• Lorànt Deutsch, Stéphane Bern, Patrick Buisson... la vision réac’ de l’histoire à la télé - Les Inrocks : magazine et actualité culturelle en continu
    http://www.lesinrocks.com/2013/04/12/medias/historiens-de-garde-perpetuent-vision-reactionnaire-notre-histoire-11382

    De Lorànt Deutsch à Dimitri Casali, de Franck Ferrand à Stéphane Bern, de Patrick Buisson à Jean Sévillia, le territoire du champ médiatique où se cristallise une vision réductrice de l’histoire s’est élargi, selon le diagnostic posé par William Blanc, Aurore Chéry et Christophe Naudin. Les “historiens de garde” sont des “militants réactionnaires au sens propre”, précise dans la préface Nicolas Offenstadt, auteur de L’Histoire bling bling – Le retour du national, en 2009 : “Parce qu’ils valorisent un passé idéalisé et fabriqué contre ce qui leur déplaît dans le présent ; mais aussi réactionnaires dans leur conception de l’histoire ; ils négligent tous les subtils progrès d’un champ de recherche qui n’a cessé de s’ouvrir.” Alors que la recherche s’ouvre à des perspectives décisives, l’histoire globale, connectée, décentrée, les figures qui font profession de servir la connaissance historique à la télé font tout l’inverse. Ils manipulent les téléspectateurs avec une vision étriquée, nationaliste, conservatrice, fantasmatique de l’histoire.

    Tous pratiquent le grand écart entre le roman national et l’histoire scientifique, entre la mythologie et l’esprit critique ; tous s’engagent contre “l’historiquement correct” qui prônerait une histoire multiculturelle et différentialiste, “contaminée par le paradigme des droits de l’homme” (Jean Sévillia). Un pur néonationalisme historique, en somme. Une même vision téléologique de l’histoire, rythmée par des grandes dates sacralisées visant à démontrer la continuité historique d’une France éternelle, se dégage de leurs propos.

    Prétendre “populariser” l’histoire reste pourtant un projet télévisuel vertueux. Et de ce point de vue, les succès publics de Deutsch, Ferrand et Bern pourraient former l’indice de leur pari réussi : le spectacle est assuré, au-delà de leurs artifices. C’est tout le problème que posent avec gravité les historiens critiques : comment résister aux dérives de l’histoire spectacle où la forme prime sur le fond, où la nostalgie d’un passé fantasmé occulte la complexité analytique ? Si quelques documentaristes ouvrent des contre-feux, comme l’attestait en janvier un colloque de l’Union syndicale de la production audiovisuelle, “Documentaire : Histoire, la nouvelle star”, l’impact de ces magazines reste dominant sur le grand public.

    Au fond, l’alternative n’est pas entre l’histoire populaire et l’histoire universitaire, mais plutôt entre l’histoire falsifiée, identitaire, rétrograde, et l’histoire complexe, interrogée, critique. Démasquer les impostures et les fausses évidences, défendre la démarche critique : une émission comme La Fabrique de l’histoire sur France Culture, des ouvrages éducatifs, comme L’Histoire de France sous la direction de Joël Cornette (Belin), Les Rendez-Vous de l’histoire à Blois, très populaires, le font par exemple très bien. La preuve que l’histoire peut accommoder rigueur de la recherche et aspirations du public, pour lequel l’histoire ne se réduit pas à la vie de château dont on pleure la dissolution dans les eaux décadentes de la modernité.

  • A travers l’analyse de la prestation de Hollande sur M6, l’intéressante dissection de l’état de la démocratie française ...

    http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2013/06/17/il-y-avait-un-decalage-entre-le-discours-de-hollande-et-les-reportages-de-ca

    Le style de François Hollande n’a-t-il pas généré un décalage entre son discours et les reportages sur les difficultés concrètes des électeurs ? Un Nicolas Sarkozy aurait-il été plus à l’aise dans ce type de format ? « François Hollande a dans sa façon de parler une approche très économique et ’techno’. Sarkozy parlait plus du quotidien », note Stéphane Rozès, qui regrette le spectre trop précis de « Capital » : « Le format ramène les questions du pays à des questions purement économiques. »

    Hollande n’est pas du tout pédagogue. C’est un très mauvais « manager ».
    Il est de l’ancienne école, mais ça ne fonctionne plus. En tous cas moins bien.

