Mortalité : les graphiques utiles... et les autres - Par Loris Guémart | Arrêt sur images
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Les représentations visuelles du nombre de décès liés au Covid-19 se sont multipliées dans les médias du monde entier. Mais ils sont loin de tous transmettre une information utile, surtout à mesure que l’épidémie évolue. Comment et pourquoi les infographistes, en particulier anglo-saxons, de loin les plus influents, ont-ils choisi l’échelle logarithmique, laissé de côté le nombre de morts par habitants, ou fini par adopter la statistique des « morts en excès » ?
" "Dans une interview du 14 avril, Burn-Murdoch explique : « Vers le 10 mars, un de nos journalistes voulait savoir où en étaient l’Espagne et le Royaume-Uni par rapport à l’Italie », note Burn-Murdoch. Le journaliste fait alors le choix déterminant d’une progression dite « logarithmique » (et non plus linéaire). Il crée deux courbes, du nombre de cas d’abord, du nombre de morts cumulé ensuite (qu’il transformera en avril en nombre de morts quotidiennes). Actualisées chaque jour sur une page placée en accès libre par ce média 100 % payant en temps normal, elles deviendront les infographies les plus citées au monde.
▻https://medium.com/nightingale/how-john-burn-murdochs-influential-dataviz-helped-the-world-understand-coron
►https://www.ft.com/coronavirus-latest
« Pour représenter une croissance , une échelle linéaire utilise une grande partie de l’espace disponible pour montrer la verticalité grandissante de la courbe », détaille Burn-Murdoch. Cela aboutit à « écraser » les pays dont l’épidémie est naissante dans un espace restreint, tout en rendant plus difficile les comparaisons, toutes les courbes exponentielles semblant similaires. Très remarqué, son choix a également été loué par le New York Times : « Sur une échelle linéaire, la courbe s’envole. Sur une échelle logarithmique, elle se transforme en une ligne droite, ce qui signifie que les déviations (soit une croissante encore plus forte, ou réduite, ndlr) deviennent beaucoup plus simples à déceler. »
Les courbes de progression logarithmiques permettent de comprendre où en est chaque pays, relativement aux autres. Mais elles constituent des représentations peu efficaces pour apprécier en un clin d’œil le niveau d’accélération ou de décroissance d’un pays donné, malgré les affirmations du journaliste du Financial Times, notait début avril le responsable des données du groupe Veolia. Autre défaut : leur efficacité semble tout aussi limitée pour appréhender la réussite ou l’échec des politiques de santé de chaque État, hors des cas les plus flagrants, tel que le succès de la Corée du Sud. « Nous nous concentrons sur la trajectoire (…) et sur les nombres que vous entendez dans les médias », défendait le Financial Times le 30 mars. « Si nous choisissions d’aller vers un ratio du nombre de morts par habitant, vous perdriez un peu du côté viscéral, immédiat et évident. »
The Economist diffuse en effet des comparaisons entre les données de surmortalité issues de sources fiables, comme la base de données européenne de décès EuroMOMO, et les bilans officiels dans de nombreux pays et régions, dont la France. Il est rapidement imité par le New York Times, le Financial Times et Mediapart, entre autres.
Si les comparaisons internationales du nombre de morts, comme du nombre de morts par habitants, sont particulièrement défavorables au gouvernement français, le différentiel entre la surmortalité totale et les décès officiels du Covid-19 montre plutôt une transparence acceptable et de données relativement fiables… du moins depuis que la France s’est résolue à comptabiliser les morts des Ehpad.
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