Ile-de-France et de l’Agence régionale de santé, s’effectuera sur la base du volontariat. Pour les personnes qui souhaitent rester chez elles, « des équipes vont être formées pour les accompagner et les aider à s’organiser, vérifier qu’elles disposent du matériel de protection individuel , résume Jean-Louis Missika, adjoint à la maire de Paris chargé de l’urbanisme. Et pour éviter qu’elles se rendent dans les magasins, on leur livrera des repas ou produits frais » .

    En Seine-Saint-Denis, qui fait partie des départements les plus touchés par un excès de mortalité lié à l’épidémie de Covid-19, seront réalisées des enquêtes épidémiologiques parallèlement à la détection de « clusters » locaux. « L’idée est de mobiliser un ensemble de partenaires : services sociaux, associations, bailleurs sociaux, car au-delà de la dimension de santé, il faut articuler l’accompagnement social pour les familles et les enfants » , explique Stéphane Troussel, président du Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis.

    La durée de cette opération n’a pas encore été fixée. La phase pilote sera menée pendant « quelques jours pour tirer le plus d’enseignements possible , indique Martin Hirsch. Si ces pilotes donnent des résultats favorables, ils seront utiles pour élargir et dupliquer le dispositif. » Cet accueil limité semble aussi avoir valeur de test pour Accor. Toutefois, le groupe, qui compte 1 700 établissements en France, se déclare capable de monter rapidement en puissance. Selon M. Bazin, il y aurait déjà « plus de 300 hôtels volontaires ».

    « Prix coûtant »

    « L’opération ne nous coûte rien ni ne nous rapporte » , précise le numéro un de l’hôtellerie en Europe, dont près de 300 établissements accueillent déjà des personnels soignants ou des routiers depuis quelques semaines. En revanche, l’AP-HP – qui a déjà recours aux locaux du centre national d’entraînement de la Fédération française de tennis, dans le 16e arrondissement de Paris et à un bâtiment de l’hôpital Sainte-Périne voisin – devrait verser de 30 à 50 euros, « prix coûtant », par chambre occupée aux propriétaires des hôtels.

    L’ouverture de structures intermédiaires permettant de mettre en quarantaine des patients atteints de formes simples ou modérées de Covid-19 a déjà été mise en place à l’étranger, comme en Chine, en Espagne ou en Italie. Depuis le début de la pandémie, le groupe Accor a lui-même ouvert certains de ses hôtels en Corée du Sud et en Espagne. Jusqu’à présent en France, si des patients atteints du Covid-19 ont été mis à l’isolement, c’est d’abord pour soulager des hôpitaux sous forte tension. Comme dans les Pyrénées-Orientales, où, depuis le 26 mars, un hôtel de la périphérie de Perpignan a ainsi permis de libérer des lits d’hospitalisation.

    L’initiative de l’AP-HP vient « un peu tard mais mieux vaut tard que jamais , estime le professeur Eric Caumes, chef du service des maladies infectieuses à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière. C’est une politique qui devrait concerner la France entière, c’est assez symbolique des initiatives locales ou régionales qui ne font que témoigner qu’il n’y a pas de pilote dans l’avion républicain » . Selon lui, il serait urgent de s’attaquer à des « clusters » plus importants encore que la cellule familiale : « Quid par exemple des grosses chaînes de transmission dans les hôpitaux de l’AP-HP, des structures médico-sociales intermédiaires, des foyers de travailleurs, de migrants ? C’est un vrai problème. »

    Il y a trois semaines
    https://seenthis.net/messages/835151

    #hôtel #isolement_des_malades #cluster #structures_intermédiaires

  • « Je suis un rescapé, je respire tout seul » : après la réanimation, le difficile retour à la vie des patients atteints du coronavirus
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/18/je-suis-un-rescape-je-respire-tout-seul-apres-la-reanimation-le-difficile-re

    Certains malades sortant du coma doivent tout réapprendre : respirer sans assistance mécanique, manger, marcher… L’hôpital Forcilles les prend en charge.

    Le générique des Feux de l’amour résonne jusque dans le couloir de l’hôpital, avec ses violons grandiloquents. Dans la chambre, sur le plateau-repas, une brique de jus d’orange côtoie la Bible et un livre corné de mots croisés. La kiné demande : « Vous êtes prête, Mme Etienne ? On y va ? » La patiente ferme les yeux et prend sa respiration. Ses longues tresses caressent sa blouse médicale.

    Elle se lève doucement, chancelle un peu. Les pas sont hésitants, difficiles. La kiné l’encourage et pousse au fur et à mesure l’appareil à oxygène auquel sa patiente est reliée. Bras dessus, bras dessous, les deux femmes avancent lentement dans le couloir. Un groupe de soignants se retourne pour observer l’exploit. « C’est la première fois qu’elle marche comme ça, se félicite la kiné. Il y a deux semaines, elle ne parvenait pas à tenir assise au bord du lit. »

    Marie-Ange Etienne, 62 ans, est une rescapée du coronavirus. Trois semaines plus tôt, cette employée d’un Ehpad était en réanimation dans un hôpital de Marne-la-Vallée (Seine-et-Marne). Dix-huit jours de coma. Son mari et ses enfants lui ont rendu visite en rêve. « Je me suis vue mourir. C’est là que je me suis dit : “Ah, je ne suis pas dans la bonne voie”. » Quand elle a rouvert les yeux, une ambulance l’a transférée ici, à l’hôpital de Forcilles, à Férolles-Attilly, en Seine-et-Marne.