    On n’est plus dans les années 60, où quand les gens écoutaient un homme politique, ils se disaient « on n’y comprend rien, c’est qu’il est plus intelligent que nous. Tant mieux, il est compétent. »
    Aujourd’hui la méthode a fait long feu.
    Et les gens ont changé.
    Aujourd’hui beaucoup veulent un communiquant. Ils veulent du bon sens, du limpide. Ils veulent qu’on appelle un chat un chat, il leur faut des schémas simples : les gentils / les méchants, les victimes / les coupables, les bons / les mauvais. Ils veulent comprendre et voir des solutions, tout de suite. Ils veulent du jugement, pas de l’analyse. Du concret, pas de l’abstrait. De la langue de fiel, pas de la langue de bois..
    Ils veulent être rassurés, même si c’est à court terme. Ils sont dans l’émotion, pas dans la raison.

    Voilà qui est confirmé par la suite de l’analyse... Hollande trop « élitiste », trop déformé par l’ENA...
    On pense forcément à Nicolas Sarkozy, qui comme Berlusconi, est un virtuose du poujadisme cathodique moderne...

    "Il y avait un décalage entre le discours de François Hollande et les reportages, mais « Capital », c’est une émission économique, et le président ne s’adressait peut-être pas à tous les Français, mais au public de l’émission, CSP+, jeunes, décideurs...", estime Christian Delporte, historien et spécialiste de la communication politique, selon lequel les chiffres d’audience, « très moyens », montrent que « Capital » a réuni dimanche son « public habituel ».

    « Nicolas Sarkozy aurait sans doute mieux rebondi que François Hollande sur l’ordinaire des reportages, pense M. Delporte. Il avait toujours une anecdote – ’Quelqu’un m’a dit que...’ –, il jouait sur les sentiments. François Hollande n’est pas dans ce registre, il est dans le raisonnement, et c’est vrai que ça marche souvent un peu moins bien à la télévision. »

    Enfin pour conclure, une vraie belle illustration de l’analyse de Christian Salmon, « La puissance de la communication est l’envers de l’impuissance politique » (relayée ici http://seenthis.net/messages/146287)

    Pour Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l’Ifop, le format de « Capital » convenait toutefois bien sur le principe à François Hollande, qui pendant la présidentielle apparaissait plus « en proximité » avec les électeurs que Nicolas Sarkozy : « Aujourd’hui, malgré sa forte impopularité, le président a gardé une image personnelle relativement bonne : sympathique, intègre et proche des gens. » Sa cote d’image personnelle serait de dix points supérieure aux baromètres sur son action politique, qui ne recueillent qu’un tiers d’opinions positives, note le politologue.

    "Mais le danger de ce type de formats, de réaction à du testimonial, c’est pour le responsable politique de donner un sentiment d’impuissance, selon M. Dabi. « Et c’est le principal grief fait à la classe politique : plutôt que le ’tous pourris’, nous sentons dans les études d’opinion le ’tous impuissants’. »

    Il semble effectivement que l’opinion veuille un communiquant puissant qui fasse illusion, à défaut d’un politicien puissant.
    Bien qu’à priori plus intègre que Sarkozy, Hollande semble tout autant décrié, voire détesté.
    Effectivement, c’est comme si le « tous impuissants » était tout aussi grave, si ce n’est plus, que le « tous pourris ».
    Pour une bonne partie de la droite, virile et phallocrate, pour ne pas dire misogyne et homophobe, celle qui préfère Sarko ou Copé à Fillon, il semble en effet que la corruption soit moins grave que l’impuissance de façade...

    http://www.lesinrocks.com/2013/04/28/actualite/christian-salmon-lhomme-politique-est-peut-etre-en-train-de-disparaitre-

    • Bien qu’à priori plus intègre que Sarkozy, Hollande semble tout autant décrié, voire détesté.

      L’intégrité, c’est ce qui mesure la capacité à tenir ses promesses ou au contraire à ne surtout pas les tenir ?

      Parler d’intégrité pour ces gens me semble totalement inepte. Un peu comme de disserter sur l’intégrité de Barroso, Obama ou de Ashton.

