Quand quelque chose qui était contrôlé par l’argent devient libre d’accès, chacun s’en sert selon ses besoins, et non plus en fonction de ses moyens. En ce sens, la liberté est une valeur intrinsèque à la gratuité. La gratuité abolit aussi la distinction de fortune : en tant qu’usager des transports publics, on est à égalité avec tous les autres, que l’on soit notaire ou chômeur. Enfin, la gratuité produit des effets sociaux, en stimulant la convivialité et le sentiment de solidarité. Tout cela constitue une avancée dans le sens des valeurs revendiquées par la république.
Vous définissez la gratuité comme « une forme supérieure de dérégulation ». Qu’entendez-vous par là ?
Avec la gratuité, on n’accède plus à un bien de façon marchande ; on y accède de droit. A partir de là, les règles qui régissent le marché – si je vole, la police m’interpelle – tombent. Il y a donc une baisse de la coercition et une dérégulation pour tous. Le poids des règles qui nous surplombent diminue. C’est le contraire de la « dérégulation » capitaliste, qui échange des règles imposées au marché par un Etat démocratique par le pouvoir exclusif des puissances économiques.