    Cet établissement privé d’intérêt collectif, planté au milieu des champs, fait partie des trois structures hospitalières d’Ile-de-France à posséder un service de réadaptation post-réanimation (SRPR). Une spécialité encore rare : moins de dix hôpitaux en ont une en France. Elle consiste à sevrer les patients de leurs appareils respiratoires après la « réa », et à les rééduquer à l’effort pour qu’ils puissent rentrer chez eux.

    Le long chemin vers la guérison

    Plus de 6 200 patients atteints par le Covid-19 sont actuellement en réanimation, selon le dernier bulletin de Santé publique France. Ceux qui en sortent ont passé l’épreuve la plus difficile. Mais, pour une partie de ces survivants, le chemin vers la guérison est encore long. Ils doivent tout réapprendre : respirer sans assistance, bouger la main, se lever, marcher…

    Tout ce qui allait de soi avant leur hospitalisation a disparu. Leur long séjour en réa, de deux à trois semaines en moyenne, l’intubation, la ventilation artificielle, le coma, la fonte musculaire liée à leur alitement prolongé et les cocktails de médicaments à hautes doses les ont laissés exsangues. Ils ne retrouvent pas la force de respirer spontanément après leur réveil. L’assistance mécanique est alors maintenue, puis diminuée progressivement pour réentraîner les muscles respiratoires.

    Depuis l’épidémie due au coronavirus, le SRPR de Forcilles croule sous les appels des hôpitaux de la région, qui lui envoient leurs patients. A ce jour, le service, qui accueille vingt-quatre personnes, a fait de la place à dix malades du Covid-19. Une vingtaine d’autres sont sur liste d’attente. « On en refuse tous les jours. Parfois, on n’a même pas le temps de prendre les appels », regrette Gérald Choukroun, médecin réanimateur, pneumologue et chef du SRPR. Pour faire face à l’afflux, le service doit doubler ses capacités d’ici quelques jours en armant quinze lits supplémentaires.

    « Entre-deux »

    « Quand ils arrivent chez nous, ils sont dans un entre-deux, en phase de réveil, plutôt calmes et un peu ralentis », explique M. Choukroun. C’est à cette condition qu’il accepte de les prendre. Car, le plus souvent, les patients infectés par le Covid-19 ont, au contraire, des réveils très agités. « Avec ce virus, c’est quasi systématique et assez sévère, précise le chef de service, qui bénéficie d’une vision panoramique sur la réanimation grâce aux appels de ses confrères. Cela peut être dangereux, certains arrachent leur matériel. » C’est la première fois que, d’un hôpital à l’autre, tout le monde lui raconte toujours la même histoire : « Le patient s’est remis à respirer, ça l’a dégradé, on a dû le remettre dans le coma. »

    Ceux qui atterrissent dans son service ne sont pas tirés d’affaire pour autant. Sur treize patients, deux ont succombé : un pasteur évangélique dont la fille avait assisté en février au rassemblement à Mulhouse, qui a accéléré l’épidémie en France, et une femme qui était déjà suivie à l’hôpital pour un cancer. Les autres progressent peu à peu, à leur rythme.

    Beaucoup sont traumatisés par ce qu’ils ont vécu lorsqu’ils étaient plongés dans le coma. Certains patients évoquent la fameuse « lumière blanche » de l’expérience de mort imminente, d’autres disent avoir « revu des proches décédés », ou décrivent un « délire peuplé de spirales colorées et kaléidoscopiques », explique Mégane Guillemeau, la psychologue du service. Plus singulier, « un patient s’est imaginé en tortionnaire de la seconde guerre mondiale exterminant tout le service de réa, raconte-t-elle. Leur vécu est si étrange que cela laisse des traces quand ils émergent. J’en parle souvent avec eux pour tenter de dédramatiser ».

    « Lumière blanche »

    Le service a été réaménagé pour éviter les risques de contamination : à gauche, les patients encore contagieux, à droite, au fond du couloir, ceux qui ne sont plus considérés comme tels après avoir été testés négatifs à plusieurs reprises. Les premiers sont encore sous respirateur la plupart du temps, incapables de parler et de se mouvoir seuls. Les seconds retrouvent peu à peu leur souffle, l’usage de la parole et la force de remarcher.