    • Matrix est une métaphore à travailler totalement. Ces gens ne sont que les représentants clonés à l’infini d’un même système. Et disserter sur leurs éventuels mérites est totalement infécond. C’est désespérant, d’une certaine façon, mais à mon avis, en définitive, impérativement nécessaire. C’est la seule façon de commencer à comprendre pourquoi, par exemple, les élections de juin 2012 en Grèce n’ont rien donné. Cf. le dernier post du Yéti sur son blog.

    • Et disserter sur leurs éventuels mérites est totalement infécond

      Je suis d’accord pour dire que parler des travers ou vertus individus est une façon bien pratique d’occulter les vices du système. Je suis le premier à dénoncer la personnification du pouvoir, cet acharnement à s’accrocher au monarchisme républicain de la Vème république cathodique, quand tout au contraire devrait nous pousser à assumer collectivement les responsabilités et donc l’autorité...
      C’est toute la stratégie des dominants que de faire croire que le système est parfait, et que tout ce qui va mal est dû à l’existence de brebis galeuses à neutraliser. Souviens-toi de la crise de 2008 expliquée par Sarkozy : il suffisait de nettoyer le système bancaire au karscher pour virer les escrocs et zou, ça repart... Donc oui on est d’accord, je n’attends rien des individus.

      Mon propos ne consistait pas ici à dire qu’Hollande était mieux ou moins bien que Sarkozy, je m’en fous réellement de ces deux là (enfin, pas tout à fait, ils me filent des boutons) non, c’était de réfléchir à ce qui faisait que « l’opinion » (de droite) semblait préférer l’agitation stérile et roublarde du lièvre Sarkozy, au train train débonnaire et propret de la tortue Hollande (qui par ailleurs a fait plus de réformes de « droite » en un an et demi que Sarkozy en 5 ans). Cela illustrait la thèse de Salmon, à savoir que moins les politiques ont de pouvoir politique, plus ils doivent le remplacer par un pseudo pouvoir médiatique...

      (sinon je ne suis pas d’accord pour dire que Hollande n’a pas tenu ses promesses de campagne... Comme il l’avait laissé entendre pendant la campagne, il n’est pas vraiment de gauche, donc il a appliqué le programme du PS à sa sauce, c’est en dire en le vidant de sa substance, ce qui, vu sa consistance initiale, fut très vite réalisé..)

  • Le symptôme de la mise sous tutelle des Etats par le pouvoir financier : les élus, anciens intermittents du pouvoir, nouveaux intermittents du spectacle.
    Disparition du représentant « politique » pour peu qu’il en ait beaucoup existé, remplacé par le dirigeant, c’est à dire une sorte de pdg, de « manager » du peuple, chargée de faire appliquer une politique non plus décidée par le peuple, mais par les créanciers « actionnaires » financiers de l’Etat..

    http://www.lesinrocks.com/2013/04/28/actualite/christian-salmon-lhomme-politique-est-peut-etre-en-train-de-disparaitre-

    Plus l’Etat est “insouverain”, plus les communicants prennent de l’importance et cannibalisent le politique. Dans son livre sur les sociétés sans Etat, Pierre Clastres définissait le rôle du chef comme une autorité sans pouvoir, une parole sans pouvoir de commandement. Il le définissait comme un mannequin du pouvoir. L’Etat ayant perdu beaucoup de ses prérogatives, le chef d’Etat est de plus en plus un homme qui parle, raconte des histoires. Ses missions régaliennes ? Rassurer, redonner confiance, conjurer la spirale de l’incrédulité. Avant, un ministre était entouré de conseillers techniques ; aujourd’hui, il vit et travaille surtout avec son chargé de communication ; plus de 50 % de son temps est consacré à occuper une place dans les médias. Une logique de “réapparition” spectrale, de persistance et de survie médiatique. La puissance de la communication est l’envers de l’impuissance politique.

