L’un des aspects des politiques néolibérales depuis des décennies, c’est la destruction systématique et volontaire des outils de compétence et d’expertise de l’État.
C’est notamment un des grands thèmes démontrés par @marclaime au sujet de la gestion de l’eau : la plus grande forme de corruption du système, ce ne sont pas les histoires de valises de billets qui ravissent le Canard enchaîné (ce que Marc qualifie de « vol de sac à main »), mais l’organisation volontaire de l’incompétence des services de l’État, qui se retrouve ainsi pieds et poings liés aux bons conseils (juridiques, techniques et scientifiques, organisationnels…) délivrés par les multinationales de chaque secteur qui, du coup, raflent des contrats de plusieurs centaines de millions voire de milliards d’euros dans des conditions qui leur sont incroyablement favorables, façon racket légalisé sur un service public.
Et en règle général, les politiques « volontaristes » de libéralisation ont systématiquement été menées en appauvrissant et détruisant tous les centres d’expertise indépendants financés l’État, considérés ou présentés comme des contre-pouvoirs corporatistes et rétrogrades freinant l’émergence d’un marché efficace.
Je n’ai pas encore vu passer grand chose à ce sujet quant à la crise actuelle. Ce qu’on a vu, c’est tout de même le niveau d’incompétence sidérant de nos responsables politiques, comme si, vraiment, il n’y avait rigoureusement rien d’organisé, dans les structures institutionnelles, pour leur donner des conseils vaguement structurés et cohérents.
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Je me demande donc si, dans ce domaine-là, on n’est pas aussi en train de payer des années de destruction des centres d’expertise à la fois financés et promus sur fonds publics, mais indépendants et scientifiquement compétents dans leur expertise. Ce qui constituait une caractéristique fondamentale de la démocratie libérale (pouvoirs et contre-pouvoirs, centres d’expertise ne dépendant pas des changements politiques, à l’intérieur même de la structure politique).
Les financements « à courte vue » de la recherche me semblent entrer dans cette logique. Mais je me demande s’il y a aussi, comme cela a été fait pour la privatisation de la gestion de l’eau, un appauvrissement volontaire et coupable des services de compétence et d’expertise de l’État en matière de décisions et d’évaluation de la santé publique.
Ou peut-être que non. (Mais vu le niveau interstellaire d’incompétence affiché avec morgue là-haut, j’en doute.)