    Tous traversent la même épreuve en même temps. Mais, avec les restrictions liées au risque de contagion, chaque patient est condamné à la surmonter dans le plus grand isolement, loin de ses proches. C’est l’une des cruautés de cette épidémie. Ici comme ailleurs, les visites des familles sont limitées au maximum et strictement encadrées. Or, d’habitude, le soutien des proches est capital pour vaincre la peur des patients après le traumatisme de la réa et les aider à participer aux exercices de rééducation. A défaut, le personnel soignant fait au mieux pour les rassurer, mais cela ne suffit pas. « Les patients pleurent beaucoup », constatent les infirmières, désarmées. Et plus le temps passe, plus l’éloignement d’avec les proches leur est insupportable.

    Pour tenter d’y remédier, l’hôpital fait appel à un robot. L’objet, une sorte de bras articulé de 1,60 m surmonté d’un écran, est un prototype dont l’usage initial – faire de la téléconsultation – a été détourné depuis le coronavirus pour permettre aux familles de passer des appels vidéo. A l’heure du rendez-vous, Noëlle Bozec, la secrétaire du service, appelle les proches et vérifie que l’image est bonne. Un soignant en tenue de cosmonaute dépose ensuite l’engin dans la chambre puis repart aussitôt. Les patients sont laissés seuls avec lui pour plus d’intimité.

    L’effet est troublant. A travers la porte vitrée des chambres, le robot avance maladroitement autour du lit. Il incline sa drôle de tête à droite, à gauche, cherche le bon angle. Les familles le déplacent et l’orientent à distance. Sur l’écran, des fronts et des yeux mal cadrés apparaissent en gros plan et tentent de s’approcher au plus près de ce visage qu’ils ne peuvent embrasser.

    « Il faut vraiment que tu t’accroches »

    « Coucou maman, tu m’entends ? » La vieille dame ne répond pas. Elle garde les yeux mi-clos, le corps inerte. « Maman, c’est moi, reprend la voix claire. Tout le monde te fait des bisous. Il faut vraiment que tu t’accroches. Je suis là, maman, ne t’inquiète pas. » Un silence. « Mathis m’a dit de te dire qu’il a eu son brevet. Il m’a dit : dis-le à mamie, comme ça, elle sera fière de moi. » Silence. « Oh, ma petite mère, s’étrangle la voix. Tu veux bien bouger ta main comme la dernière fois, que je sache que tu m’entends ? » La main ne bouge pas, les yeux cherchent à grand-peine d’où vient la voix sans la trouver, puis se referment. « Tu es fatiguée, je te laisse te reposer. Bisous maman, je t’aime. » Détresse à l’écran, détresse sur le lit d’hôpital. Etrange vision d’un monde dystopique et déshumanisé.

    « Le robot est surtout utilisé à la demande des familles, mais elles se retrouvent souvent en situation d’impuissance, relève Mégane Guillemeau, la psychologue. Si elles étaient là, ce seraient des moments où elles auraient juste à tenir la main de leur proche. Le robot ne peut pas combler ce besoin de contact humain. » Quand les soignants constatent que ces échanges vidéo font plus de mal que de bien, ils repassent à la méthode classique, sans image : un téléphone en mode haut parleur, coincé près de l’oreille du patient.

    Parmi les malades que l’hôpital a accueillis depuis le début de l’épidémie, il y a aussi Mohamed. Cet homme de 36 ans, en tunique brodée et claquettes en plastique, achève sa troisième semaine ici, après quinze jours de réanimation et de coma. A l’hôpital Bichat, c’était l’un des patients les plus graves. Les médecins ont vraiment cru qu’ils allaient le perdre. Puis, miracle, son état s’est peu à peu amélioré, au point qu’il a pu être transféré à Forcilles.

    « Allez, maintenant, je rentre chez moi »

    Et le voilà guéri. C’est le premier du service. Le jeune homme a retrouvé sa jovialité, son humour, et trépigne d’impatience à l’idée de rentrer chez lui et de retrouver sa femme. « C’est elle qui m’a sauvé la vie, en appelant les urgences au bon moment », dit-il, ému. Il ne l’a pas revue depuis, sauf le week-end dernier, « un petit coucou à travers la fenêtre de ma chambre, de loin ».

    Encore quelques examens à passer, et ce sera bon. Les orthophonistes l’emmènent en fauteuil roulant jusqu’en radiologie pour vérifier qu’il déglutit correctement. L’intubation a fait quelques dégâts et lui a laissé une voix rauque. Mohamed avale en grimaçant le yaourt rosâtre qu’on lui demande d’ingurgiter. « La vie de ma mère, c’est dégueulasse, on dirait du savon ! » Les soignantes rient et le taquinent. Sur l’écran en noir et blanc de radiologie, le squelette de Mohamed déglutit en même temps que lui. Zoom avant sur la gorge. Pas de fausse route, c’est parfait.

    « Je suis un rescapé, constate le jeune homme, encore incrédule. J’ai retrouvé ma mobilité, je respire tout seul, je mange tout seul, je peux me lever, je peux marcher… C’est des petites choses, mais le coronavirus, c’est une saloperie qui vous prend tout. » Il interpelle les soignants qu’il croise sur son passage : « Allez, maintenant, je rentre chez moi ! » Il rit. Il n’en revient pas d’être vivant.