  • Christian Salmon : « L’homme politique est peut-être en train de disparaître »
    http://www.lesinrocks.com/2013/04/28/actualite/christian-salmon-lhomme-politique-est-peut-etre-en-train-de-disparaitre-

    Plus l’Etat est “insouverain”, plus les communicants prennent de l’importance et cannibalisent le politique. Dans son livre sur les sociétés sans Etat, Pierre Clastres définissait le rôle du chef comme une autorité sans pouvoir, une parole sans pouvoir de commandement. Il le définissait comme un mannequin du pouvoir. L’Etat ayant perdu beaucoup de ses prérogatives, le chef d’Etat est de plus en plus un homme qui parle, raconte des histoires. Ses missions régaliennes ? Rassurer, redonner confiance, (...)

    • Euh son évocation de Clastres est un peu pourrie là, vu que ce dernier montrait justement qu’il pouvait y avoir une autorité symbolique mais sans qu’elle soit liée à un vrai pouvoir coercitif, et que finalement c’était pas si mal foutu. Là on a l’impression qu’il dit ça comme si Clastres disait que c’était mal car il en parle dans un passage où lui dit que c’est pas bien.

    • Mmmmh, je sais pas, je comprends peut-être de traviole mais :
      – son discours un peu tout du long est une critique de communicants ;
      – il commence le passage en disant "Plus l’Etat est “insouverain”, plus les communicants prennent de l’importance et cannibalisent le politique." sous entendu donc que pour lui ce n’est pas bien ;
      – juste après il cite Clastres qui a analysé les sociétés sans État, où le chef avait seulement un pouvoir symbolique, dans la parole, mais non coercitif (or je le rappelle, Clastres pensait que ces sociétés faisait volontairement ça pour ne pas avoir d’État, et que c’était plutôt "bien")
      – sa citation vient comme un appui à sa critique des communicants et de l’État qui n’aurait plus de pouvoir, alors que Clastres a un propos à priori inverse

      C’est comme ça que j’avais compris ce passage, pour l’instant. :)

  • Petite auto-promo, en echo à nos commentaires sur l’article des inrock http://www.lesinrocks.com/2013/04/10/actualite/des-destins-tres-francais-11383786 :

    http://labyrinthes.wordpress.com/2013/04/19/egalite-des-chances-et-meritocratie-justifier-les-inegalites- >>

    " Le régime nouveau sera une #hiérarchie sociale. Il ne reposera plus sur l’idée fausse de l’égalité naturelle des hommes, mais sur l’idée nécessaire de l’égalité des « chances » données à tous les Français de prouver leur aptitude à « servir ».

    Seuls le travail et le talent deviendront le fondement de la hiérarchie française. Aucun préjugé défavorable n’atteindra un Français du fait de ses origines sociales à la seule condition qu’il s’intègre dans la France nouvelle et qu’il lui apporte un concours sans réserve. On ne peut faire disparaître la #lutte_des_classes, fatale à la nation, qu’en faisant disparaître les causes qui ont formé ces classes, qui les ont dressées les unes contre les autres. "

    Nombres d’apologues de l’idéal républicain de l’#égalité_des_chances ignorent sûrement que la quasi-unanimité de leur position s’étend jusqu’à trouver chez Pétain un allié. Il se trouve pourtant dans cette façon de présenter la chose le parfum d’une vérité démaquillée, l’éloquence d’une franchise assumée, et par conséquent les éléments à même de rendre compte de l’efficace sociale que vise la hiérarchisation au mérite : asservir, et faire disparaître la lutte des classes.

    La #méritocratie est la forme devenue consensuelle d’un #darwinisme_social qui ne dit pas son nom, pire, qui ose se dissimuler sous le champ lexical de l’#égalité

    .

    Réinventer le #travail, viser sa transformation en activité individuellement, psychologiquement et humainement enrichissante d’une part, et en activité socialement utile d’autre part, implique donc une transmutation des valeurs qui s’y associent. Le diptyque concurrence et hiérarchisation doit laisser place à celui de la coopération et de l’égalité, non plus des chances, mais du pouvoir économique, dans l’ensemble de ses ramifications. Parmi celles-ci, se trouve le niveau de revenu

  • Activités de l’extrême droite
    On s’attend à de multiples alliances UMP-FN aux municipales de 2014. Mais le coup d’envoi vient de la gauche, à Noyon dans l’Oise, Claude Sadin, élu Conseiller Municipal via la liste communiste en 2008 se rapproche dès aujourd’hui de l’extreme droite en vue d’« une liste de large rassemblement »
    http://www.courrier-picard.fr/region/noyon-60-mariage-politique-et-atypique-ia201b0n45167

    Néonationalisme historique
    Lorànt Deutsch, Stéphane Bern, Patrick Buisson… la vision réac’ de l’histoire à la télé
    http://www.lesinrocks.com/2013/04/12/medias/historiens-de-garde-perpetuent-vision-reactionnaire-notre-histoire-11382

  • Les Inrocks - « Les inégalités n’ont pas disparu, elles ont juste été repoussées plus loin dans le cursus scolaire. »
    http://www.lesinrocks.com/2013/04/10/actualite/des-destins-tres-francais-11383786

    La France reste donc une société de classes ?

    La période des Trente Glorieuses a fait croire à certains que les classes sociales étaient mortes, enterrées par le développement des classes moyennes. Or, depuis une quinzaine d’années, les inégalités augmentent à nouveau, en termes de revenus ou de patrimoine. Ce que montre également la persistance d’une si forte reproduction sociale, c’est que l’émergence d’une vaste société “moyenne” relève du mirage. Les destins à ce point contrastés des enfants des classes populaires et des enfants mieux nés soulignent à quel point il subsiste des univers de vie différents dans la société française.

    #Camille_Peugny #sociologie #mobilité_sociale

    • En vrai, le titre est trompeur les inégalités n’ont pas « été repoussées plus loin dans le cursus scolaire », leurs effets visibles peut-être, et encore…
      (Ne serait-ce que du point de vue institutionnel-financier, pour ne pas parler du reste, les budgets des écoles, qui dépendent des mairies, varient de plus de 1 à 10.)

      L’élitisme de l’école n’est-il pas son principal vice ?

      Bin oui, on en revient toujours là.

      Pour cela, il n’y a pas de miracle : il faut plus de moyens – la France dépense 20 % de moins pour l’enseignement primaire que la moyenne des pays de l’OCDE -, des classes moins chargées, des changements dans les pratiques éducatives.

      Le vrai miracle serait une vraie volonté politique pour coordonner augmentation des moyens ET un changement des pratiques éducatives. Le trou noir de la réflexion éducative de la gauche de gauche est que le second n’est absolument pas une conséquence de la première.

    • Enfin, moins visible pour les classes moyennes, qui sont effectivement discriminées plus tard dans le cursus scolaire. Par contre, pour les classes populaires, je peux te dire que le couperet tombe de plus en plus tôt. Dès la maternelle, tu vois déjà comment les petits _cassos" comme on les appelle délicieusement sont traités différemment des autres et combien cette mise à l’écart va s’intensifier tranquillement pendant le primaire pour un direct to CLIS ou Segpa à l’arrivée au collège. Les classes moyennes à fort capital culturel et faible capital financier verront le couperet lors de l’accès aux études supérieures où l’argent fait immanquablement la différence plus que la connaissance des cursus ou les aptitudes des étudiants.

    • La question de la maîtrise de la langue orale est discriminante dès la maternelle. Les écarts (et donc les inégalités) entre les classes de GS de la ville haute et du quartier populaire du #bled-en-chef sont vraiment criantes.
      Pour les classes populaires, il y a à la fois les inégalités de départ (sociales, culturelles) et pour ceux qui s’en sortent malgré tout un effondrement plus tard (au collège) faute d’étayage et aussi de possibilité de se projeter dans l’idée d’un cursus long. L’an dernier, nous avons organisé des séances communes entre un groupe de lycéens et nos CP. J’ai été frappé par le fait de devoir expliquer ce qu’était un lycéen, de fait mes élèves n’en ont pas autour d’eux. Ils connaissent le collège que les grands frères et sœurs fréquentent, mais pas le lycée car les orientations se font avant. Massivement. On retrouve là le tandem élitisme/reproduction sociale.
      Pour les cassos, tu as encore raison. Avant de rejoindre le quartier populaire du #bled-en-chef, j’étais en école rurale et le regard porté par les adultes, et parfois les prises de paroles que ces adultes s’autorisent avec les familles et les gamins, sont tout simplement effrayants. Je ne prétends pas être un bon instit et la question des bonnes pratiques pédagogiques est complexe et je fais mon chemin avec modestie mais il y a un truc dont je suis persuadé c’est que la #bienveillance est une clef pédagogique fondamentale. Une attitude bienveillante de la part des enseignants est une réforme applicable tout de suite, qui ne demande aucun moyen supplémentaire et qui pourrait modifier en profondeur notre système éducatif. L’#effet_Pygmalion est un levier incroyable, j’en ai tous les ans la preuve…

    • Les cassos sont les nouveaux bougnoules de la République. Je suis frappée par l’unanimité du rejet dont il font l’objet et par les attitudes et discours que les gens se croient permis à leur encontre. C’est d’une violence qui m’est assez intolérable et je suis dans cette configuration incroyablement minoritaire. La figure du cassos permet, semble-t-il, de cristalliser tout le besoin de haine et de distinction de l’ensemble du corps social. C’est un racisme anti-pauvres très violent et content de ne pas dire son nom.
      En gros, ils sont un défouloir collectif aux frustrations accumulées ces derniers années, les parfaits boucs émissaires d’un corps social qui se délite totalement.
      Je veux écrire là-dessus, mais quelque part, je n’y arrive pas... même pour moi, c’est trop gros.

    • J’avais mis ça de coté il y a quelque temps sur Diigo :
      http://www.lautrecampagne.org/article.php?id=52

      On peut dire, pour résumer, que l’École française, bien loin d’être une institution « technique » (dont la théorie serait la « pédagogie ») destinée à mettre les générations montantes en possession de connaissances ou de compétences (on ne peut s’étendre ici sur cette distinction pourtant capitale), est au contraire une institution idéologico-politique de formation d’identités hiérarchisées en classes qui utilise la transmission, l’enseignement comme alibi ou masque de cette opération de reproduction, mais qui, en même temps, ne pouvant se passer de ce masque, effectue réellement, pour une part, cette transmission.

      Et, toujours de ce #Bertrand_Oglivie : http://www.revuedeslivres.fr/a-quoi-sert-lechec-scolaire-par-bertrand-ogilvie

      Or il est évident, contrairement à cette représentation de l’échec comme un « ratage », que cette institution a été conçue dès le départ pour qu’un tel ratage statistique important ait lieu, accompagné bien sûr d’un volant étroit de réussite, qui aboutit à ce résultat que l’école reproduit non pas simplement la société telle qu’elle est, mais le fait que les individus qui y vivent considèrent comme naturelles les normes et les hiérarchies dans lesquelles ils viennent se ranger quand ils entrent sur le marché du travail.

      [...1789] il fallait leur donner les moyens, dans tous les domaines possibles, d’être au niveau de ceux qui pensent, qui formulent conceptuellement les problèmes, et non de ceux qui les subissent. Il s’agissait de leur permettre de participer au débat public de plein pied dans le champ de réflexion et d’action de ce grand moment révolutionnaire de 1789. Il fallait donc inventer une institution spéciale dans laquelle on donnerait à toute la population française (avec évidemment, comme toujours, la question de ce qu’on entend par « tous ») la possibilité d’entrer dans la pensée du politique. Ce projet est politique depuis le départ, et l’est resté jusqu’au bout. Aujourd’hui, dans l’esprit des gens qui font fonctionner cette école, ce lieu reste associé – sur un mode assez lâche, qui est plutôt celui de l’association d’idées – à l’idée d’émancipation politique. [...]
      cette école politique ne pouvait pas non plus ne pas affronter la question de savoir ce qu’on fait d’une masse de scolarisés qui, éduqués à égalité, débarquent dans une société profondément inégalitaire, dans laquelle la question de la propriété a été tranchée dans le sens de la protection de l’inégalité, et doivent donc, d’une manière ou d’une autre, articuler, accepter cette injustice d’une formation égalitaire qui ne contrebalance pas la vie inégalitaire qu’ils vont inévitablement mener – la Révolution française n’ayant pas été une révolution communiste, comme on le sait.

      Sans vouloir lancer un #débat_interminable (quoique...), je suis depuis longtemps assez sidéré par la naiveté de l’exigence d’’#égalité_des_chances, et qui est assez marquée dans cet entretient des inrock : d’abord, la #mobilité_sociale ascendante suppose soit la disparition du travail non-qualifié, soit sa délocalisation, soit le recours à l’immigration, soit, enfin, une mobilité sociale descendante des enfants des classes bourgeoises et moyennes... Ensuite, pour poursuivre l’idée d’Oglivie, dans une société inégalitaire, l’idée d’égalité des chances semble revendiquer que les enfants de pauvres et les enfants de riches doivent avoir les mêmes chances de devenir... pauvres ou riches. Si l’on veut l’égalité des chances, comment ne pas vouloir l’égalité tout court ? : [ http://www.barbery.net/philo/chouette/salaire.htm ]

      il n’est pas vrai que des familles à revenus différents peuvent offrir les mêmes chances de développement à leurs enfants.
      Ce pourquoi, alors qu’il n’y a pas plus de justification rationnelle en faveur de l’égalité que de la hiérarchie des salaires, il faut à mon avis défendre l’égalité des revenus, c’est pour rendre effective et réelle l’égalité des chances des êtres humains.

  • Ignoré du gouvernement français, Nabil Hadjarab se meurt à Guantanamo
    http://www.lesinrocks.com/2013/04/11/actualite/ignore-du-gouvernement-francais-nabil-hadjarab-se-meurt-a-guantanamo-113

    Détenu depuis onze ans à Guantanamo et déclaré « libérable » par les administrations Bush et Obama, Nabil Hadjarab mène une grève de la faim qui inquiète ses défenseurs. Ce citoyen algérien, dont les proches possèdent la nationalité française, implore la France de le rapatrier. Le Quai d’Orsay et le ministère de l’Intérieur préfèrent se murer dans le silence. Source : Les Inrocks

  • Sur Instagram, des ados organisent des concours de beauté - Les Inrocks
    http://www.lesinrocks.com/2013/04/buzzodrome/sur-instagram-les-ados-organisent-des-concours-de-beaute

    via @jeanlucr sur Twitter

    Les concours de beauté se déroulent maintenant aussi sur les réseaux sociaux et notamment sur Instagram. Aux États-Unis, de plus en plus d’adolescentes postent des photos d’elles sur Instagram et, en les accompagnant de certains hashtags comme #beautycontest ou #beautypageant, invitent les utilisateurs du réseau social à les commenter. Ainsi, quand on tape #beautycontest dans la barre de recherche d’Instagram, on tombe sur pas moins de 8 992 photos, toutes ou presque de jeunes filles posant face caméra.

    Un compte intitulé “girl_of_the_day_” organise même un concours de beauté quotidien. Mode d’emploi : poster une photo de soi en taggant le compte. Celle qui aura reçu le plus de likes remportera le concours. 1148 photos y ont déjà été postées.

    #femmes #beauté #Internet

  • Une petite synthèse s’imposait... Femen partout, féminisme nulle part (Le Monde diplomatique)
    http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2013-03-12-Femen

    « Les musulmans semblent éprouver un sentiment de puissance virile à voiler leurs femmes, et les Occidentaux à les dévoiler », écrivait l’essayiste marocaine Fatema Mernissi dans Le Harem et l’Occident (Albin Michel, 2001). L’engouement des médias français pour des figures comme les Femen ou Aliaa El-Mahdy, l’étudiante égyptienne qui, en 2011, avait posé nue sur son blog (1), offre une nouvelle confirmation de la justesse de cette observation. On a pu voir sur France 2, le 5 mars, un documentaire consacré au collectif d’origine ukrainienne implanté en France depuis un peu plus d’un an (2), et un autre intitulé Aliaa, la révolutionnaire nue sur Public Sénat pour le 8 mars, Journée internationale des femmes.

    Tant pis pour les milliers de femmes qui ont le mauvais goût de lutter pour leurs droits tout habillées, et d’offrir un spectacle moins conforme aux critères dominants de jeunesse, de minceur, de beauté et de fermeté. « Le féminisme, c’est ces femmes qui ont défilé dans les rues du Caire, pas les Femen ! Et sur ces femmes-là, je vois peu de documentaires TV », s’insurgeait sur Twitter, le 6 février dernier, la correspondante de France Inter en Egypte, Vanessa Descouraux. En France, les organisations féministes « se voient désormais plus souvent interpellées sur ce qu’elles pensent du mouvement d’origine ukrainienne que sur leurs propres actions » (3).

    #Femen #féminisme